Cour d'Appel de Pau

Arrêt du 20 avril 2023 n° 21/00289

20/04/2023

Irrecevabilité

JN/SB

 

Numéro 23/1376

 

COUR D'APPEL DE PAU

 

Chambre sociale

 

ARRÊT DU 20/04/2023

 

Dossier : N° RG 21/00289 - N° Portalis DBVV-V-B7F-HYFG

 

Nature affaire :

 

Demande en paiement de prestations

 

Affaire :

 

[K] [Z]

 

C/

 

CAISSE DE MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE SUD AQUITAINE

 

Grosse délivrée le

 

à :

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

 

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

A R R Ê T

 

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 20 Avril 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

 

* * * * *

 

APRES DÉBATS

 

aux audiences publiques tenues en continuation les 19 janvier 2023 et 02 Mars 2023, devant :

 

Madame NICOLAS, magistrat chargé du rapport,

 

assistée de Madame BARRERE, faisant fonction de greffière, présente à l'appel des causes du 19 janvier 2023 et de Madame LAUBIE, greffière, présente à l'appel des causes du 02 mars 2023

 

Madame NICOLAS, en application de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :

 

Madame NICOLAS, Présidente

 

Madame SORONDO, Conseiller

 

Madame PACTEAU, Conseiller

 

qui en ont délibéré conformément à la loi.

 

dans l'affaire opposant :

 

APPELANT :

 

Monsieur [K] [Z]

 

[Adresse 4]

 

[Adresse 4]

 

[Localité 2]

 

Représenté par Maître COIMBRA de la SELARL DE MAITRE COIMBRA, avocat au barreau de BORDEAUX

 

INTIMEE :

 

CAISSE DE MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE SUD AQUITAINE

 

[Adresse 3]

 

[Localité 1]

 

Représentée par Maître DUALE de la SELARL DUALE - LIGNEY - BOURDALLE, avocat au barreau de PAU

 

sur appel de la décision

 

en date du 07 JANVIER 2021

 

rendue par le POLE SOCIAL DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MONT DE MARSAN

 

RG numéro : 18/00259

 

FAITS ET PROCÉDURE

 

M. [K] [Z] (le cotisant) est exploitant agricole et gérant de sociétés agricoles exploitées sous forme d'EARL.

 

La Caisse de Mutualité Sociale Agricole Sud Aquitaine (la caisse ou l'organisme social) lui a adressé les 9 février 2018 et 31 mai 2019, deux mises en demeure, qu'il a contestées devant la commission de recours amiable, puis devant le tribunal des affaires de sécurité sociale des Landes, devenu le pôle social du tribunal judiciaire de Mont de Marsan, selon deux procédures distinctes respectivement enrôlées sous les numéros RG n°18/00259 et RG n°19/00545.

 

Ces mises en demeure sont les suivantes :

 

> mise en demeure du 9 février 2018, notifiée par courrier recommandé avec accusé de réception, signé de son destinataire le 17 février 2018, pour un montant total de 9 378,75 €, selon le détail suivant :

 

- 7590 € en principal au titre de l'année 2017,

 

- 461,89€ de majoration de retard, pour les années 2015 et 2017.

 

> mise en demeure du 31 mai 2019, notifiée par courrier recommandé avec accusé de réception signé de son destinataire le 8 juin 2019, pour un montant total de 10 221,28€, selon le détail suivant :

 

- 9702 € € en principal au titre de l'année 2018,

 

- 519,28 € à titre de majoration de retard.

 

Par jugement du 7 janvier 2021, rendu sous le numéro de minute 21/32, le pôle social du tribunal judiciaire de Mont de Marsan a :

 

- ordonné la jonction des affaires enrôlées sous les numéros 18/00259 et 19/00545 sous le numéro 18/00259,

 

- rejeté la demande de production de pièces formée par le cotisant,

 

- rejeté les moyens de nullité des mises en demeure,

 

- débouté le cotisant de toutes ses demandes,

 

- condamné le cotisant à verser à la caisse les sommes suivantes :

 

- 9 378,75 € au titre de la mise en demeure du 9 février 2018 pour les cotisations et majorations de retard dues pour 2015 et 2017,

 

- 10 221,28 € au titre de la mise en demeure du 31 mai 2019 pour les cotisations et majorations de retard dues pour 2018,

 

- condamné le cotisant aux dépens engagés à compter du 1er janvier 2019.

