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Commentaire de la décision 2023-1037 QPC

31/05/2023

Conformité

 

Le Conseil constitutionnel a été saisi le 13 janvier 2023 par la Cour de cassation (chambre criminelle, arrêt n° 154 du 11 janvier 2023) d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) posée par M. Sylvain K. relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du sixième alinéa de l’article 114 du code de procédure pénale (CPP).

 

Dans sa décision n° 2023-1037 QPC du 17 mars 2023, le Conseil constitutionnel a déclaré conforme à la Constitution le sixième alinéa de l’article 114 du CPP, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2015-993 du 17 août 2015 portant adaptation de la procédure pénale au droit de l’Union européenne.

 

I. – Les dispositions contestées

 

A. – Objet des dispositions contestées

 

1. – Le secret de l’instruction

 

a. –  Fondement et portée du secret de l’instruction

 

* Le secret de l’instruction est prévu à l’article 11 du CPP depuis l’entrée en vigueur de ce code en 1958. Le premier alinéa de cet article dispose, en des termes inchangés depuis lors, que : « Sauf dans le cas où la loi en dispose autrement et sans préjudice des droits de la défense, la procédure au cours de l’enquête et de l’instruction est secrète ».

 

Caractéristique de la nature inquisitoire de la procédure d’instruction1, le secret de l’instruction vise à garantir l’efficacité et la sérénité des investigations. Il s’agit notamment d’éviter la destruction ou la dissimulation d’éléments de preuve, d’empêcher d’éventuelles pressions sur les témoins ou la victime et de préserver l’institution judiciaire des influences extérieures. Le secret de l’instruction permet également de protéger la réputation des personnes concernées par l’information judiciaire en évitant qu’il soit porté atteinte au respect de leur vie privée et à la présomption d’innocence.

 

* Conformément au deuxième alinéa de l’article 11 du CPP, toute personne qui concourt à la procédure d’instruction est tenue au secret professionnel.

 

Selon la jurisprudence de la Cour de cassation, les personnes qui concourent à la procédure sont les magistrats2, les greffiers, les huissiers, les officiers et agents de police judiciaire, les enquêteurs de personnalité et, plus largement, toutes les personnes requises par l’autorité judiciaire, telles que les experts ou les interprètes. Il s’agit ainsi de l’ensemble des personnes qui participent à l’élaboration des pièces écrites du dossier d’instruction3.

 

En revanche, la personne mise en cause ou en examen, la victime, les parties civiles et les témoins ne sont pas considérés comme concourant à la procédure. Il en va de même des tiers et, notamment, parmi eux, des journalistes. Ces personnes peuvent donc porter à la connaissance du public des informations liées à la procédure sans être poursuivies pour violation du secret de l’instruction.

 

Le cas des avocats est particulier. Ils ne sont pas considérés comme concourant à la procédure et ne sont donc pas soumis au secret sur le fondement de l’article 11 du CPP. Mais ils sont tenus au secret professionnel et l’article 5 du décret n° 2005-790 du 12 juillet 2005 relatif aux règles de déontologie de la profession d’avocat dispose que : « L’avocat respecte le secret de l’enquête et de l’instruction en matière pénale, en s’abstenant de communiquer, sauf pour l’exercice des droits de la défense, des renseignements extraits du dossier, ou de publier des documents, pièces ou lettres intéressant une enquête ou une information en cours. / Il ne peut transmettre de copies de pièces ou actes du dossier de la procédure à son client ou à des tiers que dans les conditions prévues à l’article 114 du code de procédure pénale ». L’avocat qui révèle à un tiers le contenu d’un acte couvert par le secret de l’instruction contrevient dès lors au secret professionnel4.

 

* Depuis la loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire, la violation du secret de l’instruction est réprimée par un texte unique, quelles que soient les fonctions de son auteur5.

 

Le premier alinéa de l’article 434-7-2 du code pénal, dans sa rédaction résultant de cette loi, dispose ainsi que : « Sans préjudice des droits de la défense reconnus à la personne suspectée ou poursuivie ou des droits des victimes, le fait pour toute personne qui, en raison de ses fonctions, a connaissance, en application du code de procédure pénale, d’informations issues d’une enquête ou d’une instruction en cours concernant un crime ou un délit de révéler sciemment ces informations à des tiers est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende ». Il s’ensuit que la divulgation de telles informations est sanctionnée quel qu’en soit le destinataire et quel qu’en soit l’objectif.

 

Les deuxième et troisième alinéas de ce même article prévoient que les peines sont aggravées lorsque la révélation est faite à des personnes susceptibles d’être impliquées comme auteurs, coauteurs, complices ou receleurs dans la commission des infractions et dans le but d’entraver le déroulement des investigations ou la manifestation de la vérité6.

 

b. – Les dérogations au secret de l’instruction

 

Le secret de l’instruction n’est pas un secret absolu. Le premier alinéa de l’article 11 du CPP prévoit en effet expressément que la procédure d’instruction est secrète « Sauf dans les cas où la loi en dispose autrement et sans préjudice des droits de la défense ».

