Tribunal de commerce de Saint-Nazaire

Ordonnance du 29 mai 2020

29/05/2020

Renvoi

GREFFE DU TRIBUNAL DE COMMERCE DE SAINT-NAZAIRE

Contentieux Général et Référés

Audience

Cour de cassation

le 29/05/2020

Nos réf. :

N° Répertoire Général 2020001607/ ordonnance de référé du 29 mai 2020

AFF : GERB SA / SAS GESTAL

DEMANDEUR(S) :

GERB SA, [LOCALITE 1] 317 600 054, Société anonyme, dont le siège social est [LOCALITE 2]

Partie demanderesse comparante par Cabinet WEIÏL & ASSOCIES - Maitre Bruno WEIL, assisté de Maître FREGONA Linda

DEFENDEUR(S) :

SAS GESTAL, RCS [LOCALITE 3] 335 339 131, Société par actions simplifiée, dont le siège social est [LOCALITE 4]

Partie defenderesse comparante par SELARL MGA

SAS SOCIETE D'INTERVENTIONS ET REALISATIONS EN BOBINAGE, ELECTRICITE ET MECANIQUE, RCS SAINT-NAZAIRE 335 339 123, Société par actions simplifiée, dont le siège social est [LOCALITE 5]

Partie defenderesse comparante par SELARL MGA

SAS RESSORTS MASSELIN

Partie defenderesse comparante par Maître HAVELETTE Agnès, assisté de SCP BIARD et associés

SAS GETZNER FRANCE

Partie defenderesse comparante par Selarl VACCARO ET ASSOCIES (Me François VACCARO), assisté de SCP CADORET-TOUSSAINT DENIS ([LOCALITE 6])

Madame, Monsieur,

Dans l'affaire citée sous rubrique, je vous prie de bien vouloir trouver la copie de la décision statuant sur la transmission d'une Question Prioritaire de Constitutionnalité .

Je vous en souhaite bonne reception et vous prie d'agréer, Madame, Monsieur, l'expression de mes sentiments dévoués.

Le Greffier du tribunal,

Monsieur [G E]

 

-------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

 

TRIBUNAL DE COMMERCE DE SAINT NAZAIRE

(Cour d'appel de RENNES)

ORDONNANCE DE REFERE

Prononcée par mise à disposition au greffe, au visa des dispositions de l'ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020

DATE : 29 MAI 2020

ROLE : 2020001607

DEMANDERESSE :

La société GERB, société anonyme au capital social de 1 000 000 d'euros, immatriculée au [LOCALITE 7] sous le numéro 317 600 054, dont le siège social est sis [LOCALITE 8], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés, en cette qualité, audit siège.

Ayant pour avocat plaidant : Cabinet Weil & Associés en la personne de Maître Bruno WEIL, avocats associés au barreau de PARIS et pour avocat postulant : Maître Linda FREGONA, avocat au barreau de SAINT NAZAIRE.

DEFENDERESSES :

La société GESTAL, société par actions simplifiées au capital social de 2 200 000 euros, immatriculée au [LOCALITE 9] sous le numéro 335 339 131, dont le siège social est sis [LOCALITE 10], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés, en cette qualité, audit siège.

Ayant pour avocat : societé L&KA AVOCATS, prise en la personne de Maître Vanessa KRESPINE, avocats associés au barreau de PARIS et pour avocat postulant : Cabinet MGA, en la personne de Me Benoît GABORIT, avocats associés au barreau de SAINT NAZAIRE.

La société SOCIETE D'INTERVENTIONS ET REALISATIONS EN BOBINAGE, ELECTRICITE ET MECANIQUE, ci-après dénommée « SIRBEM », société par actions simplifiées au capital social de 229 200 euros, immatriculée au [LOCALITE 11] sous le numéro 335 339 123 dont le siège social est sis [LOCALITE 12], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés, en cette qualité, audit siège.