 

Cette décision a été notifiée aux parties par lettre recommandée avec accusé de réception. Il n'est pas justifié aux pièces du dossier de la date à laquelle le cotisant en a été rendu destinataire.

 

Le 27 janvier 2021, par lettre recommandée avec avis de réception adressée au greffe de la cour, le cotisant en a régulièrement interjeté appel.

 

Selon avis de convocation du 15 juin 2022, contenant calendrier de procédure, les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience de plaidoiries du 24 novembre 2022, contradictoirement renvoyée à leur demande, au 19 janvier 2023.

 

Au 19 janvier 2023, l'affaire a été mise en continuation au 2 mars 2023, afin de pouvoir intégrer aux débats un arrêt devant être rendu le 2 mars 2023, relatif à une procédure (RG 22 /2996), par laquelle l'appelant a saisi la cour par mémoires distincts, d'une demande de sursis à statuer, fondée sur trois demandes de transmission à la Cour de cassation, de trois questions prioritaires de constitutionnalité, et sur une demande de transmission à la Cour de Justice de l'Union Européenne (CJUE), de deux questions préjudicielles.

 

Cet arrêt, intégré aux débats, ne faisant pas droit aux demandes de sursis à statuer de l'appelant, l'affaire a été mise en délibéré au 20 avril 2023.

 

PRÉTENTIONS DES PARTIES

 

Par ses dernières « conclusions n°2 » visées par le greffe de la cour le 3 novembre 2022, reprises oralement à l'audience de plaidoirie, et auxquelles il est expressément renvoyé, le cotisant, M. [K] [Z], appelant demande à la cour de :

 

- juger l'appel recevable,

 

- réformer le jugement déféré,

 

et statuant à nouveau,

 

1-à titre principal :

 

-juger recevables les trois questions prioritaires de constitutionnalité soulevées, dont il rappelle le contenu, et surseoir à statuer jusqu'à décision définitive sur chacune de ces questions,

 

2-à titre subsidiaire, pour le cas où la cour ne ferait pas droit aux précédentes demandes, et en tout état de cause,

 

- transmettre à la Cour de Justice de l'Union Européenne, les deux questions préjudicielles dont il rappelle le contenu, et surseoir à statuer jusqu'à décision définitive sur le renvoi préjudiciel,

 

3-à titre subsidiaire, pour le cas où la cour ne ferait pas droit aux précédentes demandes, et en tout état de cause,

 

-enjoindre à la caisse :

 

-de justifier de sa forme juridique précise, de sa personnalité morale, de sa date d'immatriculation, d'un agrément lui permettant de pratiquer une activité d'assurance,

 

-de verser aux débats tous documents et éléments d'information et calcul, permettant au demandeur d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son éventuelle obligation (nature et montant des cotisations réclamées ; période concernée ; détail des montants en principal, intérêts et autres),

 

- surseoir à statuer sur le surplus en attendant cette communication,

 

4-subsidiairement, pour le cas où la cour ne ferait pas droit aux précédentes demandes, et en tout état de cause,

 

- juger qu'il n'y a pas lieu de valider les mises en demeure litigieuses,

 

-débouter la caisse de toutes ses demandes,

 

-la condamner à lui payer 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

 

Selon ses conclusions transmises par RPVA le 17 octobre 2022, reprises oralement à l'audience de plaidoirie, et auxquelles il est expressément renvoyé, la Caisse de Mutualité Sociale Agricole Sud Aquitaine, intimée, demande à la cour de :

 

- dire irrecevable et en tout cas mal fondé l'appel interjeté par l'appelant,

 

- l'en débouter purement et simplement ainsi que de toutes ses demandes,

 

- confirmer la décision de première instance en toutes ses dispositions,

 

- condamner l'appelant au paiement d'une somme de 3 000 € sur la base de l'article 700 du code de procédure civile,

 

- condamner l'appelant aux entiers dépens de première instance comme d'appel et autoriser la SELARL [5] à en poursuivre le recouvrement conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

 

SUR QUOI LA COUR

 

I/ Sur la recevabilité de l'appel

 

L'appel a été régulièrement interjeté, tant s'agissant de sa forme, que du délai dans lequel il a été formé, et sa recevabilité ne fait l'objet d'aucune contestation.

