• Commentaire DC

Commentaire de la décision 2020-800 DC

13/06/2023

 

La loi prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions a été déférée au Conseil constitutionnel par le Président de la République, le président du Sénat ainsi que par deux saisines parlementaires, l'une émanant de plus de soixante députés et l'autre émanant de plus de soixante sénateurs.

 

Le Président de la République demandait au Conseil constitutionnel de se prononcer sur la conformité à la Constitution de certaines dispositions des articles 1er, 3, 5 et 11 de cette loi. Le président du Sénat demandait au Conseil constitutionnel de se prononcer sur la conformité à la Constitution de certaines dispositions de ses articles 1er, 3, 5 et 11 et sur la conformité à la Constitution de ses articles 8 et 13. Les députés et sénateurs requérants contestent certaines dispositions de ses articles 3, 5 et 11. Les sénateurs contestent également la procédure d'adoption de la loi et certaines dispositions de son article 1er et de son article 9.

 

Dans sa décision n° 2020-800 DC du 11 mai 2020, le Conseil constitutionnel a déclaré contraires à la Constitution certaines dispositions de l'article 11 ainsi que l'article 13 de cette loi. Il a déclaré conformes à la Constitution, sous des réserves, certaines dispositions des articles 5, 8 et 11. Il a enfin déclaré conformes à la Constitution certaines dispositions des articles 1er, 3 et 9.

 

Le présent commentaire porte sur les dispositions relatives aux mesures de quarantaine et d'isolement sanitaires prévues aux articles 3, 5 et 8 (I), la création d'un système d'information destiné à lutter contre la propagation de l'épidémie de covid-19 prévue à l'article 11 (II) et les modalités d'information des assemblées parlementaires sur les mesures prises en application de l'article 11 prévues au paragraphe IX de l'article 11 (III).

 

 

 

 

 

 

 

I. – Le régime des mesures de quarantaine et d'isolement sanitaires (articles 3, 5 et 8)

 

A. – Les dispositions contestées et les griefs des requérants

 

* La loi déférée a entendu « prévoir des garanties supplémentaires » pour la mise en œuvre des mesures de quarantaine et d'isolement susceptibles d'être prises pendant l'état d'urgence sanitaire à l'égard, respectivement, des personnes susceptibles d'être affectées par le covid-19 et des personnes affectées par l'épidémie. Le cadre applicable à ces mesures préventives était jusqu'alors principalement contenu aux 3° et 4° de l'article L. 3131-15 du code de la santé publique (CSP), qui en autorisaient la mise en œuvre sans autre précision qu'un renvoi vers le règlement sanitaire international de 2005 pour leur définition1. Depuis la déclaration de l'état d'urgence sanitaire prise en application de l'article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 pour une durée de deux mois sur l'ensemble du territoire national, ces mesures n'avaient cependant fait l'objet que d'une application limitée et ciblée (dans certains territoires ultramarins notamment) en comparaison d'autres mesures susceptibles d'être ordonnées par le Premier ministre en application de l'article L. 3131-15.

 

La réforme du régime de ces mesures dans le cadre de la prorogation de l'état d'urgence sanitaire visait, selon l'étude d'impact du projet de loi, à permettre de « continuer à répondre aux besoins dans le contexte de la poursuite de la crise avec toutes les garanties nécessaires dans les prochaines semaines ».

 

À cet effet, le 5° de l'article 3 et l'article 5 de la loi déférée modifient les articles L. 3131-15 et L. 3131-17 du CSP afin de préciser le champ d'application et le régime des mesures de mise en quarantaine, de placement et de maintien en isolement susceptibles d'être ordonnées en cas d'état d'urgence sanitaire. L'article 8 de la loi déférée étend ce régime de contrôle aux mêmes mesures lorsqu'elles sont prises dans le cadre distinct de la lutte contre la propagation internationale des maladies (article L. 3115-10 du CSP) ou en cas de menace sanitaire grave (article L. 3131-1 du même code).

 

S'agissant du cadre général de la mise en quarantaine et du placement à l'isolement, un nouveau paragraphe est introduit à l'article L. 3131-15 aux fins de préciser les conditions dans lesquelles ces mesures peuvent être ordonnées par le Premier ministre, et décidées à titre individuel par le représentant de l'État.

 

Ce paragraphe II circonscrit, d'une part, le périmètre géographique de ces mesures, qui « ne peuvent viser que les personnes qui, ayant séjourné au cours du mois précédent dans une zone de circulation de l'infection, entrent sur le territoire national, arrivent en Corse ou dans l'une des collectivités mentionnées à l'article 72–3 de la Constitution ».

 

D'autre part, il prévoit que la durée initiale de la mise en quarantaine et du placement en isolement « ne peut excéder quatorze jours ». Ces mesures peuvent toutefois être renouvelées, dans la limite d'une durée maximale d'un mois et il doit y être mis fin avant leur terme lorsque l'état de santé de l'intéressé le permet.

 

Enfin, il précise les obligations susceptibles de s'appliquer à la personne qui en fait l'objet, en particulier celle de « ne pas sortir de son domicile ou du lieu d'hébergement où elle exécute la mesure, sous réserve des déplacements qui lui sont spécifiquement autorisés par l'autorité administrative », et les garanties dont elle bénéficie en retour, à savoir, notamment, le choix du lieu d'exécution de la mesure à son domicile ou dans un lieu d'hébergement adapté et, dans l'hypothèse où un isolement complet lui est imposé, « un accès à des biens et services de première nécessité ainsi qu'à des moyens de communication téléphonique et électronique ».

 

S'agissant de la procédure applicable aux mesures individuelles de mise en quarantaine, de placement et de maintien en isolement, l'article 5 de la loi déférée insère à l'article L. 3131-17 du CSP un nouveau paragraphe prévoyant que la décision du préfet, prise sur proposition du directeur général de l'agence régionale de santé, doit être motivée et, dans le cas du placement en isolement, subordonnée à la constatation médicale de l'infection de la personne. Un avis médical est également requis pour la prolongation des mesures de mise en quarantaine et d'isolement, qui ne peuvent se poursuivre au-delà d'un délai de quatorze jours sans autorisation du juge des libertés et de la détention (JLD), préalablement saisi par le préfet.

 

Le paragraphe II nouveau de l'article L. 3131-17 du CSP prévoit par ailleurs que ces mesures peuvent à tout moment faire l'objet d'un recours par la personne qui en fait l'objet devant le JLD dans le ressort duquel se situe le lieu de sa quarantaine ou de son isolement, en vue de la mainlevée de la mesure. Le JLD peut également être saisi par le procureur de la République territorialement compétent ou se saisir d'office à tout moment. Il statue dans un délai de soixante–douze heures par une ordonnance motivée immédiatement exécutoire.

 

* Comme lors des deux précédentes saisines du Conseil constitutionnel par le Président de la République2, le chef de l'État ne contestait pas la constitutionnalité de la loi, mais demandait seulement au Conseil d'examiner la conformité à la Constitution des dispositions de l'article 3 et de l'article 5 applicables aux mesures de mise en quarantaine, de placement et de maintien en isolement. Le président du Sénat ne formulait pas non plus de critique à l'encontre de ces dispositions, mais demandait au Conseil constitutionnel de se prononcer sur leur conformité à la liberté d'aller et de venir, au droit de mener une vie familiale normale, au droit à un recours juridictionnel effectif ainsi qu'à l'article 66 de la Constitution.

 

Les députés requérants soutenaient, pour leur part, que les mesures de mise en quarantaine, de placement et de maintien à l'isolement méconnaissaient la liberté d'aller et de venir et la liberté individuelle. Ils faisaient valoir, en particulier, que la mesure de quarantaine ne bénéficie pas des mêmes garanties que celle d'isolement, en ce qu'elle n'est pas subordonnée à la production d'un certificat médical confirmant sa nécessité. Ils dénonçaient également l'insuffisante effectivité du droit au recours devant le JLD, faute qu'ait été prévue sa saisine automatique dans les quarante-huit heures suivant le prononcé d'une mesure de mise en quarantaine ou de placement en isolement. Ils dénonçaient, en outre, l'imprécision des termes « lieux d'hébergement adapté ».

 

Les sénateurs requérants les rejoignaient dans leur critique au regard de l'article 66 de la Constitution et dénonçaient l'absence d'information systématique du JLD, lorsque des mesures de mise en quarantaine et de placement en isolement sont ordonnées, ainsi que la tardiveté de l'intervention de ce juge.

 

Dans sa réponse à ces griefs, le Conseil constitutionnel s'est principalement attaché à la question de la méconnaissance de la liberté individuelle, protégée par l'article 66 de la Constitution.

 

B. – Analyse de constitutionnalité

 

1. – La jurisprudence constitutionnelle relative à la liberté individuelle

 

* Aux termes de l'article 66 de la Constitution, « Nul ne peut être arbitrairement détenu. / L'autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle, assure le respect de ce principe dans les conditions prévues par la loi ». Cet article est au nombre des droits et libertés que la Constitution garantit et peut donc être invoqué à l'appui d'une QPC3.

