Cour d'Appel de Versailles

Arrêt du 24 mai 2016 n° 2016/286

24/05/2016

Renvoi

ARRÊT N° 286

du 24 mai 2016

2016/866

2016/916

PM / HF

DÉCISION :

Ordonne la jonction

Déclare recevable la question prioritaire de constitutionnalité Ordonne la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité à la Cour de cassation

AFFAIRE :

[C A]

PC :

notifié aux avocats par L.R. le : 25.05.16

 

COUR D'APPEL DE VERSAILLES

CHAMBRE DE L'INSTRUCTION

10ème chambre-section A

***

ARRÊT DE TRANSMISSION d'une QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITÉ RENDU LE VINGT QUATRE MAI DEUX MIL SEIZE

COMPOSITION DE LA COUR

- lors des débats, du délibéré

Monsieur GACHON, Président

Madame CHAMBONCEL-SALIGUE, Conseiller

Madame DESSET, Conseiller

tous trois désignés en application des dispositions de l'article 191 du code de procédure pénale

- lors des débats

Monsieur PHILIBEAUX, Avocat général,

Mademoiselle MERIDJEN, greffier,

Lors du prononcé de l'arrêt il a été donné lecture de l'arrêt par Monsieur GACHON, Président, en présence du Ministère public et de Mademoiselle MERIDJEN, greffier,

PARTIES EN CAUSE :

PERSONNE MISE EN EXAMEN :

[A C]

né le [DateNaissance 1] 1991 à [LOCALITE 2]

de nationalité française

Libre et demeurant [adresse 3], [LOCALITE 4]

Mandat de dépôt correctionnel du quatre juillet deux mil quinze, Ordonnance de non prolongation de la détention du trois mars deux mil seize à compter du trois mars deux mil seize, levée d'écrou le 03 mars 2016

Ayant pour avocat Maître Kaltoum GACHI, 16, boulevard raspail - 75007 PARIS

qualification des faits : acquisition non autorisée de stupéfiants, détention non autorisée de stupéfiants, transport non autorisé de stupéfiants, offre ou cession non autorisée de stupéfiants, emploi non autorisé de stupéfiants.

PARTIE APPELANTE

[T C]

née le [DateNaissance 5] 1977 à [LOCALITE 6] ([...])

de nationalité française

demeurant [adresse 7], [LOCALITE 8]

Ayant pour avocat Maître Kaltoum GACHI, 16, boulevard Raspail - 75007 PARIS

RAPPEL DE LA PROCÉDURE

Le 11 janvier 2016, Madame COURCET-DESVAUX juge d'instruction au Tribunal de Grande instance de VERSAILLES a rendu une ordonnance de rejet de demande de restitution, demande formée par [T C], soeur du mis en examen [A C]

Ladite ordonnance a été notifiée :

- par fax contre AR à Maître GACHI Kaltoum, avocat de [A C] et de [T C] le 11 janvier 2016

Appel de cette ordonnance a été interjeté le 20 janvier 2016 par Maître HAINCOURT substituant Maître GACHI, appel enregistré au greffe du Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES le 20 janvier 2016 :

Par arrêt du 3 mai 2016, la chambre de l'instruction a renvoyé l'affaire au 17 mai 2016 s'agissant de la question prioritaire de constitutionnalité, et par arrêt du même jour, a renvoyé l'affaire au 31 mai 2016 s'agissant de l'examen de l'appel ;

Dans la procédure sur la question prioritaire de constitutionnalité.

Conformément aux dispositions des articles 194 et 197 du Code de procédure pénale, le procureur général :

- à notifié la date à laquelle l'affaire sera appelée à l'audience à [C A] personne mise en examen et à Mme [T M], à leur avocat par lettres recommandées le 11 mai 2016 :

- a déposé le dossier au greffe de la chambre de l'instruction et ses réquisitions écrites en date du 06 avril 2016 pour être tenus à la disposition de l'avocat de la personne mise en examen ou de la personne appelante ;

Maître GACHI a déposé au nom de [T C], soeur du mis en examen, par voie de télécopie, deux mémoires le 2 mai 2016 dont | un à 16h25 sur une question prioritaire de constitutionnalité et un sur le fond à 16h 36 lesquels ont été visés par le greffier et communiqués à la Cour (affaire 2016/866).

