Conseil d'Etat

Décision du 6 octobre 2023 n° 456129

06/10/2023

Non renvoi

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Vu les procédures suivantes :

1° Sous le n° 456129, la commune de Roumazières-Loubert a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté interministériel du 27 septembre 2017 refusant de reconnaître l'état de catastrophe naturelle sur son territoire pour les mouvements de terrains différentiels consécutifs aux épisodes de sécheresse et de réhydratation des sols survenus en 2016 et d'enjoindre à l'Etat de prendre un arrêté portant reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle sur son territoire dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir. Par un jugement n° 1800683 du 17 juillet 2020, le tribunal administratif a annulé l'arrêté du 27 septembre 2017 en tant qu'il n'a pas inscrit la commune de Roumazières-Loubert sur la liste des communes reconnues en état de catastrophe naturelle et a enjoint à l'Etat de procéder à un nouvel examen de la demande de la commune.

Par un arrêt n° 20BX03049 du 29 juin 2021, la cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé, sur le recours du ministre de l'intérieur ; le jugement du tribunal administratif de Poitiers et a rejeté la demande de première instance de la commune.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés le 30 août et le 1er décembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune de Terres-de-Haute-Charente, commune nouvelle issue de la fusion de la commune de Roumazières-Loubert avec d'autres communes le 1er janvier 2019, demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel du ministre de l'intérieur ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2° Sous le n° 456130, la commune de Fléac a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté interministériel du 27 septembre 2017 refusant de reconnaître l'état de catastrophe naturelle sur son territoire pour les mouvements de terrains différentiels consécutifs aux épisodes de sécheresse et de réhydratation des sols survenus en 2016 et d'enjoindre à l'Etat de prendre un arrêté portant reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle sur son territoire dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir. Par un jugement n° 1800844 du 17 juillet 2020, le tribunal administratif a annulé l'arrêté du 27 septembre 2017 en tant qu'il n'a pas inscrit la commune de Fléac sur la liste des communes reconnues en état de catastrophe naturelle et a enjoint à l'Etat de procéder à un nouvel examen de la demande de la commune.

Par un arrêt n° 20BX03045 du 29 juin 2021, la cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé, sur le recours du ministre de l'intérieur, le jugement du tribunal administratif de Poitiers et a rejeté la demande de première instance de la commune.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés le 30 août et le 1er décembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune de Fléac demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel du ministre de l'intérieur ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

3° Sous le n° 456158, la commune de Magnac-sur-Touvre a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté interministériel du 27 septembre 2017 refusant de reconnaître l'état de catastrophe naturelle sur son territoire pour les mouvements de terrains différentiels consécutifs aux épisodes de sécheresse et de réhydratation des sols survenus en 2016 et d'enjoindre à l'Etat de prendre un arrêté portant reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle sur son territoire dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir. Par un jugement n° 1800851 du 17 juillet 2020, le tribunal administratif a annulé l'arrêté du 27 septembre 2017 en tant qu'il n'a pas inscrit la commune de Magnac-sur-Touvre sur la liste des communes reconnues en état de catastrophe naturelle et a enjoint à l'Etat de procéder à un nouvel examen de la demande de la commune.

Par un arrêt n° 20BX03053 du 29 juin 2021, la cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé sur le recours du ministre de l'intérieur le jugement du tribunal administratif de Poitiers et a rejeté la demande de première instance de la commune.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés le 30 août et le 1er décembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune de Magnac-sur-Touvre demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel du ministre de l'intérieur ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- la Constitution, notamment son article 61-1 ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

- le code des assurances, notamment son article L. 125-1 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bruno Bachini, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Nicolas Agnoux, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Sevaux, Mathonnet, avocat des communes de Terres-de-Haute-Charente, de Fléac et de Magnac-sur-Touvre ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 125-1 du code des assurances, dans sa rédaction applicable au litige : " Les contrats d'assurance, souscrits par toute personne physique ou morale autre que l'Etat et garantissant les dommages d'incendie ou tous autres dommages à des biens situés en France, ainsi que les dommages aux corps de véhicules terrestres à moteur, ouvrent droit à la garantie de l'assuré contre les effets des catastrophes naturelles () ; / Sont considérés comme les effets des catastrophes naturelles, au sens du présent chapitre, les dommages matériels directs non assurables ayant eu pour cause déterminante l'intensité anormale d'un agent naturel, lorsque les mesures habituelles à prendre pour prévenir ces dommages n'ont pu empêcher leur survenance ou n'ont pu être prises. / L'état de catastrophe naturelle est constaté par arrêté interministériel qui détermine les zones et les périodes où s'est située la catastrophe ainsi que la nature des dommages résultant de celle-ci couverts par la garantie visée au premier alinéa du présent article. Cet arrêté précise, pour chaque commune ayant demandé la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, la décision des ministres. Cette décision est ensuite notifiée à chaque commune concernée par le représentant de l'État dans le département, assortie d'une motivation. L'arrêté doit être publié au Journal officiel dans un délai de trois mois à compter du dépôt des demandes à la préfecture. De manière exceptionnelle, si la durée des enquêtes diligentées par le représentant de l'État dans le département est supérieure à deux mois, l'arrêté est publié au plus tard deux mois après la réception du dossier par le ministre chargé de la sécurité civile ".

