Conseil constitutionnel

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Commentaire de la décision 2019-823 QPC

09/12/2022

Conformité

 

Le Conseil constitutionnel a été saisi le 7 novembre 2019 par le Conseil d'État (décision n° 433460) d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) posée par l'union des industries de la protection des plantes et portant sur le paragraphe IV de l'article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous.

Dans sa décision n° 2019-823 QPC du 31 janvier 2020, le Conseil constitutionnel a déclaré ces dispositions conformes à la Constitution.

 

I. Les dispositions contestées

 

A. – Éléments de contexte

1. – Définition

Les produits phytopharmaceutiques, qui constituent une gamme de pesticides parmi d'autres, sont des préparations destinées uniquement à protéger les végétaux et les produits de culture1.

Cette définition inclut les produits issus de synthèse chimique mais aussi les produits d'origine naturelle et les produits à base de micro-organismes (bactéries ou virus). Il peut s'agir, notamment, d'herbicides, de fongicides, d'insecticides ou d'acaricides.

Chaque produit phytopharmaceutique se compose d'une ou plusieurs substances actives, responsables des propriétés du produit, et de substances appelées co-formulants. Ces dernières permettent de donner à la préparation une forme appropriée à son application : anti-mousse ou diluant par exemple.

Évaluer la dangerosité d'un produit phytopharmaceutique suppose, d'une part, d'évaluer la substance active en elle-même (voire également des co-formulants) et, d'autre part, d'évaluer la composition, la destination et les modalités d'application du produit finalisé.

2. – Cadre réglementaire européen

L'évaluation, avant mise sur le marché, des produits phytopharmaceutiques et des substances actives qui les composent est encadrée et harmonisée au niveau européen par le règlement précité (CE) n° 1107/2009 du 21 octobre 2009.

L'objet de ce règlement, énoncé à son considérant 8, est « de garantir un niveau élevé de protection de la santé humaine et animale et de l'environnement, et dans le même temps de préserver la compétitivité de l'agriculture communautaire. Il convient d'accorder une attention particulière à la protection des groupes vulnérables de la population, notamment les femmes enceintes, les nourrissons et les enfants. Le principe de précaution devrait être appliqué et le présent règlement devrait assurer que l'industrie démontre que les substances ou produits fabriqués ou mis sur le marché n'ont aucun effet nocif sur la santé humaine ou animale ni aucun effet inacceptable sur l'environnement ».

Cette réglementation repose sur deux piliers, qui distinguent, d'un côté, les substances actives et, de l'autre, les produits phytopharmaceutiques qui les comportent. Pour pouvoir entrer dans la composition de produits phytopharmaceutiques, les premières doivent faire l'objet d'une procédure d'approbation ab initio. Les produits phytopharmaceutiques eux-mêmes relèvent, en revanche, d'une procédure d'autorisation de mise sur le marché.

a. – La procédure d'approbation des substances actives

L'évaluation des substances actives entrant dans la composition des produits phytopharmaceutiques est réalisée au niveau européen. Elle est coordonnée par l'agence européenne de sécurité alimentaire (EFSA, selon son acronyme en anglais).

Cette évaluation permet de caractériser pour chaque substance ses propriétés intrinsèques et d'identifier les dangers qu'elle présente pour l'homme et l'environnement. Elle permet, notamment, de définir des valeurs toxicologiques de référence, nécessaires à l'évaluation du risque2.

Les conditions de la procédure sont fixées au chapitre II du règlement européen précité. Son article 4 fixe les conditions d'approbation d'une substance active. Il doit être prévisible, eu égard à l'état actuel des connaissances scientifiques et techniques, que les produits phytopharmaceutiques contenant cette substance active ou leurs résidus n'ont, d'une part, pas d'effet nocif sur la santé des êtres humains ou la santé des animaux, d'autre part, pas d'effet inacceptable sur l'environnement ou sur les végétaux ou produits végétaux. Les produits en cause ne doivent pas non plus provoquer des souffrances ou douleurs inutiles chez les animaux vertébrés à combattre.

Le règlement définit, dans son annexe II, les critères d'approbation correspondant à ces conditions. Ainsi, il prévoit qu'une substance active ne pourra pas être approuvée dans un certain nombre de cas, notamment si le dossier est incomplet (art. 2.2), si la substance ne présente pas une efficacité suffisante (art. 3.2), si elle est considérée comme ayant des effets perturbateurs endocriniens pouvant être néfastes pour l'homme (art. 3.6.5), comme un polluant organique persistant (art. 3.7.1) ou encore si elle présente des risques non acceptables pour l'environnement (écotoxicologie) (art. 3.8.1).

Si la substance active satisfait à ces critères d'approbation, la durée de la première approbation est de dix ans. Son renouvellement peut être sollicité, pour une durée de quinze ans à chaque fois. La Commission européenne peut réexaminer une approbation à tout moment.

Une fois que la substance active a été approuvée par l'Union européenne, elle peut être incorporée dans un produit phytopharmaceutique. La commercialisation de ce dernier suppose toutefois que sa mise sur le marché soit autorisée.

b. – Autorisation de mise sur le marché

L'autorisation de mise sur le marché relève de la compétence des États membres3 mais ses conditions sont encadrées par le chapitre III du règlement (CE) n° 1107/2009.

En premier lieu, le règlement prévoit que l'État membre ne peut pas autoriser la mise sur le marché de produits phytopharmaceutiques qui contiennent des substances non approuvées par l'Union européenne4.

