Tribunal administratif de Strasbourg

Ordonnance du 13 septembre 2023 n° 2303444

13/09/2023

Renvoi

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Vu la procédure suivante :

Par des mémoires, enregistrés les 31 mai et 5 juillet 2023, Mme E I, Mme J H, Mme A G, M. F D et Mme C B, représentés par la SELARL Le Temps des Droits, demandent au tribunal, à l'appui de leur requête tendant à l'annulation de la délibération n° V-2023-277 du 20 mars 2023 du conseil municipal de la commune de Strasbourg, en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions du I de l'article L. 2333-87 du code général des collectivités territoriales résultant de la loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019.

Ils soutiennent que :

- les dispositions contestées sont applicables à la procédure en cours ;

- les dispositions contestées n'ont pas été déclarées conformes dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;

- les dispositions contestées méconnaissent le principe d'égalité devant les charges publiques garanti par les articles 1er et 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ;

- les dispositions contestées méconnaissent l'exigence de clarté de la loi issue de l'article 34 de la Constitution et de l'objectif de valeur constitutionnelle d'intelligibilité et d'accessibilité de la loi qui découle des articles 4, 5, 6 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ;

- le législateur, en ne fixant pas de limite dans la détermination et la modulation de la redevance de stationnement sur le domaine public a méconnu l'étendue de sa compétence et par là-même porté atteinte au principe d'égalité devant les charges publiques.

Par des mémoires, enregistrés les 23 juin et 19 juillet 2023, présentés par Me Kern, la commune de Strasbourg, représentée par sa maire, conclut à ce que la question ne soit pas transmise au Conseil d'Etat.

Elle soutient que les conditions posées par l'article 23-4 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 ne sont pas remplies, que la question soulevée est dépourvue de caractère sérieux.

Vu les autres pièces du dossier.

 

Vu :

- la Constitution du 4 octobre 1958, notamment son Préambule et son article 61-1 ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment ses articles 23-1 à 23-3 ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

1. Aux termes de l'article 61-1 de la Constitution : " Lorsque à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé ". Selon l'article 23-2 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée : " La juridiction statue sans délai par une décision motivée sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'État ou à la Cour de cassation. Il est procédé à cette transmission si les conditions suivantes sont remplies : 1° La disposition contestée est applicable au litige ou à la procédure ou constitue le fondement des poursuites ; 2° Elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances ; 3° La question n'est pas dépourvue de caractère sérieux. (). ".

2. Il résulte des dispositions combinées des premiers alinéas des articles 23-1 et 23-2 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel que le tribunal administratif, saisi d'un moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution présenté dans un écrit distinct et motivé, statue sans délai, par une décision motivée, sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'Etat et procède à cette transmission si est remplie la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question ne soit pas dépourvue de caractère sérieux.

3. Les dispositions du I de l'article L. 2333-87 du code général des collectivités territoriales résultant de la loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 sont applicables au présent litige. Ces dispositions n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution par le Conseil Constitutionnel. Les moyens tirés de ce que ces dispositions portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, et notamment au principe d'égalité devant les charges publiques garantis par les articles 1er et 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 et à l'exigence de clarté de la loi issue de l'article 34 de la Constitution et à l'objectif de valeur constitutionnelle d'intelligibilité et d'accessibilité de la loi qui découle des articles 4, 5, 6 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 posent des questions qui ne sont pas dépourvues de tout caractère sérieux. Il y a donc lieu de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité invoquée par Mme I et autres.

O R D O N N E :

Article 1 : La question de la conformité à la Constitution du I de l'article L. 2333-87 du code général des collectivités territoriales résultant de la loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 est transmise au Conseil d'Etat.

Article 2 : Il est sursis à statuer sur la requête de Mme I et autres jusqu'à la réception de la décision du Conseil d'Etat ou, s'il a été saisi, jusqu'à ce que le Conseil constitutionnel ait tranché la question de constitutionnalité ainsi soulevée.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme E I en application des dispositions du dernier alinéa de l'article R. 751-3 du code de justice administrative et à la commune de Strasbourg.

Fait à Strasbourg, le 13 septembre 2023.

Le président de la 5ème chambre,

C. CARRIER

La République mande et ordonne à la préfète du Bas-Rhin en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier

Code publication

C