 

Depuis sa décision n° 92-307 DC du 25 février 1992, le Conseil constitutionnel juge avec constance « que, dans l'exercice de sa compétence, le législateur peut fixer des modalités d'intervention de l'autorité judiciaire différentes selon la nature et la portée des mesures affectant la liberté individuelle qu'il entend édicter »4. Après avoir retenu une conception large de la notion de « liberté individuelle », incluant notamment la liberté d'aller et de venir et le respect de la vie privée, le Conseil en a resserré le champ aux mesures privatives de liberté dans sa décision n° 99-411 DC du 16 juin 19995. Seules de telles mesures sont en conséquence soumises aux exigences découlant de l'article 66 de la Constitution.

 

À cet égard, depuis sa décision n° 2008-562 DC du 21 février 2008 rendue au sujet de la loi relative à la rétention de sûreté et à la déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental6, le Conseil juge que les dispositions portant atteinte à la liberté individuelle doivent satisfaire à une triple exigence d'adéquation, de nécessité et de proportionnalité au sens strict : « La liberté individuelle, dont la protection est confiée à l'autorité judiciaire, ne saurait être entravée par une rigueur non nécessaire. Les atteintes portées à l'exercice de cette liberté doivent être adaptées, nécessaires et proportionnées aux objectifs poursuivis »7.

 

Ce contrôle des mesures portant atteinte à la liberté individuelle a notamment été appliqué à la rétention de sûreté (dans la décision précitée) et à des mesures d'assignation à résidence s'accompagnant d'une astreinte à domicile de plus de douze heures8.

 

* Lorsqu'il contrôle des mesures privatives de liberté, le Conseil constitutionnel distingue la décision de privation de liberté de l'exécution dans le temps de cette décision. Ainsi, le Conseil juge de manière constante que, si la décision sur la privation de liberté peut être prononcée par une autorité administrative, c'est à la condition qu'un juge judiciaire puisse contrôler ensuite cette privation de liberté dans un délai qui varie selon la nature de la mesure9.

 

Concernant le délai dans lequel le juge judiciaire doit intervenir pour contrôler la privation de liberté, le Conseil constitutionnel affirme, de manière constante, que « la liberté individuelle ne peut être tenue pour sauvegardée que si le juge intervient dans le plus court délai possible »10. Ce délai varie, cependant, selon la nature de la procédure à l'origine de la mesure en cause et de la justification de la privation de liberté.

 

Ainsi, le Conseil l'a fixé à quinze jours pour une hospitalisation d'office11 et sept jours en matière de rétention administrative12. Il a par ailleurs jugé conforme à l'exigence fixée par l'article 66 le délai de quarante-huit heures prévu, en garde à vue, pour l'intervention d'un magistrat du siège13.

 

Inversement, le Conseil constitutionnel a pu admettre, dans sa décision n° 2012-253 QPC du 8 juin 2012, que le placement en chambre de sûreté, susceptible d'être ordonné par les agents de la police ou de la gendarmerie nationales en cas d'ivresse publique, puisse se dérouler en l'absence d'intervention de l'autorité judiciaire sans que soient méconnues les exigences de l'article 66 de la Constitution « eu égard à la brièveté de cette privation de liberté organisée à des fins de police administrative »14

 

Concernant le contrôle exercé par l'autorité judiciaire au cours des mesures privatives de liberté, le Conseil est attentif à ce que ce contrôle soit maintenu tout au long de la privation de liberté.

 

Le contentieux de la rétention administrative illustre cette vigilance, le Conseil ayant formulé une réserve d'interprétation à cet effet, plusieurs fois réitérée. Ainsi, dans sa décision du 20 novembre 2003, le Conseil était saisi de dispositions qui prévoyaient une intervention du juge judiciaire quarante-huit heures après la décision administrative de placement en rétention d'un étranger et permettaient au juge judiciaire de prolonger cette rétention pour une durée de trente jours. Pour répondre à un grief des saisissants faisant valoir que l'intervention du juge judiciaire au bout de quarante-huit heures ne permettait pas de respecter les exigences de l'article 66 au motif qu'une fois la prolongation de trente jours décidée, le juge n'était plus appelé à intervenir, le Conseil a jugé : « Considérant, en premier lieu, que la disposition contestée ne remet pas en cause le contrôle de l'autorité judiciaire sur le maintien en rétention, au-delà de quarante-huit heures, d'un étranger qui a fait l'objet d'une mesure d'éloignement du territoire français ; que le législateur a prévu qu'à cette occasion, le juge, après s'être assuré que l'étranger a été placé en situation de faire valoir ses droits, l'informe des possibilités et des délais de recours contre toutes les décisions le concernant ; / Considérant, en deuxième lieu, que l'allongement de la durée de la rétention est sans incidence sur le droit reconnu à l'étranger de contester la décision administrative qui le contraint à quitter le territoire français ; que ce droit est mis en œuvre par l'article 22 bis de l'ordonnance ; qu'en cas d'annulation de la mesure d'éloignement par le juge administratif, il est mis fin immédiatement au maintien en rétention de l'étranger, qui est alors muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que le préfet ait à nouveau statué sur son cas ; / Considérant, en troisième lieu, que l'étranger ne peut être maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ, l'administration devant exercer toute diligence à cet effet ; que l'autorité judiciaire conserve la possibilité d'interrompre à tout moment la prolongation du maintien en rétention, de sa propre initiative ou à la demande de l'étranger, lorsque les circonstances de droit ou de fait le justifient »15. Cette dernière exigence, relative à l'interruption de la prolongation, a alors été érigée en réserve d'interprétation.

 

Cette réserve a été réitérée pour répondre à la même crainte dans la décision du 9 juin 2011 dans laquelle, saisi de dispositions qui prévoyaient l'intervention du juge judiciaire quarante-huit heures après la décision administrative de placement en rétention et lui permettaient de porter la durée de la rétention à quarante-cinq jours, le Conseil a jugé que « les dispositions contestées ne modifient pas les dispositions précitées selon lesquelles l'étranger ne peut être maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ, l'administration devant exercer toute diligence à cet effet ; que, comme il a été jugé au considérant 66 de la décision du 20 novembre 2003 susvisée, l'autorité judiciaire conserve la possibilité d'interrompre à tout moment la prolongation du maintien en rétention, de sa propre initiative ou à la demande de l'étranger, lorsque les circonstances de droit ou de fait le justifient ; que, sous cette réserve, les griefs invoqués doivent être écartés »16.

 

Enfin, saisi de dispositions prévoyant la possibilité pour le juge judiciaire de prolonger la rétention jusqu'à quatre-vingt-dix jours, le Conseil a, à nouveau, formulé cette réserve pour dissiper les mêmes craintes, dans sa décision du 6 septembre 201817.

 

2. – L'application à l'espèce

 

Après avoir rappelé les termes de l'article 66 de la Constitution et la conséquence qu'il en tire, s'agissant de la triple exigence d'adaptation, de nécessité et de proportionnalité des atteintes portées à l'exercice de la liberté individuelle (paragr. 30), le Conseil constitutionnel s'est tout d'abord prononcé sur la nature des mesures de mise en quarantaine, de placement et de maintien en isolement.

 

Le Gouvernement faisait valoir que ces mesures n'étaient pas toutes susceptibles d'être considérées comme privatives de liberté, ce qui aurait rendu le grief inopérant en ce qui les concernait. Dans ses observations écrites, il défendait l'idée qu'elles se distinguaient des mesures de détention frappant ceux dont il est supposé qu'ils ont violé la loi pénale (garde à vue, détention provisoire…) ou les lois relatives au séjour des étrangers (rétention administrative ou maintien en zone d'attente) ainsi que des mesures relatives à des personnes privées de leur consentement (placement en cellule de dégrisement ou hospitalisation sans consentement). En outre, il soutenait que lorsqu'elles ne privaient pas l'intéressé de la possibilité de sortir de son domicile lorsqu'il le souhaite, fût-ce pour une brève période quotidienne, elles ne s'apparentaient pas à une mesure privative de liberté individuelle au sens de l'article 66 de la Constitution.

 

Le Conseil constitutionnel n'a toutefois pas retenu cette approche.

 

Prenant en considération la durée possible d'application de ces mesures et la teneur des obligations que l'autorité administrative peut imposer à la personne qui en fait l'objet, en particulier l'isolement complet qui peut conduire à lui interdire « toute sortie », le Conseil a jugé que, dans cette dernière hypothèse, « les mesures de mise en quarantaine, de placement et de maintien en isolement constituent une privation de liberté » (paragr. 33). Il a considéré qu'il en allait de même lorsque ces mesures, même sans interdire toute sortie à l'intéressé, lui imposent « de demeurer à son domicile ou dans son lieu d'hébergement pendant une plage horaire de plus de douze heures par jour » (même paragr.). Le seuil ainsi fixé pour caractériser la nature privative de liberté de l'isolement « quasi-complet » fait écho à la décision n° 2015-527 QPC du 22 décembre 2015 précitée. Le Conseil avait alors retenu une plage horaire maximale de douze heures par jour concernant l'assignation à résidence, passée laquelle la mesure devait être regardée comme une privation de liberté relevant de l'article 66 de la Constitution. Il en avait jugé de même à propos de l'assignation à résidence de l'étranger faisant l'objet d'une interdiction du territoire ou d'un arrêté d'expulsion18. Si la mise en quarantaine et le placement en isolement reposent en l'occurrence sur des motifs distincts, leur mise en œuvre est susceptible de se traduire par une privation de liberté de même nature pour la personne qui en fait l'objet. C'est donc dans la droite ligne de sa jurisprudence que le Conseil a considéré que ces mesures devaient également respecter les exigences de l'article 66 de la Constitution lorsqu'elles sont assorties d'une interdiction de toute sortie pendant une plage horaire journalière de plus de douze heures.

