Cour d'Appel de Toulouse

Arrêt du 30 juin 2022 n° 21/04646

30/06/2022

Irrecevabilité

30/06/2022

 

ARRÊT N° 499/2022

 

N° RG 21/04646 - N° Portalis DBVI-V-B7F-OPKS

 

EV/MB

 

Décision déférée du 30 Septembre 2021 - Juge de l'exécution de TOULOUSE ( 20/00120)

 

Sophie SELOSSE

 

[N] [C]

 

[L], [D] [E] épouse [C]

 

C/

 

S.C. CAISSE DE CREDIT MUTUEL [Localité 2] CAILLOS

 

CONFIRMATION PARTIELLE

 

.

 

Grosse délivrée

 

le

 

à

 

REPUBLIQUE FRANCAISE

 

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

 

***

 

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

 

3ème chambre

 

***

 

ARRÊT DU TRENTE JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX

 

***

 

APPELANTS

 

Monsieur [N] [C]

 

[Adresse 6]

 

[Localité 4]

 

Représenté par Me Sophie CREPIN de la SELARL SELARL LEXAVOUE, avocat postulant au barreau de TOULOUSE et Me Claude DEBOOSERE-LEPIDI, avocat plaidant au barreau de VERSAILLES

 

Madame [L], [D] [E] épouse [C]

 

[Adresse 6]

 

[Localité 4]

 

Représentée par Me Sophie CREPIN de la SELARL SELARL LEXAVOUE, avocat postulant au barreau de TOULOUSE et Me Claude DEBOOSERE-LEPIDI, avocat plaidant au barreau de VERSAILLES

 

INTIMÉE

 

S.C. CAISSE DE CREDIT MUTUEL [Localité 2] CAILLOS agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliées en cette qualité audit siége

 

[Adresse 1]

 

[Localité 2]

 

Représentée par Me Jérôme MARFAING-DIDIER de la SELARL SELARL DECKER, avocat au barreau de TOULOUSE

 

COMPOSITION DE LA COUR

 

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Mai 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant E.VET, Conseiller, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

 

C. BENEIX-BACHER, président

 

E.VET, conseiller

 

A. MAFFRE, conseiller

 

Greffier, lors des débats : M. BUTEL

 

ARRET :

 

- CONTRADICTOIRE

 

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

 

- signé par E. VET, Conseiller rapporteur pour C. BENEIX-BACHER, président de chambre empêché, et par M. BUTEL, greffier de chambre

 

Le 29 juin 2020, la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 2] Caillols a fait délivrer à M. [N] [C] et Mme [L] [E] épouse [C] un commandement de payer valant saisie-immobilière d'un bien situé à [Localité 7] sis [Adresse 3] dans un ensemble immobilier en copropriété dénommé [Adresse 5].

 

Le commandement de payer valant saisie-immobilière a été publié au service de la publicité Foncière de [Localité 7] le 11 août 2020.

 

Par jugement du 4 mars 2021, le juge de l'exécution a fixé la créance du Crédit Mutuel à la somme de 193'923,48 € arrêtée au 14 février 2020, autorisé la vente amiable du bien immobilier au prix minimum net vendeur de 200 000 € et fixé l'audience de rappel au 1er juillet 2021.

 

À l'audience de rappel, aucune vente n'étant intervenue, la banque a sollicité la vente forcée.

 

Par jugement du 8 juillet 2021, le juge de l'exécution a constaté l'échec de la vente amiable, ordonné la vente forcée de l'immeuble saisi et fixé l'audience d'adjudication au 30 septembre 2021 à la mise à prix de 110000€.

 

Les époux [C] ont diligenté contre cette décision un appel dont ils se sont désistés à l'audience du 16 mai 2022.

 

Par jugement du 30 septembre 2021 le juge de l'exécution de Toulouse a :

 

' constaté l'absence de caractère sérieux de la question prioritaire de constitutionnalité et dit qu'elle ne sera pas transmise,

 

' déclaré les demandes formées par M.et Mme [C] irrecevables,

 

' rejeté la demande de report de l'adjudication et dit que la décision du 8 juillet 2021 sera exécutée à l'audience de vente du 30 septembre 2021,

 

' débouté les parties de toutes demandes plus amples ou contraires,

 

' rappelé que le jugement est exécutoire de plein droit.