 

* Des dispositions législatives peuvent ainsi y déroger et permettre la communication d’informations, voire de pièces couvertes par ce secret.

 

Par exemple, le secret de l’instruction n’est pas opposable à certaines juridictions ou administrations. Ainsi, l’article L. 101 du livre des procédures fiscales prévoit que l’autorité judiciaire doit communiquer à l’administration des finances toute indication de nature à faire présumer une fraude fiscale. De la même manière, l’article L. 621-10 du code de la consommation autorise le ministère public à produire, devant la juridiction saisie d’une action exercée par une association dans l’intérêt collectif des consommateurs, les procès-verbaux ou rapports d’enquête qu’il détient et dont la production est utile à la solution du litige.

 

Une autre exception a été introduite, à l’article 11 du CPP lui-même, par la loi n° 2000-516 du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d’innocence, puis étendue par la loi du 22 décembre 2021 précitée. Consacrant la pratique des « fenêtres de publicité », le troisième alinéa de cet article permet désormais au procureur de la République, d’office ou à la demande de la juridiction d’instruction ou des parties, de rendre publics des éléments tirés de la procédure « afin d’éviter la propagation d’informations parcellaires ou inexactes ou pour mettre fin à un trouble à l’ordre public, ou lorsque tout autre impératif d’intérêt public le justifie ». Ces éléments doivent toutefois être objectifs et ne comporter aucune appréciation sur le bien-fondé des charges retenues contre les personnes mises en cause.

 

* L’autre dérogation au secret de l’instruction prévue depuis l’adoption du code de procédure pénale par le premier alinéa de l’article 11 est tirée du respect des droits de la défense.

 

Adoptée en réaction à des critiques émises lors des débats parlementaires sur la rédaction initiale de cet article, qui ne prévoyait aucune réserve tenant compte des besoins de la défense7, cette exception, dont la formulation a été « volontairement prudente »8, vise à ne pas compromettre l’exercice des droits de la défense au cours de l’instruction9, mais également dans le cadre d’une autre procédure, y compris civile ou commerciale.

 

Les dispositions de l’article 5 du décret du 12 juillet 2005 relatif aux règles de déontologie de la profession d’avocat, précitées, en sont une illustration, en tant qu’elles permettent à l’avocat, pourtant soumis au secret, de communiquer des éléments d’information tirés de la procédure d’instruction « pour l’exercice des droits de la défense ».

 

La jurisprudence judiciaire s’assure cependant que les informations divulguées en dépit du secret sont « réduites au strict nécessaire » exigé par l’objectif de respect des droits de la défense10.

 

2. – Les règles relatives à la communication des pièces du dossier de la procédure

 

a. – La communication des pièces du dossier aux parties et à leurs conseils

 

Si le secret de l’instruction a longtemps été regardé comme faisant obstacle à la communication et même à la simple consultation des pièces du dossier par les parties et leurs conseils11, le renforcement des droits des parties au cours de la procédure d’instruction a conduit le législateur à leur ouvrir progressivement la possibilité d’obtenir des copies des pièces du dossier.

 

* Dans un premier temps, seul l’avocat pouvait avoir accès au dossier de l’instruction. L’article 114 du CPP, dans sa rédaction résultant de la loi n° 93-2 du 4 janvier 1993 portant réforme de la procédure pénale, prévoyait ainsi que la procédure était mise à disposition des avocats de la personne mise en examen et de la partie civile et que, après la première comparution ou la première audition, ces derniers pouvaient se faire délivrer copie de tout ou partie des pièces et actes du dossier « pour leur usage exclusif et sans pouvoir en établir de reproduction »12.

 

La Cour de cassation avait jugé sur ce fondement que, si l’avocat pouvait procéder avec son client, pour les besoins de sa défense, à l’examen des copies du dossier qui lui avaient ainsi été délivrées, il lui était en revanche interdit de remettre ces copies, destinées à son « usage exclusif », à son client13.

 

* La loi n° 96-1235 du 30 décembre 1996 relative à la détention provisoire a modifié l’article 114 du CPP afin d’autoriser les avocats à transmettre à leurs clients une reproduction des copies de pièces qui leur ont été délivrées.

 

Cette faculté de transmission aux parties elles-mêmes a cependant été accompagnée d’un certain nombre de garanties, destinées à assurer le respect du secret de l’instruction14.

 

Tout d’abord, l’avocat doit donner connaissance au juge d’instruction de la liste des pièces ou actes dont il souhaite remettre une reproduction à son client.

 

Ensuite, le juge d’instruction dispose d’un délai de cinq jours à compter de la réception de la demande pour s’opposer à cette remise, par une ordonnance spécialement motivée au regard des risques de pression sur les victimes, les personnes mises en examen, leurs avocats, les témoins, les enquêteurs, les experts ou toute autre personne concourant à la procédure15.

 

Enfin, la loi du 30 décembre 1996 a créé un nouvel article 114-1 du CPP réprimant, « Sous réserve des dispositions du sixième alinéa de l’article 114, le fait, pour une partie à qui une reproduction des pièces ou actes d’une procédure d’instruction a été remise en application de cet article, de la diffuser auprès d’un tiers »16. Lorsque l’avocat remet de telles pièces à son client, celui-ci doit au préalable attester avoir pris connaissance de ces dispositions.