Maître GACHI a déposé toujours au nom de [T C], directement au greffe de la chambre de l'instruction, le 9 mai 2016 à 15h27 un écrit portant question prioritaire de constitutionnalité, lequel a été visé par le greffier et communiqué à la cour (affaire 2016/916).

DÉROULEMENT DES DÉBATS

A l'audience en chambre du conseil le 17 mai 2016 ont été entendus :

Madame CHAMBONCEL-SALIGUE, conseiller, en son rapport,

En l'absence de Maître GACHI, avocat de [T C], et de [A C], personne mise en examen, qui s’est fait excuser et a adressé outre ses écrits portant question prioritaire de constitutionnalité, ses observations en réponse aux réquisitions du procureur général ;

Monsieur PHILIBEAUX, avocat général. en ses réquisitions :

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 24 mai 2016.

DÉCISION

Rendue après en avoir délibéré conformément à l'article 200 du code de procédure pénale, par arrêt prononcé en chambre du conseil :

Considérant qu'il convient d’ordonner la jonction des affaires enrôlées sous les numéros 2016/868 et 2016/916 pour une meilleure compréhension du dossier et une bonne administration de la justice ;

SUR LA RECEVABILITÉ de la QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITE

Le procureur général aux termes de ses réquisitions écrites demande à la cour de le dire non recevable en la forme au motif que l'article R49-22 du code de procédure pénale par le terme “déposé” ne prévoit pas la possibilité de l'adresser par télécopie ou lettre recommandée ; que toujours selon ces réquisitions il lui “semble que le renvoi fait par l'article 49-25 du code de procédure pénale aux règles de la procédure applicables devant la juridiction saisie ne vaut que pour la suite de la procédure et non pour les conditions de la saisine qui sont préalablement clairement définies” ;

Maître GACHI au nom de “Monsieur [C]” formule des observations en réponse demandant à la cour de déclarer sa question prioritaire de constitutionnalité recevable. Elle invoque à l'appui les dispositions de la loi organique du 10 décembre 2009, en l'exposé des motifs, ainsi que celles de l'article 198 du code de procédure pénale en son dernier alinéa. Enfin elle fait état à toutes fins utiles du dépôt “manuel au greffe de la chambre de l'instruction de la question prioritaire de constitutionnalité effectué le 9 mai 2016.

SUR CE, LA COUR

Considérant que les dispositions de l'article R49-22 du code de procédure pénale prévoient que le moyen tiré de l'inconstitutionnalité doit être “présenté, à l'appui d'une demande, dans un écrit distinct et motivé déposé au greffe de la chambre de l'instruction et qui est visé par le greffier avec l'indication du jour du dépôt' ;

Considérant que la question prioritaire de constitutionnalité soumise à la chambre de l'instruction dans le cas présent a été présentée par un mémoire régulier s'agissant de la procédure, puisqu'il s’agit d'un écrit distinct et motivé, rédigé au nom de [T C]. soeur du mis en examen et propriétaire du véhicule objet de la demande de restitution ;

Considérant que l'article R49-22 ne contient aucune disposition particulière s'agissant de la forme du dépôt de l'écrit au greffe de la chambre de l'instruction ; que par ailleurs les dispositions de l’article R49-25 du même code font référence aux ‘règles de la procédure qui lui [la juridiction saisie] sont applicables”, de même sans autre distinction selon qu'il s'agit du début de la procédure, donc la saisine, ou de la suite, donc les débats et la décision ;

Considérant que les articles 198 et 199 alinéa 3 du code de procédure pénale sont relatifs à la recevabilité des mémoires et au déroulement des débats devant la Chambre de l'instruction : que ces dispositions sont bien applicables à la présente procédure :

Considérant que dès lors la faculté offerte par l’article 198 du code de procédure pénale en son dernier alinéa à l'avocat qui n'exerce pas dans ia ville où siège la chambre de Finstruction d'adresser son mémoire par télécopie ou lettre recommandée avec accusé de réception doit pouvoir s'appliquer pleinement aux parties qui veulent déposer au greffe de la chambre de l'instruction un écrit distinct et motivé contenant un moyen tiré d'une inconstitutionnalité.

