Cour d'Appel de Paris

Arrêt du 15 septembre 2022 n° 22/05950

15/09/2022

Irrecevabilité

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

 

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D'APPEL DE PARIS

 

Pôle 5 - Chambre 7

 

ARRÊT DU 15 SEPTEMBRE 2022

 

SUR QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITÉ

 

(n°24, 5 pages)

 

Numéro d'inscription au répertoire général : 22/05950 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFQG7

 

Numéro d'inscription au répertoire général de l'affaire au fond : 21/10311

 

Décision déférée à la Cour : décision du Comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie n° 01-38-21 du 06 avril 2021

 

REQUÉRANTE À LA QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITÉ :

 

[Adresse 12]

 

Prise en la personne de son représentant légal

 

Immatriculée au RCS de SAINT-ÉTIENNE sous le n° 829 119 544

 

Dont le siège social est au [Adresse 6]

 

[Localité 4]

 

Élisant domicile au cabinet de Me Edmond FROMANTIN

 

[Adresse 5]

 

[Localité 8]

 

Représentée par Me Edmond FROMANTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J151

 

Assistée de Me Sébastien BOURILLON de la SELARL URBAN CONSEIL, avocat au barreau de LYON

 

DÉFENDERESSE À LA QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITÉ :

 

ENEDIS S.A.

 

Prise en la personne de son représentant légal

 

Immatriculée au RCS de NANTERRE sous le n° 444 608 442

 

Dont le siège social est [Adresse 3]

 

[Adresse 3]

 

[Localité 10]

 

Élisant domicile au cabinet de l'AARPI GIDE LOYRETTE NOUEL

 

[Adresse 1]

 

[Localité 7]

 

Représentée par Me Michel GUÉNAIRE, du cabinet de l'AARPI GIDE LOYRETTE NOUEL, avocat au barreau de PARIS, toque : T03

 

EN PRÉSENCE DE :

 

LA COMMISSION DE RÉGULATION DE L'ÉNERGIE

 

[Adresse 2]

 

[Localité 9]

 

Représentée par Me Paul RAVETTO, de l'AARPI RAVETTO ASSOCIÉS, avocat au barreau de PARIS, toque D 1448

 

COMPOSITION DE LA COUR :

 

L'affaire a été débattue le 16 juin 2022, en audience publique, devant la cour composée de :

 

' Mme Agnès MAITREPIERRE, présidente de chambre, présidente,

 

' Mme Frédérique SCHMIDT, présidente de chambre,

 

' M. Gildas BARBIER, président de chambre,

 

qui en ont délibéré.

 

GREFFIER, lors des débats : Mme Véronique COUVET

 

MINISTÈRE PUBLIC : auquel l'affaire a été communiquée et représenté lors des débats par Mme Jocelyne AMOUROUX, avocate générale.

 

ARRÊT :

 

' contradictoire

 

' prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

 

' signé par Mme Agnès MAITREPIERRE, présidente de chambre et par Mme Véronique COUVET, greffière à qui la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

 

Vu la déclaration de recours, contenant un exposé des moyens, déposée le 7 juin 2021 par la société Résidence [11] contre la décision du Comité de règlement des différends et des sanctions (ci-après, « le CoRDiS ») de la Commission de régulation de l'énergie du 6 avril 2021 sur le différend qui l'oppose à la société Enedis ;

 

Vu le mémoire de la société Résidence [11] aux fins de transmission de questions prioritaires de constitutionnalité déposé au greffe le 4 avril 2022 ;

 

Vu l'avis adressé par la Cour le 8 avril 2022, complété le 24 suivant, informant les parties du moyen relevé d'office pris de l'irrecevabilité de la demande de transmission de questions prioritaires de constitutionnalité comme tardive au regard de l'article R134-22 du code de l'énergie et les invitant à présenter leurs observations ;

 

Vu le mémoire en réponse de la société Enedis, déposé au greffe le 26 avril 2022 ;

 

Vu les observations de la Commission de la régulation de l'énergie (ci-après, « la CRE »), déposées au greffe le 10 mai 2022 ;

 

Vu le mémoire complémentaire et récapitulatif de la société Résidence [11] déposé au greffe le 23 mai 2022 ;

 

Vu le mémoire en réplique de la société Enedis déposé au greffe le 31 mai 2022 ;

 

Vu l'avis du ministère public du 10 juin 2022 transmis le même jour aux parties ;

 

Après avoir entendu, à l'audience publique du 16 juin 2022, le conseil de la société Résidence [11], le conseil de la société Enedis, le représentant de la CRE ainsi que le ministère public ;

 

''''''

 

FAITS ET PROCEDURE

 

1.Le 13 janvier 2021, la société Résidence [11] (ci-après, « la Résidence [11] ») a saisi le CoRDIS d'une demande de règlement d'un différend l'opposant à la société Enedis (ci-après,« Enedis ») relatif aux conditions de raccordement d'une résidence de services au réseau de distribution.

 

2.Par une décision du 6 avril 2021, le CoRDiS a rejeté l'ensemble de ses demandes.

