Cour des comptes

Arrêt du 26 janvier 2012 n° 62810

26/01/2012

Non renvoi

COUR DES COMPTES QUATRIEME CHAMBRE PREMIERE SECTION

 

 

LETTRES DE NOTIFICATION

 

 

DU ..26 JAN. 2012

 

 

 

Arrêt n° 62810

 

 

OFFICE DE COMMUNICATION ET D'INFORMATION (OCID) ­ GESTION DE FAIT DES DENIERS DU DEPARTEMENT

DES BOUCHES-DU-RHONE

 

Question prioritaire de constitutionnalité Rapport n° 2011-675-0

Audience publique du 8 décembre 2011

 

Lecture publique du 26 janvier 2012

 

 

LA COUR DES COMPTES a rendu l'arrêt suivant : LACOUR,

 

Vu les requêtes, enregistrées respectivement les 9 juin et 11 juillet 2011 au

greffe de la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte-d'Azur, par lesquelles MM. A… et B… ont interjeté appel du jugement n° 2011-027 du 9 mai 2011 par lequel ladite chambre régionale a fixé définitivement la ligne de compte de la gestion de fait des deniers du département des Bouches-du-Rhône pour les opérations effectuées par l'OFFICE DE COMMUNICATION ET D'INFORMATION DEPARTEMENTAL (OCID) à 9 907 847,94€ en recettes et 9 851 194,52 € en dépenses, les a constitués solidairement débiteurs de la somme de 56 653,41 € augmentée des intérêts de droit, et a fixé le partage de ce débet par parts viriles entre eux ;

 

Vu le mémoire, enregistré le 28 septembre 2011 au greffe de la Cour, par lequel Me Jacques Vieilleville, avocat de M. A…, a soulevé, à l'occasion de l'appel, une question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité des articles L. 131-11 et L. 231-11 du code des juridictions financières, aux droits et libertés que la Constitution garantit ;

 

Vu le jugement du 9 octobre 2008 par lequel la chambre régionale, statuant définitivement, a condamné respectivement MM. B… et A… à des amendes de 8 000 € et 12 000 €, ensemble l'arrêt du 17 décembre 2009 par lequel la Cour des comptes a confirmé en appel lesdites amendes, et la décision du 20 mai 2011 par laquelle le Conseil d'Etat a refusé d'admettre le pourvoi en cassation formé contre ledit arrêt ;

 

 

MGB

 

 

 

 

Vu la Constitution, notamment son article 61-1 ;

 

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment ses articles 23-1 et 23-2 ;

 

Vu le code des juridictions financières ;

 

Vu la loi n° 94-1040 du 2 décembre 1994 relative à la partie législative des. livres Ier et II du code des juridictions financières ;

 

Vu la loi n° 2008-1091 du 28 octobre 2008 relative à la Cour des comptes et aux chambres régionales des comptes, notamment son article 34 ;

 

Vu les correspondances du 4 octobre 2011 par lesquelles les personnes concernées ont été informées de la possibilité de présenter des observations ;

 

Vu les autres pièces du dossier ;

 

Sur le rapport de M. Geoffroy, conseiller maître ;

Vu les conclusions n° 731 du 29 novembre 2011 du Procureur général; Entendu, lors de l'audience publique de ce jour, M. Geoffroy, rapporteur,

en son rapport, M. Vallemaud, avocat général, en les conclusions du Parquet, l'appelant

étant représenté par son conseil, Me Rosenstiehl, qui a eu la parole en dernier ;

 

Ayant délibéré hors la présence du rapporteur et du ministère public et après avoir entendu M. Cazanave, conseiller maître, en ses observations ;

 

 

Sur la recevabilité de la demande :

 

Attendu que l'article 61-1 de la Constitution dispose :

« Lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'Etat (... ) qui se prononce dans un délai déterminé » ;

 

Attendu que le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé pour la première fois en cause d'appel ;

 

Attendu que l'article LO. 142-2 du code des juridictions financières précise :

« I.- La transmission au Conseil d'Etat, par une juridiction régie par le présent code, d'une question prioritaire de constitutionnalité obéit aux règles définies par les articles 23-1 à 23-3 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitùtionnel (... ) » ;

 

 

 

 