 

Le Conseil constitutionnel s'est ensuite attaché à la proportionnalité de l'atteinte portée à la liberté individuelle par les mesures de mise en quarantaine, de placement et de maintien en isolement. Dans cette appréciation, il a notamment relevé que, en cherchant par ces dispositions à « assurer la mise à l'écart du reste de la population des personnes qui en font l'objet en les soumettant à un isolement, le cas échéant, complet de façon à prévenir la propagation de la maladie à l'origine de la catastrophe sanitaire », le législateur a poursuivi l'objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé (paragr. 34).

 

Le Conseil a également relevé que ces mesures ne peuvent être prononcées et mises en œuvre que dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire, selon les conditions rappelées au paragraphe 21 de la décision lorsqu'il a examiné les mesures de réglementation des transports, des établissements recevant du public et des lieux de réunion et permettant d'ordonner des réquisitions (paragr. 35). Leur champ d'application est, par ailleurs, limité aux seules personnes ayant séjourné au cours du mois précédent dans une zone de circulation de l'infection qui entrent sur le territoire national ou qui, déjà présentes sur le territoire national, arrivent en Corse ou dans l'une des collectivités mentionnées à l'article 72-3 de la Constitution (paragr. 36).

 

Au titre des garanties prévues par le législateur, le Conseil a tenu compte des exigences requises aussi bien pour décider d'une mise en quarantaine ou d'un placement en isolement que pour prolonger l'application de ces mesures (paragr. 37). Il a, en outre, rappelé que la personne peut choisir d'effectuer la quarantaine ou l'isolement à son domicile ou dans un lieu d'hébergement adapté (paragr. 38) et qu'il est mis fin à la mesure avant son terme lorsque son état de santé le permet (paragr. 39).

 

Dans ces conditions, le Conseil a jugé que la loi déférée a fixé des conditions propres à assurer que ces mesures ne soient mises en œuvre que dans les cas où elles sont adaptées, nécessaires et proportionnées à l'état des personnes affectées ou susceptibles d'être affectées par la maladie à l'origine de la catastrophe sanitaire (paragr. 40).

 

S'agissant, enfin, du contrôle des mesures de mise en quarantaine, de placement et de maintien en isolement, le Conseil constitutionnel a rappelé que « la liberté individuelle ne peut être tenue pour sauvegardée que si le juge intervient dans le plus court délai possible » (paragr. 41).

 

Après avoir relevé l'existence d'un recours susceptible d'être exercé à tout moment par l'intéressé ou par le procureur de la République devant le JLD aux fins de mainlevée de la mesure (paragr. 42), le Conseil a constaté que les dispositions du cinquième alinéa du paragraphe II de l'article L. 3131-17 du CSP prévoyaient l'intervention obligatoire de ce juge en vue du maintien, au-delà de quatorze jours, des mesures de mise en quarantaine ou d'isolement interdisant toute sortie de l'intéressé. Il a implicitement considéré que ce délai de quatorze jours avant l'intervention requise du juge judiciaire était suffisant pour assurer le respect de l'article 66 de la Constitution.

 

Toutefois, ce délai ne concernait que le cas particulier d'une mise en quarantaine ou d'un isolement « complet », interdisant toute sortie de l'intéressé. Par une lecture a contrario, il en a déduit qu'« aucune intervention systématique d'un juge judiciaire n'est prévue dans les autres hypothèses » de mise en quarantaine ou de maintien en isolement « quasi-complet » (paragr. 43).

 

Dès lors, tirant les conséquences de la nature privative de liberté des mesures conduisant à interdire à la personne toute sortie pendant une plage horaire de plus de douze heures par jour, le Conseil constitutionnel a formulé une réserve d'interprétation visant à préciser que « ces dispositions ne sauraient, sans méconnaître les exigences de l'article 66 de la Constitution, permettre la prolongation des mesures de mise en quarantaine ou de placement en isolement imposant à l'intéressé de demeurer à son domicile ou dans son lieu d'hébergement pendant une plage horaire de plus de douze heures par jour sans l'autorisation du juge judiciaire » (même paragr.).

 

Sous cette réserve, il a considéré que le paragraphe II de l'article L. 3131-17 du même code ne méconnaissait pas les exigences de l'article 66 de la Constitution (paragr. 44). Par voie de conséquence, le Conseil a transposé cette réserve aux dispositions de l'article 8 de la loi déférée étendant le régime de contrôle applicable aux mesures de mise en quarantaine, de placement et de maintien en isolement dans le cadre de la lutte contre la propagation internationale des maladies ou en cas de menace sanitaire grave (paragr. 49).

 

Pour finir, le Conseil a écarté le grief tiré de la méconnaissance de la liberté d'aller et de venir concernant la possibilité, dans le cadre des mesures en cause, d'interdire à la personne de fréquenter certains lieux ou catégories de lieux, compte tenu des finalités poursuivies et des garanties précitées entourant ces dispositions (paragr. 46).

 

II. – La création d'un système d'information destiné à lutter contre la propagation de l'épidémie de covid-19 (article 11)

 

A. – Les dispositions contestées et les griefs des requérants

 

* La stratégie de sortie progressive du confinement reposait sur un triptyque, présenté par le Premier ministre le 28 avril 2020 à l'Assemblée nationale : « Protéger, tester, isoler ».

 

L'article 11 vise à mettre en place l'un des piliers de cette stratégie, un système d'information facilitant l'identification et le suivi des personnes infectées et de leurs contacts : il s'agit d'identifier et de traiter les chaînes de contamination en recensant les cas diagnostiqués positif au covid-19, en établissant la liste des personnes qui ont été en contact avec eux et en organisant, à la fois, leur dépistage et, le cas échéant, leur isolement afin d'éviter qu'elles contaminent d'autres personnes.

 

Si un système d'information peut, en principe, être créé par voie réglementaire, en l'espèce, le recours à la loi avait été jugé nécessaire. En effet, le dispositif envisagé repose sur le partage d'informations médicales, sans que le consentement des intéressés n'ait à être recueilli préalablement. Or, si l'article L. 1110-4 du code de la santé publique prévoit un tel partage d'informations dans le cadre de l'équipe de soins qui s'occupe d'un patient, le second alinéa de son paragraphe III dispose que « Le partage, entre des professionnels ne faisant pas partie de la même équipe de soins, d'informations nécessaires à la prise en charge d'une personne requiert son consentement préalable, recueilli par tout moyen, y compris de façon dématérialisée, dans des conditions définies par décret pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés ». Il fallait donc y apporter une exception pour le système d'information.

 

C'est ce que prévoit le paragraphe I de l'article 11. La portée de l'exception est strictement définie, au regard de sa finalité, de sa durée et des personnes ou des données en cause, et les travaux parlementaires ont été attentifs à limiter cette portée à ce qui était nécessaire.

 

Si le but poursuivi est la lutte contre la propagation de l'épidémie de covid-19, le paragraphe II de l'article 11 précise les quatre finalités pour lesquelles il peut être recouru au dispositif en cause :

 

1° L'identification des personnes infectées, par la prescription et la réalisation des examens de biologie ou d'imagerie médicale pertinents ainsi que par la collecte de leurs résultats ou par la transmission des éléments probants de diagnostic clinique susceptibles de caractériser le covid-19 ;

 

2° L'identification des personnes présentant un risque d'infection, par la collecte des informations relatives aux contacts des personnes infectées et, le cas échéant, par la réalisation d'enquêtes sanitaires, en présence notamment de cas groupés ;

 

3° L'orientation des personnes infectées, et des personnes susceptibles de l'être, en fonction de leur situation, vers des prescriptions médicales d'isolement prophylactiques, ainsi que l'accompagnement de ces personnes pendant et après la fin de ces mesures ;

 

4° La surveillance épidémiologique aux niveaux national et local, ainsi que la recherche sur le virus et les moyens de lutter contre sa propagation.

 

Le dispositif est limité à la durée de l'état d'urgence sanitaire déclaré par l'article 4 de la loi d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19.

 

Les données à caractère personnel collectées et partagées correspondent à des données de santé et à des données d'identification, telles que celles relatives aux coordonnées des personnes en cause. Celles qui concernent la santé sont en outre strictement limitées au statut virologique ou sérologique de la personne ainsi qu'à des éléments probants de diagnostic clinique et d'imagerie médicale, précisés par le décret en Conseil d'État. Ces données ne peuvent être conservées à l'issue de l'état d'urgence sanitaire en cours.