Ayant pour avocat : société L&KA AVOCATS, prise en la personne de Maître Vanessa KRESPINE, avocats associés au barreau de PARIS et pour avocat postulant : Cabinet MGA en la personne de Me Benoît GABORIT, avocats associés au barreau de SAINT NAZAIRE.

La société RESSORTS MASSELIN société par actions simplifiées au capital social de 2 000 250 euros, immatriculée au [LOCALITE 13] sous le numéro 300 773 603, dont le siège social est [LOCALITE 14], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés, en cette qualité, audit siège.

Ayant pour avocat plaidant Maître Agnès HAVELETTE, avocat au barreau de ROUEN et pour avocat postulant la SCP BIARD -GOUVERNNEC - LOUIS DIT BIZEAU, avocats au barreau de Saint Nazaire.

La Société GETZNER FRANCE, société par actions simplifiée, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de LYON sous le numéro 812 134 518, au capital de 50 000 euros, dont le siège est situé [LOCALITE 15], [adresse 16], [LOCALITE 17], agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié, en cette qualité, audit siège.

Ayant pour avocat, la SELARL inter-barreaux VACCARO ET ASSOCIES, représentée par Maître François VACCARO, avocat au barreau de PARIS, et pour avocat postulant : la SCP CADORET TOUSSAINT — DENIS, en la personne de Me Bruno DENIS, avocat au barreau de SAINT NAZAIRE.

DATE DU DEPOT DES DOSSIERS AU GREFFE : 15 MAI 2020

JUGE DES REFERES : Monsieur Philippe MARTIN, président du tribunal

GREFFIER : Monsieur [E F G]

FAITS ET PROCEDURE :

Sur la base d'une présomption de concurrence déloyale, parasitisme et détournement de secrets d'affaire impliquant son ancien directeur général, plusieurs salariés démissionnaires, ainsi que les sociétés GESTAL, RESSORTS MASSELIN et GETZNER, la société GERB a été autorisée à établir sur le fondement de l'article 145 du CPC, par deux ordonnances en date des 21 et 26 février 2020, respectivement, des présidents du tribunal judiciaire et du tribunal de commerce de [LOCALITE 18], à faire pratiquer des constats par acte d'huissiers de justice.

La société GERB a saisi, par requête, le président du tribunal de commerce de [LOCALITE 19] d'une demande d'autorisation d'assignation en référé d'heure à heure, fondée sur l'urgence, à laquelle était jointe un projet d'ordonnance signé par le président, prévoyant qu'en application des dispositions prises dans le cadre de la crise sanitaire liée à la pandémie, il sera statué en référé sans entendre les avocats, afin d'assigner et obtenir,

Par ordonnance en date du 6 mai 2020, au visa

De l’article 485, alinéa 2 du code de procédure civile ;

De la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-18 ;

De l’article 8 de l’ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière non pénale et aux contrats de syndic de copropriété ;

De l’article 446-1 alinéa 2 du code de procédure civile : « Lorsqu'une disposition particulière le prévoit, les parties peuvent être autorisées à formuler leurs prétentions et leurs moyens par écrit sans se présenter à l'audience. Le jugement rendu dans ces conditions est contradictoire. Néanmoins, le juge a toujours la faculté d'ordonner que les parties se présentent devant lui. » ;

Nous avons autorisé la société GERB SA à faire délivrer assignation en référé d'heure à heure pour le vendredi 15 mai à 14h30 et dit qu'en application des dispositions prises dans le cadre de la crise sanitaire liée à l'épidémie de coronavirus, nous statuerons sans entendre les avocats des parties (à défaut les parties elles-mêmes), au vu des dossiers qu'ils voudront bien déposer au greffe.

