Cour de cassation

Arrêt du 19 décembre 2023 n° 23-90.014

19/12/2023

Non renvoi

N° S 23-90.014 F-D

N° 01614

19 DÉCEMBRE 2023

RB5

QPC PRINCIPALE : NON LIEU À RENVOI AU CC

M. BONNAL président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,

DU 19 DÉCEMBRE 2023

Le tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre, par jugement en date du 14 septembre 2016, reçu le 13 octobre 2023 à la Cour de cassation, a transmis une question prioritaire de constitutionnalité dans la procédure suivie contre M. [D] [H] des chefs d'outrage et rébellion.

Sur le rapport de Mme Chaline-Bellamy, conseiller, et les conclusions de M. Desportes, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 19 décembre 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Chaline-Bellamy, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

1. La question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :

« Les textes sus-visés [l'article 433-5, alinéa 1er et 2 et 433-22 du code pénal] à la base de la poursuite en outrage sont contraires en la cause à la Constitution pour deux raisons :

- En l'espèce ils heurtent la disposition constitutionnelle en son article 2 selon laquelle la langue officielle des actes est le français, or tel n'est pas le cas des propos rapportés. Que le fait que les actes de poursuite autorisent une lecture du texte qui serait à la base des poursuites comme étant valable en français et langue étrangère autorise Monsieur [H] à quereller la constitutionnalité ».

2. La question peut être reformulée par le juge afin de la rendre plus claire ou de lui restituer son exacte qualification, à condition de ne pas en modifier l'objet et la portée (Ass. plén., 20 mai 2011, pourvoi n° 11-90.033, Bull. crim. 2011, Ass. plén., n° 6).

3. Il y a lieu en conséquence de considérer que la Cour de cassation est régulièrement saisie de la question prioritaire de constitutionnalité, ainsi reformulée par le tribunal judiciaire :

« Les dispositions de l'article 433-5 du code pénal portent-elles atteinte aux droits et libertés garantis par l'article 2 de la Constitution en permettant, par son imprécision, de poursuivre comme outrageants des propos tenus dans une autre langue que le français ? ».

4. La disposition législative contestée, dans sa version issue de la loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 en vigueur à l'époque des faits et jusqu'au 2 mars 2017, est applicable à la procédure et n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.

5. La question, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle.

6. La question posée ne présente pas un caractère sérieux.

7. En effet, la disposition légale, par sa seule application, n'est pas de nature à porter atteinte au principe énoncé par l'article 2 de la Constitution selon lequel la langue de la République est le français, principe qui ne s'oppose pas à ce que des propos tenus dans une autre langue, régionale ou étrangère, dûment traduits, fassent l'objet de poursuites.

8. En conséquence, il n'y a pas lieu de renvoyer la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en audience publique du dix-neuf décembre deux mille vingt-trois.

Code publication

n