 

Par déclaration du 22 novembre 2021, M.[N] [C] et Mme [L] [E] épouse [C] ont formé appel en ces termes : «L'appel tend à obtenir l'annulation de la décision déférée ou à tout le moins l'infirmation des chefs critiquéssuivants : Constate l'absence de caractère sérieux de la question prioritaire de constitutionnalité et dit qu'elle ne sera pas transmise ; Déclare irrecevables M. et Mme [C] sur l'ensemble des demandes formulées ; Rejette la demande de report de l'adjudication et dit que la décision du 8 juillet 2021 sera exécutée à l'audience de vente du 30 septembre 2021 ; Déboute les parties de toute demande plus ample ou contraire.».

 

Par dernières conclusions du 10 janvier 2022, M.et Mme [C] demandent à la cour de :

 

- déclarer recevable et bien fondé le présent appel,

 

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

 

Statuant à nouveau,

 

In limine litis,

 

- ordonner la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité,

 

En conséquence,

 

- surseoir à statuer en attendant la décision à intervenir de la Cour de cassation,

 

Subsidiairement,

 

- infirmer le jugement entrepris en ce que celui-ci a méconnu les dispositions de l'art R 322-32 du CPCE,

 

Très Subsidiairement,

 

- ordonner le sursis à statuer tant en application de l'article 108 du CPC et de l'article 378 du CPC en attendant la décision à intervenir sur l'appel à l'encontre du jugement d'orientation et en raison de la saisine de la commission de surendettement,

 

- condamner le Crédit Mutuel à verser au concluant la somme de 10 000€ en vertu de l'article 700 du NCPC,

 

- condamner la Caisse de Crédit Mutuel aux entiers dépens.

 

Par dernières conclusions du 19 janvier 2022, la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 2] Caillols demande à la cour de :

 

- rejeter toutes conclusions contraires comme injuste et mal fondées,

 

Vu le jugement du 30 septembre 2021,

 

- débouter Mr et Mme [C] de leur demande de renvoi devant la Cour de Cassation dans le cadre de la QPC,

 

- les débouter de leur demande de sursis à statuer,

 

En conséquence,

 

- confirmer le jugement du 30 septembre 2021 en ce qu'il a refusé de transmettre la question prioritaire de constitutionalité,

 

Vu l'article R 311-5 du CPCE :

 

- confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré M. et Mme [C] irrecevables en toutes leurs demandes,

 

- débouter M.et Mme [C] de leur demande de sursis à statuer en raison de la saisine de la Commission de surendettement ,

 

- confirmer le jugement du 30 septembre 2021 en ce qu'il a rejeté la demande de renvoi de l'adjudication,

 

- débouter en tout état de cause M.et Mme [C] du surplus de leurs demandes et notamment celle en condamnation de la banque au paiement d'un article 700,

 

- les condamner au paiement d'une somme de 2000 € en application de l'article 700 du CPCE ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

 

La clôture de l'instruction est intervenue le 9 mai 2022.

 

La cour, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties, fera expressément référence au jugement entrepris ainsi qu'aux dernières conclusions déposées.

 

MOTIFS

 

Il résulte des conclusions de la banque que l'immeuble a été adjugé au prix de 228'000 € mais qu'une surenchère a été formalisée l'audience étant fixée au 27 janvier 2022 avec une nouvelle mise à prix de 256'000 €.

 

Sur la question prioritaire de constitutionnalité :

 

Par soit-transmis du 7 juin 2022 il était demandé aux parties de s'expliquer sur la recevabilité de la question prioritaire de constitutionnalité qui n'a pas été formée par conclusions séparées.

 

Le 10 juin 2022 la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 2] Caillols concluait à l'irrecevabilité de la question prioritaire de constitutionnalité posée par les époux [C] qui n'ont pas répondu à la demande de la cour.

 

L'article 29 de la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 a introduit dans la constitution un article 61-1 qui dispose :«Lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé.».

 

Aux termes de l'article 23-1 de l'ordonnance n°58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, modifiée par la loi organique n°2009-1523 du 10 décembre 2009, la recevabilité de la question prioritaire de constitutionnalité, qui peut être soulevée pour la première fois en cause d'appel, est subordonnée à la condition qu'elle soit présentée dans un écrit distinct et motivé.

