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Commentaire de la décision 2022-1027/1028 QPC

16/03/2023

Conformité

Le Conseil constitutionnel a été saisi le 28 septembre 2022 par le Conseil d’État (décisions nos 462977 et 462978 du même jour) de deux questions prioritaires de constitutionnalité (QPC) posées par le Conseil national de l’ordre des médecins portant respectivement sur la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du paragraphe I et du paragraphe II de l’article L. 6152-5-1 du code de la santé publique (CSP), dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2021-292 du 17 mars 2021 visant à favoriser l’attractivité des carrières médicales hospitalières.

 

Dans sa décision n° 2022-1027/1028 QPC du 9 décembre 2022, le Conseil constitutionnel a déclaré l’article L. 6152-5-1 du CSP, dans cette rédaction, conforme à la Constitution.

 

Dans cette affaire, M. François Séners a estimé devoir s’abstenir de siéger.

 

I. – Les dispositions contestées

 

A. – Historique et objet des dispositions contestées

 

1. – Les règles de cumul d’activités applicables aux praticiens des établissements publics de santé

 

* Sous la Ve République, l’ordonnance du 30 décembre 1958 créant les centres hospitaliers universitaires (CHU), dite ordonnance « Debré », a ouvert la faculté à certains médecins de statut hospitalier de délivrer des soins dans les conditions de la médecine de ville au sein même des établissements publics de santé dans lesquels ils exercent1.

 

Cette possibilité d’activité libérale intra-hospitalière avait pour but « d’assurer l’attractivité de l’hôpital public tant vis-à-vis des praticiens que des patients. Il s’agissait d’inciter les praticiens, qui exerçaient alors à l’hôpital mais avaient aussi un cabinet en ville, à s’engager à temps plein dans le statut hospitalo-universitaire afin que, grâce à eux, les hôpitaux deviennent des pôles de recherche et de soins ouverts à tous les malades. Un dispositif dit de "secteur privé" a ainsi été autorisé dans les hôpitaux publics et a réussi pleinement son office : le maintien d’un secteur privé, associé à la création des statuts temps plein des médecins hospitalo-universitaires, ont permis le succès de la mise en place des CHU »2. Cette activité libérale « avait vocation à assurer aux médecins hospitaliers temps plein qui la choisissaient, un complément de revenus pour compenser le différentiel de rémunérations avec leurs confrères libéraux non hospitaliers, mais aussi à assurer aux praticiens hospitalo-universitaires (PU–PH) dont la retraite est assise sur la seule part universitaire, un complément de retraite »3.

 

Depuis la refonte en 2000 du code de la santé publique4, cette possibilité d’exercer une activité libérale au sein de l’établissement public de santé est ouverte, lorsqu’ils exercent au minimum huit demi-journées par semaine, aux médecins, odontologistes et pharmaciens statutaires des établissements publics de santé ainsi qu’aux membres du personnel enseignant et hospitalier des CHU qui exercent conjointement les fonctions universitaire et hospitalière, sous réserve que l’exercice de cette activité n’entrave pas l’accomplissement des missions de l’établissement public de santé et du service public hospitalier5.

 

Les conditions d’un tel cumul d’activités au sein de l’établissement sont fixées par l’article L. 6154-2 du CSP, qui prévoit notamment que l’activité libérale doit être de même nature que celle exercée à titre principal par le praticien et limitée à 20 % de la durée de service hospitalier hebdomadaire à laquelle il est astreint. Elle doit être « organisée de manière à garantir l’information des patients et la neutralité de leur orientation entre activité libérale et activité publique »6 et donne lieu à la conclusion d’un contrat d’activité libérale avec l’établissement public de santé, d’une durée de cinq ans, soumis à l’approbation du directeur général de l’agence régionale de santé (ARS)7.

 

* L’exercice d’une activité libérale en dehors de l’établissement public de santé n’est en principe pas possible. Le droit commun de la fonction publique impose en effet au personnel de ces établissements de consacrer l’intégralité de son activité professionnelle aux tâches confiées par l’établissement public recruteur et lui interdit d’exercer, à titre professionnel, une activité privée lucrative de quelque nature que ce soit8.

 

Cette interdiction de cumul de l’activité dans le secteur public avec une activité lucrative à l’extérieur de l’établissement hospitalier s’applique non seulement aux médecins, odontologistes et pharmaciens titulaires, mais aussi à ces mêmes praticiens contractuels ainsi qu’aux praticiens associés titulaires exerçant sous la responsabilité directe de ces professionnels et qui participent à l’activité de médecine, d’odontologie ou de pharmacie9.

 

Par dérogation, les médecins, odontologistes et pharmaciens, qu’ils soient titulaires ou contractuels, peuvent cependant être autorisés par le directeur de l’établissement dont ils relèvent à cumuler leur activité dans le secteur public avec une activité privée lucrative lorsqu’ils exercent à temps partiel (lorsque leur quotité de travail est inférieure ou égale à 90 % des obligations de service d’un praticien exerçant à temps plein)10.

 

Les conditions d’application de ce cumul d’activités sont fixées par voie règlementaire. À ce titre, il est notamment prévu que l’exercice d’une activité privée lucrative à l’extérieur de l’établissement ne doit pas mettre en cause le bon fonctionnement du service ni nuire à l’accomplissement des missions de l’établissement11. Le praticien hospitalier qui envisage d’exercer une telle activité extérieure doit en informer par écrit le directeur de l’établissement dans lequel il exerce à titre principal deux mois au moins avant le début de cette activité et fournir les justificatifs attestant du lieu d’exercice de cette activité et du type de missions12.