Attendu qu'aux termes de l'article 23-1 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 modifiée, « le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution est, à peine d'irrecevabilité, présenté dans un écrit distinct et motivé » ; que le conseil de M. A… a produit à la Cour un mémoire distinct des conclusions principales et motivé ; que, dès lors, la condition de recevabilité est satisfaite en l'espèce ;

 

 

Sur la transmission :

 

Attendu que l'article 23-2 de l'ordonnance susmentionnée fixe trois conditions relatives au texte contesté par la question prioritaire de constitutionnalité : il doit viser une « disposition législative » ; cette disposition doit être

« applicable au litige ou à la procédure, ou [constituer] le fondement des poursuites » ; et elle ne doit pas avoir « été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs ou le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances » ;

 

Attendu, en premier lieu, que les articles L. 131-11 et L. 231-11 du code des juridictions financières, précisément identifiés dans le mémoire, sont des dispositions de forme législative, votées par le Parlement et promulguées par le Président de la République ;

 

Attendu que l'article L. 131-11 du code des juridictions financières a été modifié par la loi du 28 octobre 2008 susvisée ; qu'en application de son article 34 les dispositions de cette loi, réserve faite de son article 9, « ne s'appliquent pas aux suites à donner aux procédures en cours ayant donné lieu à des décisions juridictionnelles prises à titre provisoire et notifiées avant le 1er janvier 2009 » ; que le jugement dont est appel fait partie d'une procédure ayant donné lieu à des décisions juridictionnelles provisoires antérieures à cette date ; que dès lors, nonobstant le fait que la version de l'article L. 131-11 reproduite dans le mémoire soit celle qui résulte de l'entrée en vigueur de ladite loi, la question posée par M. A… doit être comprise, s'agissant de cet article, comme concernant la rédaction antérieure, résultant de la loi du 2 décembre 1994 susvisée ;

 

Qu' ainsi la première condition doit être considérée comme satisfaite ;

 

Attendu, en second lieu, que M. A… fait valoir que les articles en cause, compte tenu de l'unicité de la procédure de gestion de fait, entretiendraient un lien indissociable avec le litige au fond ;

 

Attendu que les dispositions visées par la question concernent, au sein de la procédure de gestion de fait, la faculté qu'a le juge financier de prononcer une amende ; qu'en revanche l'appel porte sur la phase de jugement du compte; que les conditions dans lesquelles sont prononcées d'éventuelles amendes sont insusceptibles d'emporter quelque effet que ce soit sur l'allocation des dépenses, la fixation de la ligne de compte, le prononcé d'un débet et son partage entre les comptables de fait ;

 

 

 

 

 

Attendu au surplus, en l'espèce, que des amendes ont déjà été prononcées à titre définitif par la chambre régionale par le jugement susvisé du 9 novembre 2008 ; qu'elles ont été confirmées par l'arrêt d'appel susvisé rendu par la Cour le 17 décembre 2009 ; que le Conseil d'Etat a rejeté, par décision du 20 mai 2011 susvisée, le pourvoi en cassation formé contre l'arrêt susmentionné ; que les amendes prononcées, ainsi passées en force de chose jugée, ne sont plus susceptibles d'être contestées ;

 

Considérant qu'ainsi les dispositions en question ni ne sont applicables au litige ou à la. procédure, ni ne constituent le fondement de poursuites concernant l'appelant ; que dès lors, sans qu'il soit besoin de vérifier si les autres conditions de transmission sont ou non satisfaites, il convient de constater qu'il n'y a pas lieu de transmettre la question au Conseil d'Etat;

 

Par ces motifs,

 

ORDONNE:

 

Article unique : Il n'y a pas lieu à transmettre au Conseil d'Etat la question posée par M. A….

 

 

 

 

Fait et jugé à la Cour des comptes, quatrième chambre, première section, le huit décembre deux mil onze. Présents : M. Bayle, président, M. Cazanave, président de section, MM. Thérond, Vermeulen, Mme Démier et M. Senhaji, conseillers maîtres..

 

 

Signé : Bayle, président, et Férez, greffier.

 

 

Collationné, certifié conforme à la minute étant au greffe de la Cour des comptes et délivré par moi, secrétaire général.

 

 

 

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