Tribunal de grande instance de Périgueux

Jugement du 13 mai 2015, N° minute : 325/2015

13/05/2015

Renvoi

Cour d’Appel de Bordeaux

Tribunal de Grande Instance de Périgueux

Jugement du : 13/05/2015

Chambre correctionnelle

N° minute : 325/2015

N° parquet : 14062000007

Plaidé le 25/03/2015

Délibéré le 13/05/2015

JUGEMENT CORRECTIONNEL

A l'audience publique du Tribunal Correctionnel de Périgueux le VINGT-CINQ MARS DEUX MILLE QUINZE,

composé de Madame CODRON Morgane, juge d'instruction, présidente du tribunal correctionnel désignée comme juge unique conformément aux dispositions de l’article 398 alinéa 3 du code de procédure pénale.

Assistée de Monsieur SPOSITO Julien, greffier,

en présence de Monsieur RENARD Stéphane, vice-procureur de la République,

a été appelée l’affaire

ENTRE :

Monsieur le PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE, près ce tribunal, demandeur et poursuivant

ET

Prévenu

Nom : [A D]

né le [DateNaissance 1] 1992 à [LOCALITE 2] ([LOCALITE 3])

de [A B C] et de [E F]

Nationalité : afghane

Situation familiale : concubin

Situation professionnelle : gérant de magasin

Antécédents judiciaires : jamais condamné

demeurant : [adresse 4] [LOCALITE 5]

Situation pénale : libre

comparant assisté de Maître DANIEL LAMAZIERE Pierre avocat au barreau de PERIGUEUX,

Prévenu du chef de :

OUVERTURE IRREGULIERE D'UN DEBIT DE BOISSONS A CONSOMMER SUR PLACE DE 3ème OU 4ème CATEGORIE faits commis le 25 février 2014 à [LOCALITE 6]

DEBATS

A l’appel de la cause, la présidente a constaté la présence et l’identité de [A D] et a donné connaissance de l’acte qui a saisi le tribunal.

Le président informe le prévenu de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire. .

Avant toute défense au fond, Maître DANIEL LAMAZIERE conseil de [A D] a déposé des conclusions tendant à prendre acte de la question prioritaire de constitutionnalité portant sur les dispositions des articles L,3352-2 alinéa second et l'alinéa quatrième de l'article L333-1 du code de la santé publique pour violation des articles 2, 4, 5, 8 et 17 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.

Les parties ayant été entendues et le ministère public ayant pris ses réquisitions, le tribunal a joint au fond, après en avoir délibéré.

La présidente a instruit l’affaire, interrogé le prévenu présent sur les faits et reçu ses déclarations.

Le ministère public a été entendu en ses réquisitions.

Maître DANIEL LAMAZIERE Pierre, conseil de [A D] a été entendu en sa plaidoirie.

Le prévenu a eu la parole en dernier.

Le greffier a tenu note du déroulement des débats.

Puis à l'issue des débats tenus à l'audience du VINGT-CINQ MARS DEUX MILLE QUINZE, le tribunal composé comme suit :

Président : Madame CODRON Morgane, juge d'instruction, assistée de Monsieur SPOSITO Julien, greffier, en présence de Monsieur RENARD Stéphane, vice-procureur de la République,

a informé les parties présentes ou régulièrement représentées que le jugement serait prononcé le 13 mai 2015 à 09:00.

A cette date, vidant son délibéré conformément à la loi, la Présidente a donné lecture de la décision, en vertu de l'article 485 du code de procédure pénale,

composé de Madame Morgane CODRON, juge d’instruction, présidente du tribunal correctionnel désigné comme juge unique conformément aux dispositions de l’article 398 alinéa 3 du code de procédure pénale.

Assistée de Madame GINESTAL Mylène, greffière, et en présence du ministère public.

Le tribunal a délibéré et statué conformément à la loi en ces termes :

Une convocation à l'audience du 25 MARS 2015 a été notifiée à [A D] le 27 janvier 2015 par un agent ou un officier de police judiciaire sur instruction du procureur de la République et avis lui a été donné de son droit de se faire assister d'un avocat, Conformément à l'article 390-1 du code de procédure pénale, cette convocation vaut citation à personne,

[A D] a comparu à l’audience assisté de son conseil ; il y a lieu de statuer contradictoirement à son égard.

