Chambre d'appel de la cour d'appel de St Denis de la Réunion à Mamoudzou

Ordonnance du 31 janvier 2017 n° 01/2017

31/01/2017

Renvoi

COUR D'APPEL DE SAINT DENIS DE LA REUNION

CHAMBRE D’APPEL DE MAMOUDZOU

Cabinet du président

ORDONNANCE N° 01/2017

DU : 31 Janvier 2017

AFFAIRE N° : 16/00033 (chambre sociale)

AFFAIRE : SAS HORISON OI anciennement dénommée SAS OUTREMER TELECOM OCEAN INDIEN, SAS HORIZON OI OUTREMER TELECOM OCEAN INDIEN anciennement SARL QUTREMER TELECOM DISTRIBUTION / [D E]

Ordonnance rendue le 31 Janvier 2017 sur la Question Prioritaire de Constitutionnalité Jugement Au fond, origine Tribunal du travail de MAMOUDZOU, décision attaquée en date du 20 Juin 2016, enregistrée sous le n° 13/00038

ENTRE :

DEMANDEURS

SAS HORISON OI anciennement dénommée SAS OUTREMER TELECOM OCEAN INDIEN

Ayant pour avocat Me Iqbal AKHOUN de la SELARL RACINE OCEAN INDIEN, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

SAS HORIZON OI OUTREMER TELECOM OCEAN INDIEN anciennement SARL OÙUTREMER TELECOM DISTRIBUTION

Ayant pour avocat Me Iqbal AKHOUN de la SELARL RACINE OCEAN INDIEN, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

ET :

DEFENDEUR

M. [D E]

[adresse 1]

[LOCALITE 2]

Représenté par Me Jonathan ABLA, avocat au barreau de MAYOTTE

En application de l'article 61-1 de la Constitution, lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil Constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'Etat ou de la Cour de Cassation qui se prononce dans un délai déterminé;

En application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil Constitutionnel, devant les juridictions relevant du Conseil d'Etat ou de la Cour de Cassation, le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution est, à peine d'irrecevabilité, présenté dans un écrit distinct et motivé.

Devant une juridiction relevant de la Cour de Cassation, lorsque le ministère public n'est pas partie à l'instance , l'affaire lui est communiquée dès que ce moyen est soulevé afin qu'il puisse faire connaître son avis.

En l'espèce, la SARL Outremer Telecom Distribution Mayotte et la SAS Horizon, venant aux droits de la société Outremer Télecom Océan Indien prétendent que l'article 206 de la loi n° 52-1322 du 15 décembre 1952 instituant un code du travail dans les territoire associés relevant des ministères de la France d'Outre-mer, lequel prévoit que « dans les quinze jours du prononcé du jugement, appel peut être interjeté dans les formes prévues à l'article 190 », porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, en ce qu'elle prévoit des

” règles procédurales différentes pour des justiciables situés dans le ressort d'une même cour d'appel, en l'espèce, dans le ressort de la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, et ce faisant, méconnaît le principe d'égalité de tous devant la loi;

En réplique, M. [D E], qui soutient, d'une part que les dispositions de l'article 206 de la loi 15 décembre 1952 ne sont pas de nature à porter atteinte au droit à l'accès à un procès équitable, pas plus qu'au droit à un recours effectif, et, d'autre part, que les particularités historique du département de Mayotte justifient l'existence d'une différence de traitement concernant le délai d'appel, soutient que la question prioritaire de constitutionnalité est dépourvue de caractère sérieux et qu'il n'y a pas lieu de la transmettre à la cour de cassation. II demande également la condamnation solidaire de la SARL Outremer Telecom Distribution Mayotte et de la SAS Horizon, venant aux droits de la société Outremer Télecom Océan Indien, à lui payer une somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La présente affaire a été communiquée au ministère public le 24 janvier 2017, qui a fait connaître son avis le 25 janvier 2017. Le ministère public soutient que la règle prévue par l'article 206 de la loi n° 52-1322 du 15 décembre 1952 applicable à [LOCALITE 3], selon laquelle l'appel doit être interjeté dans les quinze jours du prononcé du jugement, ne trouve pas de justification et n'assure pas aux justiciables des garanties égales, notamment quant au respect des droits de la défense, au sens des articles 6 et 16 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du citoyen et de l'article 73 de la Constitution de 1958.