 

2. – Le dispositif de non-concurrence applicable aux praticiens des établissements publics de santé souhaitant exercer une activité privée à l’extérieur (les dispositions objet de la décision commentée)

 

Alors qu’il était motivé par la volonté de renforcer l’attractivité des fonctions hospitalières, l’assouplissement des conditions de cumul d’activités entre établissement public de santé et secteur privé lucratif a fait craindre, en retour, que des praticiens utilisent leurs fonctions dans le secteur public pour développer une patientèle et la détourner vers le secteur privé lucratif.

 

* Pour tenter de prévenir ce risque, la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (loi dite « HPST ») a d’abord prévu la possibilité d’interdire à certains praticiens d’exercer dans le secteur privé lucratif après leur départ d’un établissement public de santé.

 

Cette possibilité a été introduite par voie d’amendement parlementaire13, contre l’avis du Gouvernement. Les débats ont conduit les députés et sénateurs à s’accorder, en commission mixte paritaire, sur la nécessité de prévoir un tel dispositif de non-concurrence au nom de la défense du service public hospitalier, nonobstant l’objectif affiché par cette loi d’améliorer l’attractivité de l’hôpital public.

 

Ainsi, le rapporteur de la commission des lois de l’Assemblée nationale, M. Jean–Marie Rolland insistait, pour s’opposer à une telle mesure, sur le fait que « cette clause constitue un facteur de moindre attractivité pour l’hôpital public et un signal très défavorable adressé aux praticiens alors que l’ambition du projet de loi est, à l’inverse, de renforcer l’attractivité des carrières à l’hôpital public » et que la disposition porterait « atteinte aux principes constitutionnels de la liberté d’entreprendre et de la liberté du travail »14.

 

Au contraire, les députés Mme Marisol Touraine et M. Jean-Luc Préel ont tour à tour affirmé, au soutien de la mesure, « qu’un tel dispositif constitue un moyen concret de défendre le secteur public » et qu’« Une telle clause existant dans le secteur privé, il serait légitime qu’elle intervienne également dans le secteur public »15.

 

Ces dispositions figuraient au sein de l’article L. 6152-5-1 du CSP qui, dans sa rédaction initiale, s’appliquait exclusivement aux praticiens démissionnant d’un établissement public de santé et ayant exercé plus de cinq ans à titre permanent dans le même établissement. Il précisait alors que, dans un délai de deux ans suivant leur démission, il pouvait leur être interdit d’ouvrir un cabinet privé ou d’exercer une activité rémunérée dans un établissement de santé privé à but lucratif, un laboratoire privé d’analyses de biologie médicale ou une officine de pharmacie où ils pourraient « rentrer en concurrence directe avec l’établissement public dont ils sont démissionnaires ».

 

Les modalités d’application de cet article devaient être fixées par voie réglementaire. Toutefois, l’acte réglementaire prévu à cet effet n’a jamais été adopté et le dispositif de l’article L. 6152-5-1 du CSP, dans sa rédaction initiale, n’a donc pas été appliqué16.

 

* Ce dispositif de non-concurrence a ensuite été transposé aux praticiens autorisés à exercer une activité libérale au sein de leur établissement public de santé par la loi du 26 janvier 2016 précitée17, avant d’être à la fois renforcé et élargi, s’agissant des activités extra-hospitalières, par la loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé.

 

L’exposé de l’amendement à l’origine de la nouvelle rédaction de l’article L. 6152–5–1 du CSP, présenté par M. Milon, rapporteur de la commission des affaires sociales du Sénat, indique que « Si [les objectifs du projet de loi de renforcer l’attractivité de l’exercice hospitalier et de renforcer les coopérations entre la ville et l’hôpital] ne peuvent qu’être partagés, il convient de se montrer prudent sur les effets de concurrence qui pourraient en résulter au sein d’un territoire, au détriment de l’hôpital public »18.

 

C’est donc, là aussi, en contrepartie des assouplissements apportés par la même loi aux possibilités de cumul des praticiens hospitaliers que le législateur a fait le choix de compléter le régime d’interdiction susceptible de s’appliquer aux praticiens démissionnaires et de l’étendre aux praticiens hospitaliers exerçant à temps partiel.

 

En ce sens, Mme Laurence Cohen a déclaré en séance publique au Sénat : « il nous paraît impératif d’encadrer et surtout de limiter la concurrence qui existe quand un praticien hospitalier démissionne pour exercer une activité libérale en ville ou bien quand il cumule les deux fonctions. Tous les directeurs et directrices d’hôpitaux que nous avons rencontrés ont évoqué principalement ce fait pour expliquer leurs difficultés à fidéliser des praticiennes et des praticiens. Ils expliquent qu’ils ne peuvent pas financièrement s’aligner sur les rémunérations existant dans le privé. Si l’on ajoute à cela les conditions de travail difficiles dans les établissements publics, nombre de médecins, toutes spécialités confondues, font le choix de l’activité libérale en établissement privé. D’une part, des praticiens parmi les plus expérimentés, qui, jusqu’ici, exerçaient dans les établissements publics, avec tout ce que cela implique de sens du service public, démissionnent, et, d’autre part, les établissements publics ne parviennent plus à recruter des praticiens pour les remplacer. C’est bien la preuve d’un manque d’attractivité, tant du point de vue des rémunérations que des conditions de travail, qui, nous l’avons déjà dénoncé, se dégradent »19.

 

Le dispositif de l’article L. 6152-5-1 du CSP, restructuré en deux paragraphes, prévoit depuis lors un double régime d’interdiction susceptible de s’appliquer aux praticiens des établissements publics de santé souhaitant exercer une activité privée à l’extérieur.