Considérant qu'il convient en conséquence de dire recevable le moyen contenu dans le mémoire adressé le 2 mai 2016 ;

SUR LA TRANSMISSION de la QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITE

Considérant qu'il résulte à ce stade du dossier les éléments suivants :

Le 30 juin 2015, des fonctionnaires de police du commissariat de [LOCALITE 9] effectuaient un contrôle de [Q R] alors au volant de son véhicule à [LOCALITE 10] ([...]), dans le cadre d'une réquisition du procureur de la République près le Tribunal de grande instance de VERSAILLES. Interrogé sur une éventuelle possession de stupéfiants, [Q R] remettait spontanément aux policiers Un petit morceau de résine de cannabis qui se trouvait dans son paquet de cigarette. Il était alors interpellé et placé immédiatement en garde à vue (D7 à D12).

La fouille du véhicule amenait la découverte dans le coffre d’une petite boîte blanche de marque DIESEL contenant un petit morceau de résine de cannabis (D14). Au domicile, étaient découverts un sac en plastique contenant un billet de 50 euros, 3 pochons contenant une barrette de cannabis d'un poids total de 15,2 grammes et de 2 pochons d'herbe de cannabis d'un poids total de 5,1 grammes dans un panier à linge sale (D15).

[Q R] se montrait coopératif, expliquant que le cannabis retrouvé chez lui était destiné à la vente.

Il vendait de la résine et de l'herbe de cannabis depuis moins d'un mois, il touchait en moyenne 100 à 200 euros par semaine. Il n'avait pas de point de vente, il se déplaçait en voiture pour livrer ses clients. Il expliquait que c'était deux clients du [...] où il travaillait qui lui avaient demandé s’il voulait prendre une partie de l'herbe de cannabis et des plaquettes de résine de cannabis qu'ils possédaient pour les vendre. Il avait accepté car il avait des problèmes financiers. Il s'agissait de cousins, dont l'un s'appelait [A] et l’autre était surnommé ‘[Z]”, qui habitaient dans le même immeuble que lui. Il décrivait [A] comme étant un individu de sexe masculin, de type nord africain, mesurant environ 1mètre 65, âgé d'environ 25 ans et de corpulence fine.

Selon lui, ces deux individus se rendaient trois fois par mois en dehors de la région parisienne pour acheter des produits stupéfiants en grande quantité, environ un kilo de résine de cannabis et un gros sachet d'herbe de cannabis. La résine de cannabis était de deux sortes, la jaune à 240 euros les 50g, ou 400 euros les 100g, et la noir, de moins bonne qualité à 200 euros les 50g. Généralement ils n'étaient que tous les deux mais il était arrivé que lorsqu'ils revenaient chargé de produits stupéfiants, ils soient accompagnés d’un individu dont il donnait la description. Il s'agissait d'un homme de type maghrébin, âgé d'environ 25 à 30 ans, “faisant plus vieux” et porteur d'une légère barbe, mesurant environ 1m80 m (D20 à D22/D29/D52),

Selon les enquêteurs, l'exploitation des fadettes des lignes téléphoniques de ces deux individus montrait que l’une était active et mobile, avec un aller et retour entre [LOCALITE 11] et [LOCALITE 12] avec un départ de [LOCALITE 13] le 29 juin 2015 aux alentours de 17h00 pour une arrivée à [LOCALITE 14] vers 18h30 et un départ [LOCALITE 15] le 30 juin 2015 vers 12h10 avec une arrivée à [LOCALITE 16] vers 13h40, horaires qui coïncidaient Parfaitement avec les horaires des TER faisant la liaison entre [LOCALITE 17] et [LOCALITE 18] ([LOCALITE 19] à [LOCALITE 20]).