 

Le paragraphe III énumère l'ensemble des autorités ou organismes susceptibles d'avoir accès au système d'information et au partage d'informations, dans la seule mesure de leurs besoins. Il s'agit du ministre chargé de la santé, de l'Agence nationale de santé publique, d'un organisme d'assurance maladie, des agences régionales de santé, du service de santé des armées, des communautés professionnelles territoriales de santé, des établissements de santé, sociaux et médico-sociaux, des équipes de soins primaires mentionnées à l'article L. 1411-11-1 du code de la santé publique, des maisons de santé, des centres de santé, des services de santé au travail mentionnés à l'article L. 4622-1 du code du travail et des médecins prenant en charge les personnes infectées ou celles en contact avec elles, des pharmaciens, des dispositifs d'appui à la coordination des parcours de santé complexes prévus à l'article L. 6327-1 du code de la santé publique, des dispositifs spécifiques régionaux prévus à l'article L. 6327-6 du même code, des dispositifs d'appui existants qui ont vocation à les intégrer mentionnés au paragraphe II de l'article 23 de la loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 relative à l'organisation et à la transformation du système de santé ainsi que des laboratoires et services autorisés à réaliser les examens de biologie ou d'imagerie médicale pertinents sur les personnes et des organismes assurant l'accompagnement social des intéressés dans le cadre de la lutte contre l'épidémie. Le paragraphe V prévoit également que peuvent avoir accès au fichier, pour leur compte et sous leur responsabilité, les sous-traitants de ces organismes.

 

Concrètement le système d'information est organisé à partir des systèmes d'information déjà existants, dont l'adaptation à cette fin est expressément prévue au paragraphe I de l'article 11.

 

Le législateur a par ailleurs soumis l'ensemble du dispositif à la surveillance d'un Comité de contrôle et de liaison covid-19, chargé d'associer la société civile et le Parlement (paragraphe VIII de l'article 11). La mission de ce comité est d'évaluer, par des audits réguliers, l'intérêt du dispositif et de vérifier le respect des garanties entourant le secret médical et la protection des données personnelles. Le paragraphe IX prévoit également certaines mesures d'information du Parlement (cf., infra, partie suivante).

 

* Les députés requérants reprochaient à cet article de méconnaître le droit au respect de la vie privée et d'être entaché d'incompétence négative. Ils dénonçaient notamment l'ampleur et la sensibilité des données recueillies, l'absence de mesures d'anonymisation, le nombre trop élevé de personnes ayant accès à ces données ainsi que le renvoi à un décret pour fixer les règles d'habilitation pour l'accès aux données ou celles d'interconnexion des fichiers. Selon eux, les garanties entourant le dispositif étaient insuffisantes, faute notamment de prévoir le consentement des personnes dont les données sont collectées et partagées ou l'exercice normal des droits d'accès, d'information et de rectification desdites données. Ils reprochaient également à ces dispositions de ne pas prévoir de mécanismes permettant de mettre fin, de manière anticipée, à l'utilisation des données. Les sénateurs requérants dénonçaient également la méconnaissance du droit au respect de la vie privée résultant de l'ampleur de la collecte des données permise par l'article 11 ainsi que l'inintelligibilité du texte, qui dérogeait à l'exigence du consentement au traitement des données, tout en maintenant le droit d'opposition des personnes en cause.

 

Dans sa réponse à ces griefs, le Conseil constitutionnel s'est principalement attaché à la question de la méconnaissance du droit au respect de la vie privée.

 

B. – Analyse de constitutionnalité

 

1. – La jurisprudence constitutionnelle relative aux fichiers

 

Aux termes de l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : « Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l'Homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté, et la résistance à l'oppression ». La liberté proclamée par cet article implique le respect de la vie privée19. Pour le Conseil constitutionnel, le respect de la vie privée figure au nombre des droits et libertés que la Constitution garantit et peut être invoqué à l'appui d'une QPC20.

 

Le Conseil est régulièrement saisi de dispositions relatives à des traitements de données à caractère personnel, accessibles aux seules autorités administratives ou à des professionnels intéressés.

 

* Dans sa décision n° 2012-652 DC du 22 mars 2012, le Conseil a précisé ses exigences en matière de contrôle de fichiers en affirmant que « la collecte, l'enregistrement, la conservation, la consultation et la communication de données à caractère personnel doivent être justifiés par un motif d'intérêt général et mis en œuvre de manière adéquate et proportionnée à cet objectif »21. Il est ainsi passé, en matière de traitement de données, d'un contrôle de l'absence de disproportion manifeste à un contrôle de proportionnalité plus poussé.

 

Dans l'exercice de ce contrôle de proportionnalité, il ressort de l'examen de la jurisprudence du Conseil que ce dernier tient compte du nombre de personnes susceptibles de relever du fichier informatique en cause, de la sensibilité particulière des données personnelles recueillies, des garanties techniques ou juridiques prévues par le législateur et des finalités d'utilisation ou de consultation du fichier.

 

Ainsi, dans la décision précitée du 22 mars 2012, le Conseil a censuré des dispositions qui prévoyaient la création d'un traitement de données à caractère personnel facilitant le recueil, la conservation et l'intégrité des données requises pour la délivrance du passeport français et de la carte nationale d'identité au motif que « compte tenu de son objet, ce traitement de données à caractère personnel est destiné à recueillir les données relatives à la quasi-totalité de la population de nationalité française ; que les données biométriques enregistrées dans ce fichier, notamment les empreintes digitales, étant par elles-mêmes susceptibles d'être rapprochées de traces physiques laissées involontairement par la personne ou collectées à son insu, sont particulièrement sensibles ; que les caractéristiques techniques de ce fichier définies par les dispositions contestées permettent son interrogation à d'autres fins que la vérification de l'identité d'une personne ; que les dispositions de la loi déférée autorisent la consultation ou l'interrogation de ce fichier non seulement aux fins de délivrance ou de renouvellement des titres d'identité et de voyage et de vérification de l'identité du possesseur d'un tel titre, mais également à d'autres fins de police administrative ou judiciaire »22.

 

Il ressort ainsi de cette décision que le Conseil a pris en compte l'ampleur du fichier, le caractère sensible des données mais également la pluralité de ses finalités (sécurisation des titres et missions de police) et son utilisation. Le Conseil a considéré, d'une part, que le choix d'un tel fichier pour atteindre l'objectif de lutte contre l'usurpation d'identité ne s'imposait pas et, d'autre part, que les dispositions contestées permettaient l'utilisation du fichier à d'autres fins que celles relatives à la vérification de l'identité.

 

De même, dans sa décision du 13 mars 201423, le Conseil a censuré des dispositions créant un registre national recensant les crédits à la consommation accordés aux personnes physiques. Ces dispositions, qui avaient pour objet la prévention des situations de surendettement, prévoyaient ainsi le recensement des crédits à la consommation, des incidents de paiements et des informations relatives aux situations de surendettement. Elles prévoyaient également une durée de conservation égale à celle de la durée d'exécution du crédit et une possibilité de consultation par les établissements et organismes financiers. Le Conseil a alors jugé « qu'eu égard à la nature des données enregistrées, à l'ampleur du traitement, à la fréquence de son utilisation, au grand nombre de personnes susceptibles d'y avoir accès et à l'insuffisance des garanties relatives à l'accès au registre, les dispositions contestées portent au droit au respect de la vie privée une atteinte qui ne peut être regardée comme proportionnée au but poursuivi ». Le commentaire précise que la création du fichier, qui portait sur dix à vingt-cinq millions de personnes, ne répondait qu'à un intérêt général mais pas à un objectif de valeur constitutionnelle.

 

* Dans le cadre de ce contrôle, pour examiner le caractère adéquat et proportionné de la mise en œuvre à l'objectif poursuivi, le Conseil constitutionnel admet aisément, eu égard à l'encadrement législatif qui est garanti par la loi du 6 janvier 197824, un renvoi général, même implicite, à ces dispositions législatives et des renvois à des dispositions réglementaires.

 

Dans une décision du 13 mars 200325, le Conseil, après avoir contrôlé la conformité à la Constitution d'un fichier des antécédents judiciaires, a écarté le grief tiré de l'incompétence négative en jugeant « que, loin d'avoir méconnu l'étendue de sa compétence, le législateur a assorti les dispositions critiquées de précisions dont certaines relèvent du pouvoir réglementaire et qui, au demeurant, avaient jusqu'ici été traitées comme telles ». Le commentaire indique à ce propos que « si les règles générales applicables aux fichiers nominatifs et aux traitements de données personnelles relèvent en effet de la loi en vertu de l'article 34 de la Constitution […] et si une législation protectrice a été édictée à ce titre (loi du 6 janvier 1978, dite "informatique et libertés"), il n'en va pas de même de la définition des caractéristiques de chaque traitement. Loin d'avoir méconnu l'étendue de sa compétence, le législateur a assorti les dispositions critiquées de précisions dont certaines relèvent, en vertu des articles 34 et 37 de la Constitution, du pouvoir réglementaire. Au demeurant, ces caractéristiques particulières avaient été jusqu'ici fixées, pour la plupart, par voie réglementaire ».

 

De même, le Conseil, dans une décision du 29 décembre 201326, a validé la création d'un fichier dans le domaine des contrats d'assurance-vie en jugeant que « si la mise en œuvre des dispositions de l'article 10 doit conduire à la création d'un traitement de données à caractère personnel des informations ainsi recueillies, il ressort des débats parlementaires, qu'en adoptant ces dispositions, le législateur n'a pas entendu déroger aux garanties apportées par la loi du 6 janvier 1978 susvisée relatives notamment aux pouvoirs de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, qui s'appliqueront aux traitements en cause ; que, par suite, il appartiendra aux autorités compétentes, dans le respect de ces garanties et sous le contrôle de la juridiction compétente, de s'assurer que la collecte, l'enregistrement, la conservation, la consultation, la communication, la contestation et la rectification des données de ce fichier des contrats d'assurance-vie seront mis en œuvre de manière adéquate et proportionnée à l'objectif poursuivi ».