2. Les trois pourvois visés ci-dessus présentent à juger les mêmes questions. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.

Sur les mémoires intitulés "question prioritaire de constitutionnalité" :

3. Aux termes de l'article 23-1 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Devant les juridictions relevant du Conseil d'Etat ou de la Cour de cassation, le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution est, à peine d'irrecevabilité, présenté dans un écrit distinct et motivé ". Aux termes de l'article 23-2 de la même ordonnance : " () Le refus de transmettre la question ne peut être contesté qu'à l'occasion d'un recours contre la décision réglant tout ou partie du litige ". Selon l'article 23-5 de cette ordonnance : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé, y compris pour la première fois en cassation, à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat ou la Cour de cassation. Le moyen est présenté, à peine d'irrecevabilité, dans un mémoire distinct et motivé () ". Enfin, aux termes du premier alinéa de l'article R. 771-16 du code de justice administrative : " Lorsque l'une des parties entend contester devant le Conseil d'Etat, à l'appui d'un appel ou d'un pourvoi en cassation formé contre la décision qui règle tout ou partie du litige, le refus de transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité précédemment opposé, il lui appartient, à peine d'irrecevabilité, de présenter cette contestation avant l'expiration du délai de recours dans un mémoire distinct et motivé, accompagné d'une copie de la décision de refus de transmission ".

4. Il résulte de ces dispositions que, lorsqu'une cour administrative d'appel a refusé de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité qui lui a été soumise, il appartient à l'auteur de cette question de contester ce refus, à l'occasion du pourvoi en cassation formé contre l'arrêt qui statue sur le litige, dans le délai de recours contentieux et par un mémoire distinct et motivé, que le refus de transmission précédemment opposé l'ait été par une décision distincte de l'arrêt, dont il joint alors une copie, ou directement par cet arrêt. Les dispositions de l'article 23- 5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 n'ont ni pour objet ni pour effet de permettre à celui qui a déjà présenté une question prioritaire de constitutionnalité devant une juridiction statuant en dernier ressort de s'affranchir des conditions, définies par les dispositions citées plus haut de la loi organique et du code de justice administrative, selon lesquelles le refus de transmission peut être contesté devant le juge de cassation.

5. Par ses trois arrêts du 29 juin 2021, la cour administrative d'appel de Bordeaux a, d'une part, refusé de transmettre au Conseil d'Etat les questions de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions de l'article L. 125-1 du code des assurances et, d'autre part, fait droit à l'appel du ministre de l'intérieur tendant à l'annulation des trois jugements attaqués et au rejet des demandes formées par les trois communes devant le tribunal administratif. Ces dernières se sont pourvues en cassation, le 30 août 2021, contre ces arrêts. Par un mémoire intitulé " question prioritaire de constitutionnalité ", également enregistré le 30 août 2021, elles demandent au Conseil d'Etat de transmettre au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de ces mêmes dispositions de l'article L. 125-1 du code des assurances, en invoquant des griefs identiques à ceux des questions prioritaires de constitutionnalité soulevées devant la cour administrative d'appel.

6. Dans la mesure où les communes requérantes ont entendu, sur le fondement de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958, soumettre au Conseil d'Etat des questions prioritaires de constitutionnalité, il ne peut y être fait droit, dès lors que de telles demandes, fondées sur les mêmes moyens, portent sur les mêmes questions que celles soumises à la cour.

