Tribunal administratif de Rennes

Jugement du 12 avril 2023 n° 2204815

12/04/2023

Irrecevabilité

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 21 septembre 2022, M. A C, représenté par Me Antoine, demande au tribunal de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2018.

Il soutient que :

- la doctrine de l'administration fiscale prévoit que les contribuables de bonne foi dont la déclaration 2018 comporte des omissions ou des insuffisances peuvent bénéficier du crédit d'impôt pour la modernisation du recouvrement (CIMR) ;

- il subit une double imposition contraire aux principes constitutionnels d'égalité devant la loi et devant les charges publiques ;

- il y a lieu de tenir compte de l'équité.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 décembre 2022, le directeur régional des finances publiques de Bretagne et du département d'Ille-et-Vilaine conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- le moyen tiré de l'inconstitutionnalité de la suppression du CIMR en cas d'omission déclarative n'est pas recevable faute de faire l'objet d'une question prioritaire de constitutionnalité présentée par mémoire distinct ;

- le refus du CIMR ne conduit pas à une double imposition.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B,

- et les conclusions de M. Fraboulet, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. A C a fait l'objet en 2021 d'un contrôle sur pièces portant sur l'impôt sur le revenu des années 2017, 2018 et 2019. A l'occasion de ce contrôle et après exercice de son droit de communication, l'administration a estimé que l'intéressé s'était livré à une activité occulte de maçonnerie générale et travaux divers du bâtiment. Elle a procédé en conséquence à une évaluation d'office du bénéfice industriel et commercial de M. C de ces trois années. L'administration a également constaté que M. C avait omis de déclarer des salaires. Le service a par suite estimé que le contribuable ne pouvait pas bénéficier du crédit d'impôt pour la modernisation du recouvrement (CIMR) au titre de l'année 2018. Une cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu au titre de cette année a été mise en recouvrement le 30 octobre 2021 pour un montant de 17 051 euros. Elle a été a assortie d'intérêts de retard et de majorations. M. C demande au tribunal de prononcer la décharge de ces droits et pénalités en contestant le refus de l'administration de le faire bénéficier du crédit d'impôt pour la modernisation du recouvrement.

Sur le terrain de la loi fiscale :

2. En premier lieu, le crédit d'impôt pour la modernisation du recouvrement (CIMR) prévu au A du II de l'article 60 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017 modifié, qui permet d'éviter un double prélèvement de l'impôt en 2019 est réservé aux revenus spontanément déclarés en application du 3 du L du II de l'article 60 de la loi du 29 décembre 2016. Pour l'application de ces dispositions, les revenus déclarés spontanément s'entendent des revenus qui figurent sur la déclaration souscrite par le contribuable en application des dispositions de l'article 170 du code général des impôts et, le cas échéant, de l'article 172 du même code. Il en résulte que des revenus qui n'ont pas été déclarés spontanément ne peuvent ouvrir droit au CIMR calculé sur la base des revenus spontanément déclarés.

3. En deuxième lieu, si M. C entend soutenir que les dispositions législatives du 3 du L du II de l'article 60 de la loi du 29 décembre 2016 seraient contraires aux principes constitutionnels d'égalité devant la loi et devant les charges publiques, il n'appartient pas, comme le relève l'administration en défense, au juge administratif, à l'exception des cas où, en application de l'article 61-1 de la Constitution, une question prioritaire de constitutionnalité est présentée par mémoire distinct, de connaître de la question de la conformité d'une loi à la Constitution.

4. Si, en troisième et dernier lieu, M. C demande à ce que la double imposition qu'il prétend subir du fait du refus de l'administration de le faire bénéficier du crédit d'impôt pour la modernisation du recouvrement doit être prise en compte sur le plan de l'équité, il n'appartient pas au juge de l'impôt, dans le cadre du contrôle qu'il exerce sur le bien-fondé de l'impôt, de connaître de telles considérations.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales :

5. M. C entend, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, du point 70 de la doctrine publiée le 10 février 2020 sous l'identifiant juridique BOI-IR-PAS-50-10-30-10 selon lequel " Afin de prendre en compte les difficultés qu'ont pu rencontrer les contribuables face aux modalités particulières de la déclaration de revenus de l'année 2018, année de transition dans la mise en œuvre du PAS, les contribuables de bonne foi dont la déclaration de revenus de l'année 2018 présente des erreurs, inexactitudes, omissions ou insuffisances déclaratives révélées à l'occasion d'une procédure contraignante, pourront également, par mesure de tempérament, bénéficier du CIMR et, le cas échéant, du crédit d'impôt complémentaire. ".

6. M. C soutient qu'il doit être regardé comme un contribuable de bonne foi dès lors qu'il ne vérifie jamais le montant des sommes portées sur les déclarations pré-remplies d'impôt sur le revenu.

7. Toutefois, il résulte de l'instruction et n'est pas contesté que M. C s'est livré durant trois années, en 2017, 2018 et 2019, à une activité occulte de maçonnerie générale et de travaux divers du bâtiment sans avoir déclaré cette activité à un centre de formalités des entreprises ou auprès du tribunal de commerce. Les bénéfices perçus par M. C dans le cadre de cette activité n'ont, par ailleurs, pas été fiscalement déclarés. En outre, il est constant qu'une somme de 64 097 euros a été encaissée par M. C en 2018 au titre de salaires ou d'arriérés de salaires sans que celui-ci ne les déclare à l'impôt sur le revenu. Au vu de ces éléments, M. C ne peut être regardé comme un contribuable de bonne foi et n'est, dès lors, pas fondé à soutenir qu'il doit bénéficier de la mesure de tempérament prévue au point 70 de la doctrine publiée le 10 février 2020 sous l'identifiant juridique BOI-IR-PAS-50-10-30-10.

8. Il résulte de tout ce qui précède que la requête de M. C doit être rejetée.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. C est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. A C et au directeur régional des finances publiques de Bretagne et du département d'Ille-et-Vilaine.

Délibéré après l'audience du 29 mars 2023, à laquelle siégeaient :

M. Etienvre, président,

M. Albouy, premier conseiller,

Mme René, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 avril 2023.

Le président-rapporteur,

signé

F. B

L'assesseur le plus ancien,

signé

E. Albouy

La greffière,

signé

S. Guillou

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Code publication

C