 

Dans sa décision du 16 juin 2017, le Conseil a validé les dispositions prévoyant l'établissement d'un fichier des personnes qui ont contrevenu ou contreviennent aux dispositions des conditions générales de vente ou du règlement intérieur relatives à la sécurité des manifestations sportives. Examinant des dispositions législatives qui renvoyaient à un décret en Conseil d'État, la nature des données ainsi que les règles de conservation et de consultation, le Conseil a, après avoir constaté l'existence d'un objectif d'intérêt général, jugé que le législateur « n'a pas entendu déroger aux garanties apportées par la loi du 6 janvier 1978 […] relatives notamment aux pouvoirs de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, qui s'appliquent aux traitements en cause. Le fichier prévu par les dispositions contestées ne peut être établi que par les organisateurs de manifestations sportives à but lucratif. Il ne peut recenser que les personnes qui ont contrevenu ou contreviennent aux dispositions des conditions générales de vente ou du règlement intérieur relatives à la sécurité de ces manifestations. Il ne peut être employé à d'autres fins que l'identification desdites personnes en vue de leur refuser l'accès à des manifestations sportives à but lucratif. Il en résulte que le traitement de données prévu par les dispositions contestées est mis en œuvre de manière adéquate et proportionnée à l'objectif d'intérêt général poursuivi » 27.

 

Plus récemment, le Conseil constitutionnel s'est prononcé sur une disposition permettant à certaines personnes, autres que les autorités compétentes en matière pénale, de mettre en œuvre un fichier relatif aux condamnations pénales28. Le Conseil a d'abord constaté que cet accès répondait à des objectifs d'intérêt général : faciliter le travail des collaborateurs du service public de la justice ou permettre aux personnes victimes ou mises en cause de préparer ou mettre en œuvre un recours en justice. Il a ensuite relevé que le champ des personnes auxquelles cet accès était ouvert était suffisamment circonscrit, puisqu'il s'agissait, en l'espèce, des personnes morales de droit privé collaborant au service public de la justice et des personnes physiques ou morales qui, en tant que victimes ou mises en cause ou pour le compte de celles-ci, cherchent à préparer, à exercer et à suivre une action en justice et à faire exécuter la décision rendue. Enfin, il a constaté que les garanties de la loi « informatique et libertés » et du règlement général sur la protection des données s'appliqueraient, en particulier celles imposant aux fichiers en cause de répondre aux conditions de licéité, proportionnalité, nécessité et adéquation aux objectifs poursuivis. Il en a conclu que les dispositions en cause étaient conformes au droit au respect de la vie privée.

 

2. – La jurisprudence constitutionnelle relative aux données de santé et au partage de données sensibles

 

* Le Conseil a reconnu le caractère particulièrement sensible des données de santé, qui justifie qu'elles fassent l'objet d'une protection particulière, fondée sur le droit au respect de la vie privée.

 

Ainsi a-t-il jugé que ce droit « requiert que soit observée une particulière vigilance dans la collecte et le traitement de données à caractère personnel de nature médicale »29. Pour autant, il appartient au législateur de concilier ce droit avec d'autres exigences constitutionnelles et, notamment, celles qui s'attachent à la protection de la santé30.

 

L'exigence du consentement à l'utilisation des données de santé est une garantie forte au regard de l'exigence de droit au respect de la vie privée. Le Conseil constitutionnel en a ainsi tenu compte pour juger conforme à la Constitution la carte électronique individuelle inter-régimes31 ou le dossier médical personnel32 qui devaient chacun permettre l'échange d'informations médicales à caractère personnel entre les professionnels de santé.

 

En revanche, le partage de données médicales à caractère personnel, sans le consentement de l'intéressé, n'est pas nécessairement contraire au droit au respect de la vie privée : tout dépend des modalités de ce partage, des finalités poursuivies et des garanties prévues.

 

Le Conseil constitutionnel a ainsi jugé conforme à la Constitution un dispositif autorisant le partage, sans le consentement des intéressés, de données médicales. Il s'agissait de permettre, à des fins statistiques d'évaluation et d'analyse des activités de soin et de prévention, la transmission de données de santé en principe non-identifiantes. Toutefois, le destinataire des données pouvait demander à ce que lui soient transmises certaines données identifiantes, à l'exclusion des données nominatives ou de celles relatives au numéro d'inscription au répertoire national d'identification des personnes physiques. Dans ce cas, il était prévu que la transmission des données était soumise à l'autorisation de la Cnil qui pouvait notamment demander à les réduire afin qu'elles soient moins identifiantes. Le Conseil a jugé que, dans ces conditions, le droit au respect de la vie privée n'était pas méconnu33.

 

Saisi de l'obligation faite aux médecins, lorsqu'ils établissent une prescription d'arrêt de travail donnant lieu à l'octroi d'indemnités journalières par l'assurance maladie, de mentionner sur les documents produits à cet effet « les éléments d'ordre médical justifiant l'interruption de travail », le Conseil constitutionnel a constaté que ces informations étaient destinées au seul « service du contrôle médical » et que les médecins-conseils le composant étaient tenus au secret médical, y compris envers l'organisme qui fait appel à leur service. Par une réserve d'interprétation, il a toutefois exigé que soient « mises en place des modalités d'acheminement de ces documents aux médecins-conseils de nature à assurer la stricte confidentialité de la transmission des informations qu'ils contiennent ». Sous cette réserve, et compte tenu de la finalité poursuivie, qui était de remédier à l'augmentation des dépenses de santé en cause et à leur caractère éventuellement injustifié, le Conseil a jugé la disposition conforme au droit au respect de la vie privée34.

 

Plus récemment, le Conseil constitutionnel s'est prononcé sur l'exemption dont bénéficiaient les organismes d'assurance maladie complémentaire, pour le service de leurs prestations, qui avait pour conséquence que leurs fichiers mis en œuvre dans ce cadre n'étaient pas soumis aux dispositions particulières du chapitre IX de la loi du 6 janvier 1978 relatives aux traitements des données de santé. Le Conseil a constaté que cette exemption ne s'étendait pas aux autres exigences de cette loi ni à celles du règlement général sur la protection des données35. Il en a conclu que « les données de santé recueillies dans le cadre de ces traitements ne peuvent faire l'objet d'un traitement ultérieur incompatible avec la finalité d'origine du traitement, qui ne peut être, en vertu des dispositions contestées, que le service des prestations d'assurance maladie »36. Il a alors jugé la disposition conforme à la Constitution.

 

* Dans le domaine non médical, mais pénal, le Conseil a censuré, au regard du droit au respect de la vie privée, la disposition prévoyant le partage d'informations entre, d'une part, l'état-major de sécurité et la cellule de coordination opérationnelle des forces de sécurité intérieure et, d'autre part, les juridictions d'application des peines. Le Conseil constitutionnel a en effet relevé que ce partage était susceptible de concerner « toute information » que les juridictions de l'application des peines et le service pénitentiaire d'insertion et de probation jugeraient utile au bon déroulement du suivi et du contrôle des personnes condamnées, sans que la nature des informations en cause ait été définie par le législateur, ni que leur champ ait été limité37.

 

3. – L'application à l'espèce

 

Dans la décision commentée, le Conseil a rappelé, dans la ligne des jurisprudences précitées, les exigences d'adéquation, de justification et de proportionnalité auxquelles sont soumis les traitements de données à caractère personnel ainsi que « la particulière vigilance » qui doit être observée dans la mise en œuvre de ces traitements lorsque sont en cause des données à caractère personnel de nature médicale (paragr. 61).

 

Décrivant le dispositif contesté, le Conseil constitutionnel a relevé que la collecte, le traitement et le partage d'informations, sans le consentement des intéressés, autorisés par l'article 11, portaient non seulement sur leurs données médicales personnelles mais aussi sur les contacts qu'ils ont noués avec d'autres personnes. Ce faisant, ce dispositif portait doublement atteinte au droit au respect de la vie privée (paragr. 62).

 

Puis le Conseil a classiquement examiné l'objectif poursuivi ainsi que l'adéquation et la proportionnalité, au regard de cet objectif, des finalités assignées au traitement, de l'étendue des données retenues et du champ des personnes ayant accès au traitement. Enfin, il s'est attaché aux autres garanties prévues par le législateur.

 

* L'objectif poursuivi

 

L'objectif poursuivi étant la lutte contre l'épidémie de covid-19, par l'identification des chaînes de contamination, il relevait évidemment de l'objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé (paragr. 63). Le Conseil a alors constaté que les quatre finalités assignées au traitement étaient bien conformes à cet objectif et que le législateur avait expressément exclu que le dispositif proposé serve au développement ou au déploiement d'une application fonctionnant à partir des téléphones portables comme celle que le Gouvernement envisageait par ailleurs de mettre en place sous le nom de « StopCovid ». Cette exclusion rendait compte de certaines craintes qui s'étaient exprimées au cours des travaux parlementaires (paragr. 64 et 65).