Sur les pourvois :

7. Il ressort des énonciations des arrêts attaqués qu'à la suite de la sécheresse de l'année 2016, les communes de Magnac-sur-Touvre, de Roumazières-Loubert, dont la fusion avec d'autres communes a donné lieu à la création, le 1er janvier 2019, de la commune de Terres-de-Haute-Charente, et de Fléac ont adressé au préfet de la Charente, sur le fondement des dispositions de l'article L. 125-1 du code des assurances citées au point 2, des demandes de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle. Par un arrêté interministériel du 27 septembre 2017, après avis de la commission interministérielle compétente consultée le 19 septembre 2017, les ministres chargés de l'intérieur, de l'économie et des finances et du budget ont fixé la liste des communes pour lesquelles a été constaté l'état de catastrophe naturelle au titre des mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols durant l'année 2016, au nombre desquelles ne figurent pas les communes requérantes. Par trois jugements du 17 juillet 2020, le tribunal administratif de Poitiers a, d'une part, annulé pour excès de pouvoir cet arrêté en tant qu'il a refusé de reconnaître l'état de catastrophe naturelle de ces communes et, d'autre part, enjoint aux ministres de l'intérieur, de l'économie et des finances, et de l'action et des comptes publics de réexaminer les demandes de ces communes, dans le délai de trois mois à compter de la notification des jugements. Par trois arrêts en date du 29 juin 2021 contre lesquels les communes de Magnac-sur-Touvre, de Terres-de-Haute-Charente et de Fléac se pourvoient en cassation, la cour administrative d'appel de Bordeaux a fait droit à l'appel du ministre de l'intérieur en annulant ces jugements et en rejetant les demandes de première instance des communes.

8. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 6 que le moyen tiré de ce que l'arrêté litigieux serait privé de base légale pour avoir fait application des dispositions de l'article L. 125-1 du code des assurances, faisant l'objet d'une question prioritaire de constitutionnalité, ne peut qu'être écarté.

9. En deuxième lieu, la circulaire interministérielle du 27 mars 1984 instituant la commission interministérielle relative aux dégâts non assurables causés par les catastrophes naturelles, chargée de donner aux ministres compétents un avis sur les demandes de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle dont ils sont saisis, prévoit, d'une part, que cette commission est composée d'un représentant du ministère de l'intérieur, appartenant à la direction de la sécurité civile, d'un représentant du ministère de l'économie et des finances, appartenant à la direction des assurances, ainsi que d'un représentant du secrétariat d'État chargé du budget, appartenant à la direction du budget et, d'autre part, que le secrétariat de la commission est assuré par la Caisse centrale de réassurance.

10. En jugeant que la seule présence, au sein de la commission interministérielle qui a examiné les demandes de reconnaissance de catastrophe naturelle, de représentants de la Caisse centrale de réassurance, société détenue à 100 % par l'Etat et proposant, avec la garantie de ce dernier, la couverture assurantielle des catastrophes naturelles, n'était pas, par elle-même, de nature à entacher d'irrégularité sa composition au regard du principe d'impartialité, dès lors qu'il ne ressortait pas des pièces des dossiers qui lui étaient soumis que de telles considérations auraient, eu égard à la mission technique qui lui est confiée, affecté de partialité l'appréciation portée par ses membres ou privé les communes intéressées d'une garantie, la cour n'a pas entaché ses arrêts d'erreurs de droit, ni dénaturé les pièces des dossiers.

11. En troisième lieu, il résulte des dispositions de l'article L. 125-1 du code des assurances que le législateur a entendu confier aux ministres concernés la compétence pour se prononcer sur les demandes des communes tendant à la reconnaissance, sur leur territoire, de l'état de catastrophe naturelle. Il leur appartient, à cet effet, d'apprécier l'intensité et l'anormalité des agents naturels en cause sur le territoire des communes concernées. Ils peuvent légalement, même en l'absence de dispositions législatives ou réglementaires le prévoyant, s'entourer, avant de prendre les décisions relevant de leurs attributions, des avis qu'ils estiment utiles de recueillir et s'appuyer sur des méthodologies et paramètres scientifiques, sous réserve que ceux-ci apparaissent appropriés, en l'état des connaissances, pour caractériser l'intensité des phénomènes en cause et leur localisation, qu'ils ne constituent pas une condition nouvelle à laquelle la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle serait subordonnée ni ne dispensent les ministres d'un examen particulier des circonstances propres à chaque commune. Il incombe, enfin, aux ministres concernés de tenir compte de l'ensemble des éléments d'information ou d'analyse dont ils disposent, le cas échéant à l'initiative des communes concernées.

