Tribunal administratif de Nîmes

Jugement du 20 avril 2023 n° 2200022

20/04/2023

Irrecevabilité

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Vu les procédures suivantes :

I - Par une requête enregistrée le 7 décembre 2021 sous le n°2104141, Mme C B, représentée par Me Guyon, demande au tribunal :

1°) d'annuler la décision du 13 octobre 2021 par laquelle le directeur du centre hospitalier régional universitaire (CHRU) de Nîmes l'a suspendue de ses fonctions sans rémunération ;

2°) d'enjoindre au CHRU de Nîmes, à titre principal, de procéder à sa réintégration, de la rétablir dans l'ensemble de ses droits, et de lui verser rétroactivement sa rémunération, à titre subsidiaire de procéder au réexamen de sa situation, sous astreinte de 400 euros par jour de retard à compter de la notification du présent jugement ;

3°) de mettre à la charge du CHRU de Nîmes la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

* sur la recevabilité :

- le recours, introduit le délai de recours qui courrait à compter de la notification de la décision le 13 octobre 2021, est recevable en application de l'article R. 421-1 du code de justice administrative ;

- elle a intérêt à agir contre cette décision qui lui fait grief ;

* sur la légalité de la décision de suspension :

- elle méconnaît le champ d'application de l'obligation vaccinale prévue par l'article 12 de la loi du 5 août 2021 dès lors qu'elle exerce des fonctions administratives accessoires dans un bâtiment distinct des lieux de soins ;

- la décision attaquée a été prise par une personne non habilitée à prendre une mesure de suspension assortie d'une privation de rémunération ;

- elle méconnaît les dispositions du 2° de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 et les dispositions de la loi n° 2021-1040 du 5 août 2021, notamment ses articles 12 ,13 et 14, dès lors qu'elle était placée en arrêt de travail depuis le 6 septembre 2021, et ne se trouvait soumise à ces dispositions qu'à la reprise effective de son service à l'issue de son congé de maladie ;

- elle est insuffisamment motivée en méconnaissance des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration (CRPA) qui imposent la motivation des sanctions ;

- elle est entachée d'un vice de procédure dès lors que l'autorité administrative ne justifie pas avoir saisi le conseil de discipline en méconnaissance de l'article 82 de la loi du 9 janvier 1986 ;

- elle méconnaît les principes du contradictoire et de respect des droits de la défense dès lors qu'elle n'a pas été en mesure de présenter ses observations écrites ou orales ou de se faire représenter par un avocat conformément aux dispositions des articles L. 122-1 et L. 122-2 du CRPA ;

- elle constitue une sanction disciplinaire déguisée et ne rentre pas dans les cas de sanctions prévues par l'article 81 de la loi du 9 janvier 1986 ;

- elle constitue une mesure de police administrative illégale compte tenu de son caractère disproportionné et inutile à la limitation de la propagation du virus, et inadéquate à la situation sanitaire ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article 30 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 relatif aux suspensions des agents à titre conservatoire, lequel garantit le maintien de la rémunération ;

- elle est entachée d'erreur de fait, faute pour l'administration de justifier, par la production d'un rapport ou de tout autre élément probant, du constat de son impossibilité d'exercer ses fonctions, conformément à l'article 14 de la loi du 5 août 2021 ;

- elle méconnaît les principes constitutionnels de continuité du service public, d'égalité, garanties par les articles 1er et 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, du droit à la santé, garanti par l'article 11 du préambule de la Constitution de 1946, de l'intégrité physique et du corps humain, garantie par les articles 1er et 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, et du respect de la dignité humaine ;

- elle méconnaît le principe de précaution garanti l'article 5 de la charte de l'environnement ;

- elle fait application de dispositions législatives et réglementaires contraires au principe de non-discrimination, garanti par l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, par l'article 1er du protocole 12 additionnel de cette même convention et par la résolution 2361 (2021) du 27 janvier 2021 de l'assemblée parlementaire du Conseil d'Europe, et contraires au principe du respect de la dignité humaine ;

- elle fait application de dispositions législatives et réglementaires contraires au principe de non-discrimination, garanti par le règlement du Parlement européen et du conseil n°2021/953 du 14 juin 2021 ;

- elle fait application de dispositions législatives et réglementaires contraires aux articles 2, 5 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît le droit à la santé garante par l'article 11 du préambule de la constitution ;

- elle méconnaît le principe de l'intégrité physique et du corps humain, garanti par les articles 16-1 et 16-3 du code civil et l'article L. 1111-4 du code de la santé publique ;

- elle méconnaît le droit au respect du secret médical ;

- elle méconnaît la liberté d'entreprendre et la liberté du commerce et de l'industrie, garanties par l'article 16 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et par l'article 4 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 décembre 2022, le CHRU de Nîmes, représenté par Me Moreau de l'AARPI MB avocats, conclut, à titre principal au non-lieu à statuer, à titre subsidiaire, au rejet de la requête, et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de la requérante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

* sur la recevabilité : le recours en annulation de la décision du 24 septembre 2021 a perdu son objet compte tenu de son retrait par une décision du 2 juin 2022, devenue définitive faute d'avoir été contestée ;

* sur le fond : aucun des moyens invoqués dans la requête, qui sont inopérants en raison de la situation de compétence liée dans laquelle se trouvait le directeur de l'établissement, n'est en tout état de cause fondé.