 

* La loi n° 2014-535 du 27 mai 2014 portant transposition de la directive 2012/13/UE du Parlement européen et du Conseil, du 22 mai 2012, relative au droit à l’information dans le cadre des procédures pénales a parachevé cette évolution.

 

Elle a en effet modifié l’article 114 du CPP afin de prévoir la possibilité pour les parties elles-mêmes, lorsqu’elles n’ont pas d’avocat, de se faire délivrer copie de tout ou partie des pièces et actes du dossier.

 

Conformément au cinquième alinéa de l’article 114 du CPP, « Lorsque la copie a été directement demandée par la partie, celle-ci doit attester par écrit avoir pris connaissance des dispositions du sixième alinéa du présent article et de l’article 114-1 ».

 

Comme l’a souligné la rapporteure de ce texte devant la commission des lois de l’Assemblée nationale, « Au stade de l’instruction, ce nouveau droit constitue une "petite révolution". Justifiée par le principe selon lequel les parties doivent pouvoir se défendre avec les mêmes armes, qu’elles soient assistées ou non d’un avocat, cette réforme conduit à remettre en cause en pratique le secret de l’instruction inscrit à l’article 11 du code de procédure pénale. En effet, les parties, au même titre que l’avocat, pourront demander une copie de tout ou partie des pièces et actes du dossier après leur première comparution ou leur première audition par le juge d’instruction. […] Or, les parties – mises en cause et victimes – ne concourent pas à la procédure au sens de l’article 11 du code de procédure pénale et ne sont pas tenues par un quelconque devoir de respect du secret professionnel »17.

 

b. – La communication des pièces du dossier à des tiers

 

* Si les parties et leurs avocats peuvent obtenir des copies des pièces du dossier de la procédure, le secret de l’instruction leur interdit de communiquer ces copies à des tiers. Une telle divulgation tombe sous le coup de l’incrimination prévue à l’article 434-7-2 du code pénal, lorsqu’elle est le fait de l’avocat, ou à l’article 114-1 du CPP, lorsque la partie en est à l’origine.

 

La loi du 30 décembre 1996 précitée a cependant introduit une exception au secret de l’instruction. Le sixième alinéa de l’article 114 du CPP, dont la rédaction n’a pas été modifiée depuis, prévoit en effet que : « Seules les copies des rapports d’expertise peuvent être communiquées par les parties ou leurs avocats à des tiers pour les besoins de la défense ».

 

Cette disposition a notamment pour but de permettre aux parties et à leurs conseils de critiquer les travaux et conclusions de l’expert désigné par le juge d’instruction18. En effet, comme le relève Me François Saint-Pierre, « Dans bien des affaires, les rapports d’expertise sont d’une telle technicité que l’avocat ne peut les analyser ni les discuter sans le secours d’un professionnel de la matière – la toxicologie, la chimie, par exemple. Il lui faut donc solliciter le concours d’un expert qu’il associera à la défense »19.

 

Une partie ou son conseil peut ainsi communiquer à un sachant, intervenant à titre privé20, la copie d’un rapport d’expertise pour obtenir un avis susceptible de lui être utile afin de contester les conclusions de ce rapport, soumis à la discussion contradictoire des parties, et, éventuellement, de solliciter un complément d’expertise ou une contre-expertise en application du quatrième alinéa de l’article 167 du CPP.

 

Lors de la discussion devant le Sénat sur la loi du 30 décembre 1996, M. Michel Dreyfus-Schmidt avait proposé, par voie d’amendement, d’aller plus loin en permettant la communication à « tout expert » de l’ensemble des copies des pièces du dossier de la procédure. Il faisait à cet égard valoir qu’« il n’y a pas que le rapport d’expertise qui doit pouvoir être communiqué. Imaginons une affaire un peu plus compliquée, portant par exemple sur un grave accident du travail qui s’est produit à l’occasion de l’utilisation d’une machine : il y a des constatations faites par la direction de la main-d’œuvre, des déclarations de personnes ayant travaillé sur cette machine, etc. Si l’on veut demander l’avis d’un homme de l’art, on ne peut pas se contenter de lui remettre la copie du rapport d’expertise ; il faut qu’il puisse prendre connaissance de l’ensemble du dossier. C’est pourquoi nous proposons, par cet amendement n° 8, que les parties ou leurs avocats puissent communiquer, pour les besoins de la défense, les copies des pièces mises à leur disposition à tout expert, qui est alors soumis aux textes régissant le secret professionnel et le secret de l’instruction »21.

 

Cette option n’a toutefois pas été retenue22 et la communication à des tiers des copies de pièces du dossier autres que le rapport d’expertise reste proscrite.

 

* L’application du sixième alinéa de l’article 114 du CPP, qui n’a pas suscité un contentieux abondant, pose principalement difficulté lorsque des copies de pièces de la procédure d’instruction sont communiquées dans le cadre d’une autre instance, pénale ou civile.