12. Il ressort des énonciations des arrêts attaqués que la cour, après avoir rappelé que les membres de la commission interministérielle consultée et les ministres décisionnaires ont disposé des données fournies par Météo-France qu'ils ont comparées aux critères servant à apprécier l'état de catastrophe naturelle, a jugé, sans dénaturer les faits et les pièces des dossiers qui lui étaient soumis, qu'ils ont ainsi été en mesure de connaître avec une précision suffisante les conditions climatiques propres à chaque commune, bien que le préfet de la Charente ait omis de demander aux communes requérantes des éléments sur l'épisode climatique considéré avant de transmettre leurs dossiers à l'autorité ministérielle, contrairement aux prévisions des circulaires du 27 mars 1984 et du 19 mai 1998 relative aux règles de constitution, de validation et de transmission des dossiers de demande de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle. Dès lors, les communes requérantes ne sont pas fondées à soutenir que la cour aurait omis de répondre au moyen tiré de ce que leurs dossiers de demande de reconnaissance de catastrophe naturelle, constitués par le préfet de la Charente, étaient incomplets en ce qu'ils ne comportaient ni le rapport préfectoral ni le rapport météorologique prévus par les dispositions précitées.

13. En quatrième lieu, les ministres compétents peuvent légalement, même en l'absence de dispositions législatives ou réglementaires le prévoyant, s'appuyer sur des méthodologies et paramètres scientifiques, sous réserve que ceux-ci apparaissent appropriés, en l'état des connaissances, pour caractériser l'intensité des phénomènes en cause et leur localisation, qu'ils ne constituent pas une condition nouvelle à laquelle la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle serait subordonnée ni ne dispensent les ministres d'un examen particulier des circonstances propres à chaque commune.

14. Il ressort des énonciations des arrêts attaqués qu'après avoir rappelé de manière détaillée la méthodologie, dénommée " SIM ", utilisée par les ministres, laquelle prend en compte deux paramètres scientifiques cumulatifs, météorologique et géotechnique, concernant respectivement l'humidité des sols et la présence de sols argileux, la cour a estimé que les éléments produits par les communes, critiquant principalement l'utilisation de modélisations et de découpages administratifs imprécis susceptibles de conduire, eu égard notamment aux choix opérés s'agissant du maillage territorial ou du seuil de déclenchement, à des effets contraires à l'intention du législateur, n'étaient pas de nature à démontrer que ces paramètres seraient inappropriés pour caractériser l'intensité du phénomène en cause dans les communes. En écartant ainsi les critiques formulées par les communes dans leurs écritures sur cette méthodologie, la cour n'a pas commis d'erreur de droit, ni n'a dénaturé les pièces des dossiers qui lui étaient soumis.

15. Enfin, il ressort des énonciations des arrêts attaqués que la cour administrative d'appel de Bordeaux a relevé que la sécheresse de 2016 ne présentait pas, pour les trois communes requérantes, les caractères d'intensité et d'anormalité retenus par l'article L. 125-1 du code des assurances, en constatant que les critères de méthodologie " SIM ", lesquels prennent en compte l'intensité et l'anormalité de l'évènement, n'étaient pas remplis. Si les communes ont fait valoir en appel que les indices utilisés par l'administration pour se prononcer sur l'existence d'un état de catastrophe naturelle étaient supérieurs à ceux consultés sur le site Météo-France, il ressort des pièces des dossiers soumis aux juges du fond qu'elles n'ont fourni aucun élément, notamment météorologique, de nature à remettre en cause l'évaluation de l'intensité du phénomène de sécheresse résultant de l'application de la méthodologie décrite au point précédent. Par suite, en jugeant que, dans ces conditions, le refus de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle opposé aux communes requérantes n'était pas entaché d'erreur d'appréciation, la cour n'a pas inexactement qualifié les faits de l'espèce.

16. Il résulte de tout ce qui précède que les communes requérantes ne sont pas fondées à demander l'annulation des arrêts qu'elles attaquent.

17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans les présentes instances, la partie perdante.

D E C I D E :

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Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par les communes de Terres-de-Haute-Charente, de Fléac et de Magnac-sur-Touvre.

Article 2 : Les pourvois nos 456129, 456130 et 456158 des communes de Terres-de-Haute-Charente, de Fléac et de Magnac-sur-Touvre sont rejetés.

Article 3 : La présente décision sera notifiée aux communes de Magnac-sur-Touvre, Terres-de-Haute-Charente et Fléac, et au ministre de l'intérieur et de l'outre-mer.

Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel.

Délibéré à l'issue de la séance du 21 septembre 2023 où siégeaient : Mme Isabelle de Silva, présidente de chambre, présidant ; Mme Suzanne von Coester, conseillère d'Etat et M. Bruno Bachini, conseiller d'Etat-rapporteur.

Rendu le 6 octobre 2023.

La présidente :

Signé : Mme Isabelle de Silva

Le rapporteur :

Signé : M. Bruno Bachini

La secrétaire :

Signé : Mme Laïla Kouas

Code publication

C