II - Par une requête enregistrée le 5 janvier 2022 sous le n°2200022, Mme C B, représentée par Me Guyon, demande au tribunal :

1°) d'annuler la décision du 24 septembre 2021 par laquelle le directeur du centre hospitalier régional universitaire (CHRU) de Nîmes l'a suspendue de ses fonctions sans rémunération, avec effet à cette même date et jusqu'à la production d'un justificatif de vaccination ou de contre-indication à la vaccination contre la Covid-19, ainsi que la décision du 23 décembre 2021 rejetant le recours gracieux ;

2°) d'enjoindre au CHRU de Nîmes, à titre principal, de procéder à sa réintégration, de la rétablir dans l'ensemble de ses droits, et de lui verser rétroactivement sa rémunération, à titre subsidiaire de procéder au réexamen de sa situation, sous astreinte de 400 euros par jour de retard à compter de la notification du présent jugement ;

3°) de mettre à la charge du CHRU de Nîmes la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

* sur la recevabilité :

- le recours, introduit le délai de recours qui courrait à compter de la notification de la décision le 4 janvier 2022, est recevable en application de l'article R. 421-1 du code de justice administrative ;

- elle a intérêt à agir contre cette décision qui lui fait grief ;

* sur la légalité de la décision de suspension :

- elle méconnaît le champ d'application de l'obligation vaccinale prévue par l'article 12 de la loi du 5 août 2021 dès lors qu'elle exerce des fonction administratives accessoires dans un bâtiment distinct des lieux de soins ;

- la décision attaquée a été prise par une personne non habilitée à prendre une mesure de suspension assortie d'une privation de rémunération ;

- elle méconnaît les dispositions du 2° de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 et les dispositions de la loi n° 2021-1040 du 5 août 2021, notamment ses articles 12 ,13 et 14, dès lors qu'elle était placée en arrêt de travail depuis le 6 septembre 2021, et ne se trouvait soumise à ces dispositions qu'à la reprise effective de son service à l'issue de son congé de maladie ;

- elle est insuffisamment motivée en méconnaissance des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration (CRPA) qui imposent la motivation des sanctions ;

- elle est entachée d'un vice de procédure dès lors que l'autorité administrative ne justifie pas avoir saisi le conseil de discipline en méconnaissance de l'article 82 de la loi du 9 janvier 1986 ;

- elle méconnaît les principes du contradictoire et de respect des droits de la défense dès lors qu'elle n'a pas été en mesure de présenter ses observations écrites ou orales ou de se faire représenter par un avocat conformément aux dispositions des articles L. 122-1 et L. 122-2 du CRPA ;

- elle constitue une sanction disciplinaire déguisée et ne rentre pas dans les cas de sanctions prévues par l'article 81 de la loi du 9 janvier 1986 ;

- elle constitue une mesure de police administrative illégale compte tenu de son caractère disproportionné et inutile à la limitation de la propagation du virus, et inadéquate à la situation sanitaire ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article 30 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 relatif aux suspensions des agents à titre conservatoire, lequel garantit le maintien de la rémunération ;

- elle est entachée d'erreur de fait, faute pour l'administration de justifier, par la production d'un rapport ou de tout autre élément probant, du constat de son impossibilité d'exercer ses fonctions, conformément à l'article 14 de la loi du 5 août 2021 ;

- elle méconnaît les principes constitutionnels de continuité du service public, d'égalité, garanties par les articles 1er et 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, du droit à la santé, garanti par l'article 11 du préambule de la Constitution de 1946, de l'intégrité physique et du corps humain, garantie par les articles 1er et 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, et du respect de la dignité humaine ;

- elle méconnaît le principe de précaution garanti l'article 5 de la charte de l'environnement ;

- elle fait application de dispositions législatives et réglementaires contraires au principe de non-discrimination, garanti par l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, par l'article 1er du protocole 12 additionnel de cette même convention et par la résolution 2361 (2021) du 27 janvier 2021 de l'assemblée parlementaire du Conseil d'Europe, et contraires au principe du respect de la dignité humaine ;

- elle fait application de dispositions législatives et réglementaires contraires au principe de non-discrimination, garanti par le règlement du Parlement européen et du conseil n°2021/953 du 14 juin 2021 ;

- elle fait application de dispositions législatives et réglementaires contraires aux articles 2, 5 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît le droit à la santé garanti par l'article 11 du préambule de la constitution ;

