Tribunal administratif de Paris

Ordonnance du 15 mars 2023 n° 2304955

15/03/2023

Non renvoi

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Vu la procédure suivante :

A une requête, enregistrée le 8 mars 2023, M. B D, représenté A Me Hug, demande au juge des référés, saisi sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) de l'admettre provisoirement au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

2°) d'enjoindre à la ville de Paris de procéder à son hébergement dans une structure adaptée à son âge et à son état psychique et de prendre en charge ses besoins alimentaires et sanitaires quotidiens dans un délai de 24 heures à compter de l'ordonnance à intervenir, sous astreinte de 100 euros A jour de retard, jusqu'à ce que l'autorité judiciaire ait définitivement statué sur son recours fondé sur les articles 375 et suivants du code civil ;

3°) d'enjoindre à la ville de Paris de procéder à une nouvelle évaluation de sa minorité ;

4°) de mettre à la charge de la ville de Paris une somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve qu'il renonce à la part contributive de l'Etat, ou à lui verser directement en cas de non admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- la condition d'urgence est remplie dès lors qu'il se trouve dans une situation de grande précarité, isolé, sans ressources et hébergement, livré à un risque d'exploitation, de violence et de mort et que sa situation d'errance qui ne lui permet pas de maintenir le lien indispensable avec ses avocats ou l'institution judiciaire et de réunir utilement les pièces nécessaires à faire reconnaitre sa minorité A le juge des enfants ;

-la décision de la ville de Paris refusant de le prendre en charge jusqu'à ce que le juge des enfants statue sur son recours, porte une atteinte grave et manifestement illégale à son intérêt supérieur en tant qu'enfant tel qu'il est garanti A l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; cette protection doit en effet être appréciée de façon effective, ce qui implique qu'il existe une présomption de minorité qui perdure tout au long de la procédure jusqu'à l'épuisement des voies de recours ainsi que l'ont estimé le défenseur des droits et le comité des droits de l'enfant des Nations Unies ; or, actuellement le délai de recours devant le juge des enfants est supérieur à trois mois ce qui créé une entrave disproportionnée à l'accès au juge et à la possibilité d'exercer utilement la voie de recours et oblige le mineur à recourir au dispositif d'hébergement pour majeurs en violation de ses droits fondamentaux ;

- le dispositif légal actuel, tel qu'il est prévu A la combinaison des articles L. 221-1 et L. 223-4 du code de l'action sociale et des familles et 375-5 du code civil est inconstitutionnel en ce qu'il n'assure pas les garanties suffisantes au respect de l'exigence constitutionnelle de l'intérêt supérieur de l'enfant et méconnait le droit à un recours effectif devant le juge des enfants ; les délais d'intervention du juge des enfants étant très longs, le mineur qui ne bénéficie plus de prise en charge se trouve dans une situation de grande précarité qui ne lui permet pas de préparer avec son conseil l'audience devant le juge des enfants et de réunir les pièces probatoires ou les éléments de son parcours permettant de confirmer sa minorité ;

- ce dispositif est également inconventionnel au regard des dispositions des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

A un mémoire en défense, enregistré le 10 mars 2023, la ville de Paris, représentée A la SCP Foussard-Froger, conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- la présomption de minorité ne résulte d'aucun texte, ni d'aucun principe ;

- M. D ne conteste pas la pertinence des éléments retenus A le rapport d'évaluation ayant conclu à son absence de minorité et n'établit pas, A les pièces qu'il produit, que l'appréciation portée A la ville de Paris serait manifestement erronée ;

- la question prioritaire de constitutionnalité soulevée est irrecevable, faute d'avoir été présentée A un mémoire distinct ;

