Tribunal administratif de Paris

Ordonnance du 19 août 2022 n° 2217454

19/08/2022

Autre

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 17 août 2022, Mme B, représentée par Me Djemaoun, demande au juge des référés, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) d'ordonner au préfet de police de lui fixer un rendez-vous afin que sa carte de résident lui soit restituée ou, à défaut, qu'un récépissé lui soit délivré, lui permettant de travailler dans l'attente de la régularisation de sa situation, dès la notification de l'ordonnance à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la condition de l'urgence est satisfaite dès lors qu'un rendez-vous devait lui être accordé pour pouvoir récupérer son titre de séjour ; en l'espèce, elle a été libérée de zone d'attente et n'a que huit jours pour régulariser sa situation, soit jusqu'au 20 août prochain, date d'expiration de son visa ; elle pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement au-delà de ce délai alors qu'elle justifie d'un séjour régulier en France de plus de neuf ans ; le juge des référés a enjoint au ministre de lui délivrer sans délai un document l'autorisant à pénétrer sur le territoire national, à y séjourner et y travailler dans l'attente d'une décision éventuelle sur son droit effectif au séjour ; la préfecture n'a pas répondu à sa demande de rendez-vous ;

- il est porté une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale, notamment sa liberté d'aller et venir et son droit au respect de sa vie privée et familiale, dès lors que l'administration la prive de tout document établissant la régularité de sa situation ; la décision de retrait de son titre de séjour ne lui ayant pas été régulièrement notifiée, elle ne lui est pas opposable.

Par un mémoire distinct, enregistré le 18 août 2022, Mme B demande qu'une question prioritaire de constitutionnalité soit posée s'agissant de l'article L. 342-19 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle soutient que la disposition lui est applicable, qu'elle n'a jamais été déclarée conforme à la Constitution et que la question posée est sérieuse ; cette disposition méconnaît le droit pour l'étranger à voir sa situation examinée au regard des dispositions relatives au séjour des étrangers en France, en méconnaissance d'un principe de valeur constitutionnelle. Elle méconnaît également l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et l'article 34 de la Constitution.

Vu :

- l'ordonnance n° 2207902 et n° 2207903 rendue le 12 août 2022 par le juge des référés du tribunal administratif de Melun ;

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention relative aux droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président du tribunal administratif de Paris a désigné Mme A pour statuer sur les demandes de référé.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures ". L'article L. 522-3 du même code dispose : " Lorsque la demande ne présente pas un caractère d'urgence ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée, le juge des référés peut la rejeter par une ordonnance motivée sans qu'il y ait lieu d'appliquer les deux premiers alinéas de l'article L. 522-1 ".

2. Il résulte de l'instruction que par ordonnance n° 2207902 et n° 22078903 rendue le 12 août 2022, le juge des référés près le tribunal administratif de Melun a prononcé la suspension de l'exécution de la décision du 11 août 2022 par laquelle le ministre de l'intérieur avait retiré la carte de résident de Mme B et de la décision du même jour lui refusant son entrée sur le territoire national au motif que l'arrêté du 24 septembre 2020 portant retrait de la carte de résident de l'intéressée, fondé sur son divorce d'avec un ressortissant français, assorti d'une obligation de quitter le territoire français, ne lui avait pas été régulièrement notifié et ne lui était donc pas opposable, l'intéressée justifiant avoir communiqué ses nouvelles adresses à l'administration. Le juge des référés a enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer sans délai à Mme B un document l'autorisant à pénétrer sur le territoire national et à y séjourner et travailler à titre provisoire, dans l'attente de décisions éventuelles sur son droit effectif au séjour. Dans ces conditions, Mme B peut se prévaloir de cette ordonnance pour justifier de la régularité de son séjour en France, dans l'attente du réexamen de sa situation administrative, nonobstant la circonstance que son visa expirerait le 20 août prochain. En outre, Mme B ne justifie que d'une seule demande de rendez-vous en date du 13 août 2022, à laquelle l'administration n'a pas encore répondu. Les éléments ainsi exposés par la requérante et produits au dossier ne suffisent pas à établir qu'elle se trouverait dans une situation d'urgence au sens des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative justifiant l'intervention du juge des référés dans les brefs délais prévus par ces dispositions. En tout état de cause, il lui appartient, si elle s'y croit fondée, de demander l'exécution complète de l'ordonnance mentionnée ci-dessus ou de présenter un référé mesures utiles, sur le fondement de l'article L. 521-3 du code de justice administrative, en vue d'obtenir une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ou un rendez-vous.

3. Il résulte de tout ce qui précède que la requête présentée par Mme B doit être rejetée en toutes ses conclusions, sans qu'il soit besoin d'examiner sa demande tendant à la transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité.

O R D O N N E :

Article 1er : La requête de Mme B est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme C B.

Copie en sera adressée au préfet de police et au ministre de l'intérieur.

Fait à Paris, le 19 août 2022.

La juge des référés,

C. A

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision./9