- elle méconnaît le principe de l'intégrité physique et du corps humain, garanti par les articles 16-1 et 16-3 du code civil et l'article L. 1111-4 du code de la santé publique ;

- elle méconnaît le droit au respect du secret médical ;

- elle méconnaît la liberté d'entreprendre et la liberté du commerce et de l'industrie, garanties par l'article 16 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et par l'article 4 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 décembre 2022, le CHRU de Nîmes, représenté par Me Moreau de l'AARPI MB avocats, conclut, à titre principal au non-lieu à statuer, à titre subsidiaire, au rejet de la requête, et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de la requérante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

* sur la recevabilité : le recours en annulation de la décision du 24 septembre 2021 a perdu son objet compte tenu de son retrait par une décision du 2 juin 2022, devenue définitive faute d'avoir été contestée ;

* sur le fond : aucun des moyens invoqués dans la requête, qui sont inopérants en raison de la situation de compétence liée dans laquelle se trouvait le directeur de l'établissement, n'est en tout état de cause fondé.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la Constitution ;

- le déclaration universelle des droits de l'homme ;

- la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le règlement du Parlement européen et du conseil n°2021/953 du 14 juin 2021 ;

- la résolution 2361 (2021) du 27 janvier 2021 de l'assemblée parlementaire du Conseil d'Europe ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de la santé publique ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- la loi n° 2021-1040 du 5 août 2021 ;

- le décret n° 2021-1059 du 7 août 2021 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus, au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D,

- les conclusions de Mme Chamot, rapporteure publique,

- et les observations de Me Hamidi, pour le CHRU de Nîmes.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B est ingénieure hospitalière du centre hospitalier régional universitaire (CHRU) de Nîmes, " data-manager " chargée de la gestion des données biomédicales. Par décision du 24 septembre 2021, le directeur général de cet établissement a prononcé la suspension de l'intéressée de ses fonctions sans rémunération, avec effet immédiat et jusqu'à ce qu'elle produise un justificatif de vaccination ou de contre-indication à la vaccination contre la Covid-19 répondant aux conditions réglementaires. Cette suspension a été suivie d'une demande d'émission de titre de recettes par le CHRU de Nîmes le 13 octobre 2021, aux fins de recouvrer l'indu de salaires versés depuis le 24 septembre 2021. Par courrier du 15 décembre 2021 l'intéressée a formé un recours gracieux contre la décision de suspension du 24 septembre 2021, lequel a expressément été rejeté par une décision du 23 décembre 2021. Par les présentes requêtes, Mme B doit être regardée comme demandant l'annulation de ces deux décisions.

Sur la jonction :

2. Les requêtes susvisées concernent une même requérante, présentent des questions communes et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour qu'il soit statué par un seul jugement.

Sur l'objet du litige :

3. D'une part, lorsqu'une décision administrative faisant l'objet d'un recours contentieux est retirée en cours d'instance pour être remplacée par une décision ayant la même portée, le recours doit être regardé comme tendant également à l'annulation de la nouvelle décision. Lorsque que le retrait a acquis un caractère définitif, il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions dirigées contre la décision initiale, qui ont perdu leur objet. Le juge doit, en revanche, statuer sur les conclusions dirigées contre la nouvelle décision.

4. Il ressort des pièces du dossier que par une décision du 2 juin 2022 intervenue en cours d'instance, le directeur général a retiré la décision attaquée du 24 septembre 2021 et a placé Mme B en congé de maladie ordinaire du 24 septembre au 3 janvier 2022, et l'a suspendue de ses fonctions à compter du 4 janvier 2022. La décision du 2 juin 2022 ayant la même portée que la décision initiale du 24 septembre 2021, en ce qu'elle confirme la suspension de l'intéressée de ses fonctions sans rémunération pour non production d'un justificatif de vaccination ou de contre-indication à la vaccination pour la période postérieure à son arrêt de travail, la présente requête doit être regardée, en application de ce qui a été dit au point 3, comme étant dirigée contre les deux décisions précitées des 24 septembre 2021 et 2 juin 2022. Dans ces conditions, le CHRU n'est pas fondé à soutenir que les conclusions présentées par Mme B à l'encontre de ces deux décisions sont devenus sans objet.

5. Il en va en revanche différemment des conclusions présentées par Mme B à l'encontre de la décision du 23 décembre 2021 rejetant le recours gracieux dès lors que, par la décision du 2 juin 2022, le directeur général a donné entière satisfaction à l'intéressée sur ce recours en la rétablissant dans ses droits à traitement pour la période couverte par son arrêt de travail, du 6 septembre 2021 au 3 janvier 2022. Dans ces conditions, les conclusions en annulation de la décision du 23 décembre 2021 ont perdu leur objet et il n'y a plus lieu pour le tribunal de statuer.