Le 1er juillet 2015, à 23h08, [Q R] recevait sur son téléphone portable un sms de l’un de ses fournisseurs, démontrant que les deux supposés fournisseurs étaient rentrés (D58).

Le 2 juillet 2015, à 9h15, les policiers se rendaient au domicile des précités et y trouvaient trois hommes, [I P], [A B] et [A C], qui étaient interpellés à 9h30 et immédiatement placés en garde à vue (D59 à D60/D61 à [LOCALITE 21]).

La perquisition des lieux permettait la découverte d’une tête d'herbe de cannabis, d'un pochon contenant une barrette de résine de cannabis, d'un coffre fort noir contenant de nombreux pochons vides, une demi plaquette de résine de cannabis et une boîte contenant 10 billets de 20 euros soit 200 euros, 28 billets de 10 euros soit 280 euros et 2 billets de 5 euros soit 10 euros. Il était également saisi six téléphones portables posés à même le sol ainsi qu'un morceau de papier plié supportant de nombreuses inscriptions (D69 à D70).

La fouille du véhicule conduit par [A C] permettait la découverte dans la boîte à gants d'une pochette contenant un billet de 50 euros, deux billets de 20 euros et un billet de 10 euros, soit un total de 100 euros. Les policiers constataient une odeur diffuse de cannabis à l’intérieur du véhicule (D71).

[A C] reconnaissait avoir vendu des produits Stupéfiants lorsqu'il avait 18 ans mais déclarait n’en avoir jamais consommé. Selon lui, [A B] était un ami d'enfance qui habitait dans le même quartier que lui. [I P] était également un très bon ami. Il était venu à son domicile pour les Voir, à bord du véhicule de sa soeur. || déclarait qu’il avait emprunté l'argent retrouvé dans son véhicule à son frère. Il affirmait qu'il ignorait qu'il y avait un coffre et des produits stupéfiants au domicile de ses amis. Il ne savait pourquoi il y avait une forte odeur de cannabis dans son véhicule (D77 à D78).

[I P] expliquait habiter en région [LOCALITE 22] depuis 7 mois. Il reconnaissait que la plaquette de résine de cannabis pesant 47,9g retrouvé à son domicile lui appartenait, affirmant que c'était pour Sa Consommation personnelle. L'argent saisi à son domicile lui appartenait également, il recevait des virement de 50 ou 100 euros tous les mois de sa mère qu'il retirait en billets de 10 ou 20 euros au distributeur automatique. Il déclarait ne pas être surnommé “[Z]”. ll indiquait que la veille, il était à [LOCALITE 23] avec [A C] mais pas avec [A B] son cousin car ce dernier était "interdit [LOCALITE 24]” (D79 à D80).

[A B] niait vendre des produits stupéfiants. II déclarait vivre en région [LOCALITE 25] depuis 7 à 8 mois et son cousin [I P] habitait avec lui depuis 4 ou 5 mois. I! n'était pas consommateur de produits stupéfiants. || avait acheté le coffre fort à l'époque de l'emménagement de son cousin, pour 35 euros dans le but de protéger ses objets de valeur en cas d'agression. La résine de cannabis retrouvée à l'intérieur appartenait à son cousin, il s'agissait de Sa consommation personnelle pour le mois. L'argent trouvé provenait de leur ASSEDIC. interrogé sur le fait qu’une photographie de son cousin [I P] se trouvant dans son téléphone portable portée le nom ‘[Y]”, il répondait qu'il ne savait s’il s'agissait de son surnom. Il affirmait que depuis son installation à [LOCALITE 26], il achetait du tabac à chicha qu'il revendait ensuite à son entourage, ce qui expliquait certains sms trouvés dans son téléphone portable. Il expliquait également certains des sms échangés avec son cousin [I P] par le fait que ce dernier lui avait demandé d'aller acheter des produits stupéfiants qu'il avait acheté à la cité du Petit Bois à [LOCALITE 27]. La veille, il était resté chez lui dans l'attente de [I P] et [A C] qui revenaient d'[LOCALITE 28], précisant qu'ils étaient arrivés vers 22h (D84 à D85).