 

* Le champ des données collectées et partagées

 

Le Conseil constitutionnel a ensuite observé que le champ des données à caractère personnel collectées et partagées avait été restreint à ce qui était strictement nécessaire à la poursuite des trois premières finalités du traitement (identification des personnes infectées et de leurs contacts, réalisations des tests diagnostiques et isolement et accompagnement des intéressés). Ce point avait d'ailleurs largement occupé les débats parlementaires, le champ des données de santé initialement prévu par le projet de loi ayant été notablement restreint par le Sénat aux seules données relatives au statut virologique ou sérologique des personnes à l'égard du covid-19 et aux éléments probants de diagnostic clinique ou d'imagerie médicale38 précisés par décret en Conseil d'État. Pour ce qui concernait les autres données à caractère personnel, il s'agissait seulement de celles permettant l'identification des personnes infectées –et donc l'entrée en contact avec elles– ainsi que celles des personnes ayant été en contact avec elles pendant la période critique de la maladie (paragr. 66).

 

La dernière finalité, relative à la surveillance épidémiologique et la recherche contre le virus, devait être traitée à part, puisqu'elle n'exigeait pas le même degré de précision de l'identification. Le Conseil a constaté que le législateur avait prévu que, dans ce cadre, les informations nominatives sur les intéressés, leur numéro de sécurité sociale ou leur adresse seraient supprimés. Par une réserve d'interprétation, et afin de garantir la stricte adéquation entre les données collectées et partagées et cette finalité, le Conseil a jugé que cette exigence de suppression devait s'étendre aux coordonnées de contact téléphonique ou électronique des intéressés (paragr. 67).

 

* Le champ des personnes ayant accès aux informations collectées et partagées

 

Après avoir énuméré l'ensemble des personnes ou organismes susceptibles d'avoir accès, sans l'accord des intéressés, à ces données à caractère personnel, le Conseil constitutionnel a souligné que si ce champ est particulièrement étendu, cette extension est rendue nécessaire par la masse des démarches à entreprendre pour organiser la collecte des informations nécessaires à la lutte contre le développement de l'épidémie. À une exception près, il y avait donc bien une stricte adéquation entre ce champ et les finalités poursuivies (paragr. 69).

 

L'exception était relative aux organismes qui assurent l'accompagnement social des intéressés. Il s'agissait par exemple des centres communaux d'action sociale. Le Conseil a constaté que cet accompagnement ne relève pas directement de la lutte contre l'épidémie et que, dès lors, rien ne justifiait que ces organismes aient accès, sans le consentement des personnes intéressées, aux données à caractère personnel présentes dans le fichier. Il a donc censuré la référence à ces organismes (paragr. 70).

 

Le Conseil constitutionnel s'est ensuite attaché, sous l'angle de la proportionnalité, aux garanties du partage d'informations entre tous ces acteurs. Il a constaté que le législateur avait, d'une part, borné l'accès de chacun à la seule part de ses missions susceptible de correspondre à l'une ou l'autre des finalités du fichier et aux seules données nécessaires à son intervention et, d'autre part, renvoyé à un décret en Conseil d'État la détermination, au sein de ces organismes, des services et personnels ayant accès au fichier et des modalités de cet accès (données en cause, durée de l'accès et règles de conservation). Le Conseil a également observé que ces agents n'étaient pas autorisés à communiquer, sans son accord, les données d'identification d'une personne infectée à ses « cas contacts » et que, de manière plus générale, ils étaient tous soumis aux exigences du secret professionnel, pénalement sanctionnées (paragr. 71 et 72).

 

Le Conseil constitutionnel a précisé, dans une réserve d'interprétation, qu'il appartiendra également au pouvoir réglementaire de définir des modalités de collecte, de traitement et de partage des informations assurant leur stricte confidentialité et notamment l'habilitation spécifique des agents en cause ainsi que la traçabilité de leurs accès (paragr. 73). Une telle réserve d'interprétation fait écho à celle qu'il avait formulée dans sa décision n° 99-416 DC précitée, à propos des données médicales portées sur les prescriptions d'arrêt de travail adressées aux médecins-conseils de l'assurance maladie : la confidentialité est ce qui assure que n'auront pas accès aux données à caractère personnel d'autres personnes que celles expressément citées dans la loi, qui sont les seules pour lesquelles le Conseil a pu s'assurer du caractère justifié, adéquat et proportionné de leur accès.

 

Le législateur avait prévu que certains sous-traitants des organismes ayant accès au système d'information pourraient eux-mêmes y avoir accès, pour le compte de ces organismes et sous leur responsabilité, dans des conditions fixées par décret. Le Conseil constitutionnel leur a donc logiquement étendu les exigences de nécessité des accès et de confidentialité prévues par le législateur ou impliquées par la réserve d'interprétation précédente (paragr. 74).

 

* Les autres garanties

 

D'autres garanties méritaient d'être relevées.

 

D'une manière générale, sauf sur la question du consentement à la collecte, au traitement et au partage de certaines données à caractère personnel, les dispositions contestées de l'article 11 n'exemptaient pas les opérations en cause des autres garanties prévues par la loi « Informatique et libertés » ou le règlement général sur la protection des données. En particulier, les droits d'accès, d'information et de rectification des intéressés étaient préservés, ce que le Conseil constitutionnel a relevé (paragr. 75).

 

Par ailleurs, le dispositif était limité dans le temps à la durée strictement nécessaire à la lutte contre la propagation de l'épidémie ou, si cette durée était plus courte, à six mois après la fin de l'état d'urgence sanitaire. En outre, les données à caractère personnel devaient être supprimées trois mois après leur collecte (paragr. 76).

 

Enfin, les décrets d'application du texte devaient être adoptés après avis public de la Cnil. Le législateur avait précisé que cet avis public devait être conforme. Ce faisant, il avait subordonné à l'avis conforme d'une autre autorité de l'État l'exercice, par le Premier ministre, du pouvoir réglementaire qu'il tient de l'article 21 de la Constitution, ce qui est contraire à cet article, comme le Conseil constitutionnel a déjà eu l'occasion de le souligner à plusieurs reprises39. Le mot « conforme » a donc été déclaré contraire à la Constitution (paragr. 77).

 

Sous les trois réserves précitées et en tenant compte des censures partielles prononcées, le Conseil a conclu de tout ce qui précède que les dispositions contestées, qui n'étaient ni inintelligibles ni entachées d'incompétence négative, ne méconnaissaient pas le droit au respect de la vie privée et étaient conformes à la Constitution.

 

III. – Modalités d'information des assemblées parlementaires sur les mesures prises en application de l'article 11 (paragraphe IX de l'article 11)

 

Introduit en première lecture à l'Assemblée nationale par un amendement (n° CL212) de M. Sacha Houlié adopté par la commission des lois, le paragraphe IX de l'article 11 définissait les conditions d'information des assemblées parlementaires sur les mesures prises en application de cet article.

 

Tel qu'adopté par le Parlement, il prévoyait, à son premier alinéa, que « L'Assemblée nationale et le Sénat sont informés sans délai des mesures mises en œuvre par les autorités compétentes en application du présent article », à son deuxième alinéa, que ces autorités « leur transmettent sans délai copie de tous les actes qu'elles prennent en application du présent article. L'Assemblée nationale et le Sénat peuvent requérir toute information complémentaire dans le cadre du contrôle et de l'évaluation de ces mesures » et, à son dernier alinéa, que « Le Gouvernement adresse au Parlement un rapport détaillé de l'application de ces mesures tous les trois mois à compter de la promulgation de la présente loi et jusqu'à la disparition des systèmes d'information développés aux fins de lutter contre la propagation de l'épidémie de covid‑19. Ces rapports sont complétés par un avis public de la Commission nationale de l'informatique et des libertés ».

 

Appelé, notamment par le Président de la République et par le président du Sénat, à se prononcer sur l'article 11, le Conseil constitutionnel a examiné son paragraphe IX au regard de la jurisprudence constitutionnelle sur la séparation des pouvoirs.

 

1. – La jurisprudence constitutionnelle

 

À plusieurs reprises, le Conseil constitutionnel a censuré des dispositions méconnaissant le principe de séparation des pouvoirs garanti par l'article 16 de la Déclaration de 1789. Pour s'en tenir aux cas les plus récents, les décisions suivantes peuvent être rappelées.

 

Dans la décision n° 2009-577 DC du 3 mars 2009, le Conseil a jugé que l'obligation de transmettre aux commissions parlementaires chargées des affaires culturelles tout nouveau cahier des charges des sociétés audiovisuelles publiques conduisait à faire intervenir une instance législative dans la mise en œuvre du pouvoir réglementaire, en violation de la séparation des pouvoirs et alors que « la Constitution attribue au Gouvernement, d'une part, et au Parlement, d'autre part, des compétences qui leur sont propres »40.

 

Dans sa décision n° 2013-679 DC du 4 décembre 2013, il a jugé contraires à la séparation des pouvoirs des dispositions imposant la présence du ministre du budget lors de certains débats devant les commissions des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat41.

 

Par sa décision n° 2015-721 DC du 12 novembre 2015, il a considéré que, en prévoyant que le Premier ministre serait tenu de prendre dans un délai préfix un décret d'approbation ou de refus d'approbation d'actes dans le domaine du droit pénal intervenant dans le champ de compétences du pouvoir réglementaire, le législateur avait méconnu le principe de la séparation des pouvoirs et l'article 21 de la Constitution42.

 

Dans sa décision n° 2016-741 DC du 8 décembre 2016, il a jugé contraires à la séparation des pouvoirs des dispositions prévoyant la consultation des commissions des finances des assemblées avant l'édiction d'un arrêté ministériel fixant la liste des États et territoires non coopératifs43.