6. D'autre part, lorsque le juge est parallèlement saisi de conclusions tendant, d'une part, à l'annulation d'une décision et, d'autre part, à celle de son retrait et qu'il statue par une même décision, il lui appartient de se prononcer sur les conclusions dirigées contre le retrait puis, sauf si, par l'effet de l'annulation qu'il prononce, la décision retirée est rétablie dans l'ordonnancement juridique, de constater qu'il n'y a plus lieu pour lui de statuer sur les conclusions dirigées contre cette dernière.

Sur les conclusions dirigées contre la décision de suspension du 2 juin 2022 :

7. Aux termes de l'article 12 de la loi du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire : " I. - Doivent être vaccinés, sauf contre-indication médicale reconnue, contre la covid-19 : 1° Les personnes exerçant leur activité dans : a) Les établissements de santé mentionnés à l'article L. 6111-1 du code de la santé publique ainsi que les hôpitaux des armées mentionnés à l'article L. 6147-7 du même code ; () ". Aux termes de l'article 13 de cette loi : " I. - Les personnes mentionnées au I de l'article 12 établissent : 1° Satisfaire à l'obligation de vaccination en présentant le certificat de statut vaccinal prévu au second alinéa du II du même article 12. / Par dérogation au premier alinéa du présent 1°, peut être présenté, pour sa durée de validité, le certificat de rétablissement prévu au second alinéa du II de l'article 12. Avant la fin de validité de ce certificat, les personnes concernées présentent le justificatif prévu au premier alinéa du présent 1°. / Un décret détermine les conditions d'acceptation de justificatifs de vaccination, établis par des organismes étrangers, attestant de la satisfaction aux critères requis pour le certificat mentionné au même premier alinéa ; / 2° Ne pas être soumises à cette obligation en présentant un certificat médical de contre-indication. Ce certificat peut, le cas échéant, comprendre une date de validité. / II. - Les personnes mentionnées au I de l'article 12 justifient avoir satisfait à l'obligation prévue au même I ou ne pas y être soumises auprès de leur employeur lorsqu'elles sont salariées ou agents publics. () III. - Le certificat médical de contre-indication mentionné au 2° du I du présent article peut être contrôlé par le médecin conseil de l'organisme d'assurance maladie auquel est rattachée la personne concernée. Ce contrôle prend en compte les antécédents médicaux de la personne et l'évolution de sa situation médicale et du motif de contre-indication, au regard des recommandations formulées par les autorités sanitaires. / IV. - Les employeurs et les agences régionales de santé peuvent conserver les résultats des vérifications de satisfaction à l'obligation vaccinale contre la covid-19 opérées en application du deuxième alinéa du II, jusqu'à la fin de l'obligation vaccinale. / Les employeurs et les agences régionales de santé s'assurent de la conservation sécurisée de ces documents et, à la fin de l'obligation vaccinale, de la bonne destruction de ces derniers. / V. - Les employeurs sont chargés de contrôler le respect de l'obligation prévue au I de l'article 12 par les personnes placées sous leur responsabilité. ". Aux termes de l'article 14 de cette loi : " I. - A. - A compter du lendemain de la publication de la présente loi et jusqu'au 14 septembre 2021 inclus, les personnes mentionnées au I de l'article 12 ne peuvent plus exercer leur activité si elles n'ont pas présenté les documents mentionnés au I de l'article 13 ou, à défaut, le justificatif de l'administration des doses de vaccins requises par le décret mentionné au II de l'article 12 ou le résultat, pour sa durée de validité, de l'examen de dépistage virologique ne concluant pas à une contamination par la covid-19 prévu par le même décret. / B. - A compter du 15 septembre 2021, les personnes mentionnées au I de l'article 12 ne peuvent plus exercer leur activité si elles n'ont pas présenté les documents mentionnés au I de l'article 13 ou, à défaut, le justificatif de l'administration des doses de vaccins requises par le décret mentionné au II de l'article 12. / Par dérogation au premier alinéa du présent B, à compter du 15 septembre 2021 et jusqu'au 15 octobre 2021 inclus, sont autorisées à exercer leur activité les personnes mentionnées au I de l'article 12 qui, dans le cadre d'un schéma vaccinal comprenant plusieurs doses, justifient de l'administration d'au moins une des doses requises par le décret mentionné au II du même article 12, sous réserve de présenter le résultat, pour sa durée de validité, de l'examen de dépistage virologique ne concluant pas à une contamination par la covid-19 prévu par le même décret. () III. - Lorsque l'employeur constate qu'un agent public ne peut plus exercer son activité en application du I, il l'informe sans délai des conséquences qu'emporte cette interdiction d'exercer sur son emploi ainsi que des moyens de régulariser sa situation. L'agent public qui fait l'objet d'une interdiction d'exercer peut utiliser, avec l'accord de son employeur, des jours de congés payés. A défaut, il est suspendu de ses fonctions ou de son contrat de travail. / La suspension mentionnée au premier alinéa du présent III, qui s'accompagne de l'interruption du versement de la rémunération, prend fin dès que l'agent public remplit les conditions nécessaires à l'exercice de son activité prévues au I. Elle ne peut être assimilée à une période de travail effectif pour la détermination de la durée des congés payés ainsi que pour les droits acquis par l'agent public au titre de son ancienneté. Pendant cette suspension, l'agent public conserve le bénéfice des garanties de protection sociale complémentaire auxquelles il a souscrit. / La dernière phrase du deuxième alinéa du présent III est d'ordre public. Lorsque le contrat à durée déterminée d'un agent public non titulaire est suspendu en application du premier alinéa du présent III, le contrat prend fin au terme prévu si ce dernier intervient au cours de la période de suspension. ".