En deuxième lieu, le règlement fixe la procédure conduisant à l'autorisation de mise sur le marché. Il prévoit notamment une évaluation du produit phytopharmaceutique en lui-même5.

En troisième lieu, le règlement dispense d'autorisation la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques dans certaines hypothèses (notamment pour les produits destinés à la recherche ou au développement et ceux destinés à être utilisés dans un autre État membre que l'État d'autorisation, sous réserve d'autorisation en ce sens dudit État, ou dans un État tiers à l'Union européenne6).

Les produits fabriqués dans les pays de l'Union européenne puis exportés vers des pays tiers à l'Union européenne, où ils sont autorisés, qui ne sont donc pas soumis à l'exigence d'autorisation de mise sur le marché, sont en revanche soumis au règlement (UE) n° 649/2012 (règlement sur le consentement préalable informé dit PIC)7.

Les produits fabriqués par les entreprises étrangères situées hors de l'Union européenne puis exportés vers des pays tiers à l'Union, où ils sont autorisés, et qui ne font donc que transiter par le territoire européen, sont quant à eux soumis à la convention de Rotterdam8.

C'est dans ce contexte réglementaire que s'inscrivent les dispositions contestées dans la QPC objet du présent commentaire.

 

B. – Origine et objet des dispositions contestées

Depuis la loi n° 2006-11 du 5 janvier 2006 d'orientation agricole, l'article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime est relatif à l'encadrement de l'usage des pesticides9. Initialement consacré à certaines mesures relatives à l'évaluation du risque que présentent les produits phytosanitaires pour la santé humaine et animale ou l'environnement, il a ensuite visé l'interdiction de la pulvérisation aérienne des produits phytopharmaceutiques10.

À partir de la loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, cet article a été complété d'un paragraphe II interdisant à compter du 1er septembre 201811 à la fois l'utilisation de produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives de la famille des néonicotinoïdes et l'utilisation de semences traitées avec ces mêmes produits12. Cette interdiction a ensuite été étendue aux cas où les substances actives en cause présentent « des modes d'action identiques à ceux de la famille des néonicotinoïdes » par la loi précitée dite « EGALIM » du 30 octobre 2018.

Cette même loi a complété l'article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime de deux paragraphes, applicables à partir du 1er janvier 2020. Le premier (paragraphe III dudit article) est consacré aux mesures de protection requises en cas d'utilisation de produits phytopharmaceutiques à proximité des habitations.

Le second (paragraphe IV de l'article L. 253-8) correspond aux dispositions dont le Conseil constitutionnel était saisi dans le cadre de la QPC commentée. Ces dispositions interdisent, à compter du 1er janvier 2022, la production, le stockage et la circulation de produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives non approuvées pour des raisons liées à la protection de la santé humaine ou animale ou de l'environnement conformément au règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009.

Comme le rappelle la circulaire d'application de ces dispositions13, les substances « non approuvées » doivent s'entendre uniquement de celles qui, à la suite de leur évaluation par l'agence européenne de sécurité alimentaire (EFSA), font l'objet d'un règlement d'exécution portant non approbation ou non renouvellement de leur autorisation d'approbation, au titre et selon la procédure précédemment décrite du règlement (CE) n° 1107/2009, pour un motif de dangerosité environnementale ou sanitaire.

Dès lors, l'interdiction ne s'étend pas aux produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives non approuvées, lorsque la raison de cette absence d'approbation est soit qu'aucune demande d'approbation pour l'Union européenne n'a été déposée, soit que le motif retenu pour refuser l'approbation n'est pas lié à leur dangerosité pour la santé ou l'environnement. Dans ce dernier cas, il peut s'agir, par exemple, d'un refus d'approbation pour absence d'efficacité suffisante ou irrégularité du dossier de demande d'approbation14.

Par ailleurs, l'interdiction, qui est limitée aux produits phytopharmaceutiques eux-mêmes, ne s'applique donc pas à l'activité de synthèse des substances actives non approuvées ni aux produits non phytopharmaceutiques contenant de telles substances, comme par exemple les médicaments ou les biocides.

Enfin, l'interdiction s'applique « sous réserve du respect des règles de l'Organisation mondiale du commerce ». Comme le rappelle la circulaire d'application du texte, il s'agit, en particulier, de respecter la liberté de transit des marchandises prévue par l'article V-2 des accords généraux sur le commerce et les tarifs douaniers. Ce transit est donc autorisé dans la mesure où les produits se bornent à circuler en France sans y être produits, utilisés ou commercialisés.

En raison des prescriptions du règlement européen15, l'interdiction ne peut, en pratique, concerner que les exportations, à partir de la France, de produits phytopharmaceutiques à destination de pays non membres de l'Union européenne. En effet, pour être exporté vers un pays membre de l'Union européenne ou commercialisé en France, il est nécessaire que le produit en cause obtienne une autorisation de mise sur le marché ou soit autorisé dans l'État membre auquel il est destiné, ce qui est inenvisageable s'il contient des substances non approuvées par l'Union européenne.

 

C. – Origine de la QPC et question posée

Pour l'application du paragraphe IV de l'article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime, dans sa version résultant de la loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018, le ministre de la transition écologique et solidaire, le ministre de l'économie et des finances ainsi que le ministre de l'agriculture et de l'alimentation avaient adopté la circulaire précitée du 23 juillet 2019 relative à l'entrée en vigueur de l'interdiction portant sur certains produits phytopharmaceutiques pour des raisons de protection de la santé et de l'environnement, en application de la modification de cet article.

