Autres pays

09/05/2023

 

 

 

Argentine : le contrôle de constitutionnalité

Pablo Oscar GALLEGOS FEDRIANI - Docteur en droit, professeur à l'Université de Buenos Aires
Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel n° 43 - avril 2014
Le pouvoir judiciaire, au niveau national, est constitué de la Cour Suprême de Justice de la Nation (CSJN) et des autres tribunaux inférieurs (article 116 de la Constitution nationale).

E – Demande du particulier et existence d’un "cas"

Selon la Constitution de la République argentine, toute personne partie à un procès peut demander qu’une disposition soit déclarée inconstitutionnelle.


Selon la jurisprudence constante de la CSJN, il n’y a pas lieu de statuer sur une demande de déclaration abstraite d’inconstitutionnalité. Bien au contraire, il faut qu’existe un litige entre parties au cours duquel la constitutionnalité de la législation applicable doit avoir été contestée. La Cour estime en effet que le contrôle confié au pouvoir judiciaire impose que la condition de l’existence d’un "cas" soit rigoureusement observée, non pour échapper aux questions ayant une répercussion publique, mais afin de préserver le principe de séparation des pouvoirs, en évitant que le pouvoir judiciaire se prononce de façon générale sur la constitutionnalité des normes émises par les autres pouvoirs, attribution qui ne lui a pas été reconnue par l’article 116 de la Constitution nationale ("Brandi, Eduardo Alberto et autres contre la Province de Mendoza, concernant une action visant une déclaration d’inconstitutionnalité", décision du 11 juillet 2007, T. 330, p. 3109).


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Autriche : la Cour constitutionnelle

Gerhart HOLZINGER - Prof. Dr. Gerhart Holzinger Président de la Cour constitutionnelle autrichienne (1)
Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel n° 36 - juin 2012

A - Le contrôle des lois (article 140 de la Loi constitutionnelle fédérale)

[…]
Sous certaines conditions restrictives, une loi peut également être contestée directement devant la Cour constitutionnelle par un particulier : tel est le cas lorsque la personne en question soutient que le caractère contraire à la Constitution de la disposition critiquée viole directement ses droits et que la loi s'applique directement à cette personne, sans qu'une décision de justice ou un acte administratif ne soient nécessaires. Cette procédure appelée " recours individuel " est un recours subsidiaire qui est applicable lorsqu'il n'est raisonnablement pas possible d'exiger de la personne concernée ni qu'elle s'adresse à l'administration, dont la décision finale pourrait ensuite être contestée devant la Cour constitutionnelle au motif que cette décision serait fondée sur une loi contraire à la Constitution, ni qu'elle forme un recours devant les tribunaux et, dans le cadre de celui-ci, suggère au juge de saisir la Cour constitutionnelle d'une demande de contrôle de constitutionnalité de la loi. (7) Conformément au caractère subsidiaire du recours individuel, la Cour constitutionnelle donne une interprétation stricte aux conditions de recevabilité de ce recours. (8)
À une exception près (9) -négligeable dans le cadre de cette présentation - le contrôle de la loi exercé par la Cour constitutionnelle est toujours un contrôle a posteriori.
L'abrogation d'une loi déclarée contraire à la Constitution ne produit en principe d'effets que pour l'avenir, à l'exception de l'affaire ayant donné lieu à la décision de la Cour constitutionnelle : la loi ne peut plus être appliquée à ce cas-là. En outre, la Constitution donne compétence à la Cour constitutionnelle d'étendre discrétionnairement à des cas ayant eu lieu dans le passé cet effet applicable à l'affaire ayant conduit à sa décision. La Cour constitutionnelle est de plus habilitée à fixer un délai pour l'abrogation de la loi, délai qui ne saurait toutefois dépasser dix-huit mois. Pendant ce délai, la loi déclarée contraire à la Constitution continue à être applicable et ne peut, tant que court le délai, être contestée une nouvelle fois devant la Cour constitutionnelle.
(7) Jurisprudence constante depuis l'affaire publiée au Recueil des décisions de la Cour VfSlg. 8 009/1977 ; cf., par exemple, la décision 15 065/1997.
(8) Cf., par exemple, Recueil VfSlg., affaires 11 369/1987, 12 865/1991, 13 318/1992, 14 359/1995 et de nombreux autres cas.