 

Ainsi, la chambre criminelle de la Cour de cassation a approuvé une décision d’une cour d’appel qui avait déclaré un avocat coupable de violation du secret professionnel pour avoir, dans une citation directe délivrée à la requête de son client, reproduit des extraits de pièces provenant de perquisitions ordonnées par un juge d’instruction dans le cadre d’une autre procédure dans laquelle ce même client était constitué partie civile23.

 

Dans une affaire relative à une plainte avec constitution de partie civile du chef de violation du secret de l’instruction à la suite de la production, dans le cadre d’une instance civile et avec l’autorisation du juge d’instruction, de la copie de pièces d’un dossier d’information en cours, le sommaire d’un arrêt  rappelle que, « Hormis les rapports d’expertise, la copie des pièces d’une procédure d’instruction en cours ne peut, selon les dispositions de l’article 114, alinéa 6, du code de procédure pénale, être communiquée, par les parties ou leurs avocats, à des tiers » 24. Dans le même sens, la chambre criminelle a approuvé la mise en examen, des chefs de violation du secret professionnel et du secret de l’instruction, d’un avocat qui avait produit dans une instance civile des pièces d’une procédure d’instruction en cours, sans y avoir été autorisé ni même avoir sollicité une telle autorisation25.

 

Les chambres civiles de la Cour de cassation ont elles aussi été amenées, à de rares occasions, à faire application des dispositions du sixième alinéa de l’article 114 du CPP.

 

La deuxième chambre civile a ainsi jugé que « la partie civile, qui n’est pas soumise au secret de l’instruction, tient de l’article 114, alinéa 6, du code de procédure pénale, la faculté de produire dans une instance civile, pour les besoins de sa défense, la copie d’un rapport d’expertise ordonnée par le juge d’instruction »26.

 

La chambre commerciale a quant à elle approuvé une cour d’appel d’avoir écarté des débats des pièces issues d’un dossier d’instruction, autres qu’un rapport d’expertise, produites dans le cadre d’une instance civile : « qu’après avoir énoncé qu’en vertu de l’article 114 du code de procédure pénale, la personne mise en examen qui a régulièrement bénéficié de la remise d’une copie des pièces de l’instruction préparatoire menée à son encontre ne peut les communiquer à des tiers pour les besoins de sa défense dans une autre instance, sauf s’il s’agit de copies de rapports d’expertise, l’arrêt constate que les sociétés Adéa et Adéa Project ne sont pas parties à l’instance pénale et que les pièces qu’entend produire M. X... sont des procès-verbaux d’interrogatoire et d’audition et non des rapports d’expertise ; que la cour d’appel en a exactement déduit qu’il y avait lieu d’écarter des débats ces pièces, ainsi que la partie de ses conclusions d’appel les analysant »27.

 

B. – Origine de la QPC et question posée

 

À l’issue de l’information judiciaire ouverte du chef de meurtre commis par concubin, M. Sylvain K. avait été mis en accusation et renvoyé devant une cour d’assises.

 

Il avait interjeté appel de cette décision et, se prévalant d’un « avis consultatif » établi par un médecin-légiste précédemment écarté des débats par les juges d’instruction saisis, avait sollicité la requalification des faits en violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner.

 

La chambre de l’instruction avait déclaré cet avis irrecevable, au motif que des procès-verbaux d’audition et d’interrogatoire avaient été communiqués à l’expert, et avait confirmé la mise en accusation de M. Sylvain K. pour meurtre commis par concubin.

 

Ce dernier s’était pourvu en cassation et, à cette occasion, avait soulevé une QPC portant sur le sixième alinéa de l’article 114 du CPP.

 

Dans son arrêt du 11 janvier 2023 précité, la chambre criminelle de la Cour de cassation avait jugé que la question présentait un caractère sérieux « dès lors qu’elle tend à faire apprécier l’équilibre à respecter entre, d’une part, les droits de la défense, principe protégé par l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, une partie pouvant vouloir solliciter un avis technique fondé, non seulement sur des rapports d’expertise, mais aussi sur d’autres éléments du dossier d’information, et, d’autre part, les objectifs de valeur constitutionnelle de protection de l’ordre public et de recherche des auteurs d’infractions, qui s’opposent à la circulation illimitée des pièces d’une procédure en cours ». Elle l’avait donc renvoyée au Conseil constitutionnel.

 

II. – L’examen de la constitutionnalité des dispositions contestées

 

* La Cour de cassation n’ayant pas précisé, dans son arrêt de renvoi, la version dans laquelle les dispositions du sixième alinéa de l’article 114 du CPP étaient renvoyées, il revenait au Conseil constitutionnel de la déterminer lui-même.

 

Conformément à sa jurisprudence constante, selon laquelle la QPC doit être considérée comme portant sur les dispositions applicables au litige à l’occasion duquel elle a été posée, le Conseil a jugé, en l’espèce, qu’il était saisi de ces dispositions dans leur rédaction résultant de la loi du 17 août 2015 précitée (paragr. 1).