- le dispositif mis en place A le législateur prévoit les garanties nécessaires pour assurer la prise en charge effective et continue des personnes se déclarant mineures, qui relèvent soit du département en vertu des articles L. 221-1, L. 223-2 et L. 226-3 du code de l'action sociale et des familles si elles sont reconnues mineures, soit de l'Etat en vertu des articles L. 121-7 et L. 345-2-2 du même code si elles ont été reconnues majeures à l'issue de l'entretien d'évaluation ; en outre, il leur est possible de saisir le juge judiciaire à qui il incombe de se prononcer sur leur minorité ; elles peuvent également saisir le juge du référé liberté sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, qui peut enjoindre la poursuite leur accueil provisoire s'il estime que l'appréciation du département est manifestement erronée et qu'il existe un risque immédiat de mise en danger de leur santé ou de leur sécurité ; en l'espèce, M. D ne conteste pas l'inconventionnalité du dispositif législatif existant mais les conditions effectives dans lesquelles il est appliqué ; A suite, il n'appartient pas au juge des référés de se prononcer sur la conventionalité des dispositions législatives au regard des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

A un mémoire en intervention, enregistré le 10 mars 2023, l'association Utopia 56, le groupe d'information et de soutien des immigré.e.s (GISTI), l'association Avocats pour la défense des droits des étrangers (ADDE), l'association Infomie, la ligue des droits de l'homme et l'association d'accès aux droits des jeunes et d'accompagnement vers la majorité (ADJAAM), représentés A Me Peschanski et Me Crusoé, demandent au juge des référés de faire droit aux conclusions du requérant.

Un mémoire complémentaire en intervention a été enregistré le 13 mars 2023, présenté pour l'association Infomie.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

- le code civil ;

- le code de l'action sociale et des familles

- le code de justice administrative.

Le président du tribunal a désigné M. C pour statuer sur les demandes de référé.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Au cours de l'audience publique tenue en présence de Mme Heeralall, greffière d'audience, M. C a lu son rapport et entendu :

- les observations de Me Hug, représentant M. D ;

- les observations de Me Crusoé, représentant l'association Utopia 56, le groupe d'information et de soutien des immigré.e.s (GISTI), l'association Avocats pour la défense des droits des étrangers (ADDE), l'association Infomie, la ligue des droits de l'homme et l'association d'accès aux droits des jeunes et d'accompagnement vers la majorité (ADJAAM) ;

- et les observations de Me Froger, représentant la ville de Paris.

La clôture de l'instruction a été prononcée à l'issue de l'audience publique.

Une note en délibéré, présentée pour l'ADJAAM, a été enregistrée le 14 mars 2023.

Considérant ce qui suit :

Sur la demande d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :

1. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 : " Dans les cas d'urgence (), l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée soit A le président du bureau ou de la section compétente du bureau d'aide juridictionnelle, soit A la juridiction compétente ou son président ".

2. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de prononcer, en application des dispositions précitées, l'admission provisoire de M. D au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

3. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée A l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures. ".

4. Eu égard à leur objet, l'association Utopia 56, le groupe d'information et de soutien des immigré.e.s (GISTI), l'association Avocats pour la défense des droits des étrangers (ADDE), l'association Infomie, la ligue des droits de l'homme et l'association d'accès aux droits des jeunes et d'accompagnement vers la majorité (ADJAAM) justifient d'un intérêt pour intervenir aux soutien de la requête. Leur intervention est admise.

5. M. D, ressortissant camerounais qui indique être né le 10 mars 2006, s'est présenté le 31 octobre 2022 à l'accueil des mineurs non accompagnés de Paris (AMNA) afin de solliciter une prise en charge au titre de l'aide sociale à l'enfance. A une décision du 4 novembre suivant, la maire de Paris a refusé de le prendre en charge et de pourvoir à ses besoins aux motifs que sa minorité n'était pas établie. M. D a saisi le même jour le juge des enfants du tribunal judiciaire de Paris afin de solliciter une mesure de protection sur le fondement des articles 375 et suivants du code civil. Il a également saisi le juge des référés du présent tribunal, en application de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, aux fins d'enjoindre à la ville de Paris de le prendre en charge dans un dispositif adapté jusqu'à l'audience du juge des enfants.