(9) Article 138 alinéa 2 de la Loi constitutionnelle fédérale ; cf., infra, point II.E.


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Belgique : la Cour constitutionnelle

Géraldine ROSOUX - Référendaire à la Cour constitutionnelle de Belgique - Assistante et maître de conférences à l'Université de Liège
Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel n° 41 - octobre 2013

II – Organisation et procédure
B – Saisine

17 – Depuis sa création, la Cour constitutionnelle peut être saisie par deux voies :
(1) soit de manière "directe", par un recours en annulation (éventuellement accompagné d'une demande de suspension), introduit dans un délai de principe(43) de six mois à partir de la publication au journal officiel de Belgique, le Moniteur belge ;
(2) soit de manière "incidente" par une question préjudicielle, qui doit, en principe, être posée par tout juge lorsqu'est soulevée devant lui, dans le cadre d'un litige particulier, une question portant sur la conformité d'une loi au regard des règles dont la juridiction constitutionnelle assure le respect.
La juridiction constitutionnelle exerce donc un contrôle a posteriori des lois, après que la loi soit adoptée, sanctionnée, promulguée et publiée.
[…]
20 – Si, dans le cadre d'un litige particulier, est invoquée la violation, par une loi, des règles répartitrices de compétences ou d'un droit fondamental dont la juridiction constitutionnelle assure le respect, le juge saisi est, en principe, obligé (48) de surseoir à statuer, de poser une question préjudicielle à la Cour constitutionnelle et d'attendre la réponse de la Cour. Contrairement au recours en annulation, la question préjudicielle n'est soumise à aucune limitation temporelle.
Par cette obligation de principe qui s'impose à toutes les juridictions, le législateur spécial a voulu créer un contrôle "concentré" de constitutionnalité des lois, qui relève d'un monopole de principe de la juridiction constitutionnelle (49). Conscient du risque de concurrence entre les hautes juridictions, le législateur belge a même prévu, pour la Cour de cassation et le Conseil d'État, une obligation plus stricte (50) (c'est-à-dire avec moins de dérogations possibles) d'interroger la Cour constitutionnelle.
Posée par un juge à un autre juge, la question préjudicielle est donc un mécanisme indirect de saisine du juge constitutionnel puisqu'il suppose un dialogue de juge à juge, une coopération entre les juridictions.
21 – Inséré par la loi spéciale du 12 juillet 2009 (51), le nouvel article 26, § 4, de la loi spéciale sur la Cour constitutionnelle organise, dans le contentieux préjudiciel, une priorité de principe de la saisine de la juridiction constitutionnelle belge " lorsqu'est invoqué devant une juridiction qu'une loi, un décret ou une règle visée à l'article 134 de la Constitution viole un droit fondamental garanti de manière totalement ou partiellement analogue par une disposition du titre II de la Constitution ainsi que par une disposition de droit européen ou de droit international ".
Par la priorité de principe qu'il instaure, ce mécanisme peut être comparé à celui de la QPC française (52).
Après l'arrêt Melki (53) de la Cour de justice de l'Union européenne concernant la QPC française, dont l'enseignement a été implicitement transposé par l'ordonnance Chartry (54) à l'article 26, § 4, de la loi spéciale du 6 janvier 1989, on peut considérer que, lorsqu'on se situe dans le champ d'application du droit de l'Union européenne, cette disposition doit être interprétée de manière telle qu'elle n'entrave à aucun moment la saisine préjudicielle de la Cour de justice de l'Union européenne (la question de constitutionnalité n'est pas prioritaire par rapport à la question à Luxembourg), mais qu'elle peut par contre postposer le contrôle diffus, opéré par tout juge national, de conformité au droit de l'Union (tempérament de la jurisprudence Simmenthal (55)).
Lorsque, par contre, on ne se situe pas dans le champ d'application du droit de l'Union, l'article 26, § 4, continue à devoir être appliqué sans restriction par le juge saisi de la violation, par une norme législative, d'un droit fondamental garanti de manière analogue par une disposition constitutionnelle et par une disposition de droit européen ou de droit international.
