Tribunal administratif de Montreuil

Ordonnance du 7 septembre 2022 n° 1914027

07/09/2022

Autre

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 18 décembre 2019 et des mémoires complémentaires, enregistrés les 26 décembre 2019, 3, 4 8 janvier 25 juin et 23 septembre 2020, 9 avril,

17 septembre 2021 et 20 janvier 2022, M. D B demande au tribunal, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler la décision du 27 juillet 2018 par laquelle l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG) ay attribué la mention " mort pour la France " à Mme A C ;

2°) d'enjoindre à la ville de Paris de supprimer la mention " mort pour la France " sur l'acte de décès de Mme C et de remplacer la mention de lieu de décès de Lublin-Maïdanek par Sobibor ;

3°) d'enjoindre à l'ONACVG de supprimer la mention " mort pour la France " sur l'acte de décès de Mme C et de remplacer, dans l'arrêté du 9 juin 1987 relatif à l'apposition de la mention " mort en déportation " sur les actes ou jugements déclaratifs de décès la mention de lieu de décès de Lublin-Maïdenek par Sobibor ;

4°) d'enjoindre à l'ONACVG, d'une part, de publier chaque année une seule liste actualisée regroupant l'ensemble des personnes déportées survivantes ou mortes en déportation ainsi que leur nombre et, d'autre part, de publier chaque année une seule liste actualisée de l'ensemble des personnes reconnues comme mortes en déportation ainsi que leur nombre ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 mars 2020, l'ONACVG conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que la juridiction administrative n'est pas compétente pour statuer sur les litiges relatifs à la mention " mort pour la France " et qu'aucune demande préalable n'a été effectuée en vue de la publication annuelle d'une liste actualisée regroupant l'ensemble des personnes reconnues " morte en déportation " ainsi que leur nombre.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 juillet 2020, la ville de Paris conclut au rejet de la requête. Elle fait valoir que la juridiction administrative n'est pas compétente pour connaître d'un litige relatif à l'état civil des personnes et qu'au surplus, dès lors que, le

27 janvier 2020, les services de l'état civil de la mairie du 14eme arrondissement ont apposé la mention " mort en déportation " et rétablit la mention du lieu de décès à Sobibor en lieu et place de Lublin-Maïdenek sur l'acte de décès de Mme A C, la requête est dépourvue d'objet.

Par un mémoire enregistré le 15 décembre 2021, présenté en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, M. B demande au tribunal, à l'appui de sa requête, de transmettre au Conseil d'Etat aux fins de renvoie au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l'article 20 de la loi n° 2018-727 du

10 août 2018 pour un Etat au service d'une société de confiance.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code civil ;

- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;

- le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " () les présidents de formation de jugement des tribunaux () peuvent, par ordonnance : 2° Rejeter les requêtes ne relevant manifestement pas de la compétence de la juridiction administrative ; 3° Constater qu'il n'y a pas lieu de statuer sur une requête ; 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens ".

2. Les mémoires complémentaires visés ci-dessus, enregistrés les 26 décembre 2019, 3 et 4 janvier 2020, portent la mention " annule et remplace le mémoire du 17 décembre 2019 ", correspondant à la date de rédaction de la requête introductive d'instance enregistrée le lendemain. Dans ces conditions, M. B doit être regardé comme ayant expressément abandonné ses conclusions aux fins d'indemnisation et d'astreinte formulées dans sa requête initiale.

En ce qui concerne les conclusions aux fins d'annulation de la décision du 27 juillet 2018 de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre et d'injonction tant à l'Office qu'à la ville de Paris de supprimer la mention " mort pour la France " sur l'acte de décès de Mme C et de remplacer la mention de lieu de décès de Lublin-Maïdanek par Sobibor dans cet acte et dans l'arrêté du 9 juin 1987 :

3. D'une part, l'article L. 511-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre prévoit les conditions dans lesquelles la mention " Mort pour la France " est apposée sur un acte de décès et aux termes de l'article R. 511-2 du même code : " Les recours contre les décisions prises en application de l'article L. 511-1 sont portés devant le tribunal judiciaire compétent pour connaître des demandes en annulation des actes de l'état civil, en application des articles 1047 à 1049 du code de procédure civile. ". Il résulte de ces dispositions que les tribunaux judiciaires sont seuls compétents pour connaitre des litiges relatifs à la mention " Mort pour la France ".

4. D'autre part, aux termes de l'article 34-1 du code civil : " Les actes de l'état civil sont établis par les officiers de l'état civil. Ces derniers exercent leurs fonctions sous le contrôle du procureur de la République. ". Les tribunaux judiciaires sont seuls compétents pour connaître d'une demande relative à la rédaction des actes de l'état civil.

5. Il résulte de ce qui a été dit aux points 3 et 4 que les conclusions de la requête tendant à l'annulation de la décision du 27 juillet 2018 de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre et à ce qu'il soit fait injonction tant à l'Office qu'à la ville de Paris de supprimer la mention " mort pour la France " sur l'acte de décès de Mme C et de remplacer la mention de lieu de décès de Lublin-Maïdanek par Sobibor ne relèvent pas de la compétence de la juridiction administrative. Dans ces conditions, il y a lieu d'accueillir les fins de non-recevoir opposées en défense et de rejeter de telles conclusions comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître.

En ce qui concerne les autres conclusions aux fins d'injonction :

6. Comme l'ONACVG le fait valoir, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B aurait demandé à l'Office de publier chaque année une seule liste actualisée regroupant l'ensemble des personnes déportées survivantes ou mortes en déportation ainsi que leur nombre et de publier chaque année une seule liste actualisée de l'ensemble des personnes reconnues comme mortes en déportation ainsi que leur nombre. Dès lors, les conclusions tendant à ce qu'il soit fait injonction à l'office de publier de telles listes ne sont pas l'accessoire de conclusions tendant à l'annulation d'une décision de refus de publication desdites listes. Elles sont, par suite, irrecevables et doivent, comme telles, être rejetées.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la requête de M. B doit, sans qu'il soit besoin de statuer sur la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M. B, être rejetée en toutes ses conclusions.

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de M. B est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. D B, à la ville de Paris et à l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre.

Fait à Montreuil, le 7 septembre 2022.

Le président de la 8ème Chambre

Signé

L. Gauchard

La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.