L'Union des industries de la protection des plantes (UIPP) avait introduit un recours pour excès de pouvoir à l'encontre de cette circulaire.

À cette occasion, le 9 août 2019, l'UIPP avait posé une QPC relative aux dispositions du paragraphe IV de l'article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime.

Par la décision précitée du 7 novembre 2019, le Conseil d'État avait décidé de renvoyer la QPC au Conseil constitutionnel, au motif que « le moyen tiré par l'Union des industries de la protection des plantes de ce que l'interdiction de la production, du stockage et de la circulation de produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives non approuvées par l'Union européenne pour des raisons liées à la protection de la santé humaine ou animale ou de l'environnement prévue par ces dispositions est susceptible de porter atteinte à la liberté d'entreprendre, garantie par l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, soulève une question présentant un caractère sérieux ».

 

II. – L'examen de la constitutionnalité des dispositions contestées

La partie requérante présentait un grief unique, centré sur la liberté d'entreprendre.

Elle dénonçait la gravité des atteintes à cette liberté résultant de l'interdiction d'exportation prévues par les dispositions en cause, au regard notamment des conséquences sur l'emploi et les investissements. Elle soutenait qu'une telle interdiction était sans lien avec l'objectif de protection de l'environnement et de la santé dans la mesure où les pays importateurs des produits en cause pouvaient continuer de s'approvisionner auprès d'autres pays que la France et qu'en conséquence, l'impact sur la santé ou l'environnement des pays tiers à l'Union européenne serait le même.

 

A. – La jurisprudence constitutionnelle applicable

 

1. – La liberté d'entreprendre

La liberté d'entreprendre a été consacrée par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 16 janvier 1982 relative aux nationalisations16. La protection constitutionnelle de cette liberté est fondée sur l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, en vertu duquel : « La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi, l'exercice des droits naturels de chaque homme n'a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la société la jouissance de ces mêmes droits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la loi ».

Les critères du contrôle opéré par le Conseil constitutionnel sont énoncés dans la formulation de principe adoptée depuis la décision du 16 janvier 2001 sur l'archéologie préventive : « il est loisible au législateur d'apporter à la liberté d'entreprendre, qui découle de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, des limitations liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par l'intérêt général, à la condition qu'il n'en résulte pas d'atteintes disproportionnées au regard de l'objectif poursuivi »17.

Le Conseil constitutionnel juge donc que toute limitation de la liberté d'entreprendre doit être justifiée par une exigence constitutionnelle ou un motif d'intérêt général pour être déclarée conforme à la Constitution.

Il résulte de ce qui précède que le Conseil constitutionnel s'interroge sur l'existence d'une atteinte à la liberté d'entreprendre avant de rechercher l'existence d'un motif d'intérêt général ou d'une exigence constitutionnelle de nature à la justifier. S'il a répondu par l'affirmative à ces deux premières questions, alors il devra déterminer si l'atteinte portée à la liberté d'entreprendre est proportionnée à l'objectif poursuivi. Face à un objectif de valeur constitutionnelle, le Conseil constitutionnel exerce en principe un contrôle restreint de l'absence de disproportion manifeste alors qu'il procède à un contrôle entier face à un motif d'intérêt général.

L'étape du contrôle de la justification de l'atteinte par un motif d'intérêt général ou une exigence constitutionnelle en lien direct avec l'objectif poursuivi est importante puisque l'inconstitutionnalité de la disposition peut être acquise à ce stade si un tel lien n'existe pas ou est trop indirect.

Ainsi, dans sa décision n° 2013-317 QPC du 24 mai 2013, le Conseil constitutionnel a censuré une disposition donnant au Gouvernement, de façon générale, compétence pour fixer les conditions dans lesquelles certaines constructions devaient comporter une quantité minimale de matériaux en bois. Après avoir écarté le grief tiré d'une atteinte au principe de participation du public, au motif que « l'exigence de telles normes techniques n'est, en elle-même, susceptible de n'avoir qu'une incidence indirecte sur l'environnement »18, il a considéré que l'atteinte à la liberté d'entreprendre n'était, en revanche, pas justifiée par un motif d'intérêt général en lien direct avec l'objectif poursuivi par le législateur, qui était de permettre l'adoption de normes techniques dans le bâtiment destinées à imposer l'utilisation de bois dans les constructions nouvelles, afin de favoriser une augmentation de la production de bois dont il était attendu une amélioration de la lutte contre la pollution atmosphérique19.

* Parmi les nombreuses décisions rendues par le Conseil constitutionnel en matière de liberté d'entreprendre, celle relative au moratoire sur le bisphénol A se rapprochait le plus de l'affaire ayant fait l'objet de la décision commentée. 

Dans cette décision n° 2015-480 QPC du 17 septembre 201520, le Conseil était saisi de l'article 1er de la loi du 30 juin 2010 qui suspendait la fabrication, l'importation, l'exportation et la mise sur le marché à titre gratuit ou onéreux de tout conditionnement, contenant ou ustensile comportant du bisphénol A à vocation alimentaire. Le Conseil a distingué à cet égard deux situations : celle de la fabrication ou de la commercialisation de ces produits pour le marché français et celle des mêmes fabrication ou commercialisation à des fins d'exportation.

