Tribunal administratif de Clermont-Ferrand

Jugement du 18 juillet 2023 n° 2301505

18/07/2023

Non renvoi

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire enregistrée le 23 juin 2023 et un mémoire complémentaire enregistré le 3 juillet 2023, M. A B, représenté par Me Demars, demande au tribunal :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire ;

2°) d'annuler l'arrêté du 27 mars 2023 par lequel le préfet du Cantal lui a retiré son attestation de demande d'asile, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé d'office et l'a informé de son signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen ;

3°) d'annuler la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire supérieur à trente jours ;

4°) à titre subsidiaire, de suspendre l'exécution de l'arrêté du 27 mars 2023 ;

5°) d'enjoindre au préfet du Cantal de procéder à la suppression de son signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

5°) d'enjoindre au préfet du Cantal de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale ", ou, à défaut, une autorisation provisoire de séjour dans un délai de sept jours à compter de la notification du présent jugement sous astreinte de 100 euros par jour de retard et, dans l'attente, de lui remettre un récépissé dans un délai de 24 heures à compter de la notification du présent jugement sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

6°) d'enjoindre au préfet du Cantal de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et, dans l'attente, de lui remettre un récépissé avec autorisation de travail dans un délai de 48 heures, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

7°) de mettre à la charge du préfet du Cantal une somme de 1 200 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, ou, en cas de rejet de sa demande d'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat cette somme sur le seul fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

En ce qui concerne l'ensemble des décisions :

- l'arrêté en litige est entaché d'un vice de forme et d'une erreur de fait ;

- l'arrêté est entaché d'incompétence ;

En ce qui concerne la décision portant retrait de l'attestation de demandeur d'asile :

- elle est entachée d'une erreur de droit en méconnaissance de l'article L. 542-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est insuffisamment motivée en l'absence de considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant retrait de l'attestation de demandeur d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur de droit dès lors qu'elle est fondée sur les articles L. 542-3 et L. 611-1 4° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une incompétence de son auteur ;

- elle est entachée d'un vice de procédure en méconnaissance de son droit d'être entendu dès lors qu'il a été privé de la faculté de communiquer avec l'autorité préfectorale ;

- elle est entachée d'une erreur de droit en méconnaissance de l'article L. 532-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle fait obstacle à ce qu'il puisse assister physiquement à l'audience à intervenir devant la CNDA de sorte à y présenter des observations sur son récit de vie ;

- elle est entachée d'une erreur de droit en méconnaissance de l'article L. 431-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'un vice de forme en méconnaissance de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration en l'absence de mention en caractères lisibles du nom et prénom de son signataire ;

- elle méconnaît l'article L. 431-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il n'a pas été destinataire des informations dans une langue qu'il comprend ;

- elle méconnaît l'article L. 611-3 du même code en l'absence de recueil de l'avis du collège de médecins de l'OFII ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne la décision octroyant un délai de départ volontaire de trente jours:

- elle est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un vice de procédure en méconnaissance de son droit d'être entendu dès lors qu'il a été privé de la faculté de communiquer avec l'autorité préfectorale ;

- elle méconnaît l'article L. 532-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle fait obstacle à ce qu'il puisse présenter des observations sur son récit de vie devant la CNDA ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation en méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales au regard du risque sérieux qu'il soit soumis à des peines ou traitements inhumains et dégradants en cas de retour dans son pays d'origine ;

En ce qui concerne la demande de suspension :

- il existe un risque sérieux de considérer qu'il sera soumis à des peines ou traitements inhumains ou dégradants contraires aux engagements conventionnels de la France ;

- les motifs retenus par le directeur général de l'OFPRA ne sont pas de nature à contredire sérieusement le bien-fondé de son récit ;

- il justifie d'éléments sérieux de nature à justifier, au titre de sa demande d'asile, son maintien sur le territoire français durant l'examen de son recours par la CNDA.

Par un mémoire distinct, enregistré le 11 juillet 2023, M. B demande au tribunal de transmettre au Conseil d'Etat la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions de l'article 20 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et de l'article 62 du décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020.

Il soutient que :

- les dispositions contestées sont applicables au litige ou à la procédure ;

- elles n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution ;

- la question posée présente un caractère nouveau ou sérieux.

Par un mémoire en défense enregistré le 12 juillet 2023, le préfet du Cantal conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

M. B a déposé une demande d'aide juridictionnelle le 23 juin 2023.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration :

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

L'audience publique s'est tenue le 12 juillet 2023 à 9h30, en présence de M. Morelière, greffier d'audience, à laquelle les parties n'étaient ni présentes ni représentées.

La clôture de l'instruction a été prononcée à l'issue de l'audience.