 

3.Le 7 juin 2021, la Résidence [11] a formé un recours contre ladite décision par une déclaration contenant un exposé des moyens. Elle a déposé un mémoire complémentaire en date du 4 avril 2022.

 

4.Par un mémoire distinct du 4 avril 2022, complété et rectifié par un mémoire du 23 mai 2022, la Résidence [11] a déposé trois questions prioritaires de constitutionnalité (ci-après, « les QPC ») relatives aux articles L. 344-1 (définition des réseaux électriques fermés), L. 345-2 (définition des réseaux intérieurs des bâtiments), et L. 331-2 (définition du consommateur final d'électricité) du code de l'énergie.

 

5.Par un avis adressé aux parties le 8 avril 2022, complété le 24 suivant, la Cour a relevé d'office l'irrecevabilité de la demande de transmission de QPC comme tardive au regard de l'article R134-22 du code de l'énergie et les a invitées à présenter leurs observations.

 

''''''

 

MOTIVATION

 

I. SUR LA RECEVABILITÉ DES QPC

 

6.La CRE et Enedis concluent à l'irrecevabilité de la demande de transmission des QPC au motif d'une part, que le recours à l'appui duquel elle a été déposée est lui-même irrecevable et, d'autre part, qu'elle a été déposée au-delà du délai prévu à l'article R134-22 du code de l'énergie.

 

7.La Résidence [11] conclut au rejet de la fin de non-recevoir. Elle fait valoir, d'une part, que la recevabilité d'une demande de transmission d'une QPC n'est pas subordonnée à celle du recours principal et, d'autre part, que cette demande ne peut être regardée comme un moyen nouveau produit tardivement.

 

8.Le ministère public est d'avis que la Résidence [11] n'ayant pas invoqué dans le délai imparti par l'article R. 134-22 du code de l'énergie, l'inconstitutionnalité des articles L. 344-1, L. 345-2 et L. 331-2 du code de l'énergie, sa demande de transmission d'une QPC doit être jugée irrecevable comme tardive.

 

''''''

 

Sur ce, la Cour,

 

9.La Cour rappelle que la QPC est assimilée à un moyen par les articles 23-1 et 23-2 de l'ordonnance n°58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel.

 

10.Or, l'article R134-22 du code l'énergie, qui précise les modalités des recours formés contre les décisions du CoRDiS, prévoit qu'à peine d'irrecevabilité prononcée d'office, la déclaration de recours précise l'objet du recours et contient un exposé sommaire des moyens et que, sous la même sanction, l'exposé complet des moyens doit être déposé au greffe dans le mois qui suit le dépôt de la déclaration.

 

11.Il s'ensuit que le moyen fondé sur l'inconstitutionnalité d'une disposition législative venant au soutien d'un recours contre une décision du CoRDiS est soumis au délai prescrit par ce texte spécial. Il doit être présenté dans un mémoire spécial déposé au plus tard dans le mois qui suit le dépôt de la déclaration de recours.

 

12.En l'espèce, le mémoire spécial aux fins de transmission de QPC n'a été déposé par la Résidence [11] que le 4 avril 2022, alors que sa déclaration de recours l'a été le 7 juin 2021.

 

13.Il apparaît que dès la déclaration de recours, du 7 juin 2021, la Résidence [11] a évoqué la notion de « consommateur final » contenue à l'article L. 331-2 (page 11) ainsi que les articles L. 344-1 (page 12) et L. 345-2 du code de l'énergie (page 13), même si elle n'en a pas tiré de conséquences par la formulation de moyens autres que celui de l'atteinte au principe de l'égalité des usagers. Les QPC en cause ne sont donc pas un moyen suscité par la défense d'Enedis.

 

14.Il était ainsi loisible à la Résidence [11] d'invoquer ab initio le moyen tiré de l'inconstitutionnalité des dispositions en discussion, et il lui incombait, de déposer le mémoire distinct mentionné à l'article 23-1 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 au plus tard dans le mois de sa déclaration de recours.

 

15.En conséquence, le mémoire distinct du 4 avril 2022, et partant, les questions qu'il contient, sont irrecevables en application des dispositions de l'article R. 134-22 du code de l'énergie.

 

II. SUR LES FRAIS ET DÉPENS

 

16.Dans ses dernières écritures relatives aux questions prioritaires de constitutionnalité, Enedis demande la condamnation de la Résidence [11] à lui verser la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

 

17.Il n'y a pas lieu de statuer de manière distincte sur ces demandes, qui sont appréciées par la Cour dans l'arrêt au fond rendu ce jour.

 

''''''

 

PAR CES MOTIFS

 

La Cour :

 

DÉCLARE irrecevable le mémoire spécial de la société Résidence [11] du 4 avril 2022 aux fins de transmission de questions prioritaires de constitutionnalité ;

 

DIT n'y avoir lieu de statuer sur les demandes en frais irrépétibles et dépens.

 

LA GREFFIÈRE

 

Véronique COUVET

 

LA PRÉSIDENTE

 

[S] [L]