Dans le premier cas, relatif au seul marché français, le Conseil a constaté que le législateur, par ce moratoire, avait entendu prévenir les risques susceptibles de résulter de l'exposition au bisphénol A pour la santé des personnes. Après avoir rappelé que, ne disposant pas du même pouvoir d'appréciation que le législateur, il ne lui appartenait pas, en l'état des connaissances, de remettre en cause les dispositions prises par ce dernier, le Conseil a considéré que l'atteinte ainsi portée à la liberté d'entreprendre n'était pas manifestement disproportionnée au regard de l'objectif constitutionnel de protection de la santé poursuivi21.

En revanche, pour le second cas, le Conseil a constaté que la commercialisation de produits à base de bisphénol A était autorisée dans de nombreux pays. Il en a déduit « qu'ainsi, la suspension de la fabrication et de l'exportation de ces produits sur le territoire de la République ou à partir de ce territoire est sans effet sur la commercialisation de ces produits dans les pays étrangers ». Ce faisant, il a estimé que, « en suspendant la fabrication et l'exportation de ces produits en France ou depuis la France, le législateur a apporté à la liberté d'entreprendre des restrictions qui ne sont pas en lien avec l'objectif poursuivi »22. Le Conseil a donc estimé que le moratoire sur les exportations de bisphénol A était insusceptible de contribuer à la réalisation de l'objectif de protection de la santé poursuivi par le législateur. Un tel défaut de justification suffisait à emporter la censure de ce moratoire particulier, sans que le Conseil ait à examiner la proportionnalité de l'atteinte avec l'objectif poursuivi.

Le Conseil constitutionnel a reproduit le même type de raisonnement lorsqu'il a été saisi de dispositions interdisant l'usage de produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives de la famille des néonicotinoïdes (décision n° 2016-737 DC du 4 août 2016)23. Une telle interdiction était justifiée par l'objectif d'intérêt général de protection de l'environnement et l'objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé publique. Le législateur avait expressément prévu que cette interdiction ne concernait ni la fabrication ni l'exportation de tels produits. À la différence du cas du moratoire sur le bisphénol A, la question de la justification de l'interdiction ne se posait donc pas en ce qui concernait l'exportation, ce que le Conseil a expressément relevé. Il a ensuite, plus classiquement, cherché à évaluer le caractère proportionné de l'atteinte porté à la liberté d'entreprendre avec les objectifs poursuivis par le législateur. Il a relevé à cet égard que si la date d'entrée en vigueur de l'interdiction d'usage était proche de celle de l'adoption des dispositions en cause (l'entrée en vigueur était fixée au 1er septembre 2018), des possibilités de dérogation avaient été aménagées par le législateur, pour une durée de vingt-deux mois. Le Conseil en a conclu que l'atteinte portée à la liberté d'entreprendre n'était pas manifestement disproportionnée aux objectifs poursuivis.

Dans sa décision n° 2018-771 DC du 25 octobre 2018, le Conseil était également saisi d'une disposition qui ne prévoyait qu'une interdiction de mise à disposition de certains ustensiles en matière plastique (« pailles, couverts, piques à steak, couvercles à verre jetables, plateaux-repas, pots à glace, saladiers, boîtes et bâtonnets mélangeurs pour boissons »). Le Conseil s'est borné à relever, dans la description de la disposition, que « La mise à disposition ainsi visée s'entend de la mise à disposition gratuite ou onéreuse, y compris la mise sur le marché, de ces ustensiles en France », sans reprendre expressément ensuite cet élément dans son raisonnement de constitutionnalité. Pour le reste, rappelant une nouvelle fois qu'il ne lui appartenait pas de remettre en cause, en l'état des connaissances, l'appréciation par le législateur des conséquences susceptibles de résulter pour l'environnement et pour la santé publique de l'utilisation de ces produits, il a estimé que la restriction apportée à la liberté d'entreprendre était bien en lien avec l'objectif de protection de l'environnement et de la santé publique poursuivi24. En dépit d'une date rapprochée de prise d'effet de l'interdiction (le 1er janvier 2020, pour une loi adoptée à l'automne 2018), il a considéré, après avoir notamment relevé que les ustensiles réutilisables ainsi que les ustensiles jetables qui sont compostables en compostage domestique et constitués de matières biosourcées étaient exclus du champ de cette interdiction, que « l'atteinte portée à la liberté d'entreprendre par le législateur n'est pas, compte tenu du champ de cette interdiction, manifestement disproportionnée au regard de l'objectif d'intérêt général de protection de l'environnement et de la santé publique »25.

 

2. – La protection de l'environnement et la protection de la santé

Le Conseil constitutionnel a mobilisé à plusieurs reprises les exigences de protection de l'environnement ou de protection de la santé publique afin de justifier des atteintes portées à certaines exigences constitutionnelles.

* Jusqu'à présent, le Conseil constitutionnel n'a envisagé, dans ce cadre, la protection de l'environnement que comme un objectif d'intérêt général26. Il en est allé ainsi, par exemple, pour justifier l'obligation faite aux distributeurs de matériaux, de produits et d'équipements de construction, de reprendre les déchets provenant des matériaux vendus aux professionnels27, pour justifier l'interdiction des forages recourant à la technique de fracturation hydraulique28 ou pour justifier, comme on l'a vu précédemment, l'interdiction des pesticides à base de néonicotinoïdes29 ou de certains produits en plastique non réutilisables30.