Suivant actes en date des 7 et 11 mai 2020, la société GERB a fait délivrer assignation aux sociétés GESTAL, SOCIETE D'INTERVENTIONS ET REALISATIONS EN BOBINAGE, ELECTRICITE ET MECANIQUE, ci-après dénommée « SIRBEM », RESSORTS MASSELIN, GETZNER FRANCE, d'avoir à comparaître le vendredi 15 mai 2020 à 14h30 devant Nous, tenant l'audience des référés pour :

Vu l'article 873 du Code de procédure civile,

Vu les articles L 152-4 et R 151-1 du Code de commerce,

Vu les pièces versées au débat,

Vu la jurisprudence citée,

Il est demandé à Monsieur le président du tribunal de commerce de [LOCALITE 20] statuant en référé de :

RECEVOIR la société GERB SA en ses demandes et les dire bien fondées ;

CONSTATER que la société GESTAL, la société SIRBEM, la société RESSORTS MASSELIN et la société GETZNER commettent des agissements déloyaux, de parasitisme et de détournement de secrets d'affaire constitutifs d'un trouble manifestement illicite.

EN CONSEQUENCE :

ENJOINDRE la société RESSORTS MASSELIN de communiquer à la société GERB France un état à jour, certifié sincère et véritable par un mandataire social, des ressorts fabriqués par elle ou par une société affiliée pour le compte ou à la demande de la société GESTAL, en indiquer le modèle, la date de fabrication et les conditions financières de la fourniture;

ENJOINDRE les sociétés GESTAL et SIRBEM de communiquer à la société GERB France un état à jour, certifié sincère et véritable par un mandataire social, des boîtes à ressorts fabriquées par elle ou par une société affiliée pour le compte ou à la demande de la société GETZNER France, en indiquer le modèle, la date de fabrication et les conditions financières de la fourniture ;

ENJOINDRE la société GETZNER France de communiquer à la société GERB France un état à jour, certifié sincère et véritable par un mandataire social, des boîtes à ressorts vendues ou offertes à la vente, en précisant le modèle, la date de la vente ou de l'offre, le prix de vente et toute prestation complémentaire ainsi que ses conditions financières ;

Ce faisant,

ORDONNER la saisie par tel huissier ou la remise entre les mains de tel huissier des boîtes à ressorts produites, aux frais des sociétés GESTAL, SIRBEM et GETZNER France, de façon à empêcher leur circulation sur le marché ;

Ce, sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard à compter du huitième jour suivant le jour de la signification de l'ordonnance à intervenir,

INTERDIRE aux sociétés GESTAL, SIRBEM, RESSORTS MASSELIN et GETZNER France de :

Fabriquer, commercialiser, livrer ou installer toute boîte à ressort reprenant les spécifications techniques de la société GERB France, ce incluant les composants de ces boîtes et plus spécifiquement les ressorts,

Poursuivre tout acte de désorganisation de la société GERB France, notamment par le biais de tentative de débauchage ou de débauchage de ses salariés,

Faire usage ou divulguer toute information appartenant à la société GERB France relevant du secret des affaires, en ce compris ses plans, dessins ou procédés de fabrique, son fichier client, ses prix et conditions commerciales, ses modèles de documents ou contrats commerciaux,

Faire référence sous toute forme que ce soit à la collaboration ayant existé avec la société GERB France pour la commercialisation de produits isolants et antivibratoires,

Ce, pendant une durée de vingt-quatre mois à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir et sous astreinte de 500 000 £ par infraction constatée;

SE RESERVER la liquidation des astreintes ;

CONDAMNER solidairement les sociétés GESTAL et GETZNER France au paiement d’une provision d'un montant de 350 000 euros,

EN TOUT ETAT DE CAUSE.

CONDAMNER les sociétés GESTAL, SIRBEM, RESSORTS MASSELIN et GETZNER France au paiement solidaire de la somme de 20 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile;

CONDAMNER les sociétés GESTAL, SIRBEM, RESSORTS MASSELIN et GETZNER France au paiement solidaire des entiers dépens.

Conformément aux termes de l'ordonnance autorisant d’assigner d'heure à heure, les avocats des parties ont déposé leurs dossiers au greffe, sans être entendus.

