Tribunal administratif de Nantes

Ordonnance du 13 janvier 2023 n° 2216510

13/01/2023

Non renvoi

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 16 décembre 2022 et 6 janvier 2023, le préfet de la Loire-Atlantique demande au juge des référés :

1°) d'ordonner, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-3 du code de justice administrative, à M. C A de libérer sans délai le logement dédié aux demandeurs d'asile qu'il occupe situé au 85 avenue du président Roosevelt à Saint-Brévin-les-Pins (Loire-Atlantique), et géré par l'association Aurore ;

2°) de l'autoriser à procéder à son expulsion avec le concours de la force publique ;

3°) de l'autoriser à donner toutes instructions utiles au gestionnaire du logement afin de débarrasser les lieux des biens meubles s'y trouvant, aux frais et risques de M. A, à défaut pour celui -ci de les avoir emportés.

Il soutient que :

- le juge administratif est compétent en application des dispositions des articles L. 552- 15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers ;

- sa requête est recevable en application des mêmes dispositions ;

- les conditions d'urgence et d'utilité sont satisfaites dès lors que le maintien de l'intéressé, débouté de l'asile, dans un hébergement d'urgence pour demandeurs d'asile, compromet le bon fonctionnement du service public, alors qu'au 31 août 2022, 794 demandeurs d'asile étaient en attente d'un hébergement dans le département ;

- la mesure sollicitée ne fait l'objet d'aucune contestation sérieuse dès lors que M. A se maintient dans le logement alors que sa demande d'asile a été rejetée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 29 juin 2022, notifiée le 4 juillet suivant et que l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) l'a informé par courrier du 4 août 2022 de la fin de sa prise en charge ; par un courrier du 26 septembre 2022 réputé notifié, le préfet l'a mis en demeure de quitter les lieux dans un délai d'un mois ; l'accès à l'hébergement d'urgence de droit commun est sans lien avec le droit au maintien dans un lieu d'hébergement pour demandeurs d'asile et les dispositions de l'article L. 552-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne lui sont pas applicables ;

- il n'existe pas de circonstances exceptionnelles de nature à faire obstacle à la mesure demandée dès lors que la situation de M. A ne présente pas un caractère exceptionnel qui pourrait justifier son maintien dans le lieu d'hébergement qu'il occupe, puisque rien ne permet de conclure qu'il souffre d'une maladie grave (il établit seulement être affectée d'une apnée du sommeil modérée) et que la sortie des lieux n'a au demeurant pas pour effet de mettre un terme au suivi médical et traitement médicamenteux dont il bénéficie ; rien n'indique qu'il se trouve dans une situation d'isolement et de détresse d'autant qu'il est présent sur le territoire français depuis septembre 2020 et a pu sans nul doute nouer des contacts pouvant l'héberger temporairement ; la situation sanitaire liée à l'épidémie de covid-19 ne saurait en elle-même justifier le maintien dans son logement ;

- il est nécessaire que M. A quitte les lieux sans délai, sa présence dans ce logement faisant obstacle à l'accueil de nouveaux arrivants bénéficiant du statut de demandeurs d'asile alors qu'il a été informé depuis plusieurs mois de la nécessité de quitter les lieux, qu'il ne détient aucun titre lui permettant de se maintenir régulièrement sur le territoire français et que, dans ces conditions, lui accorder un délai serait contraire à l'esprit des dispositions de l'article L. 552-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il ne lui incombe pas de trouver une solution d'hébergement d'urgence de droit commun à M. A, lequel a vu sa demande d'asile définitivement rejetée et alors que sa situation ne justifie pas qu'il bénéficie d'une solution d'hébergement d'urgence, dispositif par ailleurs considéré comme en situation de saturation chronique.