 

II/ Sur la recevabilité des trois questions prioritaires de constitutionnalité

 

En application de l'article 61-1 de la constitution, lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil Constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'État ou de la Cour de Cassation qui se prononce dans un délai déterminé.

 

En application de l'article 126-1 du code de procédure civile, la transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité à la Cour de cassation obéit aux règles définies par les articles 23-1 à 23-3 de l'ordonnance numéro 58-1067 du 7 novembre 1968, portant loi organique sur le Conseil Constitutionnel et aux dispositions prévues par le présent chapitre.

 

En application de l'article 23-1 de cette ordonnance, le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, est, à peine d'irrecevabilité, présenté dans un écrit distinct et motivé.

 

Au cas particulier, si une telle saisine a été opérée selon procédure distincte, dont la cour a eu à connaître sous le numéro RG 22/2996, les questions prioritaires de constitutionnalité soulevées par l'appelant, dans l'actuelle procédure (RG 21/289), et contenues dans ses conclusions, faute d'être présentées dans un écrit distinct, ne sont pas recevables.

 

III/ Sur les demandes de sursis à statuer dans l'attente de decisions définitives suite à transmission à la Cour de cassation de 3 questions prioritaires de constitutionnalité et d'un renvoi de 2 questions préjudicielles à la CJUE

 

La cour a été saisie de ces mêmes demandes par mémoires distincts, et a rendu un arrêt en date du 2 mars 2023, introduit dans les présents débats, ne faisant pas droit à ces demandes de transmission et de renvoi, si bien qu'il n'y a pas lieu à sursis à statuer pour ce motif.

 

IV/ Sur la demande de sursis à statuer dans l'attente de communication de pièces

 

L'appelant reproche à l'intimée, l'absence de communication de pièces essentielles, tant en première instance qu'en appel, et invoque en substance, par des conclusions au détail desquelles il est expressément renvoyé pour plus ample information, les dispositions de :

 

- l'article 59 du code de procédure civile, selon lesquelles le défendeur, s'il s'agit d'une personne morale, doit à peine d'être déclaré même d'office irrecevable en sa défense, faire connaître sa forme, sa dénomination, son siège social et l'organe qui le représente,

 

-l'ordonnance numéro 2001-350 du 19 avril 2001, relative au code de la mutualité, les articles 111-1,112-2,114-53,112-3, R211-2 de ce code, l'ordonnance numéro 2017-734 du 4 mai 2017, portant modification des dispositions relatives aux organismes mutualistes, l'article L723-1 du code rural, l'article R321-1 du code des assurances, l'article R931-2-1 du code de la sécurité sociale, dont il déduit que la caisse de Mutualité Sociale Agricole, est une mutuelle, soumise à immatriculation, d'abord au registre national des mutuelles prévu à l'article L411-1, substitué à compter de l'ordonnance de 2017, par le Siren, de même qu'à agrément selon les opérations réalisées,

 

-ainsi que l'insuffisance des éléments produits par la caisse, faisant valoir qu'ils ne lui permettent pas de connaître la nature, la cause et l'étendue de ses obligations.

 

L'intimée sollicite, par des explications au détail desquelles il est renvoyé, et au visa d'une abondante jurisprudence concordante, tant nationale que communautaire, confirmation du jugement déféré ayant débouté l'appelante.

 

Sur ce,

 

La cour observe que l'appelant persiste dans un argumentaire déjà soumis au premier juge et que celui-ci a rejeté par une décision motivée à laquelle les éléments du dossier n'apportent aucune contradiction fondée.