 

– Son paragraphe I (dispositions objet de la QPC n° 2022-1028) reprend et complète l’interdiction d’exercer une activité privée lucrative susceptible d’être prise contre les praticiens quittant un établissement public « lorsqu’ils risquent d’entrer en concurrence directe avec l’établissement public de santé dans lequel ils exerçaient à titre principal ».

 

Ce dispositif concerne les membres du personnel enseignant et hospitalier des CHU, ainsi que les médecins, odontologistes ou pharmaciens titulaires ou contractuels qui ont exercé au moins à mi-temps au sein de l’établissement public de santé. Il s’applique désormais que ce soit en cas de départ « temporaire ou définitif » (et non plus uniquement en cas de démission).

 

Il prévoit que ces professionnels peuvent se voir interdire d’exercer une activité rémunérée dans un établissement privé à but lucratif, un cabinet libéral, un laboratoire de biologie médicale privé ou une officine de pharmacie pendant une durée qui ne peut excéder vingt-quatre mois et dans un rayon de dix kilomètres au maximum autour de l’établissement public de santé.

 

Il revient au directeur de l’établissement support du groupement hospitalier territorial (GHT) au sein duquel se trouve l’établissement dont relève le praticien de fixer les conditions de mise en œuvre de cette interdiction, sur proposition des directeurs des établissements membres du GHT et après avis de la commission médicale de groupement et du comité stratégique. Ces conditions doivent être déterminées par profession ou spécialité et, le cas échéant, par établissement, selon des modalités définies par voie réglementaire20.

 

En cas de non-respect de l’interdiction, une indemnité est due par les praticiens pour chaque mois durant lequel l’interdiction n’est pas respectée. Le montant de cette indemnité ne peut être supérieur à 30 % de la rémunération mensuelle moyenne perçue durant les six derniers mois d’activité.

 

Le non-respect de l’interdiction doit être « dûment constaté » et la sanction doit être motivée et notifiée par le directeur de l’établissement au praticien dans le respect du principe du contradictoire.

 

* Le paragraphe II du même article L. 6152-5-1 du CSP (dispositions objet de la QPC n° 2022-1027) est relatif à l’interdiction d’exercer dans le secteur privé lucratif susceptible d’être prononcée à l’encontre des praticiens d’un établissement public de santé exerçant à temps non complet et autorisés à exercer une activité libérale à l’extérieur de l’établissement.

 

Sont uniquement concernés par ce dispositif les praticiens mentionnés au 1° de l’article L. 6152-1 du CSP, i.e. les médecins, odontologistes et pharmaciens titulaires dont la quotité de travail est au plus de 90 %.

 

Dans le prolongement des obligations déontologiques pesant sur ces praticiens durant l’exercice de leurs fonctions21, il leur interdit, de manière générale, d’« user de leurs fonctions hospitalières pour entrer en concurrence directe avec l’établissement public de santé dans lequel ils exercent à titre principal dans le cadre d’une activité rémunérée dans un établissement de santé privé à but lucratif, un cabinet libéral, un laboratoire de biologie médical ou une officine de pharmacie ».

 

Le paragraphe II précise ensuite que la décision par laquelle le praticien est autorisé à exercer à temps partiel peut comprendre une interdiction d’exercer une activité rémunérée dans un rayon maximal de dix kilomètres autour de l’établissement public de santé dans lequel il exerce à titre principal. Cette décision relève ainsi de la compétence du directeur d’établissement, qui peut interdire l’exercice d’une activité libérale dans ce périmètre aussi longtemps que le praticien est autorisé à exercer à temps partiel.

 

Le constat du non-respect de cette interdiction conduit à mettre fin à l’autorisation d’exercer à temps partiel après une procédure contradictoire.

 

Enfin, les modalités d’application du double dispositif d’interdiction prévu par cet article sont renvoyées à un décret en Conseil d’État.

 

Ces modalités d’application ont été précisées par le décret n° 2022-132 du 5 février 2022 concernant les praticiens démissionnaires et par le décret n° 2022-134 du 5 février 2022 concernant les praticiens exerçant à temps partiel visés par le paragraphe II de l’article L. 6152–5-1 du CSP22.

 

B. – Origine de la QPC et question posée

 

Par deux recours distincts, le Conseil national de l’ordre des médecins avait demandé au Conseil d’État l’annulation du décret n° 2022-134 du 5 février 2022 relatif au statut de praticien hospitalier et du décret n° 2022-132 du même jour portant diverses dispositions relatives aux personnels médicaux, odontologistes et pharmaceutiques des établissements publics de santé.

 

À l’occasion de ces recours, il avait soulevé deux QPC dirigées respectivement contre les dispositions du paragraphe I (QPC n° 2022-1028) et du paragraphe II de l’article L. 6152-5-1 du CSP (QPC n° 2022-1027).

 

Dans ses décisions du 28 septembre 2022 précitées, le Conseil d’État avait jugé que « les moyens tirés de ce qu’elles [les dispositions respectives des paragraphes I et II de l’article L. 6152-5-2 du CSP] portent atteinte à la liberté d’entreprendre et sont entachées d’incompétence négative affectant par elle-même la liberté d’entreprendre soulèvent une question présentant un caractère sérieux ».

 

Il avait donc renvoyé les QPC au Conseil constitutionnel.

 

II. – L’examen de la constitutionnalité des dispositions contestées

 

* Le Conseil constitutionnel a décidé de joindre les deux QPC renvoyées pour y répondre par une seule décision (paragr. 1).

 

* Le Conseil national de l’ordre des médecins reprochait tout d’abord aux dispositions renvoyées de prévoir que l’exercice d’une activité rémunérée dans le secteur privé peut être interdit à certains praticiens des établissements publics de santé. Selon lui, une telle interdiction, qui ne tenait pas compte des besoins de la population en matière de santé, était excessive au regard de son périmètre, de sa durée d’application et de la sévérité des sanctions encourues en cas d’inobservation. Elle portait ainsi une atteinte disproportionnée à la liberté d’entreprendre.