Par un mémoire en défense enregistré le 6 janvier 2023, M. C A, représenté par Me Philippon, conclut :

1°) à ce que le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire leur soit octroyé ;

2°) à ce qu'il soit sursis à statuer jusqu'au 17 janvier 2023, date à laquelle un médecin doit se prononcer sur la compatibilité de son état de santé avec une mise à la rue ;

3°) à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à ce que leur soit accordé un sursis à exécution de la mesure d'expulsion dont ils font l'objet dans l'attente d'une autre solution d'hébergement d'urgence ;

4°) à ce que soit prononcé un sursis à exécution de la mesure d'expulsion dont il fait l'objet dans l'attente d'une autre solution d'hébergement d'urgence ;

5°) à ce que soit mis à la charge de l'État le versement à leur conseil de la somme de 1 400 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il fait valoir que :

- la condition d'urgence n'est pas remplie et la mesure sollicitée n'est pas utile dès

lors que les chiffres, en termes de places d'hébergement, avancés par le préfet ne sont pas cohérents et sont dépourvus de valeur probantes, le préfet ne versant pas aux débats les données de l'OFII qu'il invoque ; le préfet se borne à donner des éléments généraux sur le nombre de demandeurs d'asile recensés en Loire-Atlantique sans s'intéresser à sa situation particulière alors qu'il ne bénéficie plus d'aucune aide financière, qu'aucune mesure d'expulsion ne pèse sur lui et qu'il bénéficie d'un important suivi médical qu'il ne sera pas certain de poursuivre en cas de perte de son hébergement ; le refus de quitter le lieux d'hébergement résulte de la carence de l'Etat dans la mise en œuvre des dispositifs d'hébergement d'urgence et qui concernent les déboutés du droit d'asile ;

- la mesure sollicitée fait l'objet de contestations sérieuses :

* elle est entachée d'un vice de procédure tiré de la méconnaissance des articles L.552-14, L. 552-15 et R. 552-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que le courrier de mise en demeure du préfet a été adressé directement à l'association HUDA Aurore et la signature figurant sur l'accusé de réception ne correspond pas à la sienne ;

* elle est entachée d'un défaut d'examen sérieux de sa situation et méconnait l'article L. 552-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il doit pouvoir bénéficier d'un suivi médical et qu'il ne dispose plus d'aucune ressource alors qu'il est relativement jeune et isolé sur le territoire français ;

* elle est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation en ne lui proposant aucune solution transitoire d'hébergement alors que le mois le plus froid de l'année à Nantes est celui de janvier et alors que sa condition médicale justifie un suivi régulier.

Par un mémoire distinct, enregistré le 6 janvier 2023, M. C A, représenté par Me Philippon, conclut :

1°) à ce que le tribunal transmette sans délai au Conseil d'État la question prioritaire de constitutionnalité soulevée afin que celui-ci procède à l'examen qui lui incombe en vue de sa transmission au Conseil constitutionnel pour qu'il relève l'inconstitutionnalité de l'article L. 412-6 du code des procédures civiles d'exécution, qui institue une " trêve hivernale " du 1er novembre au 31 mars de l'année suivante, tel qu'interprété par le Conseil d'État en tant qu'il considère que ces dispositions ne sont pas applicables à la procédure d'expulsion des personnes se maintenant dans un lieu d'hébergement pour demandeurs d'asile ;

2°) dans cette attente, de sursoir à statuer sur la requête du préfet de la Loire-Atlantique jusqu'à ce que le Conseil d'État, et, le cas échéant, le Conseil constitutionnel aient statué sur la question prioritaire de constitutionnalité ainsi soulevée.

Il soutient que :

- contrairement à ce que juge le Conseil d'État, et nonobstant l'absence de disposition législative expresse autorisant l'application aux demandeurs d'asile des dispositions de l'article L. 412-6 du Code des procédures civiles d'exécution, ces dispositions, qui instituent une " trêve hivernale " du 1er novembre au 31 mars de l'année suivante au profit des locataires défaillants, sont applicables à la procédure d'expulsion des personnes se maintenant dans un lieu d'hébergement pour demandeurs d'asile et l'interprétation du Conseil d'État porte atteinte à ses intérêts ; les juridictions administratives appliquent régulièrement des dispositions issues des codes de droit civil sans pour autant bénéficier d'une quelconque autorisation législative (à titre d'illustration, le Conseil d'État applique les dispositions des articles 1231-6 et 1343-2 du code civil ou l'article 642 du code de procédure civile et, par un avis n° 405797 du 31 mars 2017, il a d'ailleurs admis sans équivoque l'application de règles de droit civil devant les juridictions administratives en l'absence de toute autorisation expresse) ;

