Cour de cassation

Arrêt du 15 juin 2023 n° 22-21.643

15/06/2023

Non renvoi

CIV. 1

COUR DE CASSATION

CF

______________________

QUESTION PRIORITAIRE

de

CONSTITUTIONNALITÉ

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Audience publique du 15 juin 2023

NON-LIEU A RENVOI

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 494 F-D

Pourvoi n° E 22-21.643

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 15 JUIN 2023

Par mémoire spécial présenté le 21 mars 2023, M. [D] [W], domicilié [Adresse 1]), a formulé une question prioritaire de constitutionnalité à l'occasion du pourvoi n° E 22-21.643 qu'il a formé contre l'arrêt rendu le 24 mai 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 3, chambre 5), dans une instance l'opposant au procureur général près la cour d'appel de Paris, domicilié [Adresse 2].

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Ancel, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. [W], et l'avis de M. Salomon, avocat général, après débats en l'audience publique du 13 juin 2023 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Ancel, conseiller rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. M. [W] a engagé une action déclaratoire de nationalité en se prévalant de la qualité d'admis à la qualité de citoyen français de son arrière grand-père paternel, [U] [Z] [R] [W].

2. Par arrêt du 24 mai 2022, la cour d'appel a rejeté sa demande en opposant notamment à M. [W] qu'il ne pouvait se prévaloir de l'autorité de chose jugée attachée aux décisions ayant reconnu la nationalité française à d'autres membres de sa famille en considération de ce même ascendant commun.

Enoncé de la question prioritaire de constitutionnalité

3. A l'occasion du pourvoi qu'il a formé contre l'arrêt rendu le 24 mai 2022 par la cour d'appel de Paris, M. [W] a, par mémoire distinct et motivé, demandé de renvoyer au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité ainsi rédigée :

« La portée effective donnée aux articles 29-5 et 1355 du code civil par la jurisprudence constante de la Cour de cassation, dont il résulte que seules les personnes bénéficiant de décisions judiciaires définitives reconnaissant leur filiation à l'égard d'un ancêtre commun sont admises à se prévaloir de l'autorité de ces décisions quant à la chaîne de filiation de leurs ascendants, est-elle conforme aux principes constitutionnels d'égalité devant la loi et du droit à une vie privée et familiale normale ? »

Examen de la question prioritaire de constitutionnalité

4. Les dispositions contestées, tels qu'interprétés par la jurisprudence constante de la Cour de cassation, sont applicables au litige, qui concerne l'accès à la nationalité française.

5. Elles n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.

6. Cependant, d'une part, la question posée, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle.

7. D'autre part, la question posée ne présente pas un caractère sérieux.

8. En effet, la jurisprudence constante selon laquelle, à l'égard des tiers, l'autorité de chose jugée d'une décision rendue en matière de nationalité française par le juge de droit commun ne s'applique qu'à la déclaration de nationalité, sans pouvoir être étendue aux motifs pris en eux-mêmes et isolément, ne met pas, en soi, en cause le droit au respect à la vie privée et familiale normale de la personne à laquelle un refus a été opposé, notamment pour ce motif.

9. En outre, il n'y a pas de rupture d'égalité à imposer à celui qui revendique la nationalité française de justifier, au cours d'une procédure judiciaire contradictoire, d'une chaîne de filiation avec un ascendant français, indépendamment des décisions judiciaires qui ont pu être rendues antérieurement en faveur d'autres membres de sa famille se prévalant du même auteur commun dans des litiges auxquels il n'était pas partie.

10. En conséquence, il n'y a pas lieu de renvoyer la question au Conseil constitutionnel.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze juin deux mille vingt-trois.

Code publication

n