Tribunal administratif de Marseille

Ordonnance du 4 janvier 2023 n° 2205050

04/01/2023

Non renvoi

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Vu la procédure suivante :

Par un mémoire distinct, enregistré le 3 juillet 2022, M. A C B, représenté par Me Boutang, demande au Tribunal, à l'appui de sa requête tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le directeur interrégional des services pénitentiaires de Marseille a rejeté son recours contre les décisions du 7 mars 2022 lui infligeant trois sanctions disciplinaires, en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l'article R. 57-7-32 du code de procédure pénale, devenu l'article R. 234-43 du code pénitentiaire à compter du 1er mai 2022.

Il soutient que :

- l'article R. 57-7-32 du code de procédure pénale est applicable à la procédure dès lors que le recours en annulation contre la décision implicite de rejet du 22 avril 2022 a été exercé sur son fondement ;

- l'article R. 57-7-32 du code de procédure pénale n'a pas déjà été déclaré conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;

- la question en litige a un caractère sérieux dès lors que l'article R. 57-7-32 du code de procédure pénale ne prévoit pas d'effet suspensif du recours contre la décision prise par la commission de discipline, ni ne soumet le recours hiérarchique devant le directeur interrégional à une procédure contradictoire et prive la personne détenue d'un droit à un recours effectif.

Le mémoire portant question prioritaire de constitutionnalité a été communiqué au garde des sceaux, ministre de la justice, qui n'a pas produit d'observations.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution ;

- la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

- le décret n° 2010-148 du 16 février 2010 portant application de la loi organique n° 2009-1523 du 10 décembre 2009 relative à l'application de l'article 61-1 de la Constitution ;

- le code de procédure pénale ;

- le code pénitentiaire ;

- le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article 61-1 de la Constitution : " Lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé. / Une loi organique détermine les conditions d'application du présent article ".

2. Aux termes de l'article 23-1 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 : " Devant les juridictions relevant du Conseil d'État (), le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution est, à peine d'irrecevabilité, présenté dans un écrit distinct et motivé. Un tel moyen peut être soulevé pour la première fois en cause d'appel. Il ne peut être relevé d'office ". L'article 23-2 de la même ordonnance ajoute que : " La juridiction statue sans délai par une décision motivée sur la transmission de la question prioritaire de constitutionalité au Conseil d'État ou à la Cour de cassation. Il est procédé à cette transmission si les conditions suivantes sont remplies : / 1° La disposition contestée est applicable au litige ou à la procédure, ou constitue le fondement des poursuites ; / 2° Elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances ; / 3° La question n'est pas dépourvue de caractère sérieux ".

3. M. B soutient que les dispositions de l'article R. 57-7-32 du code de procédure pénale applicables au litige portent atteinte au droit à un recours juridictionnel effectif garanti par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 en ce que le recours exercé par la personne détenue à l'encontre de la sanction disciplinaire qui lui est infligée est dénué d'effet suspensif et n'est pas soumis à une procédure contradictoire. Toutefois, les dispositions invoquées sont de nature réglementaire et ne sont par suite pas au nombre de celles dont le Conseil constitutionnel peut contrôler la conformité à la Constitution en application de l'article 23-1 de l'ordonnance du 7 novembre 1958.

4. Il résulte de tout ce qui précède qu'il n'y a pas lieu de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M. B.

ORDONNE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M. B.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A C B et au garde des sceaux, ministre de la justice.

Fait à Marseille, le 4 janvier 2023.

La présidente de la 6ème chambre,

Signé

G. Markarian

La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice, en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Pour la greffière en chef,

La greffière,

Code publication

C