Les parties ont été appelées à l'audience du 31 janvier 2017 à 8h30, à laquelle le conseil de M. [D E] a comparu, et l'affaire a été mise en délibéré pour être rendue le jour même.

MOTIFS DE LA DECISION:

Sur le moyen tiré de l'atteinte portée aux droits et libertés garantis par la Constitution par l'article 206 de la loi n° 52-1322 du 15 décembre 1952 :

Sur la recevabilité du moyen tiré de l'atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution:

En l'espèce, le moyen tiré de l'atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution a été présenté le 20 janvier 2017 dans un écrit distinct des conclusions de la SARL Outremer Telecom Distribution Mayotte et de la SAS Horizon, venant aux droits de la société Outremer Télecom Océan Indien, et motivé. Il est donc recevable.

Sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité à la Cour de Cassation:

L'article 23-2 de l'ordonnance précitée dispose que la juridiction transmet sans délai la question prioritaire de constitutionnalité à la Cour de Cassation si les conditions suivantes sont remplies:

La disposition contestée est applicable au litige ou à la procédure, ou constitue le fondement des poursuites;

elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil Constitutionnel, sauf changement de circonstances;

la question n'est pas dépourvue de caractère sérieux.

En l'espèce, la disposition contestée est applicable au litige ou à la procédure , puisqu'elle est relative à la recevabilité de l'appel interjeté le 8 juillet 2017 par les SARL Outremer Telecom Distribution Mayotte et SAS Horizon, venant aux droits de la société Outremer Télecom Océan Indien à l'encontre du jugement prononcé par le tribunal du travail de Mamoudzou le 20 juin 2016, et n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil Constitutionnel. En outre, elle n'est pas dépourvue de caractère sérieux, en ce qu'elle introduit une disparité de situation entre justiciables résidant dans deux départements français d'Outre-Mer et relevant d'une même cour d'appel, en l'espèce la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, qui ne disposent pas du même délai pour interjeter appel selon que la décision de première instance a été rendue par un conseil de prud'hommes ou le tribunal du travail du ressort.

Il y a donc lieu de transmettre à la Cour de Cassation la décision suivante:

L'article 206 de la loi n° 52-1322 du 15 décembre 1952 instituant un code du travail dans les territoire associés relevant des ministères de la France d'Outre-Mer, qui prévoit que « dans les quinze jours du prononcé du jugement, appel peut être interjeté dans les formes prévues à l'article 190 », porte -il atteinte aux droits et libertés garantis par les articles 6 et 16 de la Déclaration de 1789?

PAR CES MOTIFS:

Nous, Nadia BERGOUNIOU-GOURNAY, Présidente de la chambre d'appel de Mamoudzou, statuant publiquement , par ordonnance rendue par mise à disposition au greffe de la juridiction, réputée contradictoire et insusceptible de recours indépendamment de l'arrêt sur le fond.

Ordonnons la transmission à la Cour de Cassation de la question suivante: L'article 206 de la loin° 52-1322 du 15 décembre 1952 instituant un code du travail dans les territoire associés relevant des ministères de la France d'Outre-Mer, qui prévoit que « dans les quinze jours du prononcé du jugement, appel peut être interjeté dans les formes prévues à l'article 190 », porte -il atteinte aux droits et libertés garantis par les articles 6 et 16 de la Déclaration de 1789?

Disons que la présente ordonnance sera adressée à la Cour de cassation dans les huit jours de son prononcé avec les mémoires ou conclusions des parties relatifs à la question prioritaire;

Disons que les parties et le ministère public seront avisés par tout moyen de la présente décision;

Ordonnons le sursis à statuer sur l'instance enrôlée sous le numéro 16/00033 jusqu'à réception de la décision de la Cour de Cassation ou, s'il a été saisi, du Conseil Constitutionnel.

Disons que l'affaire sera rappelée à l'audience de la chambre d'appel du mardi 5 septembre 2017 à 14h.

LA GRÉFFIERE

LA PRESIDENTE DE LA FORMATION DE JUGEMENT

N. BERGOUNIOU-GOURNAY