Le vendredi 15 mai 2020 à 10 heures 20, Me Bruno DENIS, avocat au barreau de SAINT NAZAIRE, représentant la Selarl inter-barreaux VACCARO ET ASSOCIES, représentée par Maître François VACCARO, agissant pour le compte de la société GETZNER France, a déposé au greffe de ce tribunal une question prioritaire de constitutionnalité, aux fins de, vu la loi du 10 décembre 2009 en ses articles 23-1 à 23-3 :

SAISIR la Cour de cassation de la question prioritaire de constitutionnalité susvisée, et lui transmettre pour que celle-ci procède à l'examen qui lui incombe, en vue de la transmission ultérieure de ladite question au Conseil Constitutionnel, afin que ce dernier relève l'inconstitutionnalité de la disposition contestée, prononce son abrogation et fasse procéder à la publication qui en résultera.

MOYENS DES PARTIES :

Pour l'exposé des moyens des parties, vu les dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile, il sera renvoyé à leurs conclusions déposées au greffe le 15 mai 2020. PRETENTIONS DES PARTIES :

La société GERB, sur la question prioritaire de constitutionnalité, demande au juge des référés de :

Vu les présentes conclusions et les pièces s’y rapportant,

REJETER la question prioritaire de constitutionnalité présentée par la société GETZNER France,

Ce faisant,

STATUER sur les demandes présentées par la société GERB dans son assignation de référé d'heure à heure,

A titre principal, la société GERB maintient les termes de son assignation.

Les sociétés GESTAL et SIRBEM, par conclusions reçues au greffe le 15 mai 2020, demandent au juge des référés de :

Vu l’article 873 du Code de procédure civile,

Vu les articles R153-1 et suivants du Code de commerce,

Vu les pièces versées aux débats,

In limine litis :

PRONONCER le sursis à statuer dans l'attente (1) de la décision qui sera rendue à l'issue de la question prioritaire de constitutionnalité soumise par la société GETZNER et (2) de la décision à intervenir de la Cour d'appel de RENNES devant statuer en urgence sur l'appel interjeté de l'ordonnance du 28 avril 2020 par la société GESTAL ;

A défaut :

CONSTATER que les procédures prévues par les articles R 153-1 et suivants du Code de commerce n’ont pas été respectées ;

CONSTATER que la SCP VEYRAC, [A B-C-D] a manifestement violé sa mission de séquestre ;

DONNER ACTE du fait que la société GESTAL à interjeté appel de l'ordonnance du 28 avril 2020 devant la Cour d'appel de RENNES ;

CONSTATER que ledit appel est suspensif ;

CONSTATER que le procès-verbal du 3 mars 2020 communiqué par la société GERB n’est pas signé par l’huissier instrumentaire et qu'aucune des pages n’est revêtue du tampon officiel de l'étude ;

CONSTATER que les pièces pour lesquelles la société GERB prétend qu’elles sont issues du constat d’huissier du 3 mars 2020 ne sont pas revêtues du tampon officiel de l'huissier de justice, si bien que leur origine n’est pas identifiable ;

En conséquence,

ORDONNER le rejet des débats de toutes les pièces de la société GERB présentées comme étant le procès-verbal de constat du 3 mars 2020 ou en étant issues, et notamment les pièces suivantes : n°39, 40, 41, 42, 43, 44, 45,46, 47, 48, 49, 50, 52, 53, 54, 56, 58, 59, 60, 61, 62 et 63.

Sur les demandes de la société GERB :

DIRE ET JUGER que la société GERB ne rapporte pas la preuve d’un trouble manifestement illicite ;

DIRE ET JUGER qu'il existe de nombreuses contestations sérieuses ;

En conséquence,

REJETER toutes les demandes, fins et conclusions de la société GERB,

CONDAMNER la société GERB au paiement de la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

CONDAMNER la société GERB aux entiers dépens.