6. L'article 375 du code civil dispose que : " Si la santé, la sécurité ou la moralité d'un mineur non émancipé sont en danger, ou si les conditions de son éducation ou de son développement physique, affectif, intellectuel et social sont gravement compromises, des mesures d'assistance éducative peuvent être ordonnées A justice à la requête des père et mère conjointement, ou de l'un d'eux, de la personne ou du service à qui l'enfant a été confié ou du tuteur, du mineur lui-même ou du ministère public () ". Aux termes de l'article 375-3 du même code : " Si la protection de l'enfant l'exige, le juge des enfants peut décider de le confier : / () 3° A un service départemental de l'aide sociale à l'enfance () ". Aux termes des deux premiers alinéas de l'article 373-5 de ce code : " A titre provisoire mais à charge d'appel, le juge peut, pendant l'instance, soit ordonner la remise provisoire du mineur à un centre d'accueil ou d'observation, soit prendre l'une des mesures prévues aux articles 375-3 et 375-4. / En cas d'urgence, le procureur de la République du lieu où le mineur a été trouvé a le même pouvoir, à charge de saisir dans les huit jours le juge compétent, qui maintiendra, modifiera ou rapportera la mesure. () ".

7. L'article L. 221-1 du code de l'action sociale et des familles dispose que : " Le service de l'aide sociale à l'enfance est un service non personnalisé du département chargé des missions suivantes : 1° Apporter un soutien matériel, éducatif et psychologique tant aux mineurs et à leur famille ou à tout détenteur de l'autorité parentale, confrontés à des difficultés risquant de mettre en danger la santé, la sécurité, la moralité de ces mineurs ou de compromettre gravement leur éducation ou leur développement physique, affectif, intellectuel et social, qu'aux mineurs émancipés et majeurs de moins de vingt et un ans confrontés à des difficultés familiales, sociales et éducatives susceptibles de compromettre gravement leur équilibre () / ; 3° Mener en urgence des actions de protection en faveur des mineurs mentionnés au 1° du présent article ; / 4° Pourvoir à l'ensemble des besoins des mineurs confiés au service et veiller à leur orientation () ". L'article L. 222-5 du même code dispose que : " Sont pris en charge A le service de l'aide sociale à l'enfance sur décision du président du conseil départemental : () / 3° Les mineurs confiés au service en application du 3° de l'article 375-3 du code civil () ". L'article L. 223-2 de ce code dispose que : " Sauf si un enfant est confié au service A décision judiciaire ou s'il s'agit de prestations en espèces, aucune décision sur le principe ou les modalités de l'admission dans le service de l'aide sociale à l'enfance ne peut être prise sans l'accord écrit des représentants légaux ou du représentant légal du mineur ou du bénéficiaire lui-même s'il est mineur émancipé. / En cas d'urgence et lorsque le représentant légal du mineur est dans l'impossibilité de donner son accord, l'enfant est recueilli provisoirement A le service qui en avise immédiatement le procureur de la République. () / Si, dans le cas prévu au deuxième alinéa du présent article, l'enfant n'a pas pu être remis à sa famille ou le représentant légal n'a pas pu ou a refusé de donner son accord dans un délai de cinq jours, le service saisit également l'autorité judiciaire en vue de l'application de l'article 375-5 du code civil ".