 

Le requérant, rejoint par les parties intervenantes, reprochait à ces dispositions de ne permettre aux parties et à leurs avocats de communiquer à un tiers que les copies des rapports d’expertise. Or, selon lui, la communication d’autres pièces du dossier de la procédure d’instruction à un tiers, afin notamment de solliciter son avis technique, pouvait être nécessaire à l’exercice des droits de la défense. Il en résultait, selon lui, une méconnaissance des droits de la défense.

 

A. – La jurisprudence constitutionnelle relative aux droits de la défense

 

* Le principe des droits de la défense est rattaché, depuis la décision n° 2006-535 DC du 30 mars 2006, à l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, aux termes duquel : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution »28. Il a pour corollaire le principe du contradictoire ainsi que le droit à un recours juridictionnel effectif et le droit à un procès équitable.

 

Le respect des droits de la défense s’impose à toutes les étapes de la procédure pénale et, en particulier, lors de l’instruction préparatoire.

 

Il doit néanmoins être concilié avec d’autres exigences ou objectifs constitutionnels et, notamment, avec l’objectif de bonne administration de la justice29.

 

Ainsi, dans sa décision n° 93-326 DC du 11 août 1993, le Conseil constitutionnel était saisi des dispositions de l’article 114 du CPP, dans sa rédaction résultant de la loi du 4 janvier 1993 précitée, qui prévoyaient la mise à disposition des avocats du dossier de la procédure « sous réserve des exigences du bon fonctionnement du cabinet du juge d’instruction ».

 

Les sénateurs requérants soutenaient que ces dispositions, « en tant qu’elle[s] subordonne[nt] la mise de la procédure à la disposition des avocats à la réserve du bon fonctionnement du cabinet d’instruction », risquaient de limiter l’accès des avocats au dossier de la procédure, en méconnaissance des droits de la défense.

 

Le Conseil a écarté ce grief en jugeant que « les mentions relatives aux exigences du bon fonctionnement du cabinet d’instruction, dès lors qu’elles sont assorties de précisions suffisantes tenant à des délais ou des conditions objectives, ne sont pas de nature à entraver l’exercice des droits de la défense ; qu’ainsi, sous cette réserve d’interprétation, l’article 12-I [de la loi portant réforme du code de procédure pénale] n’est pas contraire à la Constitution »30.

 

* Si le Conseil constitutionnel n’a jamais conféré au secret de l’enquête et de l’instruction une valeur constitutionnelle, il juge que ce secret concourt à « la protection du respect de la vie privée, la sauvegarde de l’ordre public [et] l’objectif de recherche des auteurs d’infraction »31, c’est-à-dire à des droits ou objectifs de rang constitutionnel.

 

Dans sa décision n° 2017-693 QPC du 2 mars 2018, il a affirmé, dans le même sens, qu’« en instaurant le secret de l’enquête et de l’instruction, le législateur a entendu, d’une part, garantir le bon déroulement de l’enquête et de l’instruction, poursuivant ainsi les objectifs de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l’ordre public et de recherche des auteurs d’infractions, tous deux nécessaires à la sauvegarde de droits et de principes de valeur constitutionnelle. Il a entendu, d’autre part, protéger les personnes concernées par une enquête ou une instruction, afin de garantir le droit au respect de la vie privée et de la présomption d'innocence, qui résulte des articles 2 et 9 de la Déclaration de 1789 »32.

 

Le Conseil s’assure donc que les dispositions soumises à son contrôle opèrent une conciliation équilibrée entre ces exigences constitutionnelles et les droits de la défense.

 

Ainsi, dans sa décision n° 2011-191/194/195/196/197 QPC du 18 novembre 2011, le Conseil constitutionnel était saisi des dispositions de l’article 63-4-4 du CPP soumettant l’avocat au secret de l’enquête et lui interdisant de faire état auprès de quiconque, pendant la durée de la garde à vue, des entretiens avec la personne qu’il assiste et des informations qu’il a recueillies en consultant les procès-verbaux et en assistant aux auditions et aux confrontations. Le Conseil a jugé « qu’il ressort des termes mêmes de cet article que cette interdiction s’applique "sans préjudice de l’exercice des droits de la défense" ; qu’elle ne saurait, par suite, porter atteinte à ces droits »33.

 

Dans l’examen de cette conciliation, le Conseil est particulièrement attentif au respect du secret de l’instruction. Ainsi, dans la décision n° 2016-738 DC du 10 novembre 2016, il était saisi de dispositions qui, pour protéger le secret des sources des journalistes, instituaient au bénéfice de certaines personnes une immunité pénale en cas de détention de documents, images ou enregistrements provenant du délit de violation du secret de l’enquête et de l’instruction. Le Conseil a censuré ces dispositions au motif que le législateur n’avait pas opéré une conciliation équilibrée entre, d’une part, la liberté d’expression et de communication et, d’autre part, notamment le droit au respect de la vie privée, la présomption d’innocence et la recherche des auteurs d’infraction auxquels concourt le secret de l’enquête et de l’instruction en jugeant : « l’immunité […] bénéficie […] aux personnes qui, par leur fonction au sein de la rédaction dans une entreprise ou agence de presse ou dans une entreprise de communication au public en ligne ou audiovisuelle, sont amenées à prendre connaissance d’informations permettant de découvrir une source à travers la collecte, le traitement éditorial, la production ou la diffusion de ces mêmes informations. Cette immunité protège des personnes dont la profession ne présente qu’un lien indirect avec la diffusion d’informations au public. Elle interdit par ailleurs des poursuites pour recel de violation du secret professionnel et pour atteinte à l’intimité de la vie privée, délits punis de cinq ans d’emprisonnement et visant à réprimer des comportements portant atteinte au droit au respect de la vie privée et au secret des correspondances. Elle interdit également les poursuites pour recel de violation du secret de l’enquête et de l’instruction, délit puni de la même peine et protégeant la présomption d'innocence et la recherche des auteurs d'infraction »34 .