8. Il résulte des dispositions précitées des articles 12 à 14 de la loi du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire qu'il appartient aux établissements de soins de contrôler le respect de l'obligation vaccinale de leurs personnels soignants et agents publics et, le cas échéant, de prononcer une suspension de leurs fonctions jusqu'à ce qu'il soit mis fin au manquement constaté. L'appréciation selon laquelle les personnels ne remplissent pas les conditions posées par ces dispositions ne résulte pas d'un simple constat, mais nécessite non seulement l'identification du cas, parmi ceux énumérés par le I de l'article 13, dans lequel se trouve l'agent, mais également l'examen de la régularité du justificatif produit au regard de ces dispositions et de celles des dispositions réglementaires prises pour leur application. Par suite, contrairement à ce que soutient le CHRU de Nîmes, l'administration n'était pas en situation de compétence liée pour prendre la mesure litigieuse.

En ce qui concerne les moyens tirés de l'inconstitutionnalité de la loi n°2021-1040 du 5 août 2021 :

9. Aux termes de l'article R. 771-3 du code de justice administrative : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution est soulevé, conformément aux dispositions de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, à peine d'irrecevabilité, dans un mémoire distinct et motivé. Ce mémoire, ainsi que, le cas échéant, l'enveloppe qui le contient, portent la mention : " question prioritaire de constitutionnalité ".

10. Mme B, qui soutient que la décision contestée méconnaît les articles 1er, 4 et 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, le droit à la santé énoncé à l'article 11 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, l'article 5 de la charte de l'environnement ainsi que les principes constitutionnels de la liberté d'entreprendre et de la continuité du service public, conteste en réalité le principe même de l'obligation vaccinale posé par la loi du 5 août 2021. Ainsi, ces moyens tirés de l'inconstitutionnalité de la loi du 5 août 2021 n'ont pas été présentés par un mémoire distinct. Ils sont par suite irrecevables, et ne peuvent dès lors qu'être écartés.

En ce qui concerne les moyens tirés de l'inconventionnalité de la loi du 5 août 2021 :

11. En premier lieu, lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

12. Le droit à l'épanouissement personnel, le droit à une vie personnelle normale ainsi que le droit à la santé mentale font partie du droit au respect de la vie privée au sens des stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, telles que la Cour européenne des droits de l'homme les interprète. Une vaccination obligatoire constitue une ingérence dans ce droit, qui peut être admise si elle remplit les conditions du paragraphe 2 de l'article 8 et, notamment, si elle est justifiée par des considérations de santé publique et proportionnée à l'objectif poursuivi. Il doit ainsi exister un rapport suffisamment favorable entre, d'une part, la contrainte et le risque présentés par la vaccination pour chaque personne vaccinée et, d'autre part, le bénéfice qui en est attendu tant pour cet individu que pour la collectivité dans son entier, y compris ceux de ses membres qui ne peuvent être vaccinés en raison d'une contre-indication médicale, compte tenu à la fois de la gravité de la maladie, de son caractère plus ou moins contagieux, de l'efficacité du vaccin et des risques ou effets indésirables qu'il peut présenter.

13. L'article 12 de la loi du 5 août 2021 a défini le champ de l'obligation de vaccination contre la Covid-19 en retenant, notamment, un critère géographique pour y inclure les personnes exerçant leur activité dans un certain nombre d'établissements, principalement les établissements de santé et des établissements sociaux et médico-sociaux, ainsi qu'un critère professionnel pour y inclure les professionnels de santé afin, à la fois, de protéger les personnes accueillies par ces établissements qui présentent une vulnérabilité particulière au virus de la Covid-19 et d'éviter la propagation du virus par les professionnels de la santé dans l'exercice de leur activité qui, par nature, peut les conduire à soigner des personnes vulnérables ou ayant de telles personnes dans leur entourage. Mme B ne remet pas en cause le très large consensus scientifique selon lequel la vaccination contre la Covid-19 prémunit contre les formes graves de contamination. Quand bien même celle-ci ne diminuerait que modérément le risque de transmission du virus, elle présente des effets indésirables limités au regard de son efficacité. Il s'ensuit que l'obligation vaccinale pesant sur le personnel exerçant dans un établissement de santé, qui ne saurait être regardée comme incohérente et disproportionnée au regard de l'objectif de santé publique poursuivi, ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

14. En deuxième lieu, aux termes de l'article 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Le droit de toute personne à la vie est protégé par la loi. La mort ne peut être infligée à quiconque intentionnellement, sauf en exécution d'une sentence capitale prononcée par un tribunal au cas où le délit est puni de cette peine par la loi. ".