(43) Sauf s'il s'agit d'un acte d'assentiment à un traité international, v. supra, no 12.
(44) Sur la notion d' "intérêt" devant la juridiction constitutionnelle, v. J.-Th. Debry, "Saisir la Cour constitutionnelle d'un recours en annulation", in P. Martens (dir.), Saisir la Cour constitutionnelle et la Cour de justice de l'Union européenne, C.U.P., Vol. 131, Anthemis, Louvain-la-Neuve, 2012, p. 9-53, ici p. 24-27 ; B. Gors, "L'intérêt à agir au sens de l'article 142 de la Constitution", R.B.D.C., 2006, p. 135-165.
(45) H. Kelsen, "La garantie juridictionnelle de la démocratie (La Justice constitutionnelle)", op. cit., p. 226.
(46) V. toutefois la thèse de Ch. Behrendt, Le juge constitutionnel, un législateur-cadre positif – Une analyse comparative en droit français, belge et allemand, Bruylant, Bruxelles, L.G.D.J., Paris, 2006, 537 pages.
(47) La suspension de la norme législative ne pourra en principe être décidée que pour autant qu'il soit démontré (1) que les moyens sont sérieux et (2) qu'il existe un risque de préjudice grave difficilement réparable, ces deux conditions étant cumulatives. À supposer que ces conditions soient établies, la juridiction constitutionnelle s'estime par ailleurs compétente pour opérer une balance des intérêts en présence, lui permettant de ne pas prononcer la suspension si l'intérêt général justifie que la norme ne soit pas suspendue (v. les arrêts no 116/2002 du 26 juin 2002, no 174/2002 du 27 novembre 2002, no 17/2007 du 17 janvier 2007, no 34/2009 du 24 février 2009 et no 97/2010 du 29 juillet 2010). Au sujet de la suspension, v. G. Rosoux, "Leçons de l'éphémère. La Cour d'arbitrage et le Renouveau' électoral – La Cour d'arbitrage et la suspension", R.B.D.C., 2003, p. 13-68 ; J. Sautois, "Saisir la Cour constitutionnelle d'une demande de suspension", in P. Martens (dir.), Saisir la Cour constitutionnelle et la Cour de justice de l'Union européenne, C.U.P., Vol. 131, Anthemis, Louvain-la-Neuve, 2012, p. 55-83.
(48) Article 26, § 2, alinéa 1er, de la loi spéciale du 6 janvier 1989.
(49) Précisons toutefois que l'article 26 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 autorise le juge, à l'exception de la Cour de cassation et du Conseil d'État, à conclure à la non-violation manifeste de la Constitution, ce qui lui confère implicitement un certain pouvoir de contrôler la constitutionnalité des lois.
(50) Article 26, § 2, alinéa 3, de la loi spéciale, a contrario.
(51) Loi spéciale du 12 juillet 2009 "modifiant l'article 26 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage", Moniteur belge du 31 juillet 2009. L'article 26, § 4, s'inspire de la recommandation doctrinale élaborée par le groupe de travail du Professeur J. Velaers, face à la problématique de droits fondamentaux garantis de manière analogue par des textes d'origines distinctes, constitutionnelle et conventionnelles, v. J. Velaers, "De toesting van wetten, decreten en ordonnanties aan titel II van de Grondwet en aan internationale mensenrechtenverdragen, bij samenloop van grondrechten – Le contrôle des lois, décrets et ordonnances au regard du titre II de la Constitution et des conventions internationales relatives aux droits de l'homme, en cas de concours de droits fondamentaux", in A. Arts, I. Verougstraete, R. Andersen e. a. (éds.), Les rapports entre la Cour d'arbitrage, le Pouvoir judiciaire et le Conseil d'État, La Charte, Bruges, 2006, p. 99-149.
(52) Par contre, le mode de saisine et les effets des décisions sont différents en Belgique et en France.
(53) Arrêt C.J.U.E. Melki et Abdeli du 22 juin 2010 (aff. jointes C-188/10 et C-189/10).
(54) Ordonnance C.J.U.E. Chartry c/ État belge du 1er mars 2011 (aff. C-457/09).
(55) V. notamment M. Bossuyt et W. Verrijdt, "The Full Effect of EU Law and of Constitutional Review in Belgium and France after the Melki Judgment", EuConst 2011, p. 355-391, ici p. 377 ; N. Cariat, "Quelques réflexions quant à la compatibilité de la loi spéciale sur la Cour constitutionnelle avec le droit de l'Union européenne", J.T., 2011, p. 573-579, ici p. 578.