- la question est nouvelle : si le Conseil constitutionnel s'est déjà prononcé sur la constitutionnalité de l'article L. 412-6 du code des procédures civiles d'exécution, tel n'est pas le cas s'agissant de l'interprétation donnée de ce texte par le Conseil d'État ;

- sur le caractère sérieux de la question posée tenant à la violation du principe constitutionnel d'égalité devant la loi : l'article L.412-6 du code des procédures civiles d'exécution présente un caractère général et absolu ; bien que les occupants irréguliers de l'hébergement dédié aux demandeurs d'asile occupent un logement destiné à assurer le bon fonctionnement d'un service public (l'accueil des demandeurs d'asile), ils ne sont pas dans une situation sensiblement différente de celle des locataires défaillants des habitations à loyer modéré auxquels trouve à s'appliquer l'article L. 412-6 ; l'interprétation de l'article L. 412-6 du code des procédures civiles d'exécution par le Conseil d'État conduit à des différences de traitement inéquitables ;

- la question posée tenant à la violation du principe constitutionnel de respect de la dignité humaine, du droit de mener une vie familiale normale ainsi que l'objectif à valeur constitutionnelle du droit au logement présente un caractère sérieux (les occupants irréguliers de l'hébergement dédié aux demandeurs d'asile ne font pas partie des catégories de personnes explicitement exclues par l'article L. 412-6 de la protection liée à la trêve hivernale ; le refus du mécanisme de protection ne permet pas d'assurer le respect de leur dignité ou de préserver leur vie privée et familiale).

M. A a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 9 janvier 2023.

Vu les pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président du tribunal a désigné Mme Le Barbier, première conseillère, pour statuer sur les demandes de référé.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 janvier 2023 à 9 heures 30 :

- le rapport de Mme Le Barbier, juge des référés,

- et les observations de Me Philippon, avocat de M. A,

- le préfet de la Loire-Atlantique n'étant ni présent, ni représenté.

La clôture de l'instruction a été prononcée à l'issue de l'audience.

Considérant ce qui suit :

1. Le préfet de la Loire-Atlantique demande au juge des référés, sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 552-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et L. 521-3 du code de justice administrative, d'ordonner l'expulsion de M. A du logement dédié aux demandeurs d'asile qu'il occupe, situé au 85 avenue du président Roosevelt à Saint-Brévin-les-Pins (Loire-Atlantique), et géré par l'association Aurore.

Sur la demande d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :

2. M. A ayant été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 9 janvier 2023, il n'y a plus lieu de statuer sur son admission provisoire à l'aide juridictionnelle.

Sur la question prioritaire de constitutionnalité soulevée en défense :

3. Aux termes de l'article 61-1 de la Constitution : " Lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé. / Une loi organique détermine les conditions d'application du présent article. ".

4. Il résulte de la combinaison des dispositions 23-1 et 23-2 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 avec celles du livre V du code de justice administrative qu'une question prioritaire de constitutionnalité peut être soulevée devant le juge des référés du tribunal administratif statuant sur le fondement de l'article L. 521-3 de ce code. Si le juge des référés ne rejette pas les conclusions qui lui sont soumises par application des dispositions de l'article L. 522-3 dudit code, il lui appartient de se prononcer, en l'état de l'instruction, sur la transmission au Conseil d'État de la question prioritaire de constitutionnalité. Il y a lieu pour le juge des référés du tribunal administratif de transmettre au Conseil d'État cette question prioritaire à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question ne soit pas dépourvue de caractère sérieux. Enfin, en posant une question prioritaire de constitutionnalité, tout justiciable a le droit de contester la constitutionnalité de la portée effective qu'une interprétation jurisprudentielle constante du Conseil d'État confère à cette disposition.