 

Par la décision n° 2017-753 DC du 8 septembre 2017, saisi de dispositions organiques interdisant au Gouvernement d'attribuer des subventions aux collectivités territoriales et à leurs groupements « au titre de la pratique dite de la "réserve ministérielle" » (lors de la discussion des projets de loi de finances), il a jugé qu'en « limitant ainsi les prérogatives du Gouvernement », le législateur avait méconnu la séparation des pouvoirs et l'article 20 de la Constitution44.

 

Dans sa décision n° 2018-772 DC du 15 novembre 2018, il a considéré qu'en prévoyant que le pouvoir réglementaire serait tenu de prendre dans un délai préfix un décret relatif à certaines prescriptions relevant du règlement sanitaire départemental, le législateur avait méconnu le principe de la séparation des pouvoirs et les dispositions de l'article 21 de la Constitution45.

 

Dans sa décision n° 2019-785 DC du 4 juillet 2019, il a censuré pour méconnaissance de la séparation des pouvoirs une disposition du règlement de l'Assemblée nationale qui aurait permis à une commission permanente examinant une pétition d'imposer à un ministre une audition devant elle46.

 

2. – L'application à l'espèce

 

* Les dispositions du paragraphe IX de l'article 11 de la loi déférée n'étaient pas sans précédent. Ces dernières années, d'autres dispositions, comparables quoique pas nécessairement identiques, ont prévu des modalités particulières d'information des assemblées parlementaires sur certaines mesures prises par le Gouvernement.

 

Tel est par exemple le cas de :

 

– l'article 4-1 de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à l'état d'urgence, dans sa rédaction résultant de la loi du 21 juillet 201647, qui dispose que l'Assemblée nationale et le Sénat « sont informés sans délai des mesures prises par le Gouvernement pendant l'état d'urgence. Les autorités administratives leur transmettent sans délai copie de tous les actes qu'elles prennent en application de la présente loi. L'Assemblée nationale et le Sénat peuvent requérir toute information complémentaire dans le cadre du contrôle et de l'évaluation de ces mesures » ;

 

– l'article L. 22-10-1 du code de la sécurité intérieure, introduit par la loi du 30 octobre 201748, qui prévoit que l'Assemblée nationale et le Sénat « sont informés sans délai des mesures prises ou mises en œuvre par les autorités administratives en application des chapitres VI à IX du présent titre [relatifs, dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, aux périmètres de protection, aux fermetures de lieux de culte, aux mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance ainsi qu'aux visites et saisies]. Ces autorités administratives leur transmettent sans délai copie de tous les actes qu'elles prennent en application de ces dispositions. L'Assemblée nationale et le Sénat peuvent requérir toute information complémentaire dans le cadre du contrôle et de l'évaluation de ces mesures. / Le Gouvernement adresse chaque année au Parlement un rapport détaillé sur l'application de ces mesures » ;

 

– l'article 4 de la loi n° 2019-30 du 19 janvier 2019 habilitant le Gouvernement à prendre par ordonnances les mesures de préparation au retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne, selon lequel l'Assemblée nationale et le Sénat « sont informés sans délai et de manière circonstanciée des mesures prises par le Gouvernement dans le cadre des ordonnances prises en application de la présente loi. Ils sont également informés de manière régulière de leur état de préparation et peuvent requérir toute information complémentaire dans le cadre du contrôle et de l'évaluation de ces mesures » ;

 

– l'article L. 3131-13 du code de la santé publique, issu de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19, aux termes duquel l'Assemblée nationale et le Sénat « sont informés sans délai des mesures prises par le Gouvernement au titre de l'état d'urgence sanitaire. L'Assemblée nationale et le Sénat peuvent requérir toute information complémentaire dans le cadre du contrôle et de l'évaluation de ces mesures ».

 

Aucune des lois ayant introduit ces dispositions n'a été soumise au contrôle de constitutionnalité49.

 

* Dans la décision commentée, le Conseil constitutionnel a d'abord énoncé les normes de référence de son contrôle : « La séparation des pouvoirs résulte de l'article 16 de la Déclaration de 1789. Aux termes du premier alinéa de l'article 20 de la Constitution : "Le Gouvernement détermine et conduit la politique de la Nation". En vertu de l'article 21 de la Constitution, le Premier ministre assure l'exécution des lois. Le principe de la séparation des pouvoirs s'applique à l'égard du Gouvernement » (paragr. 80).

 

Le juge constitutionnel avait déjà combiné les exigences tirées de la séparation des pouvoirs, garantie par l'article 16 de la Déclaration de 1789, et du respect dû aux prérogatives du Gouvernement (article 20 de la Constitution) ou du Premier ministre (article 21 de la Constitution).

 

Par exemple, dans la décision n° 2017-753 DC précitée, c'est la combinaison de la séparation des pouvoirs et de l'article 20 de la Constitution qui avait conduit à la censure de l'interdiction de la pratique dite de la « réserve ministérielle »50. Dans la décision n° 2018-772 DC précitée, c'est la séparation des pouvoirs et l'article 21 de la Constitution qui avaient fondé la censure d'une disposition imposant au pouvoir réglementaire de prendre un décret dans un délai préfix51.

 

En l'espèce, en plus de la séparation des pouvoirs, le Conseil constitutionnel s'est fondé tant sur l'article 20 de la Constitution que sur son article 21. En effet, les dispositions examinées empiétaient sur les compétences générales du Gouvernement et, plus particulièrement, sur le pouvoir d'exécution des lois confié au Premier ministre (susceptible de délégation aux ministres en application du deuxième alinéa de l'article 21). C'est pourquoi, dans l'énoncé des normes de référence de son contrôle, le Conseil a explicitement souligné que, en « vertu de l'article 21 de la Constitution, le Premier ministre assure l'exécution des lois ».

 

Le Conseil constitutionnel a également jugé, pour la première fois, qu'il est « loisible au législateur de prévoir des dispositions assurant l'information du Parlement afin de lui permettre, conformément à l'article 24 de la Constitution, de contrôler l'action du Gouvernement et d'évaluer les politiques publiques » (paragr. 82).

 

À ce titre, le législateur peut évidemment prévoir la transmission au Parlement, par le Gouvernement, d'informations, d'actes et de documents nécessaires au contrôle de l'exécution de la loi. Il lui revient cependant, lorsqu'il agit en ce sens, de respecter les exigences constitutionnelles précitées définissant les prérogatives du pouvoir exécutif.

 

Or, le deuxième alinéa du paragraphe IX de l'article 11 imposait aux autorités mentionnées à cet article, c'est-à-dire au ministre chargé de la santé, à l'Agence nationale de santé publique, à un organisme d'assurance maladie et aux agences régionales de santé, de transmettre « sans délai » à l'Assemblée nationale et au Sénat « copie de tous les actes » qu'elles prennent en application de cet article. Il permettait en outre aux assemblées parlementaires de « requérir toute information complémentaire » dans le cadre du contrôle et de l'évaluation des mesures mises en œuvre.

 

Le Conseil constitutionnel a jugé que, « en prévoyant une transmission immédiate à l'Assemblée nationale et au Sénat d'une copie de chacun des actes pris en application de l'article 11 de la loi déférée, le législateur, compte tenu du nombre d'actes en cause et de la nature des données en jeu, a méconnu le principe de séparation des pouvoirs et les articles 20 et 21 de la Constitution » (paragr. 82).

 

Ce faisant, le Conseil constitutionnel n'a pas sanctionné le principe même d'un contrôle parlementaire s'appuyant sur la transmission par le Gouvernement d'actes pris pour l'exécution de la loi. Un tel contrôle est non seulement possible, mais constitue l'une des missions qui incombent traditionnellement au Parlement – laquelle est consacrée à l'article 24 de la Constitution depuis la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008.

 

Toutefois, en l'espèce, les dispositions contestées allaient bien au-delà d'un contrôle ex post de l'action gouvernementale. Elles permettaient une immixtion des assemblées parlementaires dans le processus même d'exécution de la loi, dès lors qu'une copie de chaque acte, y compris individuel, pris dans le cadre de la mise en œuvre des systèmes d'information visés par l'article 11, devait leur être immédiatement fournie (« sans délai » précisait la loi, ce qui signifiait, comme l'a relevé la décision, une transmission « immédiate »).

 

Le juge constitutionnel a estimé que de telles dispositions ne relevaient pas de l'exercice de la fonction de contrôle de l'Assemblée nationale et du Sénat et qu'elles empiétaient directement sur les prérogatives des autorités constitutionnellement chargées d'exécuter la loi. Il a donc jugé que, compte tenu de l'ampleur des actes en cause et de la nature des données en jeu – dont certaines constituent des données sensibles (voir supra) – le législateur avait méconnu le principe de séparation des pouvoirs et les articles 20 et 21 de la Constitution.

 

Le Conseil constitutionnel a donc censuré la première phrase du deuxième alinéa du paragraphe IX de l'article 11 et sa seconde phrase, qui en était indissociable.