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Équateur : Décision issue d’un contrôle a posteriori


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Norvège : la Cour suprême et le contrôle de constitutionnalité des lois

Iris NGUYÊN-DUY, Docteur en droit Chercheuse en droit public comparé, Oslo
Jean-Baptiste POINTEL, Docteur en droit Enseignant contractuel à la Faculté de droit et de science politique, Université de Rennes 1(1)
Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel n° 53 - octobre 2016 – article complet

II - Le contrôle de constitutionnalité des lois en Norvège

La Norvège n'a pas de cour constitutionnelle spécialisée (16) à proprement parler. Toutes les cours, avec la Cour suprême au sommet, assument des attributions de " juge constitutionnel " (17), puisqu'elles se chargent d'assurer, entre autres, le respect de la Constitution. Un contrôle concret de constitutionnalité des lois (et des actes administratifs) existe depuis le début du 19e siècle.
[…]

b. Les principales caractéristiques du contrôle de constitutionnalité des lois

En Norvège, tous les tribunaux ordinaires peuvent contrôler directement la constitutionnalité des lois à l'occasion d'un litige par voie d'exception, la loi étant déjà entrée en vigueur. Le contrôle par voie d'action ou par auto-saisine est exclu. Ainsi, le contrôle est déconcentré, a posteriori, concret et inter partes.
La procédure est orale, même si des conclusions écrites sont jointes. L'audience est publique en principe, sauf cas nécessitant le huis clos. Si la délibération est secrète, le vote des juges est public. Une décision de la Cour suprême prend la forme d'une discussion formalisée. Un magistrat représentant la majorité procède à une présentation complète de l'affaire, les questions de droit posées et les règles juridiques applicables. Ensuite, il détaille l'argumentation majoritaire, issue des débats lors de la délibération, et expose la proposition de décision qui sera adoptée. Si une proposition de vote divergente a été exprimée, elle sera exposée et justifiée par un magistrat représentant la minorité, de sorte à donner les raisons du désaccord. Une fois les positions exprimées, le vote en faveur de chacune de ses propositions est exprimé(30). Enfin, la Cour annonce la décision adoptée.

c. Portée des décisions

En pratique, si une loi est déclarée inconstitutionnelle par un tribunal de première instance, un appel peut être autorisé directement devant la Cour suprême.
Une "déclaration d'inconstitutionnalité" a pour effet d'écarter l'application au cas d'espèce (inter partes) de la disposition législative considérée non conforme à la Constitution : le texte n'a alors aucune force normative dans l'affaire en question mais la loi reste formellement en vigueur (elle n'est pas abrogée). Le plus souvent sans déclarer d'invalidité, la Cour interprète le texte législatif de sorte que la Constitution prime. La décision de la Cour ne concerne que l'affaire concrète en question (avec une autorité relative de la chose jugée), mais la Cour suprême peut estimer que la question de droit présente une importance dépassant le cadre du litige et formuler sa décision (et le raisonnement afférent) de manière plus générale que ce qui aurait été strictement nécessaire pour la résolution du litige. La force obligatoire de la décision combinée à la règle du précédent [prejudikatsvirkning] rendent alors de facto son autorité de chose jugée erga omnes.
Il est encore trop tôt pour dire s'il y aura un "avant" et un "après" les réformes de 2014-2015. Tout dépendra de la façon dont la Cour suprême choisira d'interpréter son rôle constitutionnel, du dynamisme du droit norvégien, de l'évolution de la société et de ses besoins, mais également de l'influence de plus en plus pressante du droit international et européen.
Le contrôle de constitutionnalité n'a jamais été aussi fort, ni n'a jamais été autant pratiqué qu'aujourd'hui. Bien que l'audace des cours en matière de justice constitutionnelle se soit accentuée ces dernières années et soit parfois critiquée(31), elle reste somme toute relative, les questions constitutionnelles ne représentant qu'une faible partie des litiges examinés par les cours norvégiennes. Et elle a été, d'une certaine manière, reconnue par le parlement lui-même, puisqu'il a consenti, en toute connaissance de cause, aux réformes de 2014 et 2015 qui a priori renforcent la légitimité tant des cours que de leur contrôle, ainsi que la nature constitutionnelle de la démocratie norvégienne.
(16) Arnfinn Bårdsen, "De nordiske høyesterettene som konstitusjonsdomstoler : Noen nyere utviklingslinjer i Norges Høyesterett", Séminaire des cours suprêmes nordiques, Stockholm, les 23 et 24 mars 2015.
(17) Pour une distinction entre les critères matériels et organiques, voir Constance Grewe, "Cours constitutionnelles européennes et droits fondamentaux",https://www.coleurope.eu/sites/default/files/uploads/event/article.pdf