Les enquêteurs retournaient au domicile de [A B] et [I P], accompagnés de l'équipe cynophile départementale des Yvelines. Le travail du chien permettait la découverte d'une balance de couleur noire, de deux cutters, d’un Sachet contenant d'herbe cannabis et pesant 40 grammes, un sachet contenant de l'herbe de cannabis et pesant 55 grammes, 5 sachets conditionnés à la vente contenant de l'herbe de cannabis et pesants 7 grammes, 5 sachets conditionnés à la vente contenant de l'herbe de cannabis et pesants 5 grammes, soit un total de 110 grammes d'herbe : de cannabis ainsi qu'un bloc de résine de cannabis pesant 52 : grammes, 2 plaquettes de résine de cannabis estampillées d’un point d'interrogation et pesant chacune 50 grammes, 33 sachets de résine - de cannabis conditionnés à la vente et pesant un total de 50 grammes et 5 sachets de résine de cannabis conditionnés à la vente et pesant un total de 8 grammes, cachés dans un sweat noir se trouvant dans une trappe située dans un local technique de l'immeuble.

Il était également découvert trois feuilles avec des prénoms et è des chiffres pouvant correspondre à des feuilles de comptes (D90 à D94).

Le chien spécialisé en stupéfiants marquait également au niveau de la portière avant droite du véhicule de [A C]. Les fonctionnaires de police démontaient alors l'habitacle de cette portière mais ne trouvaient aucune matière stupéfiante. Ils constataient cependant que s'y dégageait une très forte odeur s'apparentant à l'odeur d'herbe de cannabis (D95).

Interrogé sur l'un des téléphones saisis à son domicile, [I P] expliquait qu'il avait certains de ses clients dans ses contacts. Tous ces clients venaient de temps en temps le voir pour acheter pour 10 ou 20 euros. Il précisait qu’il devait leur vendre environ une fois par semaine chacun (D96 à D97).

***********

Lors d'un tapissage, [Q R] reconnaissait formellement [I P] et [A B] comme étant ceux habitant au dessus de chez lui et vendant des produits stupéfiants. !! reconnaissait également formellement [A B] comme étant la personne qui fait le transport de la marchandise entre [LOCALITE 29] et [LOCALITE 30] (D105).

[I P] finissait par reconnaître que les produits stupéfiants découverts dans le local technique de son immeuble lui appartenaient et étaient destinés à être vendus. Il vendait de l'herbe et de la résine de cannabis depuis 3 mois, expliquant qu'il n'avait pas de travail et pas d'argent. Il faisait en moyenne un bénéfice de 500 euros par mois. Il se fournissait auprès de contacts dans une cité [LOCALITE 31]. Il précisait s'y être rendu trois fois et avoir voyager seul. Il cachait les produits stupéfiants dans son pantalon. Il confirmait que l'argent trouvé chez lui provenait de la vente de stupéfiants. {| avait acheté les produits stupéfiants trouvés dans le local technique de son immeuble la veille dans une cité de [LOCALITE 32], par l'intermédiaire d'une certaine [W] qu'il avait rencontré le 30 juin à la [LOCALITE 33] à [LOCALITE 34]. l'indiquait qu'en revenant, il avait été bloqué dans le train, aussi son cousin [A B]! et [A C] étaient venus le chercher avec le véhicule de ce dernier. |! avait caché les produits Stupéfiants dans la garniture de la porte avant droite du véhicule puis une fois arrivé à son domicile, il avait procédé à la découpe de la résine de cannabis et au détail de l'herbe de cannabis. Il affirmait que [A B] et [A C], qui venaient presque tous les week- ends, n'avaient aucun rôle dans ce trafic. H connaissait [Q R], il lui vendait du cannabis. Il indiquait que les papiers trouvés dans le local technique lui appartenait et avait un lien avec le trafic de Stupéfiants (D106 à D108/D147 à D149).