Considérant ce qui suit :

1. M. B, ressortissant géorgien, est entré sur le territoire français le 28 novembre 2022 et s'est vu refuser le statut de réfugié par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 2 mars 2023. Par un arrêté du 27 mars 2023, le préfet du Cantal lui a retiré son attestation de demande d'asile, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé d'office. Par la présente requête, M. B demande l'annulation de cet arrêté.

Sur la question prioritaire de constitutionnalité :

2. L'article 61-1 de la Constitution du 4 octobre 1958 prévoit que : " Lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé. Une loi organique détermine les conditions d'application du présent article ". L'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, modifiée par la loi organique du 10 décembre 2009 relative à l'application de l'article 61-1 de la Constitution prévoit : " Devant les juridictions relevant du Conseil d'État () le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution est, à peine d'irrecevabilité, présenté dans un écrit distinct et motivé. Un tel moyen peut être soulevé pour la première fois en cause d'appel () ". Selon l'article 23-2 de la même ordonnance : " La juridiction statue sans délai par une décision motivée sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'État ou à la Cour de cassation. Il est procédé à cette transmission si les conditions suivantes sont remplies : 1° La disposition contestée est applicable au litige ou à la procédure, ou constitue le fondement des poursuites ; 2° Elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances ; 3° La question n'est pas dépourvue de caractère sérieux ". Il résulte des dispositions de cet article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux.

3. M. B doit être regardé comme demandant au tribunal de transmettre au Conseil d'État aux fins de transmission au Conseil constitutionnel, la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions de l'article 20 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et de l'article 62 du décret n° 2020-1717 du

28 décembre 2020. Toutefois, d'une part, ces dernières dispositions, qui présentent un caractère réglementaire, ne sont pas au nombre des dispositions législatives visées par l'article 61-1 de la Constitution et l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958, et ne peuvent, par conséquent, faire l'objet d'une question prioritaire de constitutionnalité. D'autre part, les dispositions contestées de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 ne sont pas applicables au présent litige dès lors que la décision dont M. B demande l'annulation porte sur son éloignement du territoire français et non sur le refus de son admission à l'aide juridictionnelle.

4. Dans ces conditions, alors qu'au demeurant M. B a présenté sa requête par l'intermédiaire d'un avocat librement choisi alors qu'il pouvait également solliciter la désignation d'un avocat commis d'office, il n'y a pas lieu de transmettre la question prioritaire de constitutionnalité soulevée au Conseil d'État.

Sur la demande de communication du dossier :

5. Le préfet du Cantal a produit les pièces concernant M. B au regard desquelles il a fondé l'arrêté en litige.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

6. En premier lieu, l'arrêté du 27 mars 2023 a été signé par M. Wahid Ferchiche, secrétaire général de la préfecture du Cantal en vertu d'un arrêté portant délégation en date du 22 novembre 2022, régulièrement publié le même jour. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte doit être écarté.

7. En deuxième lieu, l'arrêté en litige comporte, pour l'ensemble des décisions qu'il édicte, les éléments de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.

8. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 542-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque le droit au maintien sur le territoire français a pris fin dans les conditions prévues aux articles L. 542-1 ou L. 542-2, l'attestation de demande d'asile peut être refusée, retirée ou son renouvellement refusé. / Les conditions de refus, de renouvellement et de retrait de l'attestation de demande d'asile sont fixées par décret en Conseil d'Etat. ". Aux termes de l'article R. 541-1 du même code : " L'attestation de demande d'asile est renouvelée jusqu'à ce que le droit au maintien prenne fin en application des articles L. 542-1 ou L. 542-2. () ".

9. Il ressort des pièces du dossier, et en particulier de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 2 mars 2023 produit par le requérant, qu'il a été statué en procédure accélérée sur sa demande de protection internationale au motif qu'il provenait d'un pays d'origine sûr. Il en résulte qu'en application de l'article L. 542-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, son droit de se maintenir sur le territoire français a pris fin dès que l'Office de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande, soit le 2 mars 2023, sans que le recours formé devant la Cour nationale du droit d'asile ne lui confère le droit de se maintenir sur le territoire. Par ailleurs, et en tout état de cause, il ne résulte pas des termes de la décision attaquée que le préfet du Cantal se serait estimé en situation de compétence liée pour prendre la décision attaquée. Il s'ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 542-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

10. En quatrième lieu, contrairement à ses allégations, la décision portant obligation de quitter le territoire n'est pas " la conséquence de la décision constatant la caducité de l'attestation de demandeur d'asile ". En tout état de cause, n'ayant pas démontré l'illégalité de la décision portant retrait de cette attestation, le requérant n'est pas fondé à s'en prévaloir à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français. Enfin, le moyen ainsi articulé " en l'obligeant à quitter le territoire sur le fondement des dispositions de l'article L. 542-3 et du 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet du Cantal a commis une erreur de droit " ne peut qu'être écarté en conséquence de ce qui précède et comme non assorti des précisions permettant d'en apprécié le bien-fondé.