La société RESSORTS MASSELIN, par conclusions reçues au greffe le 15 mai 2020, demande au juge des référés de :

Vu l'article 6 de la Convention Européenne des Droits de l'homme,

- Donner acte à la société RESSORTS MASSELIN et à son avocat de leur absence d'accord pour qu'il soit statué, à l'initiative de la partie demanderesse, sans qu'un débat ne soit organisé afin d'entendre les avocats.

Vu l'article R153-1,

Vu les dispositions des articles L 151-4 et suivants du code de commerce,

Dire et juger que la société GERB a commis une voie de fait, un acte illicite, en violant la mesure de séquestre ordonnée par le président du tribunal de commerce de [LOCALITE 21] ;

Dire et juger, en tout état de cause que les documents appréhendés par l'huissier l'ont été illégalement, l'huissier ayant dépassé la mission ordonnée par le président du tribunal de commerce de [LOCALITE 22] en ce qu'ils ne constituent pas des documents contractuels entre la société GESTAL et la société RESSORTS MASSELIN ;

Rejeter des débats les pièces issues des opérations de constats du 3 mars 2020 et notamment les pièces 38, 39, 40, 41, 42, 43, 44, 45, 46, 48, 49, 50, 52, 53, 54, 56, 58, 59, 60, 61, 62, 63.

Vu les dispositions de l'article 873 du CPC,

Vu les feuilles de calcul de la société RESSORTS MASSELIN de 2006,

Les pièces 4,5,6 et 7,

Se déclarer incompétent rationae materiae faute pour la société GERB de justifier d'un droit exclusif évident sur les informations relatives à la fabrication de ressorts lui permettant de revendiquer l'existence d'un trouble illicite ou d'un dommage imminent qui serait issu de la fabrication d'un ressort au profit de l'un de ses concurrents ;

Rejeter la demande de la société GERB d'appropriation des calculs, définition de design et travaux effectuées par la société RESSORTS MASSELIN.

En tous cas :

Débouter la société GERB de sa demande, faute pour elle de justifier de l'existence d'informations précises et définies sur lesquelles elle détiendrait un droit évident lui permettant de fonder une action sur la base du secret des affaires, à l'égard de la société RESSORTS MASSELIN ;

Débouter la société GERB en ce qu'elle ne justifie nullement d'un trouble illicite ou d'un dommage imminent qui serait issu d'une faute évidente, d'un préjudice évident et d'un lien de causalité évident, lui permettant de mettre en œuvre une action sur le fondement de la concurrence déloyale ;

Rejeter l'ensemble des demandes d'injonction de communiquer quelque information que ce soit et d'interdiction générale de fabriquer, commercialiser, livrer ou installer tous ressorts à intégrer dans des boîtes à ressorts ;

Rejeter toute demande générale de protection d'informations ;

Condamner la société GERB au paiement de la somme de 20 000 € sur le fondement de l'article 700 du CPC, et la condamner au paiement des entiers dépens.

La société GETZNER, par conclusions reçues au greffe le 15 mai 2020, demande au juge des référés de :

Vu l’assignation et l'article 856 du Code de procédure civile,

Vu les dispositions des articles 14, 16, 485 alinéa 2 du Code de procédure civile,

Vu l'ordonnance 304-2020 du 25 mars 2020 et sous réserve de la question prioritaire de constitutionnalité,

Vu les dispositions de l'article L. 151-1 du Code de Commerce, 873 du Code de procédure civile,

Vu l’article 6 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme,

SE DECLARER incompétent au profit des conseils de prud'hommes territorialement compétents pour connaître de tout ce qui concerne l’invocation d’une faute dans le cadre de leur contrat de travail par les salariés COLOMBEL, [H I] et [F I] et surseoir en tout état de cause dans l'attente des décisions de la juridiction prud’homale saisie ;

DIRE nulle et de nul effet l'ordonnance du 6 mai 2020 et l’assignation délivrée à la Société GETZNER ;

DECLARER irrecevable la Société GERB dans l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions et la RENVOYER à mieux se pourvoir ;

En tout état de cause, DEBOUTER la Société GERB de ses demandes, fins et conclusions ;

CONDAMNER la Société GERB à verser à la Société GETZNER la somme de 20 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile :

CONDAMNER la Société GERB en tous les dépens.