(30) Les arrêts sont généralement détaillés et bien argumentés afin qu'ils puissent servir de précédents ou offrir des lignes directrices par delà le cas d'espèce.
(31) Voir la critique faite par Anne Robberstad de la fonction positiviste, créatrice de droit, que la Cour suprême s'arroge depuis quelques années, "Høyesteretts mandat", Lov og rett vol. 55, 2016, n° 4, p. 245-256. L'auteur fait allusion à un "coup d'état juridico-politique". Voir également Morten Kinander, "De svekker folkestyret", Klassekampen, 26 juin 2015, p. 10 et, pour une position divergente, voir par ex. Anine Kierulf, "Grunnloven som irrelevant rettskilde", Lov og rett, vol. 55, 3, 2016, p. 185-189.


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Portugal : le Tribunal constitutionnel

Marie-Christine MEININGER
Cahiers du Conseil constitutionnel n° 29 (Dossier : Portugal) - octobre 2010

Présentation du Tribunal constitutionnel et de ses compétences

[…]
Alors que le contrôle préventif est limité aux textes ayant force législative, à certains décrets régionaux et aux règlements des assemblées, le contrôle abstrait successif ou a posteriori touche une grande variété de normes comprenant l'ensemble des actes juridiques législatifs (y compris lois à valeur infra-constitutionnelle équivalant à nos lois organiques), normes des régions autonomes, actes réglementaires quelle que soit leur nature.
Le contrôle concret est un contrôle diffus qui peut être exercé par l'ensemble des tribunaux. La question de constitutionnalité peut en effet être soulevée au cours d'un litige par tout justiciable ou d'office par le juge et ce devant n'importe quel degré de juridiction depuis le tribunal de première instance.
Si le juge ordinaire juge la norme inconstitutionnelle, s'il écarte la question en appliquant une norme dont l'inconstitutionnalité a été soulevée ou une norme précédemment jugée inconstitutionnelle, les parties peuvent, après épuisement des voies de droit commun, saisir le Tribunal constitutionnel. La saisine par le ministère public est obligatoire en cas de refus d'un tribunal d'appliquer une norme contenue dans une convention internationale ou en cas d'application d'une norme précédemment jugée inconstitutionnelle.
Le Tribunal retient, dans le cadre du contrôle concret, une interprétation extensive de sa compétence. S'inquiétant de la prolifération des normes de toute nature opposables aux particuliers, il a, par exemple, accepté d'inclure dans son contrôle les règles de procédure établies par un tribunal arbitral pour être appliquées dans un procès particulier. Il s'est également estimé compétent pour examiner les Assentos, décisions interprétatives des tribunaux suprêmes, auxquelles la loi confère force obligatoire générale.
Dans le cadre du contrôle concret, le Tribunal examine la norme telle qu'interprétée par le juge a quo, et non le jugement. Sa décision n'a d'effet que sur l'affaire soumise à son appréciation et produit des conséquences identiques à celles d'une décision de cassation, obligeant le juge a quo à réformer sa décision. Un nouveau recours est possible en cas de non-respect d'une décision du Tribunal constitutionnel mais, dans la pratique, les cas sont très rares. Enfin, si une norme est jugée inconstitutionnelle par trois décisions identiques rendues dans le cadre du contrôle concret, le Parquet peut demander une décision erga omnes.
Sur le contrôle concentré se greffe ainsi un contrôle diffus qui représente 90 % de l'activité du Tribunal, soit environ 1000 décisions par an.
Le contrôle des normes comporte aussi un contrôle de la compatibilité des lois régionales avec les statuts des régions ainsi qu'un contrôle de constitutionnalité par omission, dont l'initiative est limitée au président de la République et au Provedor de Justiça ou, en cas de violation des droits des régions, aux présidents des assemblées régionales. Le rôle du Tribunal se borne alors à vérifier l'existence de l'omission, sans pouvoir se substituer au législateur. Ce type de contrôle n'a fait l'objet que de sept décisions depuis l'origine, dont deux d'inconstitutionnalité.


drapeau du Portugal

Mis à jour le 29/08/2023