 

La cour adopte la décision du premier juge, par laquelle les prétentions de l'appelant ont été rejetées, sauf à rappeler, préciser ou ajouter que :

 

- les dispositions de l'article 59 du code de procédure civile, visées par l'appelant, concernent le « défendeur », et non la caisse, dès lors que celle-ci a la qualité de « demanderesse », dans l'actuelle procédure par laquelle elle réclame à l'appelant au paiement de cotisations,

 

-la caisse produit ses statuts, arrêtés lors de l'assemblée générale du 7 novembre 2008, et approuvés par arrêté préfectoral du 8 décembre 2008 (ses pièces 9 et 10), et ce en conformité avec les dispositions de l'article L723-2 du code rural et de la pêche maritime, selon lesquelles :

 

«Les caisses de mutualité sociale agricole sont départementales ou pluridépartementales. Elles sont chargées de la gestion des régimes obligatoires de protection sociale des salariés et non salariés des professions agricoles. (')

 

Les statuts et règlements intérieurs des caisses de mutualité sociale agricole sont approuvés par l'autorité administrative »,

 

- la caisse est dotée de la personnalité morale, en application de l'article L723-1 du code rural et de la pêche maritime, dernier alinéa, selon lequel :

 

«Les caisses de mutualité sociale agricole sont dotées de la personnalité morale et sont constituées et fonctionnent conformément aux prescriptions du code de la mutualité, sous réserve des dispositions du présent code et du code de la sécurité sociale et des textes pris pour leur application » ,

 

- les articles L723-1, L. 723-2 et L. 725-3 du code rural et de la pêche maritime fixent les attributions des organismes de mutualité sociale agricole pour le recouvrement des cotisations et contributions qui concourent au financement des régimes obligatoires, et non facultatifs, de protection sociale des salariés et non-salariés agricoles.

 

Ne poursuivant pas un but lucratif, ces organismes, qui ne fournissent pas un service marchand et fonctionnent sur un mode de répartition, ne sont ni des entreprises économiques ni des assureurs.

 

Il est à cet égard constant et régulièrement rappelé notamment par la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que les régimes de sécurité sociale dont le fonctionnement repose sur le principe de solidarité, ont un caractère exclusivement social, dépourvu de tout but lucratif et qu'ils ne constituent pas de ce fait des mutuelles.

 

La jurisprudence de la cour de justice de l'Union européenne (CJUE) est constante en la matière : il appartient à la législation de chaque Etat membre de déterminer le droit ou l'obligation de s'affilier à un régime de Sécurité sociale et les conditions qui donnent droit à des prestations. Cette obligation d'affiliation et de cotisations en France à la sécurité sociale ne va pas à l'encontre des règles européennes de la concurrence, car ces dernières ne sont pas applicables à la matière, ainsi qu'il vient d'être dit, et a été confirmé à plusieurs reprises par la CJUE, les organismes de sécurité sociale ne constituent pas des entreprises au sens des articles 101 et 102 du TFUE (ex articles 81 et 82 du traité instituant la communauté européenne TCE) dans la mesure où ils n'exercent pas des activités économiques au sens des règles européennes de la concurrence. De même, les directives assurances (dont notamment les directives CEE 92/49 et 92/96) excluent les législations de sécurité sociale de leur champ d'application. De ce fait, les organismes de sécurité sociale, organismes de droit privé, ne sont pas soumis aux règles assurantielles consistant pour les mutuelles à être immatriculées au registre national des mutuelles.

 

- la caisse, par la production des imprimés de déclaration de revenus, des bordereaux d'appels de cotisations, des mises en demeure, et du détail de ses calculs contenus à ses conclusions, produit les éléments suffisants à considérer l'affaire en état d'être jugée.

 

V/ Sur la contestation de chacune des 2 mises en demeure litigieuses

 

Au soutien de cette contestation, l'appelant développe quatre moyens qui vont être examinés successivement, et auxquels l'intimée s'oppose par des conclusions au détail desquelles il est expressément renvoyé.

 

5-1-L'appelant fait valoir que le silence de la CRA, suite à la contestation des mises en demeure dont il a saisi cette commission, vaudrait acceptation de ses contestations, au visa de l'article R 142-1-A du code de la sécurité sociale, qui rendrait applicable aux recours préalables mentionnés aux articles L 142-4 et L 142-5 du code de la sécurité sociale, l'article L231-1 du code des relations entre le public et l'administration, créé par ordonnance du 23 octobre 2015, numéro 2015-1341, selon lequel le silence gardé pendant deux mois par l'administration sur une demande vaut décision d'acceptation.