* Le Conseil constitutionnel a reconnu la valeur de principe constitutionnel à la protection de la santé publique dès la décision n° 90-283 DC du 8 janvier 1991, rendue sur la loi relative à la lutte contre le tabagisme et l'alcoolisme31, en le rattachant au onzième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946.

Par la suite, il a mobilisé à de nombreuses reprises cette exigence constitutionnelle pour justifier certaines atteintes portées à d'autres principes constitutionnels. Il a pu, à cette occasion, assimiler cette exigence à un objectif de valeur constitutionnelle, par exemple en matière d'accouchement sous X32 ou de lutte contre l'alcoolisme33. Comme on l'a vu, il a procédé de même, s'agissant de la mise en cause de la liberté d'entreprendre résultant de l'interdiction de certains produits à base de bisphénol A34 ou de néonicotinoïdes35. Dans d'autres cas, il s'est borné à citer cette exigence constitutionnelle, sans en qualifier autrement la nature, dans le cadre de restrictions à l'exercice de liberté d'entreprendre s'agissant des conditions de qualification pour l'accès à certains métiers artisanaux36, du prix de vente minimum du tabac37, de l'instauration d'un paquet « neutre » de cigarettes38, de restriction de publicité en faveur des officines de pharmacie39 ou de prix maximal de vente de certains dispositifs médicaux40, ainsi que, en matière d'atteinte à la vie privée, de renseignements médicaux transmis aux services de contrôle41.

Par ailleurs, lorsque l'exigence de protection de la santé publique ne vise pas à justifier l'atteinte portée à une autre exigence constitutionnelle, mais que les requérants dénoncent directement sa méconnaissance, le Conseil constitutionnel accepte d'en connaître, en qualifiant alors cette exigence de droit à la protection de la santé et non d'objectif de valeur constitutionnelle42.

 

C. – L'application à l'espèce

* Le Conseil constitutionnel a, tout d'abord, énoncé les normes constitutionnelles applicables à l'espèce.

En premier lieu, le Conseil a rappelé que la liberté d'entreprendre découle de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 (paragr. 3).

En deuxième lieu, le Conseil constitutionnel a jugé, en des termes inédits, qu'il découlait du préambule de la Charte de l'environnement un objectif de valeur constitutionnelle de « protection de l'environnement, patrimoine commun des êtres humains » (paragr. 4).

Pour reconnaître ce nouvel objectif de valeur constitutionnelle, le Conseil constitutionnel s'est expressément fondé sur certains termes du préambule de la Charte, selon lesquels « l'avenir et l'existence même de l'humanité sont indissociables de son milieu naturel … l'environnement est le patrimoine commun des êtres humains… la préservation de l'environnement doit être recherchée au même titre que les autres intérêts fondamentaux de la Nation … afin d'assurer un développement durable, les choix destinés à répondre aux besoins du présent ne doivent pas compromettre la capacité des générations futures et des autres peuples à satisfaire leurs propres besoins » (paragr. 4).

La consécration de cet objectif de valeur constitutionnelle de protection de l'environnement appelle deux observations.

D'une part, le Conseil constitutionnel a déjà reconnu valeur constitutionnelle au préambule de la Charte de l'environnement. Il a toutefois jugé qu'aucun des sept alinéas qui le composent « n'institue un droit ou une liberté que la Constitution garantit ; qu'ils ne peuvent être invoqués à l'appui d'une question prioritaire de constitutionnalité sur le fondement de l'article 61-1 de la Constitution » 43, à la différence, par exemple, des articles 1er à 4 et 7 de cette même charte44. En tirant un objectif de valeur constitutionnelle de protection de l'environnement des dispositions du préambule, le Conseil se place dans la ligne de sa jurisprudence antérieure, puisque, sauf exception, de tels objectifs de valeur constitutionnelle ne constituent pas des droits ou libertés invocables dans le cadre d'une QPC. Il s'agit, en revanche, de normes sur le fondement desquelles le législateur peut apporter des restrictions à des tels droits ou libertés constitutionnels.

D'autre part, le Conseil constitutionnel s'est appuyé sur le fait que l'environnement est reconnu, par le préambule de la Charte, comme un patrimoine commun de l'humanité pour en déduire une norme de concrétisation particulière, énoncée au paragraphe 6, selon laquelle le législateur est fondé à tenir compte des effets que les activités exercées en France peuvent porter à l'environnement à l'étranger : l'objectif de protection de l'environnement ne se limite donc pas à la protection de l'environnement national. Il revêt une portée universelle dont s'infère la possibilité pour le législateur de promouvoir cette protection partout sur la planète.

En troisième lieu, le Conseil a énoncé qu'« aux termes du onzième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946, la Nation "garantit  à tous ... la protection de la santé". Il en découle un objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé » (paragr. 5). Par cette formule nouvelle, le Conseil constitutionnel confirme l'existence, au côté du principe constitutionnel de protection de la santé, directement invocable en QPC, d'un objectif de valeur constitutionnelle habilitant le législateur à agir au nom de la protection de la santé, le cas échéant en portant atteinte à d'autres exigences constitutionnelles.

* Le Conseil constitutionnel a, ensuite, examiné l'atteinte portée en l'espèce à la liberté d'entreprendre par les dispositions qui lui étaient soumises.