 

Il convient de souligner, en revanche, que le Conseil constitutionnel n'a formulé aucune remarque particulière à propos du premier alinéa du paragraphe IX, qui prévoit que les assemblées parlementaires sont informées « sans délai des mesures mises en œuvre par les autorités compétentes en application du présent article ». En dépit du fait que cette information doit, là aussi, intervenir « sans délai », celle-ci porte sur des mesures générales relatives à l'application de l'article 11, non sur chacun des actes pris au titre de cet article. Le Conseil n'a pas davantage vu de difficultés dans le dernier alinéa du paragraphe IX, qui prévoit des rapports trimestriels du Gouvernement sur l'application de ces mêmes mesures, complétés d'un avis public de la Cnil.

 

 

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1 Dans sa rédaction initiale, l'article L. 3131-15 du CSP prévoyait que le Premier ministre pouvait, « dans les circonscriptions territoriales où l'état d'urgence sanitaire est déclaré, […]par décret réglementaire pris sur le rapport du ministre chargé de la santé, aux seules fins de garantir la santé publique : […] 3° Ordonner des mesures ayant pour objet la mise en quarantaine, au sens de l'article 1er du règlement sanitaire international de 2005, des personnes susceptibles d'être affectées ; 4° Ordonner des mesures de placement et de maintien en isolement, au sens du même article 1er, à leur domicile ou tout autre lieu d'hébergement adapté, des personnes affectées ». Selon le dernier alinéa du même article, « les mesures prescrites en application des 1° à 10° […] sont strictement proportionnées aux risques sanitaires encourus et appropriées aux circonstances de temps et de lieu. Il y est mis fin sans délai lorsqu'elles ne sont plus nécessaires ».

2 Décisions n° 2015-713 DC du 23 juillet 2015, Loi relative au renseignement et n° 2019-780 DC du 4 avril 2019, Loi visant à renforcer et garantir le maintien de l'ordre public lors des manifestations.

3 Pour une illustration récente, voir la décision n° 2019-807 QPC du 4 octobre 2019, M. Lamin J. (Compétence du juge administratif en cas de contestation de l'arrêté de maintien en rétention faisant suite à une demande d'asile formulée en rétention), paragr. 5 à 12.

4 Décision n° 92-307 DC du 25 février 1992, Loi portant modification de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, cons. 13.

5 Décision n° 99-411 DC du 16 juin 1999, Loi portant diverses mesures relatives à la sécurité routière et aux infractions sur les agents des exploitants de réseau de transport public de voyageurs, cons. 2 et 20.

6 Décision n° 2008-562 DC du 21 février 2008, Loi relative à la rétention de sûreté et à la déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental, cons. 13.

7 Voir, par exemple, les décisions n° 2010-71 QPC du 26 novembre 2010, Mlle Danielle S. (Hospitalisation sans consentement), cons. 16, n° 2011-631 DC du 9 juin 2011, Loi relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité, cons. 66, n° 2017-624 QPC du 16 mars 2017, M. Sofiyan I. (Assignations à résidence dans le cadre de l'état d'urgence II), paragr. 5 et, en dernier lieu, n° 2020-800 DC du 11 mai 2020, Loi prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions, paragr. 30.

8 Voir les décisions n° 2015-527 QPC du 22 décembre 2015, M. Cédric D. (Assignations à résidence dans le cadre de l'état d'urgence), cons. 6, et n° 2017-674 QPC du 30 novembre 2017, M. Kamel D. (Assignation à résidence de l'étranger faisant l'objet d'une interdiction du territoire ou d'un arrêté d'expulsion), paragr. 15.

9 Décision n° 92-307 DC du 25 février 1992 précitée, cons. 15 ; décision n° 2010-71 QPC du 26 novembre 2010 précitée, cons. 20.

10 Voir, en dernier lieu, la décision n° 2020-800 DC du 11 mai 2020 précitée, paragr. 41.

11 Décision n° 2010-71 QPC du 26 novembre 2010 précitée, cons. 25 et décision n° 2012-235 QPC du 20 avril 2012, Association Cercle de réflexion et de proposition d'actions sur la psychiatrie (Dispositions relatives aux soins psychiatriques sans consentement), cons. 16 à 18.

12 Décision n° 2011-631 DC du 9 juin 2011, Loi relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité, cons. 73.

13 Décision n° 80-127 DC du 20 janvier 1981, Loi renforçant la sécurité et protégeant la liberté des personnes, cons. 25 ; décision n° 2010-14/22 QPC du 30 juillet 2010, M. Daniel W. et autres (Garde à vue), cons. 26.

14 Décision n° 2012-253 QPC du 8 juin 2012, M. Mickaël D. (Ivresse publique), cons. 8.

15 Décision n° 2003-484 DC du 20 novembre 2003, Loi relative à la maîtrise de l'immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité, cons. 64 à 66.

16 Décision n° 2011-631 DC du 9 juin 2011 précitée, cons. 75.

17 Décision n° 2018-770 DC du 6 septembre 2018, Loi pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie, paragr. 75.

18 Décision n° 2017-674 QPC du 30 novembre 2017 précitée.

19 Décision n° 99-416 DC du 23 juillet 1999, Loi portant création d'une couverture maladie universelle, cons. 45.

20 Décision n° 2010-25 QPC du 16 septembre 2010, M. Jean-Victor C. (Fichier empreintes génétiques), cons. 6 et 16.

21 Décision n° 2012-652 DC du 22 mars 2012, Loi relative à la protection de l'identité, cons. 8.

22 Ibid., cons. 10.

23 Décision n° 2014-690 DC du 13 mars 2014, Loi relative à la consommation, cons. 51

24 Le Conseil contrôle en revanche l'éventuelle incompétence négative dont les dispositions de cette loi pourraient être entachées : voir par exemple décision n° 2004-499 DC du 29 juillet 2004, Loi relative à la protection des personnes physiques à l'égard des traitements de données à caractère personnel et modifiant la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, cons. 11.

25 Décision n° 2003-467 DC du 13 mars 2003, Loi pour la sécurité intérieure, cons. 45.

26 Décision n° 2013-684 DC du 29 décembre 2013, Loi de finances rectificative pour 2013, cons. 13.

27 Décision n° 2017-637 QPC du 16 juin 2017, Association nationale des supporters (Refus d'accès à une enceinte sportive et fichier d'exclusion), paragr. 13.

28 Décision n° 2018-765 DC du 12 juin 2018, Loi relative à la protection des données personnelles, paragr. 48 à 50.

29 Décision n° 2004-504 DC du 12 août 2004, Loi relative à l'assurance maladie, cons. 5. Cf. également, décision n° 99-422 DC du 21 décembre 1999, Loi de financement de la sécurité sociale pour 2000, cons. 56.

30 Même décision n° 2004-504 DC, même cons.

31 Décision n° 99-416 DC du 23 juillet 1999, Loi portant création d'une couverture maladie universelle, cons. 46.

32 Décision n° 2004-504 DC précitée, cons. 7.

33 Décision n° 99-416 DC, cons. 48 à 51.

34 Décision n° 99-422 DC, cons. 53.

35 Règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (règlement général sur la protection des données).

36 Décision n° 2018-765 DC du 12 juin 2018, Loi relative à la protection des données personnelles, paragr. 56 et 57.

37 Décision n° 2016-569 QPC du 23 septembre 2016, Syndicat de la magistrature et autre (Transaction pénale par officier de police judiciaire - Participation des conseils départementaux de prévention de la délinquance et des zones de sécurité prioritaires à l'exécution des peines), paragr. 26.

38 Cette mention ayant été ajoutée à l'Assemblée nationale.

39 Décision n° 2015-715 DC du 5 août 2015, Loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, cons. 45 ou décision n° 2006-544 DC du 14 décembre 2006, Loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, cons. 36 à 38.

40 Décision n° 2009-577 DC du 3 mars 2009, Loi relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision, cons. 29 à 31.

41 Décision n° 2013-679 DC du 4 décembre 2013, Loi relative à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière, cons. 78 et 79.

42 Décision n° 2015-721 DC du 12 novembre 2015, Loi organique portant diverses dispositions relatives à la collectivité de Saint-Barthélemy, cons. 13 à 15.

43 Décision n° 2016-741 DC du 8 décembre 2016, Loi relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, paragr. 147 et 148.

44 Décision n° 2017-753 DC du 8 septembre 2017, Loi organique pour la confiance dans la vie politique, paragr. 51 et 52.

45 Décision n° 2018-772 DC du 15 novembre 2018, Loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, paragr. 62 à 64.

46 Décision n° 2019-785 DC du 4 juillet 2019, Résolution modifiant le règlement de l'Assemblée nationale, cons. 46 et 47.

47 Loi n° 2016-987 du 21 juillet 2016 prorogeant l'application de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à l'état d'urgence et portant mesures de renforcement de la lutte antiterroriste.

48 Loi n° 2017-1510 du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme.

49 En revanche, les dispositions relatives à l'état d'urgence sanitaire avaient été disjointes par le Conseil d'État, dans son avis n° 399873 du 18 mars 2020 sur le projet de loi (« Le Conseil d'État propose également de supprimer la disposition imposant au Gouvernement la transmission d'informations relatives à la mise en œuvre de l'état d'urgence sanitaire car elle constitue une injonction du Parlement au Gouvernement et ne relève pas du domaine de la loi »).

50 Décision n° 2017-753 DC précitée, paragr. 44, 51 et 52.

51 Décision n° 2018-772 DC précitée, paragr. 63 et 64.