 

Le requérant faisait ensuite grief à ces dispositions de ne pas déterminer les cas et les conditions dans lesquels cette interdiction pouvait être mise en œuvre. Selon lui, elles étaient dès lors entachées d’incompétence négative dans des conditions affectant, d’une part, la liberté d’entreprendre et, d’autre part, le principe de légalité des délits et des peines.

 

A. – La jurisprudence constitutionnelle relative à la liberté d’entreprendre

 

* La protection constitutionnelle de la liberté d’entreprendre se fonde sur l’article 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789. Le grief tiré de l’incompétence négative affectant cette liberté peut être invoqué en QPC23.

 

La jurisprudence du Conseil constitutionnel protège cette liberté dans ses deux composantes traditionnelles : la liberté d’accéder à une profession ou une activité économique24 et la liberté dans l’exercice de cette profession et de cette activité25.

 

Toutefois, la liberté d’entreprendre n’est ni générale ni absolue. Le Conseil considère en effet qu’« Il est loisible au législateur d’apporter à la liberté d’entreprendre, qui découle de l’article 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, des limitations liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par l’intérêt général, à la condition qu’il n’en résulte pas d’atteintes disproportionnées au regard de l’objectif poursuivi »26.

 

La liberté d’entreprendre peut ainsi être limitée au nom d’un objectif de valeur constitutionnelle, tel que le droit de disposer d’un logement décent27, pour des raisons d’ordre public28, de sauvegarde des intérêts fondamentaux de la Nation29, de protection de la santé30, au nom des droits sociaux résultant du Préambule de 194631 ou pour certains motifs d’intérêt général, comme, par exemple, la protection de l’environnement32 ou la protection des consommateurs33.

 

Face à un objectif de valeur constitutionnelle, le Conseil constitutionnel exerce en principe un contrôle restreint de l’absence de disproportion manifeste, alors qu’il procède à un contrôle entier face à un motif d’intérêt général.

 

Le Conseil a examiné à différentes reprises, sur le fondement de la liberté d’entreprendre, des restrictions à la liberté d’exercice d’acteurs du secteur de la santé34.

 

- Par exemple, dans la décision n° 2013-364 QPC du 31 janvier 2014, le Conseil s’est prononcé sur des dispositions encadrant l’activité des officines de pharmacie et, plus particulièrement, sur des dispositions renvoyant au pouvoir réglementaire le soin de déterminer les conditions dans lesquelles ces officines peuvent bénéficier de publicité.

 

Dans cette décision, après avoir notamment rappelé les règles encadrant l’implantation des officines de pharmacie, le Conseil a souligné que « le législateur a entendu encadrer strictement la profession et l’activité de pharmacien ainsi que leur établissement pour favoriser une répartition équilibrée des officines sur l’ensemble du territoire et garantir ainsi l’accès de l’ensemble de la population aux services qu’elles offrent » et « qu’il a ainsi poursuivi un objectif de santé publique ». Pour écarter le grief tiré de l’incompétence négative du législateur dans des conditions affectant la liberté d’entreprendre, le Conseil a ensuite constaté que « les dispositions contestées renvoient à un décret le soin de fixer les conditions dans lesquelles la publicité en faveur des officines de pharmacie peut être faite, afin de permettre l’application de ces règles ; qu’elles ne privent pas de garanties légales les exigences qui résultent de la liberté d’entreprendre » et « qu’elles n’affectent par elles-mêmes aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit »35.

 

- Par la suite, dans sa décision n° 2014-434 QPC du 5 décembre 2014, le Conseil a validé des dispositions interdisant les remises tarifaires en matière d’examens de biologie médicale, mais écartant du champ de cette interdiction les laboratoires intégrés à des établissements de santé ou ayant conclu avec d’autres laboratoires des contrats de coopération.

 

Dans cette décision, le Conseil a relevé que « le législateur a entendu favoriser le développement des laboratoires de biologie médicale intégrés aux établissements de santé afin de maintenir des compétences en biologie médicale dans ces établissements et sur l’ensemble du territoire » et « qu’il a également entendu encourager les contrats de coopération entre les laboratoires de biologie médicale pour que ceux-ci, lorsqu’ils sont situés dans un même territoire médical infrarégional, mutualisent certains de leurs moyens ». Après avoir précisé « que la sécurité sociale prend en charge une large part des dépenses dans le secteur de la biologie médicale », le Conseil a considéré que les dispositions examinées « poursuivent un but d’intérêt général » et « qu’il n’appartient pas au Conseil constitutionnel, qui ne dispose pas d’un pouvoir d’appréciation de même nature que celui du Parlement, de substituer son appréciation à celle du législateur sur le choix de poursuivre de tels objectifs plutôt que de favoriser la concurrence par les prix dans ce secteur ». Il a ensuite jugé que les règles de tarification en cause, prévues à l’article L. 6211-21 du CSP, « n’entraînent pas une atteinte à la liberté d’entreprendre disproportionnée au regard des objectifs poursuivis »36.

 

- Dans sa décision n° 2015-727 DC du 21 janvier 2016, le Conseil s’est notamment prononcé sur l’obligation pour les établissements de santé assurant le service public hospitalier et les professionnels de santé qui exercent en leur sein de garantir à toute personne qui recourt à leurs services l’absence de facturation de dépassements d’honoraires.