 

De la même manière, saisi des dispositions du premier alinéa de l’article 11 du CPP qui, telles qu’interprétées par la Cour de cassation, interdisent qu’une perquisition soit réalisée en présence d’un tiers qui en capte le déroulement par le son et l’image, le Conseil constitutionnel a jugé qu’« il ressort des dispositions contestées que le secret de l’enquête et de l’instruction s’entend "sans préjudice des droits de la défense". Les parties et leurs avocats peuvent en conséquence communiquer des informations sur le déroulement de l’enquête ou de l’instruction »35.

 

* Le Conseil constitutionnel a récemment eu l’occasion de se prononcer sur la conformité à la Constitution de dispositions limitant les droits des tiers afin d’assurer le respect du secret de l’instruction.

 

- Dans sa décision n° 2022-1020 QPC du 28 octobre 2022, le Conseil était saisi de dispositions permettant à toute personne de demander au juge d’instruction la restitution d’un objet placé sous main de justice, mais lui interdisant d’avoir accès aux pièces de la procédure en cas d’appel de l’ordonnance du juge d’instruction rejetant sa demande.

 

Pour écarter le grief tiré de la méconnaissance du droit à un recours juridictionnel effectif et déclarer ces dispositions conformes à la Constitution, il a notamment relevé qu’« en lui interdisant d’exiger la communication de pièces relatives à la saisie, le législateur a entendu préserver le secret de l’enquête et de l’instruction et protéger les intérêts des personnes concernées par celles-ci. Ce faisant, il a poursuivi les objectifs de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l’ordre public et de recherche des auteurs d’infractions et entendu garantir le droit au respect de la vie privée et de la présomption d’innocence, qui résulte des articles 2 et 9 de la Déclaration de 1789 »36.

 

- Dans sa décision n° 2022-1021 QPC du même jour, le Conseil constitutionnel était saisi de dispositions qui, telles qu’interprétées par la Cour de cassation, interdisent à un tiers à la procédure, y compris un journaliste, de demander l’annulation d’un acte d’investigation versé au dossier de la procédure alors qu’il a été accompli en violation du secret des sources.

 

Pour écarter le grief tiré de la méconnaissance du droit à un recours juridictionnel effectif, le Conseil a notamment relevé qu’en réservant au juge d’instruction, au procureur de la République, aux parties et au témoin assisté « la possibilité de contester la régularité d’actes ou de pièces versés au dossier de la procédure, le législateur a entendu préserver le secret de l’enquête et de l’instruction et protéger les intérêts des personnes concernées par celles-ci. Ce faisant, il a poursuivi les objectifs de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l’ordre public et de recherche des auteurs d’infractions et entendu garantir le droit au respect de la vie privée et de la présomption d’innocence, qui résulte des articles 2 et 9 de la Déclaration de 1789 »37.

 

Ces objectifs ou exigences de valeur constitutionnelle justifient ainsi que la faculté de demander l’annulation d’un acte d’une procédure pénale soit réservée aux seuls acteurs de cette procédure.

 

B. – L’application à l’espèce

 

Après avoir rappelé que les droits de la défense sont garantis par l’article 16 de la Déclaration de 1789 (paragr. 4), le Conseil constitutionnel a tout d’abord décrit l’objet des dispositions contestées.

 

À cet égard, il a relevé que, en application de l’article 114 du CPP, dans le cadre de l’instruction, les avocats des parties ou, si elles n’ont pas d’avocat, les parties elles-mêmes peuvent, après la première comparution ou la première audition, se faire délivrer copie de tout ou partie des pièces du dossier de la procédure (paragr. 5).

 

Puis, il a constaté que, conformément aux dispositions contestées, les parties ou leurs avocats peuvent communiquer à des tiers, pour les besoins de la défense, les copies des rapports d’expertise. En revanche, aucune autre pièce du dossier ne peut leur être communiquée (paragr. 6).

 

Le Conseil constitutionnel a ensuite relevé qu’en interdisant la communication à des tiers de copies des pièces du dossier autres que les rapports d’expertise, le législateur a entendu préserver le secret de l’instruction et protéger les intérêts des personnes concernées par celle-ci. Dans le prolongement de sa jurisprudence relative au secret de l’instruction, il a jugé que, ce faisant, le législateur « a poursuivi les objectifs de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l’ordre public et de recherche des auteurs d’infractions, et entendu garantir le droit au respect de la vie privée et de la présomption d’innocence qui résulte des articles 2 et 9 de la Déclaration de 1789 » (paragr. 7).