 

Enfin, l'article 126-2 du code de procédure civile prévoit : «A peine d'irrecevabilité, la partie qui soutient qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution présente ce moyen dans un écrit distinct et motivé, y compris à l'occasion d'un recours contre une décision réglant tout ou partie du litige dans une instance ayant donné lieu à un refus de transmettre la question prioritaire de constitutionnalité.

 

Le juge doit relever d'office l'irrecevabilité du moyen qui n'est pas présenté dans un écrit distinct et motivé.

 

Les autres observations des parties sur la question prioritaire de constitutionnalité doivent, si elles sont présentées par écrit, être contenues dans un écrit distinct et motivé. A défaut, elles ne peuvent être jointes à la décision transmettant la question à la Cour de cassation. ».

 

En l'espèce, la question préalable de constitutionnalité présentée par les époux [C] n'est pas présentée dans un écrit distinct et motivé par conclusions séparées et il convient en conséquence de la déclarer irrecevable, par infirmation du jugement déféré.

 

Sur la demande de sursis à statuer :

 

Les époux [C] sollicitent le sursis à statuer :

 

' dans l'attente de la décision à intervenir sur l'appel qu'ils ont formé à l'encontre du jugement d'orientation du 8 juillet 2021.

 

Cependant, si les époux [C] ont formé appel du jugement d'orientation, ils se sont désistés de leur appel ce qui a été constaté par la présente juridiction selon décision du 15 juin 2022.

 

' au regard de leur saisine de la commission de surendettement.

 

Cependant, si les époux [C] justifient que leur dossier a été déclaré recevable par la commission le surendettement des particuliers de la Martinique le 27 octobre 2021, cette décision est intervenue postérieurement à la décision déférée. Et conformément aux dispositions de l'article R 322-28 du code des procédures civiles d'exécution : «La vente forcée ne peut être reportée que pour un cas de force majeure ou sur la demande de la commission de surendettement formée en application des articles L. 722-4 ou L. 721-7 du code de la consommation.». Or, la commission de surendettement de la Martinique n'a pas saisi le juge de l'exécution.

 

En conséquence, il n'y a pas lieu de surseoir à statuer par confirmation du jugement déféré.

 

Sur la procédure :

 

Les époux [C] font valoir qu'il résulte de photographies datées de l'immeuble que le créancier poursuivant n'a ni placardé, ni affiché la vente du 30 septembre 2021 par un avis simplifié à l'entrée ou à défaut en limite de l'immeuble saisi indiquant la mise en vente aux enchères de l'immeuble, que les dispositions de l'article R 322-32 du CPCE n'ont donc pas été respectées.

 

La banque oppose les dispositions de l'article R 311-5 du code de procédure civile.

 

L'article R 322-32 du CPCE prévoit les procédures de publicité préalable à la vente.

 

La cour considère que comme l'a relevé le premier juge, il résulte des dispositions de l'article R.311-5 du code des procédures civiles d'exécution qu'à peine d'irrecevabilité prononcée d'office, aucune contestation ni aucune demande incidente ne peut, sauf disposition contraire être formée après l'audience d'orientation prévue à l'article R.222-15, à moins qu'elle porte sur des actes de procédure postérieurs à celle-ci.

 

Tel n'est pas le cas en l'espèce, les appelants critiquant les formalités de publicité préalables à l'audience d'orientation dont pourtant la réalité a été au surplus constatée par acte d'huissier selon procès-verbal du 25 août 2021 et quand bien même cette publicité aurait été retirée, il ne s'agit pas là d'un acte de procédure susceptible de critique au sens du texte visé.

 

Il convient en conséquence de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté ce moyen.

 

Sur les demandes annexes :

 

L'équité commande de faire droit à la demande de la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 2] Caillols au titre de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur de 2000 €.

 

PAR CES MOTIFS:

 

La cour,

 

Statuant dans les limites de sa saisine:

 

Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a constaté l'absence de caractère sérieux de la question prioritaire de constitutionnalité,

 

Statuant à nouveau du chef infirmé et y ajoutant :

 

Déclare irrecevable la question prioritaire de constitutionnalité,

 

Rejette les demandes de sursis à statuer présentées par M. [N] [C] et Mme [L] [E] épouse [C],

 

Condamne M. [N] [C] et Mme [L] [E] épouse [C] à verser à la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 2] Caillols 1000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

 

Dit que les dépens de la procédure seront compris dans les frais soumis à taxe.

 

Le greffierP/le Président empêché,

 

Le Conseiller rapporteur

 

M. BUTELE. VET