 

Les pièces du dossier établissent que l'appelant a contesté chacune des mises en demeure devant la CRA (les 5 mars 2018 et 24 juin 2019), et il est constant que la CRA n'a pas statué dans le délai prévu par la réglementation.

 

Cependant, le moyen est inopérant dès lors que:

 

>le cas de figure est traité par un texte spécial, s'agissant de l'article R142-6 alinéa 1 du code de la sécurité sociale, en ses versions applicables à la cause en vigueur du 13 janvier 2011 au 1er janvier 2019, s'agissant de la première mise en demeure, et dans sa version applicable depuis le 31 mars 2019, s'agissant de la seconde mise en demeure, selon lequel :

 

« Lorsque la décision(...) de la commission n'a pas été portée à la connaissance du requérant dans le délai

 

- d'un mois (version en vigueur du 13 janvier 2011 au 1er janvier 2019),

 

- de deux mois, (versions en vigueur à compter du 1er janvier 2019, puis du 31 mars 2019),

 

l'intéressé peut considérer sa demande comme rejetée et se pourvoir devant le tribunal des affaires de sécurité sociale prévu à l'article L. 142-2.

 

(...) »,

 

> à titre superfétatoire, la commission de recours amiable n'est pas une administration, si bien que ne sont pas applicables les dispositions invoquées de l'article L231-1 du code des relations entre le public et l'administration, le recours porté devant elle, nonobstant le fait qu'il s'agit d'un recours gracieux de nature administrative ayant la particularité de constituer un préalable obligatoire au recours contentieux relevant du juge judiciaire.

 

5-2-L'appelant invoque le défaut de qualité à agir de la caisse de mutualité agricole, faisant valoir qu'il s'agirait d'une mutuelle relevant du code de la mutualité, laquelle n'aurait pas qualité pour émettre les mises en demeure litigieuses, faute de lien juridique avec l'appelant, en l'absence de contrat ou de tout acte d'adhésion la liant à l'appelant, et de justification de son véritable statut et de sa date d'immatriculation

 

Ce moyen est inopérant, dès lors que :

 

> la caisse de Mutualité Sociale Agricole, est expressément dotée de la personnalité morale par les dispositions de l'article L723-1 du code rural et de la pêche maritime, et est chargée de la gestion des régimes obligatoires de protection sociale des salariés et non-salariés des professions agricoles, en application de l'article L723-2 du code rural et de la pêche maritime,

 

>il a déjà été dit par la présente décision, que les régimes de sécurité sociale dont le fonctionnement repose sur le principe de solidarité, ont un caractère exclusivement social, dépourvu de tout but lucratif et ne constituent de ce fait ni des entreprises au sens des articles 101 et 102 du TFUE, ni des assurances, ni des mutuelles,

 

> l'appelant, en sa qualité d'exploitant à titre individuel d'une activité agricole non-salariée, ainsi que de gérant de trois sociétés agricoles, est soumis à ce régime obligatoire, et est à ce titre redevable des cotisations et contributions, indépendamment de tout engagement contractuel, la caisse rappelant à cet égard et sans contestation, le détail des textes du code rural et de la pêche maritime, relatifs à cette obligation, s'agissant des articles suivants :

 

-L722-1 : « le régime de protection sociale des non-salariés des professions agricoles est applicable aux personnes non-salariées occupées aux activités ou dans les exploitations, entreprises ou établissements énumérés ci-dessous :

 

1° exploitations de culture et d'élevage de quelque nature qu'elle soit' »,

 

-L722-4 et L722-10 5è,

 

-L731-30,L 731-10, L731-25, L731 42, L 732-61, en ce qui concerne l'assurance maladie, maternité, invalidité, prestations familiales, assurance vieillesse, retraite complémentaire obligatoire,

 

- L 136-5 II du code de la sécurité sociale, 14 III de l'ordonnance 96-50 du 24 janvier 1996, L718-2-1 du code rural et de la pêche maritime, en ce qui concerne les contributions CSG, CRDS, formation professionnelle.