Tout d'abord, il a estimé que les dispositions contestées ont bien pour effet de porter atteinte à la liberté d'entreprendre dès lors qu'elles font obstacle à la vente et à l'exportation des produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives non approuvées par l'Union européenne en raison de leurs effets nocifs sur la santé humaine ou animale ou de leurs effets inacceptables sur l'environnement (paragr. 8 et 9).

S'attachant aux objectifs poursuivis par le législateur, il a constaté qu'« en adoptant ces dispositions, le législateur a entendu prévenir les atteintes à la santé humaine et à l'environnement susceptibles de résulter de la diffusion des substances actives contenues dans les produits en cause, dont la nocivité a été constatée dans le cadre de la procédure prévue par le règlement du 21 octobre 2009 » (paragr. 9). De manière classique, il a rappelé qu'il ne lui appartient pas, en ces matières scientifiques, « de remettre en cause, au regard de l'état des connaissances, les dispositions ainsi prises par le législateur » (même paragr.). Le Conseil constitutionnel a donc considéré que le législateur avait bien entendu, en l'espèce, placer son action sous les auspices des objectifs de valeur constitutionnelle de protection de l'environnement et de protection de la santé.

Il lui appartenait alors de s'assurer, d'une part, que les moyens retenus par le législateur étaient bien adéquats aux finalités visées et, d'autre part, que la conciliation opérée entre ces objectifs et la liberté d'entreprendre n'était pas manifestement déséquilibrée.

Le premier point était le plus délicat au regard de la jurisprudence du Conseil constitutionnel puisque, dans la décision n° 2015-480 QPC sur l'interdiction du bisphénol A, la censure avait précisément été acquise sur cette absence d'adéquation entre la mesure retenue et les finalités poursuivies. Dans la décision commentée, le Conseil constitutionnel a jugé qu'« En faisant ainsi obstacle à ce que des entreprises établies en France participent à la vente de tels produits partout dans le monde et donc, indirectement, aux atteintes qui peuvent en résulter pour la santé humaine et l'environnement et quand bien même, en dehors de l'Union européenne, la production et la commercialisation de tels produits seraient susceptibles d'être autorisées, le législateur a porté à la liberté d'entreprendre une atteinte qui est bien en lien avec les objectifs de valeur constitutionnelle de protection de la santé et de l'environnement poursuivis » (paragr. 10).

Ainsi qu'il l'avait fait, implicitement, dans sa décision n° 2018-771 DC, en ne relevant pas que l'interdiction de certains produits plastiques jetables n'incluait pas l'activité d'exportation, le Conseil constitutionnel a donc considéré que le fait qu'une activité nuisible à l'environnement ou à la santé soit autorisée à l'étranger ne saurait, en soi, priver le législateur français de la possibilité, au nom de la protection de l'environnement ou de la santé, d'interdire aux sociétés régies par le droit français d'y participer. Il ne s'agit plus seulement de permettre au législateur de porter une atteinte à une exigence constitutionnelle au nom de la protection de l'environnement entendu comme une notion limitée à l'espace national, mais d'admettre que la protection de l'environnement doit être appréhendée de manière universelle.  Il ne s'agit par ailleurs plus seulement de raisonner à partir du niveau global des atteintes à l'environnement ou à la santé, qui ne diminuera peut-être pas du seul fait de l'éviction des entreprises françaises au profit de leurs concurrentes étrangères. Il s'agit de permettre au législateur de promouvoir, pour ce qui relève de la zone de souveraineté française, des comportements protecteurs, quand bien même cette action positive pourrait se trouver, matériellement, annihilée par une recrudescence d'actions nuisibles à l'environnement commises par les entreprises d'autres pays.   

La norme de concrétisation évoquée précédemment, selon laquelle le législateur est fondé à tenir compte des effets que les activités exercées en France peuvent porter à l'environnement, rend d'ailleurs compte de cet infléchissement du raisonnement retenu par le Conseil constitutionnel : elle ne fait nullement référence au régime juridique régissant lesdites activités à l'étranger.

S'attachant ensuite aux garanties apportées à la liberté d'entreprendre, le Conseil a jugé qu'« en différant au 1er janvier 2022 l'entrée en vigueur de l'interdiction de production, de stockage ou de circulation des produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives non approuvées, le législateur a laissé aux entreprises qui y seront soumises un délai d'un peu plus de trois ans pour adapter en conséquence leur activité » (paragr. 11).

Le Conseil en a conclu, que, « en adoptant les dispositions contestées, le législateur a assuré une conciliation qui n'est pas manifestement déséquilibrée entre la liberté d'entreprendre et les objectifs de valeur constitutionnelle de protection de l'environnement et de la santé » (paragr. 12).

Il a, en conséquence, écarté le grief tiré de la méconnaissance de la liberté d'entreprendre et déclaré conformes à la Constitution les dispositions du paragraphe IV de l'article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime.