5. Aux termes des dispositions de l'article L. 412-6 du code des procédures civiles d'exécution : " Nonobstant toute décision d'expulsion passée en force de chose jugée et malgré l'expiration des délais accordés en vertu de l'article L. 412-3, il est sursis à toute mesure d'expulsion non exécutée à la date du 1er novembre de chaque année jusqu'au 31 mars de l'année suivante, à moins que le relogement des intéressés soit assuré dans des conditions suffisantes respectant l'unité et les besoins de la famille. Par dérogation au premier alinéa du présent article, ce sursis ne s'applique pas lorsque la mesure d'expulsion a été prononcée en raison d'une introduction sans droit ni titre dans le domicile d'autrui par voies de fait. Le juge peut supprimer ou réduire le bénéfice du sursis mentionné au même premier alinéa lorsque les personnes dont l'expulsion a été ordonnée sont entrées dans tout autre lieu que le domicile à l'aide des procédés mentionnés au deuxième alinéa. ".

6. Par ses décisions nos 404934, 405164, 405165 et 406065 du 21 avril 2017, et par les décisions n°406170 du 12 juillet 2017 et n°408098 du 7 juin 2017, le Conseil d'État a jugé que les dispositions de l'article L. 412-6 du code des procédures civiles d'exécution ne sont pas applicables, en l'absence de disposition législative expresse, à la procédure d'expulsion des personnes se maintenant dans un lieu d'hébergement pour demandeurs d'asile organisée par l'article L. 744-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

7. Par mémoire distinct, M. A demande de transmettre au Conseil d'État une question prioritaire de constitutionnalité tirée de la conformité au principe d'égalité devant la loi, au principe à valeur constitutionnelle de sauvegarde de la dignité humaine, au droit de mener une vie familiale normale et à l'objectif de valeur constitutionnelle d'accès à un logement décent de la portée effective des dispositions de l'article L. 412-6 du code des procédures civiles d'exécution par l'interprétation constante donnée par le Conseil d'État.

8. Toutefois, ainsi qu'il a été dit au point 6, la disposition contestée n'est pas applicable au litige soumis par le préfet de la Loire-Atlantique au juge des référés, comme en a jugé le Conseil d'État dans les décisions qui y sont mentionnées. Contrairement à ce que soutient M. A, le Conseil d'État ne s'est livré à aucune interprétation de l'article L. 412-6 du code des procédures civiles d'exécution, interprétation qui selon l'intéressé rendrait ce texte contraire à des droits et libertés que la Constitution garantit, mais a seulement jugé que ce texte relatif à des procédures civiles, ne trouvait pas à s'appliquer à un litige régi par des textes propres et relevant de la compétence de la seule juridiction administrative.

9. Dès lors que la disposition législative dont M. A conteste la constitutionnalité n'est pas applicable au présent litige et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de leur mémoire, il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité posée par le requérant.

Sur les conclusions présentées sur le fondement des articles L. 521-3 du code de justice administrative :

10. D'une part, aux termes de l'article L. 552-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Les lieux d'hébergement mentionnés à l'article L. 552-1 accueillent les demandeurs d'asile pendant la durée d'instruction de leur demande d'asile ou jusqu'à leur transfert effectif vers un autre Etat européen ". Selon l'article L. 551-11 du même code : " L'hébergement des demandeurs d'asile prévu au chapitre II prend fin au terme du mois au cours duquel le droit du demandeur de se maintenir sur le territoire français a pris fin, dans les conditions prévues aux articles L. 542-1 et L. 542-2 ". L'article L. 552-15 dispose : " Lorsqu'il est mis fin à l'hébergement dans les conditions prévues aux articles L. 551-11 à L. 551-14, l'autorité administrative compétente ou le gestionnaire du lieu d'hébergement peut demander en justice, après mise en demeure restée infructueuse, qu'il soit enjoint à cet occupant sans titre d'évacuer ce lieu. / Le premier alinéa n'est pas applicable aux personnes qui se sont vues reconnaître la qualité de réfugié ou qui ont obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire. Il est en revanche applicable aux personnes qui ont un comportement violent ou commettent des manquements graves au règlement du lieu d'hébergement. / La demande est portée devant le président du tribunal administratif, qui statue sur le fondement de l'article L. 521-3 du code de justice administrative et dont l'ordonnance est immédiatement exécutoire ".

