Tribunal administratif de Paris

Ordonnance du 21 janvier 2015 N° 1428029, 1429131 , 1430471/2-1

21/01/2015

Renvoi

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PARIS

 

 

N° 1428029, 1429131,1430471/2-1

 

M.FERAUD

PREFET DE PARIS

SOCIETE TOUR TRIANGLE

 

___________

 

Mme KOSCIUSKO-MORIZET

___________

 

Ordonnance du 21 janvier 2015

__________

 

 

 

 

 

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

 

 

 

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

 

 

Le président de la 2ème section

 

Vu le mémoire, enregistré le 19 décembre 2014 , présenté pour Mme Kosciusko-Morizet, domiciliée au 5 rue de Lobau 75004 Paris, par Me Schnerb, en application de l’article 23-1 de l’ordonnance n° 58-1167 du 7 novembre 1958 ; Mme Kosciusko-Morizet appelée à présenter ses observations sur les requêtes n° 1428029, 1429131 et 1430471 présentées respectivement par M. A... Féraud, la société civile immobilière Tour Triangle et le préfet de Paris tendant à l’annulation de la décision du 17 novembre 2014 par laquelle le Conseil de Paris a refusé d’adopter le projet de délibération n° 2014 DU 1117 relatif au « déclassement de l’assiette de la Tour Triangle et signature d’une promesse de bail et d’un bail à construction relatif à la réalisation de la Tour Triangle », demande au tribunal, de transmettre au Conseil d’Etat la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l’article L.2121-21 du code général des collectivités territoriales ;

 

Elle soutient que les dispositions de l’article L.2121-21 du code général des collectivités territoriales en ce qu’elles permettent à un tiers des membres du conseil municipal d’obtenir un vote à bulletin secret méconnaissent le principe d’égalité énoncé aux articles 1er et 6 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen ainsi que les dispositions de l’article 15 de la Déclaration, en vertu desquelles la société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration ;

 

Vu le mémoire, enregistré le 13 janvier 2015, présenté pour la ville de Paris par Me Foussard ; la ville de Paris conclut à la non transmission de la question au Conseil d’Etat ; elle soutient que les conditions prévues à l’article 23-2 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 ne sont pas remplies dés lors que la question posée est dépourvue de caractère sérieux ;

 

Vu le mémoire, enregistré le 19 janvier 2015, présenté pour M. A... Féraud par la SCP Waquet-Farge-Hazan ; M. Féraud conclut à la non transmission de la question au Conseil d’Etat ; il soutient que les conditions prévues à l’article 23-2 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 ne sont pas remplies dés lors que la question posée est dépourvue de caractère sérieux ;

 

 

Vu les autres pièces du dossier ;

 

Vu la Constitution, notamment son article 61-1 ;

 

Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

 

Vu la loi organique n° 2009-1523 du 10 décembre 2009 relative à l’application de l’article 61-1 de la Constitution, ensemble le décret n° 2010-148 du 16 février 2010 portant application de ladite loi ;

 

Vu le code général des collectivités territoriales ;

 

Vu le code de justice administrative ;

 

1. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 61-1 de la Constitution : « Lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé. » ; qu'aux termes de l'article 23-2 de l'ordonnance du 7 novembre 1958, modifiée, portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : « La juridiction statue sans délai par une décision motivée sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'État ou à la Cour de cassation. Il est procédé à cette transmission si les conditions suivantes sont remplies : 1° La disposition contestée est applicable au litige ou à la procédure ou constitue le fondement des poursuites ; 2° Elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances ; 3° La question n'est pas dépourvue de caractère sérieux. » ;

 

2. Considérant qu’il résulte des dispositions combinées des premiers alinéas des articles 23-1 et 23-2 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, que le tribunal administratif saisi d’un moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution présenté dans un écrit distinct et motivé, statue sans délai par une décision motivée sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'Etat et procède à cette transmission si est remplie la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu’elle n’ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question ne soit pas dépourvue de caractère sérieux ; que l'article R. 771-7 du code de justice administrative dispose que : « Les présidents de tribunal administratif (…), les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours (…) peuvent, par ordonnance, statuer sur la transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité. » ;

 

3. Considérant que le Conseil de Paris a au cours de la séance du 17 novembre 2014 refusé d’adopter le projet de délibération qui lui était présenté par la maire de Paris en vue de constater la désaffectation de la parcelle devant servir au terrain d’assiette du projet de la Tour Triangle et de prononcer son déclassement, ainsi que de l’autoriser à signer au nom de la ville de Paris une promesse de bail et un bail à construction avec la société Tour Triangle ; que le vote est intervenu au scrutin secret à la demande de plus d’un tiers des membres présents en application des dispositions de l’article L.2121-21 du code général des collectivités territoriales ; que par les requêtes susvisées, M. Féraud, président du groupe socialiste au Conseil de Paris, la société Tour Triangle et le préfet de Paris, demandent au tribunal d’annuler la décision du Conseil de Paris refusant d’adopter ce projet de délibération ; qu’ils soutiennent que certains élus n’ont pas respecté le caractère secret du vote ; que compte tenu des résultats du scrutin qui ont conduit au rejet de la délibération mise aux voix par la maire de Paris, le tribunal, afin d’assurer le caractère contradictoire de la procédure, a appelé en cause les présidents de groupe au Conseil de Paris ; que Mme Kosciusko-Morizet, présidente du groupe UMP, est par suite recevable à soulever la conformité à la Constitution des dispositions de l’article L.2121-21 du code général des collectivités territoriales ;

 

4. Considérant que la question prioritaire de constitutionnalité que soulève Mme Kosciusko-Morizet porte sur les dispositions de l’article L.2121-21 du code général des collectivités territoriales qui sont applicables au litige présenté devant le tribunal ; que ces dispositions législatives n’ont pas été déclarées conformes à la Constitution par une décision du Conseil constitutionnel et que la question de leur conformité au principes énoncés aux articles 1er, 6 et 15 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen ne peut être regardée comme étant dépourvue de caractère sérieux ; que, par suite, il y a lieu de transmettre cette question au Conseil d’Etat ;

 

 

 

ORDONNE :

 

 

Article 1er : La question de la conformité à la Constitution de l’article L.2121-21 du code général des collectivités territoriales est transmise au Conseil d’Etat.

 

Article 2 : Il est sursis à statuer sur les requêtes de M. A... Féraud, de la société civile immobilière Tour Triangle et du préfet de Paris.

 

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A... Féraud, à la société Tour Triangle, au préfet de Paris, à la ville de Paris, à Mme Kosciusko-Morizet, présidente du groupe UMP, au groupe Ecologistes de Paris, au groupe UDI-Modem, au groupe Communiste Front de Gauche et au groupe radical de Gauche, Centre et Indépendants du Conseil de Paris.

 

 

Fait à Paris, le 21 janvier 2015.

 

 

Le président de la 2ème section

 

 

 

 

A. Mendras

 

 

La République mande et ordonne au préfet de la Région Ile-de-France, préfet de Paris, en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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