 

5-3-L'appelant soutient que la caisse ne peut se prévaloir d'aucune créance à son encontre, faute de contrat liant les parties, et faute pour la caisse d'un agrément lui permettant de pratiquer des activités d'assurance

 

Ce moyen est jugé inopérant, aux mêmes motifs que ceux qui viennent d'être exposés au paragraphe précédent.

 

5-4-L'appelant fait valoir que chaque mise en demeure doit être annulée faute de lui permettre de connaître la nature, la cause et l'étendue de son obligation, estimant qu'elles manquent de détails, des éléments permettant de justifier de la demande, et de comprendre la base et le mode de calcul.

 

La mise en demeure, qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d'avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti, et la contrainte, délivrée à la suite de la mise en demeure restée sans effet, doivent permettre à l'intéressé d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation, et doivent préciser, à peine de nullité, outre la nature et le montant des cotisations réclamées, la période à laquelle elles se rapportent, sans que soit exigée la preuve d'un préjudice, de même qu'elles doivent préciser, depuis le 1er janvier 2017, les majorations et pénalités qui s'y appliquent.

 

En revanche, n'est pas exigée la mention du mode de calcul et du taux des cotisations.

 

Ces principes, dégagés par la jurisprudence depuis un arrêt de principe, ont été consacrés par l'article R244-1 du code de la sécurité sociale dès sa rédaction issue du décret n° 2007-546 du 11 avril 2007.

 

Selon l'article R244-1 du code de la sécurité sociale , alinéa premier, en ses versions applicables à la cause, en vigueur du 1er janvier 2017 au 16 décembre 2018, puis depuis le 16 décembre 2018 :

 

« L'avertissement ou la mise en demeure précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées, les majorations et pénalités qui s'y appliquent ainsi que la période à laquelle elles se rapportent ».

 

Au cas particulier, chacune des 2 mises en demeure litigieuses, dont copie sera annexée au présent arrêt pour permettre de s'y référer pour total informé, par le tableau détaillé qu'elle contient, informe le cotisant de la cause, de la nature et du montant des sommes réclamées, ainsi que des majorations et pénalités qui s'y appliquent, et de la période à laquelle elles se rapportent.

 

Ces réclamations, nonobstant les multiples contestations émises par le cotisant concernant le principe de la dette, n'ont jamais été contestées en leur montant.

 

Les mises en demeure sont ainsi conformes aux dispositions légales.

 

En conclusion, aucun des moyens de l'appelant pour contester chacune des 2 mises en demeure litigieuses n'étant fondé, celles-ci sont validées en leur entier montant, ce qui justifie condamnation de l'appelant au paiement des sommes réclamées, conformément à la décision du premier juge, qui sera confirmée.

 

VI/ Sur les frais irrépétibles et les dépens

 

L'équité commande d'allouer à l'intimée, la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et de rejeter le surplus des demandes à ce titre.

 

L'appelant, qui succombe, supportera les dépens exposés en appel.

 

Sur l'article 699 du code de procédure civile

 

Les dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, sont seulement applicables aux matières où le ministère d'avocat est obligatoire, ce qui n'est pas le cas de la présente procédure orale relative au contentieux des affaires de sécurité sociale, si bien que la demande du conseil de l'intimée sur ce fondement sera rejetée.

 

PAR CES MOTIFS :

 

La cour, après en avoir délibéré, statuant, publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

 

Déclare l'appel recevable,

 

Déclare irrecevables, les demandes par lesquelles M. [K] [Z] sollicite la transmission à la Cour de cassation, de trois questions prioritaires de constitutionnalité,

 

Dit n'y avoir lieu à surseoir à statuer,

 

Confirme le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Mont-de-Marsan en date du 7 janvier 2021, rendu sous le numéro de minute 21 /32,

 

Y ajoutant,

 

Condamne M. [K] [Z] à payer à la caisse de Mutualité Sociale Agricole Sud Aquitaine, la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et rejette le surplus des demandes à ce titre,

 

Déboute la Caisse de Mutualité Sociale Agricole Sud Aquitaine de sa demande sur le fondement de l'article 699 du code de procédure civile,

 

Condamne M. [K] [Z] aux dépens exposés en appel.

 

Arrêt signé par Madame NICOLAS, Présidente, et par Madame LAUBIE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,