11. En cinquième lieu, le droit d'être entendu implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français non prise concomitamment au refus de délivrance d'un titre de séjour, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne. Toutefois, une violation de ce droit n'entraîne l'annulation de la décision prise au terme de la procédure administrative en cause que si, en l'absence de cette irrégularité, cette procédure pouvait aboutir à un résultat différent.

12. En l'espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B aurait été, à un moment de la procédure, informé de ce qu'il était susceptible de faire l'objet d'une mesure d'éloignement ou mis à même de présenter des observations, la procédure de demande d'asile n'ayant pas une telle finalité. Toutefois, il ne ressort pas davantage des pièces du dossier qu'en cas d'audition de l'intéressé, cette procédure pouvait aboutir à un résultat différent. Il suit de là que le moyen tiré du vice de procédure ne peut qu'être écarté.

13. En sixième lieu, M. B ne peut utilement invoquer la méconnaissance de l'article L. 532-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont les dispositions n'ont pas pour objet de lui accorder un droit de se maintenir sur le territoire français, lequel est régi, en ce qui le concerne, par l'article L. 542-2 du code précité. Au demeurant, représenté par son avocat devant la CNDA, l'intéressé sera mis à même, par ses écritures et les observations de son conseil, de porter à la connaissance de cette juridiction l'ensemble des éléments utiles à son office. Ce moyen doit dès lors être écarté comme inopérant.

14. En septième lieu, contrairement à ce qui est soutenu, la décision comporte la signature manuscrite de son auteur. Dès lors, elle satisfait aux obligations posées par l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur le respect des exigences posées par les dispositions de l'article L. 212-3 du même code.

15. En huitième lieu, aux termes de l'article L. 431-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'un étranger a présenté une demande d'asile qui relève de la compétence de la France, l'autorité administrative, après l'avoir informé des motifs pour lesquels une autorisation de séjour peut être délivrée et des conséquences de l'absence de demande sur d'autres fondements à ce stade, l'invite à indiquer s'il estime pouvoir prétendre à une admission au séjour à un autre titre et, dans l'affirmative, à déposer sa demande dans un délai fixé par décret. Il est informé que, sous réserve de circonstances nouvelles, notamment pour des raisons de santé, et sans préjudice de l'article L. 611-3, il ne pourra, à l'expiration de ce délai, solliciter son admission au séjour. () ". Aux termes de l'article D. 431-7 de ce code : " Pour l'application de l'article L. 431-2, les demandes de titre de séjour sont déposées par le demandeur d'asile dans un délai de deux mois. Toutefois, lorsqu'est sollicitée la délivrance du titre de séjour mentionné à l'article L. 425-9, ce délai est porté à trois mois ".

16. L'information prévue par l'article L. 431-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a pour seul objet de limiter à compter de l'information ainsi délivrée le délai dans lequel il est loisible au demandeur d'asile de déposer une demande de titre de séjour sur un autre fondement, ce délai étant ainsi susceptible d'expirer avant même qu'il n'ait été statué sur sa demande d'asile. Dans l'hypothèse où l'information prévue à l'article L. 431-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'aurait pas été donnée, cette circonstance fait seulement obstacle à ce que le délai mentionné à cet article soit opposé à la personne qui sollicite la délivrance d'un titre de séjour. Le non-respect de ces dispositions est donc sans incidence sur la légalité des mesures d'éloignement prises, comme c'est le cas en l'espèce, sur le fondement du 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées et de ce qu'il n'aurait pas été destinataire de telles informations dans une langue qu'il comprend ne peut qu'être écarté.

17. En neuvième lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : () 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. ". Aux termes de l'article R. 611-1 du même code : " Pour constater l'état de santé de l'étranger mentionné au 9° de l'article L. 611-3, l'autorité administrative tient compte d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ". L'article R. 611-2 ajoute que cet avis " est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu : 1° D'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement l'étranger ou un médecin praticien hospitalier ; 2° Des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. () ".

18. Il résulte de ces dispositions que, lorsqu'il envisage de prononcer une obligation de quitter le territoire français à l'encontre d'un ressortissant étranger dont la demande d'asile a été rejetée, le préfet doit s'assurer que la situation de l'intéressé n'entre dans aucun des cas listés à l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En particulier, lorsque des éléments sérieux relatifs à l'état de santé de l'intéressé ont été portés à sa connaissance, il appartient au préfet d'examiner ces éléments en vue de mettre en œuvre la procédure prévue par les dispositions précitées pour faire constater cet état de santé notamment en délivrant le dossier contenant la notice explicative de la procédure et le certificat médical vierge devant être transmis au collège de médecins de l'OFII.