[A B] maintenait dans un premier temps ses précédentes déclarations. Il affirmait ne pas savoir à qui appartenait et d'où provenait les produits stupéfiants trouvés dans le local technique. 'ignorait pourquoi le chien avait marqué au niveau d'une des portières du véhicule de [A C]. Il ne savait pas que son cousin [I P] vendait des stupéfiants. Il l'avait vu seulement dépanner plusieurs personnes, affirmant n'avoir jamais vu de transactions d'argent. Il connaissait [Q R] qui était son voisin mais affirmait qu'il ne l'avait pas vu récemment. Il admettait que Son cousin était surnommé “[Y]”. Il revenait ensuite sur certaines de ses déclarations. L'argent dans le coffre était à son cousin, Il avait menti car il voulait le protéger. Il indiquait qu'il avait accompagné [A C] la veille pour aller chercher [I P]. Il n'avait pas vu ce dernier cacher des produits stupéfiants dans la portière du véhicule et n'avait pas senti une odeur de cannabis. précisant qu'il fumait alors la chicha et qu'il y avait en plus un Sapin désodorisant. Il confirmait que [I P] avait procédé à la découpe devant lui mais il n'y avait pas participé. Il indiquait qu'il savait pour le trafic auquel se livrait son cousin mais il n'y participait pas. Il reconnaissait seulement avoir envoyé un message à l’un des clients de Son cousin à sa demande (D110 à D111/D151 à D153).

[A C] maintenait également ses déclarations. Il déclarait que la veille au soir, il était allé chercher [I P] dans les environs des [LOCALITE 35] car il avait des problèmes de train, en compagnie de [A B].

Il affirmait ne pas avoir vu [I P] cacher des produits stupéfiants dans la portière de son véhicule ni avoir senti une odeur de cannabis, expliquant avoir des problèmes de nez et roulant les fenêtres ouvertes. Il ne comprenait pas pourquoi le chien avait marqué à cet endroit. Il ne l'avait pas non plus vu procéder à la découpe de la résine de cannabis une fois rentrés à [LOCALITE 36]. affirmait ne pas savoir si [I P] ou [A B] vendaient des produits stupéfiants (D112 à D113/D156 à D158).

L'exploitation des sms messages échangés entre [A C], surnommé "[X]” et [A B] montrait que ce dernier ne restait pas en région parisienne comme il l'avait affirmé durant ses auditions et que [A C] servait de chauffeur. Il apparaissait également que dans iles sms échangés entre [A B] et [I P], il était parfois question de produits | stupéfiants et que [A B] avait demandé à son cousin de pointer pour lui au commissariat de [LOCALITE 37] dans le cadre de son contrôle judiciaire (D160 et suivants). L'analyse effectuée sur les billets de banque saisis dans le |véhicule de [A C] et au domicile de [A B] et | [I P] révélait que le taux trouvés en cannabis sur les billets étaient supérieurs à ceux habituellement rencontrés sur les billets dits de la circulation normale. Il ne pouvait s'agir en aucun cas d'une présence liée à un simple transfert de contamination à partir de billets qui auraient été antérieurement souillés par un contact aléatoire avec des billets porteurs eux-mêmes de traces importantes de cannabis (D199 à D207).

[I P] précisait s'être fourni en produits stupéfiants a la cité [LOCALITE 38] à [LOCALITE 39]. Il reconnaissait que [A B] lui avait demandé de pointer à sa place au commissariat. ll ne l'avait pas fait et avait menti à son cousin en lui affirmant le contraire (D198).

[A B] revenait sur sa déclaration concernant la découpe, affirmant que [I P] l'avait fait chez lui. Il se doutait qu'il faisait quelque chose mais il ne savait pas quoi. Il ne souhaitait pas répondre aux question sur son rôle et celui de [A C] dans le trafic ainsi que sur le fait qu'il ait demandé à son cousin de pointer à sa place au commissariat et la raison de cette demande (D207 à D208).

Le 4 juillet 2015, le procureur de la République requérait l'ouverture d'une information contre [Q R], [I P], [A B], [A C] et tous autres pour transport, détention, offre ou cession, acquisition et emploi de résine de cannabis et d'herbe de cannabis à [LOCALITE 40], [LOCALITE 41], dans le département des [LOCALITE 42], et à [LOCALITE 43] dans la [LOCALITE 44], entre le 1° mars 2015 et le 2 juillet 2015 et ce en état de récidive légal concernant [A C] (D230).