MOTIVATION :

Sur la question prioritaire de constitutionnalité :

Attendu que la société GETZNER demande de transmettre à la Cour de cassation, aux fins de renvoi au Conseil constitutionnel, la question prioritaire de constitutionnalité suivante:

L'article 8 alinéa 1 de l'ordonnance 304/2020 du 25 mars 2020 est-il conforme à la Constitution au regard du préambule de la Constitution, et particulièrement de l'articie 16 de la Déclaration de l'Homme et du Citoyen de 1789, de l'article 55 de la Constitution éclairé par l’article 6 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme ?

Attendu que la société GETZNER fait valoir que l’article 8 de l'ordonnance 2020-304 du 25 mars 2020, ayant valeur législative en vertu de la loi 290/2020 du 23 mars 2020, ne paraît pas conforme aux dispositions de l'article 6 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme ratifiée par la France, et au regard de l'article 55 de la Constitution, de même qu'à la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789 au titre de son article 16 notamment ;

Attendu que la société GETZNER relève que « dans le cadre d’une procédure extraordinaire en termes de délais, alors que là demanderesse au référé a eu au moins 3 mois pour se préparer, et les défendeurs 3 jours, les dispositions de l'article 8 évoquées ci-dessus de l'ordonnance 2020-304 prennent un relief tout particulier qui met en lumière de façon absolument incontestable que les règles du procès équitable, principe de valeur constitutionnelle, et liberté fondamentale, ne sont manifestement pas respectées par ce texte. » ;

Que, tant au regard de la Constitution, qu’au titre de la Convention Européenne des Droits de l'Homme, l’article 8 de l'ordonnance n° 304-2020 du 25 mars 2020 paraît non conforme à la Constitution ;

Que, priver une partie d'un procès équitable au titre d'une cause qui doit être entendue et publique questionne la constitutionnalité de l'alinéa 1 de l’article 8 de l'ordonnance 2020- 304 du 25 mars 2020 ;

Attendu que la société GERB demande le rejet de la question prioritaire de constitutionnalité au motif qu’elle a pour unique objectif de geler de manière totalement abusive et dilatoire la procédure de référé ;

Attendu qu’à titre liminaire, la société GERB fait valoir que contrairement à ce qui est soutenu par la société GETZNER, selon la procédure mise en place par les dispositions sur la QPC, celle-ci n’a pas pour effet de suspendre automatiquement le cours de l'instance qu'elle vise ;

Que le juge saisi doit en premier lieu décider s’il accepte ou rejette celle-ci, que ce n’est que s’il accepte celle-ci que la procédure est suspendue ;

Qu'en l'espèce, la QPC devra être rejetée pour les raisons rappelées ci-après :

-Premièrement, le Conseil d'état a déjà été saisi d’un recours en référé afin d'ordonner la suspension du recours à la procédure écrite sans audience prévue par l'article 8 de l'ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020, objet de la question déposée par la société GETZNER France.

Dans une ordonnance rendue le 10 avril 2020 le Conseil d'état a rejeté le recours présenté, au visa notamment de :

- La Constitution;

- La Charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne ;

- La Convention Européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des Libertés fondamentales :

- Le Code de procédure civile :

Bien qu'elle ne lie pas le juge de l'ordre judiciaire, cette décision a évidemment une portée générale qui va au-delà de l’ordre administratif.

-Deuxièmement, la jurisprudence de la C.E.D.H à déjà jugé que le fait de ne pas tenir d'audience ne constituait pas un motif valable au sens de l’article 6,1 de la C.E.D.H., si la tenue d’une audience publique constitue un principe fondamental consacré par l’article 6 § 1, cette obligation n’est pas pour autant absolue.