15. D'une part, la requérante ne démontre pas, comme elle le soutient, que les vaccins contre la Covid-19 sont encore en phase expérimentale. D'autre part, si la requérante fait valoir que la limitation des possibilités de contre-indications individuelles, qui résulte des dispositions contestées, porterait une atteinte potentielle à ce droit, compte tenu des risques révélés par les données de pharmacovigilance, de tels éléments ne sont pas de nature à caractériser un danger de cette nature. Est par suite, inopérant le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 2 de la convention précitée.

16. En troisième lieu, Mme B ne saurait utilement invoquer la méconnaissance de l'article 5 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui consacre le droit à la liberté et à la sureté, et n'est pas applicable au présent litige. Par suite, le moyen doit être écarté.

17. En quatrième lieu, aux termes de l'article 16 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " " La liberté d'entreprise est reconnue conformément au droit de l'Union et aux législations et pratiques nationales. " et aux termes de l'article 51 de cette même Charte : " 1. Les dispositions de la présente Charte s'adressent aux institutions, organes et organismes de l'Union dans le respect du principe de subsidiarité, ainsi qu'aux Etats membres uniquement lorsqu'ils mettent en œuvre le droit de l'Union. () ".

18. La liberté d'entreprise, garantie par l'article 16 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, ne peut être utilement invoquée, conformément à l'article 51 de la charte, que si les dispositions contestées mettent en œuvre le droit de l'Union. La décision en cause ne mettant pas en œuvre le droit de l'Union, le moyen tiré de la méconnaissance de la liberté d'entreprise ne peut qu'être écarté comme inopérant.

19. En cinquième lieu, au regard de ce qui a été dit au point 13, les dispositions de la loi du 5 août 2021 ne créent aucune discrimination prohibée par les articles 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 1er du protocole n° 12 annexé à cette convention. Ces dispositions ne méconnaissent pas non plus la résolution 2361 (2021) du 27 janvier 2021 de l'assemblée parlementaire du Conseil d'Europe. Par suite, ces moyens doivent être écartés.

20. En sixième lieu, si la requérante soutient que la décision attaquée est illégale en tant qu'elle est fondée sur la loi du 5 août 2021 qui méconnaît le règlement (UE) 2021/953 du 14 juin 2021, les dispositions de ce règlement, qui sont relatives à l'exercice du droit à la libre circulation et à la liberté de séjour au sein des États membres de l'Union européenne, n'ont ni pour objet ni pour effet d'interdire à un État membre de rendre la vaccination contre la Covid-19 obligatoire à tout ou partie de ses ressortissants. Le dispositif contesté mis en place sur le fondement des dispositions des articles 12 à 14 de la loi du 5 août 2021, ainsi qu'il a été dit, ne crée aucune discrimination entre les personnes vaccinées et les personnes non vaccinées qui serait contraire au règlement (UE) 2021/953 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2021. Par suite, le moyen tiré de l'incompatibilité de la mesure avec le règlement (UE) 2021/953 du 14 juin 2021 doit être écarté.

En ce qui concerne les moyens tirés de la contrariété de la loi du 5 août 2021 d'autres normes de même nature :

21. Si Mme B invoque la contrariété de la loi du 5 août 2021 aux articles 16-1 et 16-3 du code civil et à l'article L. 1111-4 du code de la santé publique, il ressort de ses écritures qu'elle conteste, en réalité, l'obligation vaccinale dans son principe, prévue par les dispositions de la loi du 5 août 2021. Ainsi, Mme B ne peut invoquer la contrariété de cette loi aux articles précités qui n'ont pas un rang inférieur au leur dans la hiérarchie des normes, dès lors qu'il n'appartient pas au juge administratif de contrôler la contrariété des dispositions législatives entre elles ni de se prononcer sur l'opportunité de leur contenu.

En ce qui concerne les autres moyens de la requête :

22. En premier lieu, aux termes de l'article L. 6143-7 du code de la santé publique : " Le directeur, président du directoire, conduit la politique générale de l'établissement. Il représente l'établissement dans tous les actes de la vie civile et agit en justice au nom de l'établissement. () Le directeur exerce son autorité sur l'ensemble du personnel dans le respect des règles déontologiques ou professionnelles qui s'imposent aux professions de santé, des responsabilités qui sont les leurs dans l'administration des soins et de l'indépendance professionnelle du praticien dans l'exercice de son art. () ".