11. D'autre part, aux termes de l'article L. 521-3 du code de justice administrative : " En cas d'urgence et sur simple requête qui sera recevable même en l'absence de décision administrative préalable, le juge des référés peut ordonner toutes autres mesures utiles sans faire obstacle à l'exécution d'aucune décision administrative ".

12. Il résulte de la combinaison des dispositions précitées que, saisi par le préfet d'une demande tendant à ce que soit ordonnée l'expulsion d'un lieu d'hébergement pour demandeurs d'asile d'un demandeur d'asile dont la demande a été définitivement rejetée, le juge des référés y fait droit dès lors que la demande d'expulsion ne se heurte à aucune contestation sérieuse et que la libération des lieux présente un caractère d'urgence et d'utilité.

13. En premier lieu, M. A, ressortissant tchadien né le 1er décembre 1994 déclare être entré irrégulièrement sur le territoire français le 5 septembre 2020. Il est hébergé dans un logement dédié aux demandeurs d'asile, situé au 85 avenue du président Roosevelt à Saint-Brévin-les-Pins (Loire-Atlantique), et géré par l'association Aurore. Sa demande d'asile a été définitivement rejetée par décision de la Cour nationale du droit d'asile du 29 juin 2022, notifiée à l'intéressé le 4 juillet suivant, et il a été informé de la fin de sa prise en charge par un courrier de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 4 août 2022. Une mise en demeure de quitter ce lieu, dans un délai d'un mois, a été adressée à l'intéressé par le préfet le 26 septembre 2022. M. A se maintient ainsi dans un lieu d'hébergement pour demandeurs d'asile, alors que sa demande d'asile a été définitivement rejetée. La mesure sollicitée ne se heurte ainsi à aucune contestation sérieuse, les vices de procédure tirés, d'une part, de ce que le courrier de mise en demeure du préfet a été adressé directement à l'association HUDA Aurore et, d'autre part, de ce que la signature figurant sur l'accusé de réception ne correspondrait pas à la sienne ne suffisant pas, à les supposer établis, à démontrer l'existence d'une contestation sérieuse au sens et pour l'application des dispositions de l'article L. 521-3 du code de justice administrative.

14. En second lieu, la libération des lieux par M. A, définitivement débouté de l'asile, l'asile et qui n'établit pas par les pièces qu'il produit que ses problèmes de santé le placeraient dans une situation de particulière vulnérabilité, présente, eu égard aux exigences de bon fonctionnement et de continuité du service public d'accueil et d'hébergement des demandeurs d'asile, ainsi qu'à la situation de tension de ce dispositif, un caractère d'urgence et d'utilité et apparaît comme la seule mesure susceptible de préserver la continuité du service public de l'accueil des demandeurs d'asile.

15. Il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu d'enjoindre à M. A de quitter, sans délai, le lieu d'hébergement qu'il occupe et, en l'absence de départ volontaire de l'intéressé à compter de la notification de cette ordonnance, d'autoriser le préfet de la Loire-Atlantique à procéder à l'évacuation forcée des lieux avec le concours de la force publique et à prendre les mesures nécessaires pour faire enlever, à leurs frais et risques les biens meubles qui s'y trouveraient.

16. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espère, de faire droit aux conclusions de M. A présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

O R D O N N E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions présentées par M. A tendant à son admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Article 2 : Il est enjoint à M. A de libérer, sans délai le logement qu'il occupe au sein du centre d'accueil pour demandeurs d'asile, situé au 85 avenue du président Roosevelt à Saint-Brévin-les-Pins (Loire-Atlantique), et géré par l'association Aurore.

Article 3 : En l'absence de départ volontaire de M. A dans le délai imparti, le préfet de la Loire-Atlantique pourra faire procéder à son expulsion et à l'évacuation de ses biens, par les moyens légaux de son choix, aux frais, risques et périls de l'intéressé, au besoin avec le concours de la force publique.

Article 4 : Les conclusions de M. A présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 5 : La présente ordonnance sera notifiée au ministre de l'intérieur, à M. C A et à Me Philippon.

Copie sera en outre adressée au préfet de la Loire-Atlantique.

Fait à Nantes, le 13 janvier 2023.

La juge des référés,

M. B

Le greffier,

J-F. MerceronLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,