Lors de leur interrogatoire de première comparution, [A B], [I P] et [Q R] choisissaient de garder le silence.

Ils étaient mis en examen dans les termes du réquisitoire introductif (D232 à D233/D237 à D238/D239 à D241).

Pour sa part lors de son interrogatoire de première comparution, [A C] maintenait avoir retiré du compte de son frère les 100 euros retrouvés dans son véhicule. Concernant les traces de cannabis retrouvées sur ces billets, il déclarait que le policier qui les avait saisis était le même qui avait trouvé le cannabis chez [I P] et [A B]. Il était mis en examen dans les termes du réquisitoire introductif (D234 à D235),

Une nouvelle expertise toxicologique menée sur les billets de banque découverts lors de la fouille du véhicule RENAULT CLIO attribué à [A C] confirmait que les taux de cannabis trouvés étaient supérieurs à ceux habituellement rencontrés sur des billets dits “de la circulation normale” et ne pouvaient être liés à un Simple transfert de contamination à partir de billets antérieurement souillés. Il était également noté que les résultats de l'expertise étaient en faveur d’une contamination des billets par le même type de cannabis. (D306-D318)

Le magistrat instructeur procédait aux interrogatoires au fond des mis en examens.

[I P] et [A B] maintenaient leurs déclarations antérieures. (D373-D377, D385-D393). Ce dernier reconnaissait en outre avoir déjà récupéré de petites quantité de résine de cannabis pour son cousin en région parisienne mais niait toute implication dans le trafic de stupéfiants.

[A C] confirmait également ses précédentes déclarations puis invoquait son droit de garder le silence. (D394-D399)

***

Par requête du 30 décembre 2015, le conseil de [A C] sollicitait, au nom de [T C], la soeur du mis en examen, la restitution du véhicule RENAULT CLIO immatriculé [Immatriculation 45] placé sous main de justice et dont elle était en réalité la propriétaire.

Il soutenait que la fouille du véhicule ayant été effectuée, sa restitution ne portait pas atteinte à la manifestation de la vérité ni à la sauvegarde des droits des parties et qu'en outre, le véhicule était indispensable aux déplacements professionnels et personnels de la soeur du mis en examen, notamment afin d'assurer le suivi médical de ses parents. Il ajoutait en outre que [T C], propriétaire de bonne foi du véhicule, n'avait pas à être pénalisée par la saisie de son bien dans le cadre d'une information intéressant son frère. Il produisait la copie de la carte grise de [T C] attestant de sa qualité de propriétaire du véhicule placé sous main de justice. (D535)

Le 11 janvier 2016, le juge d'instruction, sur réquisitions conformes du procureur de la République, a rejeté la demande de restitution par une ordonnance ainsi motivée :

"Attendu que l'objet dont la restitution est sollicitée est susceptible d'être confisqué par le Tribunal correctionnel ; que dès lors la demande est prématurée ; ”

C'est de cette décision dont il a été interjeté appel, examiné par la chambre de l'instruction.

*******

Madame [E C], aux termes de son mémoire distinct déposé (dossier n°2016/866) puis réitéré (dossier n°2016/916), demande à la cour de :

- constater l'existence d'un moyen contestant la conformité d'une disposition législative, aux droits et libertés garantis par la Constitution

- Saisir la chambre criminelle de la Cour de Cassation de la question suivante :

“Les dispositions de l'article 99 alinéa 5 du code de procédure pénale, qui n'impartissent à la chambre de l'instruction aucun délai pour statuer sur l'appel interjeté à l'encontre d'une ordonnance de refus de restitution d'un bien saisi dans le cadre d'une information judiciaire, portent-elles atteinte aux Droits et libertés que la Constitution garantit et plus exactement au droit de propriété ainsi qu'au droit à un recours effectif devant une juridiction, garantis par les articles 2, 16 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ?”