 

Les requérants soutenaient que ces dispositions portaient notamment atteinte à la liberté d’entreprendre dès lors, d’une part, qu’elles interdisaient aux établissements privés de santé qui recrutent des médecins pratiquant des dépassements d’honoraires de participer au service public hospitalier et, d’autre part, qu’elles faisaient dépendre le rattachement de ces établissements au service public hospitalier d’une décision relevant des seuls médecins qu’ils emploient.

 

Pour écarter ce grief, le Conseil a souligné que « la création du service public hospitalier a pour objet de garantir aux usagers du système de santé une offre de soins hospitaliers accessible qui assure la qualité et la continuité des soins ainsi que l’égalité de traitement » et constaté que les dispositions examinées « ont pour objet de garantir que les établissements de santé assurant le service public hospitalier et les professionnels exerçant en leur sein ne facturent pas aux usagers des dépassements des tarifs fixés par l’autorité administrative et des tarifs des honoraires prévus par le code de la sécurité sociale »37.

 

Il a ensuite jugé que l’obligation de ne pas facturer des dépassements d’honoraires dans le cadre du service public hospitalier ne porte pas atteinte à la liberté d’entreprendre dès lors, d’une part, que « l’exercice d’une activité de soins n’est pas subordonné à la participation au service public hospitalier »38 et, d’autre part, que « les dispositions contestées n’ont pas pour effet d’empêcher les établissements de santé privés d’être habilités à assurer ce service dès lors qu’il leur est loisible de recruter des médecins ne pratiquant pas au sein de leurs établissements des dépassements des tarifs et des honoraires »39.

 

- Dans la décision n° 2016-593 QPC du 21 octobre 2016, le Conseil s’est prononcé sur des règles prévoyant que les sites d’un laboratoire de biologie médicale doivent être implantés au maximum sur trois territoires de santé limitrophes et que les sites dont l’implantation est devenue irrégulière ne peuvent être maintenus.

 

Le Conseil a admis qu’un tel dispositif pouvait être regardé comme poursuivant un objectif d’intérêt général dans la mesure où « le législateur a entendu garantir une proximité géographique entre les différents sites d’un même laboratoire » et « estimé que cette proximité favorisait la qualité des soins en permettant au "biologiste responsable" de conserver la responsabilité effective de l’ensemble des phases de l’examen de biologie médicale sur ces différents sites »40.

 

Il a ensuite jugé que le dispositif examiné ne portait pas une atteinte disproportionnée à la liberté d’entreprendre au regard d’un tel objectif en prenant notamment en compte le fait qu’« en autorisant l’implantation des différents sites d’un laboratoire, sans en limiter le nombre, sur trois territoires de santé limitrophes, le législateur a permis de retenir un bassin de population suffisant pour l’exercice de l’activité de biologie médicale » et « que les dispositions contestées n’excluent pas que, conformément aux règles de droit commun, l’exploitant d’un laboratoire de biologie médicale, qui subirait un préjudice anormal et spécial en raison de la modification des délimitations d’un territoire de santé ou de la révision d’un schéma régional d’organisation des soins, puisse en demander réparation sur le fondement du principe constitutionnel d’égalité devant les charges publiques »41.

 

- Enfin, dans la décision n° 2019-792 QPC du 21 juin 2019, le Conseil s’est prononcé sur les dispositions permettant au pouvoir réglementaire de déroger à l’interdiction de facturation de dépassements d’honoraires à laquelle sont soumis les établissements de santé assurant le service public hospitalier en faveur des praticiens statutaires exerçant dans ces établissements et autorisés à exercer, dans leur établissement, une activité libérale.

 

Dans cette décision, le Conseil a d’abord écarté le grief tiré de la méconnaissance du principe d’égalité devant la loi. Dans ce cadre, il a notamment jugé que la différence de traitement entre les établissements publics de santé et les établissements de santé privés, qui ne peuvent pas bénéficier des mêmes dérogations, repose sur une différence de situation42. Il a ensuite rappelé les conditions dans lesquelles des praticiens peuvent être autorisés à exercer une activité libérale au sein de l’établissement public et considéré que « L’exercice, dans de telles conditions, d’une activité libérale vise à offrir, uniquement à titre accessoire, un complément de rémunération et de retraite aux praticiens statutaires à temps plein des établissements publics de santé » et « permet ainsi d’améliorer l’attractivité des carrières hospitalières publiques et la qualité des établissements publics de santé »43. Il en a conclu que « Dans la mesure où la possibilité de pratiquer des dépassements d’honoraires contribue à cette attractivité, la différence de traitement contestée est en rapport direct avec l’objet de la loi »44.

 

Le grief tiré de la méconnaissance de la liberté d’entreprendre a en revanche été rapidement écarté, dès lors que les dispositions contestées permettaient des dérogations à l’interdiction de facturation de dépassements d’honoraires et n’apportaient donc pas, par elles-mêmes, de restrictions à la liberté d’entreprendre.

 

* Enfin, il peut être relevé qu’en dehors du domaine de la santé, dans sa décision n° 2013-676 DC du 9 octobre 2013, le Conseil constitutionnel a validé la possibilité pour la Haute autorité pour la transparence de la vie publique d’interdire à des personnes ayant exercé des fonctions gouvernementales ou des fonctions exécutives locales d’exercer une activité professionnelle jugée incompatible avec les fonctions qu’elles ont antérieurement exercées pendant une durée de trois ans en précisant que le législateur a « entendu rendre applicables aux membres du Gouvernement et à certains élus des exigences comparables à celles qui sont applicables à tous les fonctionnaires ou agents d'une administration publique en application de l'article 87 de la loi du 29 janvier 1993 »45. Compte tenu de l’objectif de prévention des conflits d’intérêts poursuivi, le Conseil a jugé que l’atteinte portée à la liberté d’entreprendre n’était pas disproportionnée46.

