Cour administrative d'appel de Lyon

Ordonnance du 29 septembre 2016 N° 16LY01303 QPC

29/09/2016

Renvoi

COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL DE LYON

 

N° 16LY01303 QPC

 

SOCIETE SNF

 

 

 

M. Boucher

Président de chambre

 

 

 

Ordonnance du 29 septembre 2016

 

54-10

C

 

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

 

 

 

 

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

 

 

 

Le président de la 1ère chambre

de la cour administrative d'appel de Lyon,

 

 

Vu la procédure suivante :

 

 

Procédure contentieuse antérieure :

 

 

La société SNF, à l’appui de sa requête tendant à l’annulation du jugement n° 1306356 du 21 janvier 2016 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l’annulation d’une décision de la communauté d’agglomération Saint-Etienne Métropole portant refus de modifier la délibération de son conseil du 11 juillet 2013 instituant le versement destiné au financement des transports en commun, demande à la Cour, par un mémoire distinct enregistré le 15 avril 2016, de transmettre au Conseil d’Etat une question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l’article L. 2333-70 du code général des collectivités territoriales et de surseoir à statuer jusqu’à réception de la décision du Conseil Constitutionnel ou du Conseil d’Etat.

 

Elle soutient :

- que cette disposition est applicable au litige ;

- qu’elle n’a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution ;

- qu’elle n’est pas dépourvue de caractère sérieux en ce que l’article L. 2333-70 du code général des collectivités territoriales ne prévoit pas de possibilité de remboursement du versement de transport à un assujetti soumis à une réglementation interdisant les dessertes par transport collectif, en ce qu’il viole le principe d’égalité devant la loi fiscale et en ce qu’il est contraire au principe d’égalité devant les charges publiques ;

- cette disposition est également non conforme à la Constitution en ce que le législateur a laissé à la discrétion des collectivités territoriales le soin de prévoir des exonérations, alors qu’il lui incombait seul de déterminer les situations dans lesquelles certains redevables peuvent ou non bénéficier d’un remboursement.

 

La procédure a été communiquée à la communauté d’agglomération Saint-Etienne

Métropole qui n’a pas produit d’observations.

 

Vu :

- la Constitution, notamment son article 61-1 ;

- l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

- l’article L. 2333-70 du code général des collectivités territoriales.

 

 

 

 

1. Considérant qu’aux termes du premier alinéa de l’article 61-1 de la Constitution :

« Lorsque, à l’occasion d’une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d’Etat ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé. (…) » ; qu’en vertu des dispositions combinées des premiers alinéas des articles 23-1 et 23-2 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée, la juridiction, saisie d’un moyen tiré de ce qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution présenté dans un écrit distinct et motivé, statue par une décision motivée sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d’Etat et procède à cette transmission à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu’elle n’ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement de circonstance, et qu’elle ne soit pas dépourvue de caractère sérieux ;

 

 

2. Considérant qu’aux termes des trois premiers alinéas de l’article L. 2333-70 du code général des collectivités territoriales, relatif au versement destiné au financement des transports en commun : « I. Le produit de la taxe est versé au budget de la commune ou de l'établissement public qui rembourse les versements effectués : / 1° Aux employeurs qui justifient avoir assuré le logement permanent sur les lieux de travail ou effectué intégralement et à titre gratuit le transport collectif de tous leurs salariés, ou de certains d'entre eux au prorata des effectifs transportés ou logés par rapport à l'effectif total ; / 2° Aux employeurs, pour les salariés employés à l'intérieur des périmètres d'urbanisation des villes nouvelles ou de certaines zones d'activité industrielle ou commerciale, prévues aux documents d'urbanisation, lorsque ces périmètres ou ces zones sont désignés par la délibération mentionnée à l'article L. 2333-66. (…) » ;

 

 

3. Considérant que la société SNF exploite, sur le territoire des communes d’Andrézieux-Bouthéon et de Saint-Bonnet-les-Oules, un établissement de fabrication de polymères acryliques à base de produits hautement toxiques et inflammables ; que cet établissement est soumis à un plan de prévention des risques technologiques qui, en son article IV.2.2, interdit les arrêts de transports collectifs à l’intérieur du périmètre d’exposition au risque ; que la société SNF a demandé à la communauté d’agglomération Saint-Etienne Métropole, à laquelle ont adhéré les communes d’Andrézieux-Bouthéon et de Saint-Bonnet-les- Oules et sur le territoire de laquelle est institué le versement de transport, d’une part, de modifier la délibération ayant institué ce versement afin qu’elle puisse, eu égard à sa situation, bénéficier d’un remboursement de ce versement en application de l’article L. 2333-70 du code général des collectivités territoriales et, d’autre part, de l’indemniser du préjudice qu’elle subit du fait de son assujettissement à ce versement ; que la société SNF a ensuite saisi le tribunal administratif de Lyon d’une demande tendant à l’annulation de la décision du 11 juillet 2013 par laquelle le président de la communauté d’agglomération Saint-Etienne Métropole a rejeté ses demandes, à ce qu’il soit enjoint à cette communauté de modifier sa délibération instituant le versement de transport et à ce qu’elle soit condamnée à l’indemniser de son préjudice ;

 

4. Considérant qu’à l’appui de sa requête d’appel contre le jugement du 21 janvier 2016 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande, la société SNF soulève une question prioritaire de constitutionnalité relative aux dispositions précitées de l’article L. 2333-70 du code général des collectivités territoriales, en faisant valoir qu’en tant que ces dispositions ne prévoient pas de possibilité de remboursement du versement de transport à un assujetti soumis à une réglementation interdisant les dessertes par transport collectif, elles violent les principes d’égalité devant la loi fiscale et les charges publiques et qu’elles sont également non conformes à la Constitution en ce que le législateur a laissé à la discrétion des collectivités territoriales le soin de prévoir des exonérations, alors qu’il lui incombait seul de déterminer les situations dans lesquelles certains redevables peuvent ou non bénéficier d’un remboursement ;

 

5. Considérant que l’article L. 2333-70 du code général des collectivités territoriales est applicable au litige ; que cette disposition n’a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel ; que les moyens soulevés par la société SNF à l’appui de sa question prioritaire de constitutionnalité n’apparaissent pas manifestement dépourvus de caractère sérieux ; qu’il y a lieu, dès lors, de la transmettre au Conseil d’Etat ;

 

 

 

ORDONNE :

 

 

 

Article 1er : La question de la conformité à la Constitution de l’article L. 2333-70 du code général des collectivités territoriales est transmise au Conseil d’Etat.

 

Article 2 : Il est sursis à statuer sur la requête de la société SNF jusqu’à réception de la décision du Conseil d’Etat ou, s’il a été saisi, jusqu’à ce que le Conseil Constitutionnel ait tranché la question de constitutionnalité soulevée.

 

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la société SNF et à la communauté d’agglomération Saint-Etienne Métropole.

 

 

 

Fait à Lyon, le 29 septembre 2016. Le président de la 1ère chambre,

 

 

 

 

 

 

Y. Boucher

 

 

 

La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

 

 

 

Pour expédition, Le greffier,

 

 

 

N° 16LY01303 QPC

 

2