8. Enfin, l'article R. 221-11 du code précité dispose que : " I. - Le président du conseil départemental du lieu où se trouve une personne se déclarant mineure et privée temporairement ou définitivement de la protection de sa famille met en place un accueil provisoire d'urgence d'une durée de cinq jours, à compter du premier jour de sa prise en charge, selon les conditions prévues aux deuxième et quatrième alinéas de l'article L. 223-2. / II. - Au cours de la période d'accueil provisoire d'urgence, le président du conseil départemental procède aux investigations nécessaires en vue d'évaluer la situation de cette personne au regard notamment de ses déclarations sur son identité, son âge, sa famille d'origine, sa nationalité et son état d'isolement. () / IV. - Au terme du délai mentionné au I, ou avant l'expiration de ce délai si l'évaluation a été conduite avant son terme, le président du conseil départemental saisit le procureur de la République en vertu du quatrième alinéa de l'article L. 223-2 et du second alinéa de l'article 375-5 du code civil. En ce cas, l'accueil provisoire d'urgence mentionné au I se prolonge tant que n'intervient pas une décision de l'autorité judiciaire. / S'il estime que la situation de la personne mentionnée au présent article ne justifie pas la saisine de l'autorité judiciaire, il notifie à cette personne une décision de refus de prise en charge délivrée dans les conditions des articles L. 222-5 et R. 223-2. En ce cas, l'accueil provisoire d'urgence mentionné au I prend fin ". Le même article dispose que les décisions de refus de prise en charge sont motivées et mentionnent les voies et délais de recours.

9. En premier lieu, si M. D fait valoir que les dispositions précitées du 2ème alinéa de l'article 375-5 du code civil et celles de l'article L. 223-2 du code de l'action sociale et des familles portent atteinte aux droits et libertés garantis A la Constitution, il n'a pas présenté cette question prioritaire de constitutionnalité dans un écrit distinct et motivé alors que cette condition est exigée sous peine d'irrecevabilité A les dispositions de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958.

10. En deuxième lieu, il n'appartient pas au juge des référés, eu égard à son office, de se prononcer sur un moyen tiré de l'incompatibilité de dispositions législatives avec les stipulations d'une convention internationale. A suite, le moyen tiré de ce que le dispositif de prise en charge des mineurs non accompagnés, tel qu'il est prévu A la combinaison des articles L. 221-1 et L. 223-4 du code de l'action sociale et des familles et 375-5 du code civil méconnaitrait les exigences des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas de nature à permettre au juge des référés de faire usage des pouvoirs qu'il tient de l'article L 521-2 du code de justice administrative.

11. En troisième lieu, il résulte des dispositions mentionnées aux points 6 à 8 qu'il incombe aux autorités du département, le cas échéant dans les conditions prévues A la décision du juge des enfants ou A le procureur de la République ayant ordonné en urgence une mesure de placement provisoire, de prendre en charge l'hébergement et de pourvoir aux besoins des mineurs confiés au service de l'aide sociale à l'enfance. A cet égard, une obligation particulière pèse sur ces autorités lorsqu'un mineur privé de la protection de sa famille est sans abri et que sa santé, sa sécurité ou sa moralité est en danger. Lorsqu'elle entraîne des conséquences graves pour le mineur intéressé, une carence caractérisée dans l'accomplissement de cette mission porte une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale. Il incombe au juge des référés d'apprécier, dans chaque cas, les diligences accomplies A l'administration en tenant compte des moyens dont elle dispose ainsi que de l'âge, de l'état de santé et de la situation de famille de la personne intéressée.

12. Il en résulte également que, lorsqu'il est saisi A un mineur d'une demande d'admission à l'aide sociale à l'enfance, le président du conseil départemental peut seulement, au-delà de la période provisoire de cinq jours prévue A l'article L. 223-2 du code de l'action sociale et des familles, décider de saisir l'autorité judiciaire mais ne peut, en aucun cas, décider d'admettre le mineur à l'aide sociale à l'enfance sans que l'autorité judiciaire l'ait ordonné. L'article 375 du code civil autorise le mineur à solliciter lui-même le juge judiciaire pour que soient prononcées, le cas échéant, les mesures d'assistance éducative que sa situation nécessite. Lorsque le département refuse de saisir l'autorité judiciaire à l'issue de l'évaluation mentionnée au point 3 ci-dessus, au motif que l'intéressé n'aurait pas la qualité de mineur isolé, l'existence d'une voie de recours devant le juge des enfants A laquelle le mineur peut obtenir son admission à l'aide sociale rend irrecevable le recours formé devant le juge administratif contre la décision du département.

