Tribunal administratif de Paris

Ordonnance du 23 avril 2013 N° 1301278/6-3

23/04/2013

Renvoi

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PARIS

 

 

N°1301278/6-3

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M. B... A...

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Ordonnance du 23 avril 2013

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REPUBLIQUE FRANÇAISE

 

 

 

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

 

 

Le vice-président de section,

 

 

 

Vu le mémoire, enregistré le 30 janvier 2013, présenté par M. B... A..., élisant domicile chez l’association Droit au logement Paris et environs dont le siège est 29 avenue Ledru-Rollin à Paris (75012), en application de l’article 23-1 de l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

 

M. A... demande au tribunal administratif, à l’appui de sa requête tendant à l’annulation de la décision par laquelle le préfet de la région d’Île-de-France, préfet de Paris a implicitement rejeté sa demande, adressée par lettre recommandée avec accusé réception du 2 novembre 2012, tendant à obtenir une attestation d’élection de domicile pour une personne sans abri en vue de déposer une demande d’aide juridictionnelle, de transmettre au Conseil d’État la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions du troisième alinéa de l’article L. 264-2 du code de l’action sociale et des familles;

 

 

Il soutient que ces dispositions, applicables au litige, méconnaissent le droit à un recours effectif devant une juridiction et donc l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen ainsi que le principe de liberté individuelle et de respect de la vie privée qui résultent des articles 2 et 4 de ladite Déclaration ;

 

 

Vu le mémoire, enregistré le 15 février 2013, présenté par le préfet de la région d’Île-de-France, préfet de Paris ;

 

 

Il soutient que les conditions posées par l’article 23-2 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 ne sont pas remplies, et en particulier pour ce qui est de la méconnaissance de l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, la condition relative au caractère sérieux de la question ; qu’en effet compte tenu des termes de l’alinéa 3 de l’article 3 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 modifiée par la loi n°2011-672 du 16 juin 2011 et des termes de la circulaire DGAS/MAS/2008/70 du 25 février 2008 relative à la domiciliation des personnes sans domicile fixe, les étrangers en situation irrégulière et sans domicile fixe peuvent se voir délivrer l’attestation de domicile mentionnée à l’article L. 246-2 du code de l’action sociale et des familles pour demander le bénéfice de l’aide juridique ;

 

 

Vu le mémoire présenté par M. A... enregistré le 7 mars 2013 ;

 

 

Vu les autres pièces du dossier ;

 

 

Vu la Constitution, notamment son article 61-1 ;

 

 

Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée ;

 

 

Vu le troisième alinéa de l’article L. 264-2 du code de l’action sociale et des familles ;

 

 

Vu le code de justice administrative ;

 

 

 

 

 

1. Considérant qu’il résulte des dispositions combinées des premiers alinéas des articles 23-1 et 23-2 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, que le tribunal administratif saisi d’un moyen tiré de ce qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution présenté dans un écrit distinct et motivé, statue sans délai par une décision motivée sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d’État et procède à cette transmission si est remplie la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu’elle n’ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances et que la question ne soit pas dépourvue de caractère sérieux ; que le second alinéa de l’article 23-2 de la même ordonnance précise que : « En tout état de cause, la juridiction doit, lorsqu’elle est saisie de moyens contestant la conformité d’une disposition législative, d’une part, aux droits et libertés garantis par la Constitution et, d’autre part, aux engagements internationaux de la France, se prononcer par priorité sur la transmission de la question de constitutionnalité au Conseil d’État (…) » ;

 

 

 

 

 

2. Considérant qu’aux termes de l’article L. 264-1 du code de l’action sociale et des familles : « Pour prétendre au service des prestations sociales légales, réglementaires et conventionnelles, à l'exception de l'aide médicale de l'Etat mentionnée à l'article L. 251-1, ainsi qu'à la délivrance d'un titre national d'identité, à l'inscription sur les listes électorales ou à l'aide juridique, les personnes sans domicile stable doivent élire domicile soit auprès d'un centre communal ou intercommunal d'action sociale, soit auprès d'un organisme agréé à cet effet… » ; qu’aux termes de l’article L. 264-2 du code de l’action sociale et des familles : « L'élection de domicile est accordée pour une durée limitée. Elle est renouvelable de droit et ne peut prendre fin que dans les conditions mentionnées à l'article L. 264-5. Les centres communaux ou intercommunaux d'action sociale ainsi que les organismes agréés remettent aux intéressés une attestation d'élection de domicile mentionnant la date d'expiration de celle-ci. L'attestation d'élection de domicile ne peut être délivrée à la personne non ressortissante d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse, qui n'est pas en possession d'un des titres de séjour prévus au titre Ier du livre III du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. » ;

 

 

 

 

 

3. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que M. A..., ressortissant ivoirien sans domicile stable et sans titre de séjour a demandé au préfet de la région Ile-de-France préfet de Parisla désignation d’une association ou d’un organisme agréé en vue d’obtenir la délivrance d’une attestation d’élection de domicile afin de pouvoir ensuite présenter une demande d’aide juridique dans le cadre d’une action contentieuse ; que M. A... a présenté une requête tendant à l’annulation de la décision implicite de rejet de sa demande ; que le troisième alinéa de l’article L. 264-2 du code de l’action sociale et des familles est applicable au présent litige ; que cette disposition n’a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel ; que le moyen tiré de ce qu’elle porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, et notamment au droit au recours effectif devant une juridiction, garanti par l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, pose une question qui n’est pas dépourvue de caractère sérieux ; qu’ainsi, il y a lieu de transmettre au Conseil d’État la question prioritaire de constitutionnalité invoquée ;

 

 

 

 

O R D O N N E :

 

 

 

Article 1er : La question de la conformité à la Constitution de l’alinéa 3 de l’article L. 264-2 du code de l’action sociale et des familles dans sa rédaction issue de la loi n°2007-290 du 5 mars 2007 - article 51 (V), parue au journal officiel de la République Française le 6 mars 2007 et entrée en vigueur le 1er juillet 2007, est transmise au Conseil d’État.

 

Article 2 : Il est sursis à statuer sur la requête de M. A..., jusqu’à la réception de la décision du Conseil d’État ou, s’il a été saisi, jusqu’à ce que le Conseil constitutionnel ait tranché la question de constitutionnalité ainsi soulevée.

 

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à M. B... A... et au préfet de la région d'Île-de-France, préfet de Paris.

 

 

 

Fait à Paris, le 23 avril 2013.

 

Le vice-président de section,

 

 

 

 

M. C....

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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