 

B. – L’application à l’espèce

 

* Dans la décision commentée, le Conseil constitutionnel s’est principalement placé sur le terrain de la liberté d’entreprendre pour examiner les dispositions contestées, après avoir énoncé la norme de référence de son contrôle fondé sur l’article 4 de la Déclaration de 1789 (paragr. 5).

 

Il a d’abord précisé l’objet de l’article L. 6152-5-1 du CSP, qui prévoit qu’il peut être interdit à certains praticiens d’un établissement public de santé d’exercer, dans un périmètre déterminé, une activité rémunérée dans un établissement de santé privé à but lucratif, un cabinet libéral, un laboratoire de biologie médicale privé ou une officine de pharmacie (paragr. 6).

 

Le Conseil a ensuite rappelé qu’une telle interdiction se décline différemment selon qu’elle s’applique à des praticiens cessant leurs fonctions au sein de l’hôpital public ou exerçant leurs fonctions à temps partiel au sein d’un établissement public de santé.

 

En application du paragraphe I de l’article L. 6152-5-1, peuvent ainsi être soumis à l’interdiction d’exercer une activité privée lucrative les membres du personnel enseignant et hospitalier des centres hospitaliers universitaires ainsi qu’aux médecins, odontologistes et pharmaciens titulaires ou contractuels dont la quotité de travail était au minimum de 50 % lorsqu’ils quittent l’établissement public au sein duquel ils exerçaient à titre principal. En cas d’inobservation de cette interdiction, une indemnité, dont le montant ne peut être supérieur à 30 % de la rémunération mensuelle moyenne perçue durant les six derniers mois d’activité, est due pour chaque mois durant lequel l’interdiction n’est pas respectée (paragr. 7).

 

Sur le fondement du paragraphe II de ce même article, les médecins, odontologistes et pharmaciens titulaires exerçant à temps partiel au sein de l’établissement public de santé peuvent de la même façon se voir interdire l’exercice d’une activité privée lucrative dans un périmètre déterminé. En cas d’inobservation de cette interdiction, il est mis fin à l’autorisation d’exercer à temps partiel (paragr. 8).

 

Les dispositions contestées, qui permettent de limiter le choix du lieu d’installation de professionnels de santé, portent bien atteinte au libre exercice d’une activité, et donc à la liberté d’entreprendre. Le Conseil constitutionnel devait par conséquent s’assurer que ces limitations étaient liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par l’intérêt général et qu’il n’en résultait pas d’atteintes disproportionnées au regard de l’objectif poursuivi.

 

* Dans le cadre de ce contrôle, le Conseil a constaté, en premier lieu, que « les dispositions contestées ont pour objet de réguler l’installation de praticiens à proximité des établissements publics de santé afin de préserver l’activité de ces établissements qui, en application de l’article L. 6112-3 du code de la santé publique, assurent le service public hospitalier ». Le législateur ayant ainsi entendu « garantir le bon fonctionnement de ce service public qui participe de l’objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé » (paragr. 9). L’objectif poursuivi par les dispositions contestées était donc de rang constitutionnel, et il appelait un contrôle restreint.

 

Le Conseil a considéré, en second lieu, que les conditions dans lesquelles une interdiction d’exercer peut être prononcée à l’encontre d’un praticien n’étaient pas manifestement disproportionnées au regard de cet objectif.

 

S’agissant, d’une part, des critères sur la base desquels est décidée l’interdiction, le Conseil a relevé qu’elle « ne peut être décidée, sous le contrôle du juge, que dans les cas où les praticiens concernés sont susceptibles d’entrer en concurrence directe avec l’établissement public de santé, en raison de leur profession ou de leur spécialité et, le cas échéant, de la situation de cet établissement » et il a jugé que « ces conditions ne sont ni imprécises, ni équivoques » (paragr. 10).

 

S’agissant, d’autre part, du champ de l’interdiction, le Conseil a souligné qu’elle « ne peut s’appliquer que dans un rayon maximal de dix kilomètres autour de l’établissement public de santé et, lorsqu’elle concerne un praticien qui cesse d’exercer ses fonctions, pour une durée qui ne peut excéder vingt-quatre mois » (paragr. 11).

 

Le Conseil en a conclu que le grief tiré de la méconnaissance de la liberté d’entreprendre devait être écarté (paragr. 12).

 

* Le Conseil a également écarté le grief tiré de la méconnaissance du principe de légalité des délits et des peines, après avoir relevé que ce grief était au demeurant inopérant s’agissant des dispositions du troisième alinéa du paragraphe II de l’article L. 6152-5-1 du CSP (paragr. 13). La décision du directeur d’un établissement public de santé de mettre fin à l’autorisation d’exercer à temps partiel de son agent en cas de méconnaissance de l’interdiction, qui ne fait que retirer une autorisation à un praticien qui n’en remplit plus les conditions, est en effet dépourvue de finalité répressive et ne peut donc être regardée comme une sanction ayant le caractère d'une punition.

 

Si, à l’inverse, ce grief était opérant s’agissant du paragraphe I de l’article L. 6152–5–1 du CSP, qui institue une sanction financière en cas de méconnaissance par un praticien de l’interdiction d’exercer dans le secteur privé lucratif à proximité de l’établissement public de santé après son départ de cet établissement, il ne pouvait être reproché à ces dispositions d’être insuffisamment précises quant à la définition de l’interdiction et de sa sanction.

 

Après avoir jugé que les dispositions contestées n’étaient pas entachées d’incompétence négative et ne méconnaissaient aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, le Conseil les a donc déclarées conformes à la Constitution (paragr. 14).