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1 L'article 2 du règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et abrogeant les directives 79/117/CEE et 91/414/CEE du Conseil en fournit la définition suivante. Il s'agit des produits destinés à l'un des usages suivants : « a) protéger les végétaux ou les produits végétaux contre tous les organismes nuisibles ou prévenir l'action de ceux-ci, sauf si ces produits sont censés être utilisés principalement pour des raisons d'hygiène plutôt que pour la protection des végétaux ou des produits végétaux ; / b) exercer une action sur les processus vitaux des végétaux, telles les substances, autres que les éléments nutritifs ou les biostimulants des végétaux, exerçant une action sur leur croissance ; / c) assurer la conservation des produits végétaux, pour autant que ces substances ou produits ne fassent pas l'objet de dispositions communautaires particulières concernant les agents conservateurs ; / d) détruire les végétaux ou les parties de végétaux indésirables, à l'exception des algues à moins que les produits ne soient appliqués sur le sol ou l'eau pour protéger les végétaux ; / e) freiner ou prévenir une croissance indésirable des végétaux, à l'exception des algues à moins que les produits ne soient appliqués sur le sol ou l'eau pour protéger les végétaux ».

2 Il s'agit des indicateurs suivants : la dose journalière acceptable (DJA), la dose de référence aiguë (ARfD) pour les consommateurs, et la dose d'exposition acceptable (AOEL) pour l'applicateur et le travailleur.

3 Règlement (CE) n° 1107/2009, art. 28.

4 Règlement (CE) n° 1107/2009, art. 29.

5 Règlement (CE) n° 1107/2009, art. 36.

6 Règlement (CE) n° 1107/2009, art. 28, b), c) et d).

7 Son objectif est d'encourager le partage des responsabilités et la coopération dans le cadre du commerce international de produits chimiques dangereux, et de protéger la santé humaine et l'environnement en fournissant aux pays en développement des informations sur le stockage, le transport, l'utilisation et l'élimination en toute sécurité des produits chimiques dangereux.

8 Convention de Rotterdam du 10 septembre 1998 sur la procédure de consentement préalable en connaissance de cause applicable à certains produits chimiques et pesticides dangereux qui font l'objet d'un commerce international. Cette convention internationale, dont la dernière révision date de 2017, vise, d'une part, à encourager le partage des responsabilités et la coopération dans le domaine du commerce international de certains produits chimiques dangereux, afin de protéger la santé des personnes et l'environnement contre des dommages éventuels et, d'autre part, à l'utilisation écologiquement rationnelle de ces produits chimiques dangereux en facilitant l'échange d'informations sur leurs caractéristiques et en instituant un processus national de prise de décisions applicable à leur importation et à leur exportation.

9 Il résulte de la codification du CRPM réalisée par l'ordonnance n° 2000-914 du 18 septembre 2000 relative à la partie Législative du code de l'environnement.

10 Ordonnance n° 2011-840 du 15 juillet 2011 relative à la mise en conformité des dispositions nationales avec le droit de l'Union européenne sur la mise sur le marché et l'utilisation des produits phytopharmaceutiques.

11 Toutefois, le législateur a prévu des dérogations pouvant être accordées jusqu'au 1er septembre 2020 par arrêté conjoint des ministres chargés de l'agriculture, de l'environnement et de la santé fondées sur un bilan public établi par l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail.

12 Les néonicotinoïdes sont une classe de produits toxiques employés comme insecticides. Ils agissent sur le système nerveux central des insectes. Leur faible biodégradabilité et le fait qu'ils affectent également, au bout d'un certain temps, des espèces non ciblées (notamment les abeilles et les prédateurs des insectes cibles tels que les oiseaux ou les chauve-souris) ont conduit à cette interdiction.

13 Circulaire du 23 juillet 2019 relative à l'entrée en vigueur de l'interdiction portant sur certains produits phytopharmaceutiques pour des raisons de protection de la santé et de l'environnement, en application de la modification de l'article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime (NOR : ECOI1918846C).

14 Cette question du champ de l'interdiction a fait l'objet d'un débat au cours des travaux parlementaires, qui a conduit à l'adoption d'un sous-amendement, afin de cibler uniquement, selon les termes du ministre de l'agriculture et de l'alimentation, M. Stéphane Travert, « les substances non approuvées pour des raisons de toxicité ou d'écotoxicité. Ainsi, les substances pour lesquelles aucune évaluation n'aurait été demandée, car le marché européen n'est pas visé par le metteur en marché en raison de l'absence de besoin sur notre territoire – faute de culture ou de nuisible – ne seraient pas concernées. / À titre d'exemple, les substances visant à lutter contre les criquets pèlerins, lesquels sont responsables de ravages en Afrique, sont produites et stockées en France avant d'être exportées. Elles ne disposent pas d'une approbation européenne car elles ne répondent à aucun besoin en Europe, en raison de l'absence de ce type de criquet » (JOAN, troisième séance du vendredi 14 septembre 2018).

15 Cf. supra.

16 Décision n° 81-132 DC du 16 janvier 1982, Loi de nationalisation, cons. 16.

17 Décision no 2000-439 DC du 16 janvier 2001, Loi relative à l'archéologie préventive, cons. 14 ; décision n° 2018-702 QPC du 20 avril 2018, Société Fnac Darty (Pouvoirs du président de l'autorité de la concurrence en matière d'opérations de concentration), paragr. 8 ; décision n° 2018-771 DC du 25 octobre 2018, Loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, paragr. 13.

18 Décision n° 2013-317 QPC du 24 mai 2013, Syndicat français de l'industrie cimentière et autre (Quantité minimale de matériaux en bois dans certaines constructions nouvelles), cons. 7.