23. La décision attaquée a été signée par M. E A, directeur général du CHRU de Nîmes qui dispose d'une compétence générale sur l'ensemble du personnel du centre hospitalier en vertu des dispositions de l'article L. 6143-7 du code de la santé publique précitées. Par ailleurs, contrairement à ce que soutient la requérante, les dispositions précitées du III de l'article 14 de la loi du 5 août 2021 donne compétence matérielle à cette autorité pour prononcer à l'encontre de ses agents une suspension de fonctions s'accompagnant de l'interruption du versement de la rémunération. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de son auteur doit être écarté.

24. En deuxième lieu, la mesure de suspension de fonctions attaquée prise à l'encontre d'un agent n'est pas une sanction, et, en tout état de cause, vise les textes dont il est fait application et mentionne les faits sur lesquels elle se fonde. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision attaquée doit être écarté.

25. En troisième lieu, Mme B soutient que la décision du 24 septembre 2021 par laquelle le directeur général du CHRU de Nîmes l'a suspendue de ses fonctions sans traitement, jusqu'à la production d'un justificatif de vaccination ou de contre-indication à la vaccination, qui constitue une sanction, est irrégulière car elle n'a pas bénéficié des garanties de la procédure disciplinaire ni de la procédure contradictoire en méconnaissance du principe constitutionnel des droits de la défense. Toutefois, en application du B de l'article 14 de la loi du 5 août 2021, à compter du 15 septembre 2021, les personnes exerçant leur activité en particulier dans les établissements de santé ne peuvent plus exercer leur activité : " si elles n'ont pas présenté les documents mentionnés au I de l'article 13 ou, à défaut, le justificatif de l'administration des doses de vaccins requises par le décret mentionné au II de l'article 12 ". Par suite, lorsque l'autorité administrative suspend le contrat de travail d'un agent public qui ne satisfait pas à cette obligation et interrompt, en conséquence, le versement de son traitement, elle ne prononce pas une sanction à raison d'un éventuel manquement ou agissement fautif commis par cet agent mais se borne à constater que l'agent ne remplit plus les conditions légales pour exercer son activité. Dès lors, les moyens ainsi soulevés par Mme B, tirés de la méconnaissance de l'article 82 de la loi du 9 janvier 1986, de ce que la mesure est une sanction disciplinaire déguisée et de la méconnaissance de l'article 81 de la loi du 9 janvier 1986, sont inopérants et doivent être écartés.

26. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : () 2° Infligent une sanction () ". Au regard de ce qui a été dit précédemment, dès lors que la décision de suspension n'est pas une sanction, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 2e de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ne peut qu'être écarté.

27. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable ". Aux termes de l'article L. 121-2 de ce même code : " Les dispositions de l'article L. 121-1, en tant qu'elles concernent les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ne sont pas applicables aux relations entre l'administration et ses agents ". Il résulte de ces dispositions que la procédure contradictoire préalable prévue à l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration n'est pas applicable aux agents publics. Par suite, ce moyen, inopérant, doit être écarté.

28. En sixième lieu, en prononçant la mesure contestée sur le fondement de la loi du 5 août 2021, qui n'est pas une sanction disciplinaire, le directeur général du CHRU de Nîmes, n'a pas fait application de l'article 30 de la loi du 13 juillet 1983. Par suite Mme B ne peut invoquer la méconnaissance des dispositions de cet article. Le moyen doit, par suite, être écarté comme inopérant.

29. En septième lieu, la décision attaquée, qui est une mesure de suspension d'un agent public ne satisfaisant pas aux obligations légales prévues par la loi du 5 août 2021, n'a pas le caractère d'une mesure de police administrative. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 6143-7 du code de la santé publique, qui est inopérant, doit être écarté.

30. En huitième lieu, en adoptant, pour l'ensemble des personnes exerçant leur activité dans les établissements de santé mentionnés à l'article L. 6111-1 du code de la santé publique, à l'exception de celles y effectuant une tâche ponctuelle, le principe d'une obligation vaccinale à compter du 15 septembre 2021, le législateur a entendu, dans un contexte de progression rapide de l'épidémie de Covid-19 accompagné de l'émergence de nouveaux variants et compte tenu d'un niveau encore incomplet de la couverture vaccinale de certains professionnels de santé, garantir le bon fonctionnement des services hospitaliers publics grâce à la protection offerte par les vaccins disponibles et protéger, par l'effet de la moindre transmission du virus par les personnes vaccinées, la santé des personnes qui y étaient hospitalisées. Il en résulte que l'obligation vaccinale prévue par l'article 12 précité de la loi du 5 août 2021 s'impose à toute personne travaillant régulièrement au sein de locaux relevant d'un établissement de santé mentionné à l'article L. 6111-1 du code de la santé publique, quel que soit l'emplacement des locaux en question et que cette personne ait ou non des activités de soins et soit ou non en contact avec des personnes hospitalisées ou des professionnels de santé. C'est pourquoi l'obligation de vaccination concerne aussi des personnels, notamment administratifs, qui ne sont pas en contact direct avec les malades dès lors qu'ils entretiennent nécessairement, eu égard à leur lieu de travail, des interactions avec des professionnels de santé en contact avec ces derniers.