 

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1 Ordonnance n° 58-1373 du 30 décembre 1958 relative à la création de centres hospitaliers et universitaires, à la réforme de l’enseignement médical et au développement de la recherche médicale. Son article 5 prévoyait alors que « les membres du personnel médical et scientifique des centres créés […] consacrent à leurs fonctions hospitalières, à l’enseignement et à la recherche la totalité de leur activité professionnelle, sous réserve des dérogations qui pourront être prévues par leur statut ».

2 Dominique Laurent, L’activité libérale dans les établissements publics de santé, Rapport remis le 31 mars 2013 à Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé, p. 8.

3 Exposé sommaire de l’amendement n° 2192 de M. Gérard Sebaoun au projet de loi de modernisation de notre système de santé, adopté par l’Assemblée nationale le 10 avril 2015 (introduisant un article 34 bis A, devenu 138 dans la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé, dite « Touraine »).

4 Ordonnance n° 2000-548 du 15 juin 2000 relative à la partie législative du code de la santé publique.

5 Article L. 6154-1 du CSP. Avant sa modification par l’ordonnance du 17 mars 2021 précitée, cet article réservait l’exercice d’une activité libérale intra-hospitalière aux praticiens hospitaliers statutaires exerçant à temps plein dans les établissements publics de santé. Ni les praticiens statutaires à temps partiel ni les médecins contractuels ne pouvaient donc en bénéficier. Cette restriction était justifiée par le fait que « le praticien doit exercer son activité principale intégralement à l’hôpital, l’exercice libéral n’en étant qu’un complément accessoire et il s’agit d’une faculté réservée aux titulaires et vécue comme un "droit statutaire" » (Rapport précité de Dominique Laurent, p. 23).

6 Paragraphe II de l’article L. 6154-2 du CSP.

7 Article L. 6154-4 du CSP. En contrepartie du service rendu par l’établissement au praticien autorisé à percevoir une rémunération à l’acte tout en bénéficiant des installations et du personnel de cet établissement, l’activité libérale donne lieu au versement d’une redevance (article L. 6154-3).

8 Le 1° du paragraphe I de l’article L. 6152-4 du CSP renvoie sur ce point à l’article 25 septies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, dite « Le Pors », portant droits et obligations des fonctionnaires (les dispositions de cet article ont été codifiées à droit constant aux articles L. 121-3 et L. 123-1 à L. 123-10 du code général de la fonction publique par l’ordonnance n° 2021-1574 du 24 novembre 2021).

9 Voir le renvoi aux personnels mentionnés aux 1° à 4° de l’article L. 6152-1 du CSP opéré par le paragraphe I de l’article L. 6152-4 du même code.

10 Quatrième alinéa du paragraphe I de l’article L. 6152-4 du CSP. L’exercice d’une activité privée à l’extérieur suppose donc que le praticien à temps complet soit au préalable autorisé à modifier sa quotité de temps de travail (article R. 6152-26-1 du même code).

11 Article R. 6152-26-3 du CSP.

12 Article R. 6152-26-4 du CSP.

13 Sénat, première lecture, amendement n° 215 rectifié du 19 mai 2009 présenté par M. Vanlerenberghe, Mmes Dini et Payet, M. J. Boyer et les membres du groupe Union centriste.

14 Rapport n° 1739 (Assemblée nationale – XIIIe législature) et 463 (Sénat – 2008-2009) de MM. Jean-Marie Rolland, député, et Alain Milon, sénateur, fait au nom de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant réforme de l’hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires, enregistré le 17 juin 2009.

15 Ibid.

16 Dans son rapport relatif à l’examen de la loi relative à l’organisation et à la transformation du système de santé, M. Alain Milon indique à ce propos que « Le décret d’application de cette interdiction n’a cependant jamais été pris - en raison semble-t-il de sa rédaction trop large, qui pourrait poser la question d’éventuels problèmes de constitutionnalité » (Rapport n° 524 [Sénat – 2018-2019] de M. Alain Milon, fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 22 mai 2019).

17 Voir le paragraphe IV de l’article L. 6154-2 du CSP, qui prévoit que le contrat d’activité libérale comporte une « clause engageant le praticien, en cas de départ temporaire ou définitif, excepté lorsqu’il cesse ses fonctions pour faire valoir ses droits à la retraite, à ne pas s’installer, pendant une période au minimum égale à six mois et au maximum égale à vingt-quatre mois, et dans un rayon au minimum égal à trois kilomètres et au maximum égal à dix kilomètres, à proximité du ou des établissements publics de santé dans lesquels il exerçait une activité libérale ». En cas de non-respect de cette clause, une indemnité compensatrice est due par le praticien dont le montant ne peut être supérieur à 30 % du montant mensuel moyen des honoraires perçus au titre de l’activité libérale durant les six derniers mois, multiplié par le nombre de mois durant lesquels la clause n’a pas été respectée. Ces dispositions ne sont toutefois pas applicables aux praticiens exerçant à l’Assistance publique-hôpitaux de Paris (APHP), aux hospices civils de Lyon et à l’Assistance publique-hôpitaux de Marseille « en raison des configurations particulières de l’offre de soins dans ces agglomérations urbaines ».

18 Sénat, amendement n° 798 du 29 mai 2019.

19 Sénat, séance du 5 juin 2019 (compte rendu intégral des débats).

20 Le deuxième alinéa du paragraphe I de l’article L. 6152-5-1 du CSP a été modifié en dernier lieu par l’ordonnance du 17 mars 2021 précitée.

21 Voir notamment les articles R. 4127-57 du CSP (sur l’interdiction de détournement de clientèle), R. 4127-86 (sur l’interdiction pour un remplaçant de s’installer, pendant une période de deux ans, dans un cabinet où il pourrait entrer en concurrence directe avec le médecin remplacé) et R. 4127-98 du même code (sur l’interdiction d’user de ses fonctions pour accroître sa clientèle).