19 Ibidem, cons. 10. Ce contrôle n'est pas propre à la matière environnementale : dans sa décision n° 2015-468/469/472 QPC du 22 mai 2015, le Conseil s'est prononcé sur des modalités de tarification particulière imposées aux voitures de transport avec chauffeur. L'intention du législateur, dans un objectif d'ordre public, notamment de police de la circulation et du stationnement sur la voie publique, était de garantir le monopole légal des taxis qui en découle. Le Conseil a estimé « qu'en interdisant certains modes de tarification pour la détermination du prix des prestations que les entreprises qui mettent à la disposition de leur clientèle une ou plusieurs voitures avec chauffeur proposent aux consommateurs lors de la réservation préalable, les dispositions contestées ont porté à la liberté d'entreprendre une atteinte qui n'est pas justifiée par un motif d'intérêt général en lien direct avec l'objectif poursuivi » (décision n° 2015-468/469/472 QPC du 22 mai 2015, Société UBER France SAS et autre [Voitures de transport avec chauffeur - Interdiction de la « maraude électronique » - Modalités de tarification - Obligation de retour à la base], cons. 13 et 18 à 20).

20 Décision n° 2015-480 QPC du 17 septembre 2015, Association Plastics Europe (Suspension de la fabrication, de l'importation, de l'exportation et de la mise sur le marché de tout conditionnement à vocation alimentaire contenant du Bisphénol A).

21 Décision n° 2015-480 QPC précitée, paragr. 6 et 7.

22 Ibidem, paragr. 8.

23 Décision n° 2016-737 DC du 4 août 2016, Loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, paragr. 33, 34 et 37 à 39.

24 Décision n° 2018-771 DC du 25 octobre 2018, Loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, paragr. 18.

25 Ibidem, paragr. 19.

26 Cf., par exemple, récemment, la justification, au regard du principe d'égalité devant les charges publiques, de la taxe sur l'huile de palme, au nom de la protection de l'environnement. Le Conseil le précise, dans sa décision n° 2019-808 QPC du 11 octobre 2019, Société Total raffinage France (Soumission des biocarburants à base d'huile de palme à la taxe incitative relative à l'incorporation de biocarburants), paragr. 7 et 8.

27 Décision n° 2016-605 QPC du 17 janvier 2017, Confédération française du commerce de gros et du commerce international (Obligation de reprise des déchets issus de matériaux, produits et équipements de construction), paragr. 8. Cet objectif apparaît en l'espèce de manière implicite, le Conseil constitutionnel jugeant « qu'en adoptant les dispositions contestées, le législateur a entendu, pour limiter le coût de transport des déchets issus du bâtiment et des travaux publics et éviter leur abandon en pleine nature, favoriser un maillage de points de collecte au plus près des chantiers de construction. Il a ainsi poursuivi un objectif d'intérêt général ».

28 Décision n° 2013-346 QPC du 11 octobre 2013, Société Schuepbach Energy LLC (Interdiction de la fracturation hydraulique pour l'exploration et l'exploitation des hydrocarbures - Abrogation des permis de recherches), cons. 12.

29 Décision n° 2016-737 DC du 4 août 2016 précitée, paragr. 38.

30 Décision n° 2018-771 DC du 25 octobre 2018 précitée, paragr. 17.

31 Décision n° 90-283 DC du 8 janvier 1991, Loi relative à la lutte contre le tabagisme et l'alcoolisme, cons. 8 et 11.

32 Décision n° 2012-248 QPC du 16 mai 2012, M. Mathieu E. (Accès aux origines personnelles), cons. 6.

33 Décision n° 2015-493 QPC du 16 octobre 2015, M. Abdullah N. (Peine complémentaire obligatoire de fermeture de débit de boissons), cons. 12.

34 Décision n° 2015-480 QPC du 17 septembre 2015 précitée, cons. 5 et 7.

35 Décision n° 2016-737 DC du 4 août 2016 précitée, paragr. 39.

36 Décision n° 2011-139 QPC du 24 juin 2011, Association pour le droit à l'initiative économique (Conditions d'exercice de certaines activités artisanales), cons. 8.

37 Décision n° 2012-290/291 QPC du 25 janvier 2013, Société Distrivit et autres (Droit de consommation du tabac dans les DOM), cons. 16.

38 Décision n° 2015-727 DC du 21 janvier 2016, Loi de modernisation de notre système de santé, cons. 21.

39 Décision n° 2013-364 QPC du 31 janvier 2014, Coopérative GIPHAR-SOGIPHAR et autre (Publicité en faveur des officines de pharmacie), cons. 6 et 8.

40 Décision n° 2019-795 DC du 20 décembre 2019, Loi de financement de la sécurité sociale pour 2020, paragr. 49 à 52.

41 Décision n° 2017-756 DC du 21 décembre 2017, Loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, paragr. 63 à 65.

42 Décision n° 2018-768 QPC du 21 mars 2019, M. Adama S. (Examens radiologiques osseux aux fins de détermination de l'âge), paragr. 14 à 16.

43 Décision n° 2014-394 QPC du 7 mai 2014 Société Casuca (Plantations en limite de propriétés privées), cons. 5.

44 Voir les décisions n° 2011-116 QPC du 8 avril 2011, M. Michel Z. et autre (Troubles du voisinage et environnement), cons. 5 et 6, n° 2014-394 QPC du 7 mai 2014 précitée, cons. 7, et n° 2011-183/184 QPC du 14 octobre 2011, Association France Nature Environnement (Projets de nomenclature et de prescriptions générales relatives aux installations classées pour la protection de l'environnement), cons. 6.