Tribunal administratif de Paris

Ordonnance du 3 mai 2013 N° 1304883/5-2

03/05/2013

Renvoi

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PARIS

 

 

N°1304883/5-2

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Mme B... A...

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Ordonnance du 3 mai 2013

___________

 

 

 

 

 

REPUBLIQUE FRANÇAISE

 

 

 

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

 

 

La Vice - Présidente de la 5ème section,

 

 

Vu l’ordonnance en date du 9 avril 2013 par laquelle le tribunal administratif de Rennes a transmis au tribunal administratif de Paris la requête présentée pour Mme A... demeurant 26 rue Thiers à Vannes (56000), par Me Morin et enregistrée le 13 mars 2013 ;

 

Vu le mémoire, enregistré le 13 mars 2013, présenté pour Mme B... A... par Me Morin ;

Mme A... demande au Tribunal à l’appui de son recours tendant à l'annulation de la décision du 13 juin 2012 du directeur du service des retraites de l’Etat rejetant sa demande tendant à bénéficier, au titre de sa pension de réversion, de la part attribuée à l’orphelin représentant l’autre lit et qui cesse d’être représenté, de transmettre au Conseil d’Etat aux fins de transmission au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l'article L. 43 du code des pensions civiles et militaires de retraite en ce que, dans sa rédaction issue de l’article 162 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011, il exclut toute réversibilité au profit du conjoint survivant de la part attribuée à un autre lit qui cesse d’être représenté ;

 

Vu le mémoire, enregistré le 27 mars 2013, présenté par le ministre de l’économie et des finances concluant au rejet de la demande de transmission au Conseil d’Etat de la question prioritaire de constitutionnalité ;

 

Vu le mémoire, enregistré le 8 avril 2013, présenté par le ministre de la défense concluant au rejet de la demande de transmission au Conseil d’Etat de la question prioritaire de constitutionnalité ;

 

Vu le mémoire en réplique, enregistré au greffe le 16 avril 2013, présenté pour Mme A... et tendant aux mêmes fins que ses précédentes écritures ;

 

 

 

Vu la Constitution, notamment son article 61-1 et son Préambule ;

 

Vu l’ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

 

Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

 

Vu la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 et notamment son article 162 ;

 

Vu la décision du Conseil constitutionnel n° 2010-108 QPC du 25 mars 2011 ;

 

Vu le code de justice administrative ;

 

Vu la délégation du président du tribunal accordée en application de l’article R. 771-7 du code de justice administrative ;

 

 

1. Considérant qu’aux termes de l’article 23-2 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : « La juridiction statue sans délai par une décision motivée sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'État ou à la Cour de cassation. Il est procédé à cette transmission si les conditions suivantes sont remplies : 1° La disposition contestée est applicable au litige ou à la procédure, ou constitue le fondement des poursuites ; 2° Elle n’a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances ; 3° La question n'est pas dépourvue de caractère sérieux. » ;

 

2. Considérant qu’aux termes de l’article L.43 du code des pensions civiles et militaires de retraite dans sa rédaction issue de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 : « La pension définie à l'article L. 38 est répartie comme suit : a) A la date du décès du fonctionnaire, les conjoints survivants ou divorcés ayant droit à pension se partagent la part de la pension de réversion correspondant au rapport entre le nombre de conjoints survivants ou divorcés et le nombre total de lits représentés. Cette part est répartie entre les conjoints au prorata de la durée respective de chaque mariage. Un lit est représenté soit par le conjoint survivant ou divorcé, soit par les orphelins de fonctionnaires dont l'autre parent n'a pas ou plus droit à pension ; b) La différence entre la fraction de la pension prévue à l'article L. 38 et les pensions versées aux conjoints survivants ou divorcés du fonctionnaire en application du a est répartie également entre les orphelins ayant droit à la pension prévue à l'article L. 40 qui représentent un lit. » ;

 

3. Considérant qu’il résulte des termes du III de l’article 162 de la loi du 28 décembre 2011que les dispositions nouvelles de l’article L. 43 du code des pensions civiles et militaires de retraite, s’appliquent à compter du 1er janvier 2012, aux pensions liquidées antérieurement à cette date ; que ces nouvelles dispositions sont donc bien applicables au présent litige et qu’elles n’ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel ;

 

 

4. Considérant que Mme A... fait grief à l’article L. 43 du code des pensions civiles et militaires de retraite de porter atteinte au principe d'égalité énoncé à l’article 2 alinéa 4 de la Constitution et aux articles 1er et 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789 en ce que, dans sa rédaction issue de la loi du 28 décembre 2011, la disposition antérieure contenue dans cet article et prévoyant que : « si un lit cesse d’être représenté, sa part accroîtra celle du ou des autres lits » n’y figure plus, excluant ainsi toute réversibilité au profit du conjoint survivant de la part attribuée à un autre lit qui cesse d’être représenté et, en particulier, toute réversibilité au profit du conjoint survivant de la part attribuée à l’orphelin représentant l’autre lit lorsqu’il cesse d’en bénéficier ayant atteint l’âge de vingt-et-un ans ; que la requérante fait ainsi valoir qu’un conjoint survivant dont l’époux est décédé sans enfant pouvant représenter l’autre lit est dans une position plus avantageuse bénéficiant alors d’un taux de réversion complet de 50 % alors que le conjoint survivant en présence d’un enfant d’un autre lit âgé de moins de 21 ans lors du décès ne pourra prétendre , sa vie durant, qu’à un taux de 25 % ; que de même, le conjoint survivant dont l’époux est décédé alors que les enfants d’un autre lit avaient déjà dépassés l’âge de 21 ans bénéficie du taux de 50 % alors que celui en présence d’enfant dont l’époux est décédé alors qu’il avait moins de 21 ans ne percevra qu’un taux de réversion de 25 % ; qu’ainsi l’article L.43 dans sa rédaction issue de la loi du 28 décembre 2011 porterait atteinte au principe constitutionnel d’égalité sans que la différence de traitement ainsi opérée soit conforme à l’objet de la loi, qui est de compenser, en cas de décès d'un fonctionnaire, la perte de revenus subie par chacun de ses ayants-cause ; que cette question n'est pas dépourvue de caractère sérieux ; qu’ainsi, il y a lieu de transmettre au Conseil d’Etat aux fins de transmission au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par Mme A... ;

 

 

 

 

ORDONNE :

 

 

Article 1er : La question prioritaire de constitutionnalité soulevée par Mme A... portant sur l’atteinte portée au principe constitutionnel d’égalité qui résulterait de l'article L. 43 du code des pensions civiles et militaires de retraite en ce que, dans sa rédaction issue de l’article 162 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011, il exclut toute réversibilité au profit du conjoint survivant de la part attribuée à l’autre lit et qui cesse d’être représenté, est transmise au Conseil d'Etat .

 

Article 2 : Il est sursis à statuer sur la requête de Mme A..., jusqu’à ce qu’il ait été statué par le Conseil d'Etat ou, s’il est saisi, par le Conseil constitutionnel, sur la question prioritaire de constitutionnalité ainsi soulevée.

 

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée au président de la section du contentieux du Conseil d’Etat, à Mme B... A..., au ministre de la défense et au ministre de l'économie et des finances.

 

 

Fait à Paris, le 3 mai 2013

 

La vice-présidente de la 5ème section,

 

 

 

 

J.EVGENAS

 

 

La République mande et ordonne au ministre de l’économie et des finances, en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution du présent jugement.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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