Afin que la chambre criminelle procède à l'examen qui lui incombe en vue de sa transmission au Conseil constitutionnel pour qu'il relève l'inconstitutionnalité de la disposition contestée, prononce son abrogation et fasse procéder à la publication qui en résultera.

Le procureur général aux termes de ses réquisitions écrites au fond sur la question prioritaire de constitutionnalité, datées du 11 mai 2076 (dossier n°2016/916), estime la question suffisamment sérieuse pour être transmise à la cour, les motifs de la décision du 16 octobre 2015 sur l'alinéa 2 de l'article 99 du code de procédure pénale pouvant s'appliquer par analogie à l'alinéa 5 du même article.

SUR CE,

LA COUR

Considérant qu'il résulte de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58- 1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel que la transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité peut avoir lieu si les conditions suivantes sont remplies :

- La disposition contestée est applicable au litige ou à la procédure, ou constitue le fondement des poursuites ;

- Elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil Constitutionnel, sauf changement de circonstances ;

-La question n'est pas dépourvue de caractère sérieux ;

Considérant que la question posée est bien en relation avec le litige, étant posée par la soeur du mis en examen par ailleurs propriétaire du véhicule et auteur de la demande rejetée par le juge d'instruction, décision dont appel a été interjeté ;

RSR PASS DOM TDR EM DE PE ET DERNIER TERRE pe nee nn

Considérant que la disposition contestée n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;

Que bien au contraire ce Conseil s’est prononcé le 16 octobre 2015 (décision n°2015-494) en soulignant que "s'agissant d’une demande de restitution d'un bien placé sous main de justice, l'impossibilité d'exercer une voie de recours devant la chambre de l'instruction ou toute autre juridiction en l'absence de tout délai déterminé imparti au juge d'instruction pour statuer conduit à ce que la procédure applicable méconnaisse les exigences découlant de l'article 16 de la Déclaration de 1789 et prive de garanties légales la protection Constitutionnelle du droit de propriété” : qu'ainsi le Conseil constitutionnel a déclaré contraire à ia Constitution les dispositions du deuxième alinéa de l'article 99 du code de procédure pénale :

Considérant que la disposition contestée dans le cas présent n'est pas dépourvue de caractère sérieux dès lors qu'elle a trait à l'alinéa 5 du même article, et à l'absence de tout délai imparti également à la chambre de l'instruction pour statuer sur l'appel contre la décision prise par le juge d'instruction sur une requête présentée au titre de son droit de propriété par un tiers à l'information dont le bien a été saisi ;

Qu'il y a lieu, par conséquent, de transmettre la question prioritaire de constitutionnalité posée par l'avocat de Madame [E M] à la Cour de cassation dans les termes mentionnés au dispositif du présent arrêt ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Vu l'arrêt du 3 mai 2016 ayant renvoyé l'affaire à l'audience du 31 mai 2016 9 heures sur l'appel interjeté,

Statuant sur la question prioritaire de constitutionnalité,

Ordonne la jonction des dossiers enrôlés sous les numéros 2016/866 et 2016/916 ;

En la forme,

Déclare recevable la question prioritaire de constitutionnalité déposée par Madame [E C]

Au fond,

Ordonne que soit transmise à la Cour de cassation la question prioritaire de constitutionnalité suivante :

“Les dispositions de l'article 99 alinéa 5 du code de procédure pénale, qui n'impartissent à la chambre de l'instruction aucun délai pour statuer sur l'appel interjeté à l'encontre d’une 6 ordonnance de refus de restitution d’un bien saisi dans le cadre ; d'une information judiciaire, portent-elles atteinte aux Droits et libertés que la Constitution garantit et plus exactement au droit de propriété ainsi qu'au droit à un recours effectif devant une juridiction, garantis par les articles 2, 16 et 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ?”

Dit que la présente décision sera adressée par le greffe à la Cour de cassation dans les huit jours de son prononcé avec les observations du ministère public et les mémoires des parties relatifs à la question prioritaire de constitutionnalité ;

Laisse à la diligence du ministère public, l'exécution du présent arrêt :

LE GREFFIER,

(Affaire .... [C] [A] )