 

Enfin, le Conseil constitutionnel a jugé que ces dispositions n’étaient pas de nature à porter atteinte aux droits de la défense.

 

En premier lieu, il a relevé que, « au cours de l’information judiciaire, les parties ont la faculté de saisir le juge d’instruction, auquel il revient de conduire l’instruction à charge et à décharge, d’une demande afin qu’il soit procédé à tous actes qui leur paraissent nécessaires à la manifestation de la vérité ». À ce titre, le Conseil a en particulier souligné que les parties peuvent demander au juge d’instruction d’ordonner une expertise et, lorsqu’une telle mesure a été ordonnée, qu’il soit prescrit à l’expert d’effectuer certaines recherches ou d’entendre certaines personnes. En outre, une fois déposé, le rapport d’expertise est soumis à la discussion contradictoire des parties et celles-ci peuvent formuler une demande de complément d’expertise ou de contre-expertise (paragr. 8).

 

En second lieu, le Conseil a rappelé, dans le droit fil de ce qu’il avait jugé dans sa décision n° 2017-693 QPC du 2 mars 2018 précitée, que « les parties et leurs avocats conservent la possibilité de communiquer aux tiers, dans le cadre de l’exercice des droits de la défense, des informations sur le déroulement de l’instruction » (paragr. 9).

 

Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, le Conseil constitutionnel a jugé, sans même entrer dans une conciliation, que le grief tiré de la méconnaissance des droits de la défense devait être écarté (paragr. 10).

 

Les dispositions contestées ne méconnaissant aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, il les a donc déclarées conformes à la Constitution (paragr. 11).

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1 On oppose traditionnellement deux modèles procéduraux : le modèle accusatoire, qui privilégie le rôle des parties et est fondé sur la contradiction, l’oralité et la publicité, et le modèle inquisitoire, qui privilégie le rôle du juge et repose sur une procédure écrite, secrète et non contradictoire. Cependant, il est rare aujourd’hui qu’une procédure n’emprunte pas à l’un et l’autre modèles. C’est ainsi que la procédure d’instruction, bien qu’initialement construite sur le modèle inquisitoire, laisse aujourd’hui une grande place au contradictoire.

2 Les magistrats du parquet sont, comme les magistrats du siège, tenus au secret de l’instruction, mais avec quelques tempéraments (cf. infra).

3 Voir, en ce sens, JurisClasseur Procédure pénale, Article 11 – Fasc. 20 : « Secret de l’instruction », § 10.

4 Cass. crim., 18 septembre 2001, n° 00-86.518. Voir également, dans le même sens, Cass. crim., 27 octobre 2004, n° 04-81.513.

5 Avant l’entrée en vigueur de ce texte, les poursuites étaient diligentées soit sur le fondement des dispositions relatives au secret professionnel (articles 226-13 et 226-14 du code pénal), lorsqu’il s’agissait d’une personne concourant à la procédure, soit sur le fondement d’autres dispositions pénales (et notamment de l’article 434-7-2 du code pénal relatif aux entraves à la justice), dans le cas contraire. Ces sanctions étaient cependant jugées « insuffisamment dissuasives » et la coexistence de différentes infractions comme « nui[sant] à l’intelligibilité de la loi pénale » (Rapport n° 4146 [Assemblée nationale – XVe législature] de M. Stéphane Mazars, fait au nom de la commission des lois de l’Assemblée nationale, déposé le 7 mai 2021).

6 Les peines sont alors portées à cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende et, en matière de criminalité organisée, à sept ans d’emprisonnement et 100 000 euros d’amende.

7 Voir le rapport n° 2540 (Assemblée nationale – XVe législature) de la mission d’information sur le secret de l’enquête et de l’instruction présenté le 18 décembre 2019 par MM. Xavier Breton et Didier Paris au nom de la commission des lois de l’Assemblée nationale.

8 Ibidem.

9 Pour certains auteurs, cette exception constituerait le « fait justificatif d’un comportement en principe interdit (…). Mis en examen, partie civile, témoins et avocats sont donc bien tenus de respecter le secret de l’instruction, mais les parties et leurs avocats ne sont pas coupables de violation de ce secret s’ils révèlent certains faits pour se défendre » (Michèle-Laure Rassat, Procédure pénale, 3e éd., Ellipses, 2017, p. 535, § 512).

10 Cass., crim., 20 juin 2017, n° 16-82.908.

11 Ainsi, sous l’empire du code d’instruction criminelle de 1808, la procédure d’instruction se déroulait à l’insu des personnes mises en cause et de la victime. Ce n’est qu’avec la loi du 8 décembre 1897 ayant pour objet de modifier certaines règles de l’instruction préalable en matière de crimes et de délits, dite loi Constans, que l’inculpé se vit reconnaître le droit d’être assisté d’un avocat devant le juge d’instruction et de prendre connaissance du dossier de l’instruction la veille de l’audience.