31. Il résulte de ce qu'il vient d'être dit que l'obligation vaccinale des personnels hospitaliers s'impose à ceux-ci, alors même qu'ils n'exerceraient que des fonctions administratives dans un bâtiment distinct de celui dispensant des soins. Dans ces conditions, Mme B n'est pas fondée à soutenir que, eu égard à ses fonctions de " Data Manager " dans un bâtiment distinct, elle n'était pas tenue de justifier de son statut vaccinal à la date du 15 septembre 2021.

32. En neuvième lieu, il ressort des dispositions précitées de l'article 14 de la loi du 5 août 2021 qu'il appartient à l'agent public, soumis à l'obligation vaccinale, de présenter à son employeur les documents mentionnés au I de l'article 13 ou, à défaut, le justificatif de l'administration des doses de vaccins requises par le décret mentionné au II de l'article 12. Contrairement à ce que soutient Mme B, il n'incombait donc pas à l'administration de procéder à la réalisation de formalités, telle que la production d'un rapport, avant de prendre sa décision de suspension de fonctions. Dans ces conditions, l'absence de production par l'intéressée des justificatifs requis suffisait à l'administration pour constater l'impossibilité d'exercer dans laquelle se plaçait ainsi l'agent. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision litigieuse serait entachée d'erreur de fait doit être écarté.

33. En dixième lieu, aux termes de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : " Le fonctionnaire en activité à droit : () 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai et selon les sanctions prévues en application de l'article 42 ". Il résulte de ces dispositions, combinées avec celles précitées des articles 12 et 14 de la loi du 5 août 2021, que si le directeur d'un établissement de santé public peut légalement prendre une mesure de suspension à l'égard d'un agent qui ne satisfait pas à l'obligation vaccinale contre la Covid-19 alors que cet agent est déjà en congé de maladie, cette mesure et la suspension de traitement qui lui est associée ne peuvent toutefois entrer en vigueur qu'à compter de la date à laquelle prend fin le congé de maladie de l'agent en question.

34. D'une part, il résulte de ce qu'il vient d'être dit que l'obligation vaccinale des personnels hospitaliers s'impose à ceux-ci, alors même qu'ils se trouveraient régulièrement placés en congé de maladie en application de l'article 41 précité de la loi du 9 janvier 1986. Toutefois, et ainsi que l'a admis le CHRU dans sa décision du 2 juin 2022 portant régularisation de la situation de Mme B, son placement régulier en arrêt de travail à compter du 6 septembre 2021 jusqu'au 3 janvier 2022 imposait à l'autorité administrative de différer les effets de la mesure de suspension jusqu'à l'expiration de ce congé de maladie. Néanmoins, il ressort des pièces du dossier qu'à la date du 4 janvier 2022, Mme B ne justifiait plus d'un arrêt de travail. Dans ces conditions, le directeur général pouvait à bon droit, en application des principes énoncés ci-dessus, et sans que Mme B ne puisse se prévaloir d'arrêts de travail postérieurs à cette date, ainsi qu'elle en justifie pour son congé de maternité du 31 mars au 20 juillet 2022, prononcer la suspension de l'intéressée à compter du 4 janvier 2022. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 doit être écarté.

35. En dernier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le directeur général du CHRU de Nîmes ait entaché la décision de suspension attaquée d'erreur manifeste d'appréciation.

36. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision contestée du 2 juin 2022. Par suite et en application de ce qui a été dit au point 6, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions en annulation dirigées contre la décision du 24 septembre 2021.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

37. Le présent jugement, qui rejette les conclusions à fin d'annulation, n'appelle aucune mesure d'exécution. Les conclusions à fin d'injonction doivent donc être rejetées.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

38. Ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge du CHRU de Nîmes, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande Mme B sur ce fondement. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par le CHRU de Nîmes sur ce même fondement.

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions en annulation dirigées contre la décision du 24 septembre 2021 et contre la décision du 23 décembre 2021.

Article 2 : Le surplus des conclusions des requêtes est rejeté.

Article 3 : Les conclusions présentées par le CHRU de Nîmes au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent jugement sera notifié à Mme C B et au centre hospitalier régional universitaire de Nîmes.

Délibéré après l'audience du 30 mars 2023, à laquelle siégeaient :

Mme Corneloup, présidente de la 2ème chambre,

Mme Galtier, première conseillère,

M. Chevillard, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 avril 2023.

La rapporteure,

F. D

La présidente de la 2ème chambre,

F. CORNELOUP

La greffière,

F. DESMOULIÈRES

La République mande et ordonne à la préfète du Gard en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 2104141 - 220002

Code publication

C