Tribunal administratif de Clermont-Ferrand

Ordonnance du 24 février 2023 n° 2202577

24/02/2023

Non renvoi

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Vu la procédure suivante :

C un mémoire distinct, enregistré le 1er décembre 2022, M. A, représenté C Me Hachet, demande au tribunal, à l'appui de sa requête tendant principalement à l'annulation de l'arrêté du 13 octobre 2022 C lequel le préfet du Puy-de-Dôme a suspendu la validité de son permis de conduire pour une durée de six mois, de transmettre au Conseil d'Etat, en application de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés garantis C la Constitution de l'alinéa 1er de l'article L. 235-1 du code de la route.

Il soutient que :

- les dispositions de l'article L. 235-1 du code de la route sont applicables au litige ;

- si le Conseil constitutionnel a déjà déclaré conformes à la Constitution les dispositions précitées, ces dernières ont fait l'objet d'une modification C la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé, et les termes de " cannabis " et de " substances ou plantes classées comme stupéfiants " ont vu leur définition modifiée, si bien qu'un changement de circonstances est intervenu ;

- la question présente un caractère sérieux dès lors que les dispositions en cause méconnaissent les articles 2, 4 et 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, ainsi que l'article 34 de la Constitution.

Le préfet du Puy-de-Dôme, auquel la question prioritaire de constitutionnalité a été transmise, n'a pas produit d'observation.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution du 4 octobre 1958, notamment son article 61-1 ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée ;

- le code de la route ;

- le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. D'une part, aux termes de l'article R. 771-7 du code de justice administrative :

" Les présidents de tribunal administratif () peuvent, C ordonnance, statuer sur la transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité ".

2. Aux termes de l'article 61-1 de la Constitution : " Lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé () ". Aux termes de l'article 23-2 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " La juridiction statue sans délai C une décision motivée sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'Etat ou à la Cour de cassation. Il est procédé à cette transmission si les conditions suivantes sont remplies : / 1° La disposition contestée est applicable au litige ou à la procédure, ou constitue le fondement des poursuites ; / 2° Elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances ; / 3° La question n'est pas dépourvue de caractère sérieux. () ".

3. D'autre part, aux termes de l'article L. 224-2 du code de la route : " I.- Le représentant de l'Etat dans le département peut, dans les soixante-douze heures de la rétention du permis prévue à l'article L. 224-1, ou dans les cent vingt heures pour les infractions pour lesquelles les vérifications prévues aux articles L. 234-4 à L. 234-6 et L. 235-2 ont été effectuées, prononcer la suspension du permis de conduire lorsque : () 2° Il est fait application des dispositions de l'article L. 235-2 si les analyses ou examens médicaux, cliniques et biologiques établissent que le conducteur conduisait après avoir fait usage de substances ou plantes classées comme stupéfiants ou si le conducteur ou l'accompagnateur de l'élève conducteur a refusé de se soumettre aux épreuves de vérification prévues au même article L. 235-2 ; () / II.- La durée de la suspension du permis de conduire ne peut excéder six mois. Cette durée peut être portée à un an en cas d'accident de la circulation ayant entraîné la mort d'une personne ou ayant occasionné un dommage corporel, de refus d'obtempérer commis dans les conditions prévues à l'article L. 233-1-1, de conduite sous l'empire d'un état alcoolique, de conduite après usage de substances ou plantes classées comme stupéfiants et de refus de se soumettre aux épreuves de vérification prévues aux articles L. 234-4 à L. 234-6 et L. 235-2. () ".

4. Et aux termes de l'article L. 235-1 du même code : " I.- Toute personne qui conduit un véhicule ou qui accompagne un élève conducteur alors qu'il résulte d'une analyse sanguine ou salivaire qu'elle a fait usage de substances ou plantes classées comme stupéfiants est punie de deux ans d'emprisonnement et de 4 500 euros d'amende. Si la personne se trouvait également sous l'empire d'un état alcoolique caractérisé C une concentration d'alcool dans le sang ou dans l'air expiré égale ou supérieure aux taux fixés C les dispositions législatives ou réglementaires du présent code, les peines sont portées à trois ans d'emprisonnement et 9 000 euros d'amende. () ".

5. M. A soutient que les dispositions du premier alinéa de l'article L. 235-1 du code de la route contreviennent aux dispositions des articles 2, 4 et 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ainsi qu'à l'article 34 de la Constitution. Toutefois, les dispositions dont la constitutionnalité est contestée concernent la répression pénale de la conduite sous stupéfiants et non la procédure de suspension administrative à titre provisoire du permis de conduire régie C les dispositions de l'article L. 224-2 du code de la route, lequel renvoie aux dispositions de l'article L. 235-2 du même code et non aux dispositions contestées lesquelles ne trouvent pas à s'appliquer au présent litige relatif à la suspension administrative du permis de conduire de M. A C le préfet du Puy-de-Dôme. C suite, la question prioritaire de constitutionnalité soulevée C le requérant ne satisfait pas à la condition posée C le 1° de l'article 23-2 de l'ordonnance du 7 novembre 1958.

6. Il résulte de ce qui précède qu'il n'y a pas lieu de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité formulée C M. A.

O R D O N N E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire soulevée C M. A.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. B A et au préfet du Puy-de-Dôme.

Fait à Clermont-Ferrand, le 24 février 2023.

La présidente du tribunal,

S. BADER-KOZA

La République mande et ordonne au préfet du Puy-de-Dôme, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.JC

Code publication

D