-Troisièmement, il sera simplement rappelé que la société GETZNER a déjà eu l'occasion de recourir elle-même à l'article 8 susvisé dans la procédure de référé rétractation initiée devant le tribunal de céans, à son bénéfice.

- faire droit à la QPC aurait pour conséquence de remettre en cause toutes les décisions rendues en référé et au fond par le président du tribunal ou le tribunal, et potentiellement toute décision rendue par les tribunaux en France sur le fondement de l'article 8.

SUR QUOI :

Attendu que par ordonnance du 6 mai 2020, nous avons pris la décision de statuer sans entendre les avocats des parties en audience publique et seulement au vu des dossiers qu'ils voudront bien déposer au greffe au visa implicite de l’article 8 de l'ordonnance 2020-304 du 25 mars 2020 prévoyant : « Lorsque la représentation est obligatoire ou que les parties sont assistées ou représentées par un avocat, le juge ou le président de la formation de jugement peut décider que la procédure se déroule selon la procédure sans audience. Il en informe les parties par tout moyen » ;

Attendu que l'article 8 alinéa 1 de l'ordonnance 304/2020 du 25 mars 2020 contenant une disposition de procédure civile est manifestement applicable à la procédure ;

Attendu que l’article 8 de l'ordonnance 2020-304 du 25 mars 2020 n’a pas déjà été déclaré conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;

Attendu que la question est nouvelle ;

Attendu que la question posée présente un caractère sérieux ;

Attendu que l'article 23-3 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 modifiée dispose que «Lorsque la question est transmise, la juridiction sursoit à statuer jusqu'à réception de la décision du Conseil d'Etat ou de la Cour de cassation ou, s'il a été saisi, du Conseil constitutionnel » ;

Qu'aucune des situations visées comme pouvant justifier qu'il ne soit pas sursis à statuer, n'existe dans la présente affaire ;

Que par suite, nous ordonnerons le sursis à statuer pour cause de transmission jusqu'à réception de la décision de la Cour de cassation ou, s’il a été saisi, du Conseil constitutionnel, et de la décision à intervenir de la Cour d’appel de RENNES devant statuer en urgence sur l'appel interjeté de l'ordonnance du 28 avril 2020 par la société GESTAL ;

Sur l’article 700 du Code de procédure civile :

Attendu qu’il sera sursis aux demandes.

Sur les dépens :

Attendu que les dépens seront réservés.

PAR CES MOTIFS :

Nous, juge des référés, statuant publiquement par ordonnance contradictoire, insusceptible de recours ;

Vu les articles 23 et suivant de l'ordonnance n°58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée ;

Vu les articles 126-1 à 126-7 du Code de procédure civile ;

Le ministère public ayant été avisé ;

Disons recevable la demande de transmission de la question prioritaire de constitutionnalité posée par la société GETZNER France ;

Disons que présente un caractère sérieux la question posée, à savoir :

L'article 8 alinéa 1 de l'ordonnance 304/2020 du 25 mars 2020 est-il conforme à la Constitution au regard du préambule de la Constitution, et particulièrement de l’article 16 de la Déclaration de l'Homme et du Citoyen de 1789, de l'article 55 de la Constitution éclairé par l’article 6 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme ?

Ordonnons en conséquence la transmission à la Cour de cassation de la question posée dans les huit jours du prononcé de la présente ordonnance avec les conclusions des parties ;

Disons qu'avis sera donné aux parties et au ministère public de la présente décision statuant sur la question prioritaire de constitutionnalité dans les conditions prévues a l'article 126-7 du code de procédure civile ;

Ordonnons le sursis à statuer pour cause de transmission jusqu’à réception de la décision de la Cour de cassation ou, s’il a été saisi, du Conseil constitutionnel, et de la décision à intervenir de la Cour d'appel de RENNES devant statuer en urgence sur l'appel interjeté de l’ordonnance du 28 avril 2020 par la société GESTAL ;

Réservons les dépens.

La minute de l’ordonnance est signée par Monsieur MARTIN, président et par Monsieur VALENTIN, greffier.