Il est prévenu d'avoir à [LOCALITE 7] ([...]), le 25 février 2014, en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription, ouvert irrégulièrement un débit de boissons à consommer sur place de 3èmc ou 4ème catégorie, en l’espèce en ayant vendu des boissons alcooliques après 22h00 sans être titulaire du permis d'exploiter, faits prévus par ART.L.3352-2 AL.l, h ART'l.3335-1,ARTL.3335-8 C SANTE PUB. et réprimés par ART.L.3352-2, ART.L.3355-6 AL.l C.SANTE.PUB.

En application de l’article 23-1 de l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, [D A] saisit la juridiction sur le fondement de l’article 61-1 de la Constitution, d’un moyen soulevant l'inconstitutionnalité de l’article 3352-2 alinéa 2 du Code de la Santé Publique.

En effet, [D A] soutient que la peine complémentaire obligatoire de fermeture du débit de boissons en cas de condamnation du chef prévu à l’alinéa 1 du même article est contraire au principe d’individualisation de la peine.

Dans son avis exprimé à l’audience du 25 mars 2015, le ministère remplie les conditions de transmission à la Cour de cassation.

SUR CE:

SUR LE MOYEN TIRE DE L'INCONSTITUTIONNALITE DE LA DISPOSITION LEGISLATIVE FONDANT LES POURSUITES / APPLICABLE AU LITIGE OU A LA PROCEDURE :

Sur la recevabilité du moyen tiré de l’atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution:

En l’espèce, le moyen tiré de l’atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution a été présenté le 25 mars 2015 dans un écrit distinct et motivé. Il est donc recevable.

Sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité à la Cour de cassation:

En l’espèce, la disposition contestée fonde les poursuites à l’encontre de [D A] et est applicable au litige en ce qu’elle précise la peine complémentaire obligatoire associée à la condamnation pour ouverture illicite d’un débit de boissons

Elle n’a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel, et n’est pas dépourvue de caractère sérieux,

en ce que cette peine complémentaire présente un caractère obligatoire et ne peut être adaptée à la personnalité de l’intéressé et aux circonstances de commission de l’infraction, la fermeture étant définitive sans possibilité de la limiter dans le temps,

qu’elle ne peut faire l’objet du relèvement prévu par l’article 132-21 du code pénal n’étant pas dans l’incapacité d’exercer son activité professionnel le mais seulement de l’exercer en ce lieu désigné,

Il y a donc lieu de transmettre à la Cour de cassation la question suivante :

L’article 3352-2 alinéa 2 du Code de la santé publique porte-t-elle atteinte aux droits et libertés garantis par l’article 5 et 8 de la déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 ?

SUR L’ACTION PUBLIQUE:

En l’espèce, aucun élément ne rend nécessaire que soient ordonnées des mesures provisoires ou conservatoires, ni que des points du litige soient immédiatement tranchés.

Il sera donc sursis à statuer sur l’action publique, l’examen de l’affaire étant renvoyé à l’audience du 9 décembre 2015 à 9heures.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire à l’égard de [D A], non susceptible de recours,

AVANT DIRE DROIT

ORDONNE la transmission à la Cour de cassation de la question suivante:

L’article 3352-2 alinéa 2 du Code de la santé publique porte-t-elle atteinte aux droits et libertés garantis par l’article 5 et 8 de la déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 ? ?

DIT que la présente décision sera adressée par le greffe à la Cour de cassation dans les huit jours de son prononcé avec les mémoires ou conclusions des parties relatifs à la question prioritaire de constitutionnalité;

SUR L’ACTION PUBLIQUE

SURSOIT à statuer sur les poursuites engagées à l’encontre de [D A];

RENVOIE l’examen de la présente affaire à l’audience du 9 décembre 2015 à 9 heures ;

Et le présent jugement a été signé par le président et le greffier.