13. Il appartient toutefois au juge du référé, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, lorsqu'il lui apparaît que l'appréciation portée A le département sur l'absence de qualité de mineur isolé de l'intéressé est manifestement erronée et que ce dernier est confronté à un risque immédiat de mise en danger de sa santé ou de sa sécurité, d'enjoindre au département de poursuivre son accueil provisoire.

14. Enfin, l'article 47 du code civil dispose que : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ".

15. Pour justifier de sa minorité, M. D produit une copie de sa carte d'identité consulaire établie le 13 janvier 2023 et délivrée A le consulat général du Cameroun à Paris, une copie de sa carte d'identité scolaire pour l'année 2020/2021, une copie de la carte nationale d'identité de sa mère et indique avoir transmis son acte de naissance au juge des enfants du tribunal judiciaire de Paris sans toutefois en produire une copie dans la présente instance. Il résulte de l'article 47 du code civil cité au point 14 que la force probante d'actes d'état civil étrangers peut être combattue A tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact, notamment au vu de données extérieures, le juge formant sa conviction au regard de l'ensemble des éléments versés au dossier dans le cadre de l'instruction du litige qui lui est soumis.

16. Il résulte de l'instruction que l'évaluation de M. D, réalisée A l'association France Terre d'Asile le 3 novembre 2022 a conclu à l'absence de minorité et d'isolement de l'intéressé eu égard à la circonstance que son discours semble préparé et ses repères travaillés, qu'il n'est pas possible de déceler dans ses propos et son comportement d'éventuels signes en lien avec une adolescence et que, s'il a déclaré avoir été hébergé et évalué dans un centre d'hébergement pour mineur en Italie et qu'on lui aurait remis une carte attestant de sa minorité, il n'a fourni aucun élément tangible permettant d'attester d'une prise compte effective de sa minorité dans ce pays, M. D déclarant avoir laissé cette carte en Italie. De même ainsi que l'a indiqué la ville de Paris dans sa décision du 4 novembre 2022, le fort degré d'autonomie et de maturé dont a fait preuve le requérant en mettant un terme de sa propre initiative à la prise en charge alléguée en Italie pour poursuivre son parcours migratoire jusqu'à Paris alors qu'il aurait été jusque-là dépendant de son accompagnateur n'apparait pas compatible avec l'âge qu'il déclare. A suite, dans les circonstances de l'espèce, M. D n'est pas fondé à soutenir que la ville de Paris se serait livrée à une appréciation manifestement erronée de l'absence de sa qualité de mineur isolé et que la décision litigieuse porterait ainsi une atteinte grave et manifestement illégale à une des libertés fondamentales qu'il invoque.

17. Il résulte de tout ce qui précède que, à l'exception des conclusions tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire, les conclusions de la requête présentées sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ainsi que, A voie de conséquence, celles présentées sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, la ville de Paris n'étant pas la partie perdante.

O R D O N N E :

Article 1er : Les interventions de l'association Utopia 56, le groupe d'information et de soutien des immigré.e.s (GISTI), l'association Avocats pour la défense des droits des étrangers (ADDE), l'association Infomie, la ligue des droits de l'homme et l'association d'accès aux droits des jeunes et d'accompagnement vers la majorité (ADJAAM) sont admises.

Article 2 : M. D est admis, à titre provisoire, au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Article 3 : La requête de M. D est rejetée.

Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à M. B D et à la Ville de paris.

Copie en sera adressée au bureau d'aide juridictionnelle, à l'association Utopia 56, le groupe d'information et de soutien des immigré.e.s (GISTI), l'association Avocats pour la défense des droits des étrangers (ADDE), l'association Infomie, la ligue des droits de l'homme et l'association d'accès aux droits des jeunes et d'accompagnement vers la majorité (ADJAAM).

Fait à Paris, le 15 mars 2023.

Le juge des référés,

Y. C

La République mande et ordonne au préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, en ce qui le concerne ou à tous les commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2/9

Code publication

C