19. Il ressort des pièces du dossier et, notamment des affirmations du préfet du Cantal, non contestées, que si M. B a sollicité une demande de titre de séjour pour raison de santé, ce dernier ne s'est pas présenté à son rendez-vous prévu le 1er mars 2023. De plus, contrairement aux allégations du requérant, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Cantal disposait de la décision prise par l'OFPRA. Dans ces conditions, dès lors que le préfet du Cantal ne disposait d'aucune information sur l'état de santé du requérant, ce dernier n'est pas fondé à soutenir que l'autorité administrative aurait méconnu les dispositions précitées.

20. En dixième lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen soulevé, par la voie de l'exception, de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français à l'encontre de la décision portant octroi d'un délai de départ volontaire et de la décision fixant le pays de destination ne peut qu'être écarté.

21. En onzième lieu, aucune pièce versée au dossier ne permet d'établir la réalité et l'actualité des risques invoqués par le requérant ni de l'impossibilité pour ce dernier de bénéficier d'une protection des autorités géorgiennes. M. B ne produit aucun élément probant à l'appui de ses allégations de nature à faire naître un doute sérieux sur le bien-fondé de la décision de refus d'asile opposée par l'OFPRA. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme doit être écarté.

22. En douzième lieu, le moyen tiré de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est assorti d'aucune précision, tout comme le moyen tiré du " vice de forme et d'une erreur de fait ". Par suite, tels qu'articulés, de tels moyens ne peuvent donc qu'être écartés.

23. Enfin, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que M. B aurait sollicité auprès de l'autorité préfectorale un délai de départ volontaire supérieur à trente jours et que la même autorité lui aurait opposé un refus. Par suite, M. B n'est, en tout état de cause, pas fondé à demander l'annulation d'une telle décision.

Sur les conclusions à fin de suspension de l'exécution de la mesure d'éloignement :

24. Au soutien de sa demande, M. B, dont la demande d'asile a été rejetée par l'OFPRA, fait valoir qu'il craint un retour en Géorgie en raison des violences de ses créanciers. Au soutien de sa demande, il fait valoir que le directeur général de l'OFPRA se serait adonné à un jugement de valeur, que les motifs retenus pour rejeter sa demande d'asile ne sont pas de nature à contredire sérieusement le bien-fondé de son récit au regard de ses déclarations suffisamment explicites et dès lors qu'il ne lui aurait pas été demandé d'apporter davantage de précisions. Toutefois, et alors qu'il ressort des termes mêmes de cette décision que l'OFPRA a pu considérer que " ses déclarations sur ses problèmes d'ordre financier ont été peu convaincantes ", " ses déclarations ne permettent pas de tenir les faits allégués pour établis et de considérer pour avérés les risque d'atteintes graves auxquels il se dit exposé en cas de retour dans son pays " ou encore que l'intéressé " s'est montré très peu loquace, ce qui a contribué à décrédibiliser de telles allégations ", le requérant n'apporte pas d'élément permettant de douter sérieusement du bien-fondé de la décision de l'OFPRA. Par suite, M. B n'est pas fondé à demander la suspension de l'exécution de la décision portant obligation de quitter le territoire français prise à son encontre.

25. Il résulte de tout ce qui précède que M. B n'est pas fondé à demander l'annulation ou, à tout le moins, la suspension de l'arrêté en litige. Le rejet des conclusions à fin d'annulation et de suspension entraîne, par voie de conséquence, le rejet de ses conclusions aux fins d'injonction ainsi que celles présentées en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Sur l'admission à l'aide juridictionnelle provisoire

26. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 visée ci-dessus: " Dans les cas d'urgence, sous réserve de l'appréciation des règles relatives aux commissions ou désignations d'office, l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée () par la juridiction compétente ou son président ". Aux termes de l'article 7 de cette loi : " L'aide juridictionnelle est accordée à la personne dont l'action n'apparaît pas, manifestement, irrecevable, dénuée de fondement ou abusive () ". Ces dispositions ont pour objet d'éviter que soient mises à la charge de l'Etat les dépenses afférentes aux actions qui, de manière manifeste, apparaissent dépourvues de toute chance de succès.

27. Il résulte des points précédents que les conclusions présentées par M. B sont, certes, assorties de très nombreux moyens. Il s'agit toutefois de moyens de légalité externe manifestement infondés, de moyens inopérants et de moyens non assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. Aucun élément factuel sérieux et étayé n'ayant été développé dans les écritures alors que le conseil de M. B n'était pas présent à l'audience, il n'y a pas lieu en vertu des dispositions précitées de l'article 7 de la loi du 10 juillet 1991, de lui accorder l'aide juridictionnelle à titre provisoire.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. A B et au préfet du Cantal.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 juillet 2023.

La présidente,

S. BADER-KOZALe greffier,

D. MORELIERE

La République mande et ordonne au préfet du Cantal, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N°2301505AA

Code publication

D