12 Il convient par ailleurs de rappeler que, hors les cas prévus par l’article 114 du CPP, l’article R. 155 du même code autorise le procureur à délivrer aux parties qui le demandent des pièces d’une procédure, notamment en ce qui concerne une enquête terminée par une décision de classement sans suite. L’article R. 156 du CPP permettait également aux tiers à la procédure de demander la communication de pièces au procureur jusqu’à son abrogation par un décret du 29 juin 2020.

13 Cass. Ass. Plén., 30 juin 1995, n° 94-16.982.

14 Comme le relevait au cours des débats M. Georges Othily, rapporteur de la commission des lois du Sénat, « La remise de copies aux parties doit avoir des contreparties pour éviter une diffusion préjudiciable à d’autres parties, voire à des tiers. Imaginez, mes chers collègues, ce qu’il adviendrait si des copies du dossier circulaient un peu partout » (Compte-rendu des débats, séance du 11 décembre 1996).

15 Sa décision est susceptible de recours devant le président de la chambre de l’instruction, qui doit également statuer dans un délai de cinq jours.

16 Cette infraction était initialement punie de 25 000 francs d’amende. Le législateur est ensuite intervenu à plusieurs reprises pour augmenter le quantum de la peine, portée à 3 750 euros en 2002, à 10 000 euros en 2014 et, enfin, à trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende depuis la loi du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire.

17 Rapport n° 1895 (Assemblée nationale – XIVe législature) de Mme Cécile Untermaier fait au nom de la commission des lois, déposé le 29 avril 2014.

18 Selon l’article 156 du CPP, dans le cas où se pose une question d’ordre technique, le juge d’instruction peut, soit à la demande du ministère public, soit d’office, ou à la demande des parties, ordonner une expertise. Le ministère public ou la partie qui demande une expertise peut préciser dans sa demande les questions qu’il voudrait voir poser à l’expert.

19 François Saint-Pierre, « Investigations privées en défense : questions de méthode et difficultés de pratique », AJ Pénal, 2009, p. 433.

20 La Cour de cassation a jugé que si, devant une cour d’assises, ce sachant a la qualité de témoin, et non celle d’expert, ses travaux n’en seront pas moins discutés contradictoirement (Cass. crim., 11 juillet 2017, n° 16-86.656).

21 Sénat, compte-rendu des débats, séance du 11 décembre 1996.

22 M. Jacques Toubon, alors garde des sceaux, a déclaré en séance que « la proposition tendant à prévoir la possibilité de communiquer n’importe quelle pièce aux seuls experts est à la fois trop large et trop réductrice ».

23 Cass. crim., 28 septembre 2004, n° 03-84.003.

24 Cass. crim., 11 janvier 2001, n° 00-80.748. Les motifs de l’arrêt ne reprennent cependant pas cette affirmation, la cassation étant fondée sur les articles 85 et 86 du CPP, relatifs au refus d’informer une plainte avec constitution de partie civile.

25 Cass. crim., 18 mars 2015, n° 14-86.680.

26 Cass. civ. 2e, 23 nov. 2006, n° 03-20.490.

27 Cass. com., 20 décembre 2017, n° 16-18.856.

28 Décision n° 2006-535 DC du 30 mars 2006, Loi pour l’égalité des chances, cons. 24.

29 Pour un exemple de conciliation entre l’objectif constitutionnel de bonne administration de la justice et les exigences découlant de l’article 16 de la Déclaration de 1789, voir la décision n° 2011-168 QPC du 30 septembre 2011, M. Samir A. (Maintien en détention lors de la correctionnalisation en cours d’instruction), cons. 4.

30 Décision n° 93-326 DC du 11 août 1993, Loi modifiant la loi n° 93-2 du 4 janvier 1993 portant réforme du code de procédure pénale, cons. 19.

31 Décisions nos 2012-284 QPC du 23 novembre 2012, Mme Maryse L. (Droit des parties non assistées par un avocat et expertise pénale), cons. 4, et 2016-566 QPC du 16 septembre 2016, Mme Marie-Lou B. et autre (Communication des réquisitions du ministère public devant la chambre de l’instruction), paragr. 9.

32 Décision n° 2017-693 QPC du 2 mars 2018, Association de la presse judiciaire (Présence des journalistes au cours d’une perquisition), paragr. 8.

33 Décision n° 2011-191/194/195/196/197 QPC du 18 novembre 2011, Mme Élise A. et autres (Garde à vue II), cons. 36.

34 Décision n° 2016-738 DC du 10 novembre 2016, Loi visant à renforcer la liberté, l’indépendance et le pluralisme des médias, paragr. 22.

35 Décision n° 2017-693 QPC du 2 mars 2018 précitée, paragr. 11.

36 Décision n° 2022-1020 QPC du 28 octobre 2022, Mme Célia C. (Accès des tiers au dossier de la procédure d’instruction dans le cadre d’une demande de restitution d’un bien saisi), paragr. 8.

37 Décision n° 2022-1021 QPC du 28 octobre 2022, Mme Marie P. (Requête en nullité d’un acte d’investigation déposée par un journaliste n’ayant ni la qualité de partie à la procédure ni celle de témoin assisté), paragr. 13.