22 Voir en particulier les dispositions codifiées aux articles R. 6152-26-3 à R. 6152-26-6 du CSP.

23 Pour une illustration, voir la décision n° 2019-774 QPC du 12 avril 2019, Société Magenta Discount et autre (Contrôle des prix et des marges en Nouvelle-Calédonie), paragr. 14.

24  Voir, par exemple, la décision n° 2011-139 QPC du 24 juin 2011, Association pour le droit à l’initiative économique (Conditions d’exercice de certaines activités artisanales).

25  Voir, par exemple, la décision n° 2020-861 QPC du 15 octobre 2020, Fédération nationale de l’immobilier et autre (Plafonnement des frais d’intermédiation commerciale pour la vente de logements éligibles à la réduction d’impôt sur le revenu en faveur de l’investissement locatif intermédiaire).

26 Décision n° 2000–439 DC du 16 janvier 2001, Loi relative à l’archéologie préventive, cons. 14 ; décision n° 2018–702 QPC du 20 avril 2018, Société Fnac Darty (Pouvoirs du président de l’autorité de la concurrence en matière d’opérations de concentration), paragr. 8 ; décision n° 2018-771 DC du 25 octobre 2018, Loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, paragr. 13.

27 Décision n° 2015-470 QPC du 29 mai 2015, Société SAUR SAS (Interdiction d’interrompre la distribution d’eau dans les résidences principales), cons. 4 à 10.

28 Décision n° 2011-132 QPC du 20 mai 2011, M. Ion C. (Incapacité et interdiction d’exploiter un débit de boissons), cons. 7.

29 Décision n° 2020-882 QPC du 5 février 2021, Société Bouygues télécom et autre (Autorisation administrative préalable à l’exploitation des équipements de réseaux 5G), paragr. 21.

30 Décision n° 2011-139 QPC du 24 juin 2011 précitée, cons. 3 à 8 ; décision n° 2015-480 QPC du 17 septembre 2015, Association Plastics Europe (Suspension de la fabrication, de l’importation, de l’exportation et de la mise sur le marché de tout conditionnement à vocation alimentaire contenant du bisphenol A), cons. 4 à 8 ; décision n° 2020–800 DC du 11 mai 2020, Loi prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions, paragr. 17.

31 Décision n° 2011-157 QPC du 5 août 2011, Société SOMODIA (Interdiction du travail le dimanche en Alsace-Moselle), cons. 6 à 8.

32 Décision n° 2013-346 QPC du 11 octobre 2013, Société Schuepbach Energy LLC (Interdiction de la fracturation hydraulique pour l’exploration et l’exploitation des hydrocarbures – Abrogation des permis de recherches), cons. 12 ; décision n° 2019-823 QPC du 31 janvier 2020, Union des industries de la protection des plantes (Interdiction de la production, du stockage et de la circulation de certains produits phytopharmaceutiques), paragr. 4.

33 Décisions n° 2015–715 DC du 5 août 2015, Loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, cons. 32, et n° 2019-774 QPC du 12 avril 2019 précitée, paragr. 17.

34 Pour un exemple ancien de contrôle en la matière, voir la décision n° 90-287 DC du 16 janvier 1991, Loi portant dispositions relatives à la santé publique et aux assurances sociales, cons. 21, dans laquelle le Conseil a déclaré conformes à la Constitution des dispositions relatives à l’homologation des tarifs conventionnels, jugeant « que la liberté d'entreprendre n’est ni générale ni absolue ; qu’il est loisible au législateur d’y apporter des limitations exigées par l’intérêt général à la condition que celles-ci n’aient pas pour conséquence d’en dénaturer la portée ; que les dispositions relatives aux critères d’homologation des tarifs conventionnels ont pour but de maîtriser l’évolution des dépenses de santé supportées par la collectivité ; que les restrictions qui en résultent pour les établissements privés d'’hospitalisation ne portent pas à la liberté d’entreprendre une atteinte contraire à la Constitution ».

35 Décision n° 2013-364 QPC du 31 janvier 2014, Coopérative GIPHAR-SOGIPHAR et autre (Publicité en faveur des officines de pharmacie), cons.8.

36 Décision n° 2014-434 QPC du 5 décembre 2014, Société de laboratoires de biologie médicale Bio Dômes Unilabs SELAS (Tarif des examens de biologie médicale), cons. 6.

37 Décision n° 2015-727 DC du 21 janvier 2016, Loi de modernisation de notre système de santé, cons. 55.

38 Ibid., cons. 55.

39 Ibid., cons. 56.

40 Décision n° 2016-593 QPC du 21 octobre 2016, Société Eylau Unilabs et autre (Règles d’implantation des sites d’un laboratoire de biologie médicale), paragr. 9.

41 Ibid., paragr. 10, 11 et 13.

42 Décision n° 2019-792 QPC du 21 juin 2019, Clinique Saint Cœur et autres (Dépassement d’honoraires dans le cadre de l’activité libérale des praticiens des établissements publics de santé), paragr. 9.

43 Ibid., paragr. 10.

44 Ibid., paragr. 11.

45 Ces dispositions soumettent à une appréciation de la compatibilité de toute activité lucrative, salariée ou non, dans une entreprise ou un organisme privé ou toute activité libérale, avec les fonctions effectivement exercées au cours des trois années précédant le début de cette activité par tout agent public cessant ses fonctions.

46 Décision n° 2013-676 DC du 9 octobre 2013, Loi relative à la transparence de la vie publique, cons. 55.