Tribunal de commerce de Toulouse

Ordonnance du 8 décembre 2011 n° 1134200053/1

08/12/2011

Renvoi

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Rôle n° 2011R321

TRIBUNAL DE COMMERCE DE TOULOUSE

ORDONNANCE DU 08/12/2011

La Juridiction des référés a été saisie de la présente question prioritaire de constitutionnalité par un mémoire en date du 15.09.2011.

La cause a été entendue à l'audience des référés du 24 novembre 2011 à laquelle siégeait : - Madame Michèle RAYMONDIS, président,

assistée de : - Madame Anick FABRE, greffier,

après quoi le président en a délibéré pour rendre ce jour, par mise à disposition au greffe, la présente décision,

ENTRE

- EURL [A B]

[adresse 1]

[LOCALITE 2]

DEMANDEUR - représentée par Maître François DANGLEHANT -, Avocat au barreau de la [LOCALITE 3]

ET

- SAS EURELOC

[adresse 4]

[LOCALITE 5]

DEÉFENDEUR - représentée par Maitre Jacques LAVERGNE -, Avocat au barreau de Toulouse

LES FAITS et LA PROCEDURE :

L'EURL [B] a conclu avec la SAS EURELOC un contrat portant sur l'acquisition d'une pelle YANMAR -MARTEAU BRH- NACELLE MANITOU pour une durée de 36 mois à compter du 1er juillet 2007.

L'EURL [B] a fait l’objet d'une procédure collective en cours d'exécution dudit contrat, ce dernier a été poursuivi conformément aux dispositions de l’article L.622-13 du Code de commerce.

Dans le cadre d'échéances impayées, la SAS EURELOC a saisi le juge des référés par acte en date du 8 août 2011 dans le but d'obtenir une ordonnance faisant injonction à l'EURL [A B] de restituer le matériel.

L'EURL [B] a déposé ses conclusions en défense, et in limine litis, par acte séparé, la présente Question Prioritaire de Constitutionnalité :

L'EURL [B] demande au Tribunal de commerce de : à titre liminaire

- Constater que la jurisprudence constitutionnelle pose le principe qu'un citoyen peut exercer la fonction juridictionnelle à titre occasionnel à condition d'être placé par une loi organique sous un statut équivalent à celui des magistrats professionnels, statut permettant de garantir l'indépendance, l'impartialité et la compétence professionnelle,

- Constater que les articles qui définissent le statut de juges consulaires sont argués non conforme à la Constitution,

- Constater que cette question prioritaire de constitutionnalité est une question préjudicielle sérieuse qui conditionne l'examen de la validité de la procédure ;

- Dire et juger recevable cette question prioritaire de constitutionnalité,

- Prononcer le sursis à statuer sur la demande,

Poser la question suivante au Conseil constitutionnel :

« les articles L 722-6 à L 722-16, L.723-1 à L 723-14, L 724-1 à L 724-6 du Code de commerce sont-ils conformes à la Constitution pris sous l'angle des principes d'indépendance, d'impartialité et de compétences professionnelles. »

à titre prioritaire

l'EURL [B] demande à la Cour de cassation de :

- Constater que la question prioritaire de constitutionnalité est une question préjudicielle sérieuse qui conditionne l'examen de la procédure,

- ordonner la transmission au Conseil constitutionnel de cette question prioritaire de constitutionnalité,

sur le fond

lEURL [B] demande au Conseil constitutionnel de :

- Déclarer dire et juger que les articles L 722-6 à L 722-16 ;L 723-1 à L 723-14 et L 724-1 à L 724-6 du Code de commerce ne sont pas conformes à la Constitution pris sous l'angle des principes d'indépendance, d'impartialité et de compétences professionnelles.

C'est dans ce contexte que l'affaire est venue à l'audience du 15 septembre 2011 et a fait l’objet d'un renvoi au 24 novembre 2011 dans l'attente de sa transmission au Ministère Public afin qu’il se prononce sur sa recevabilité et ce conformément aux dispositions de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958. Article 23-1 alinéa2,

Le Ministère Public par réponse en date du 13 octobre 2011 a indiqué qu'il y avait lieu de transmettre la question à la Cour de Cassation.

A l'audience du 24.11.2011 :

L'EURL [A B], par l'intermédiaire de son Conseil, dans de nouvelles écritures indique avoir pris connaissance de la décision n° 2011-114 du 1er avril 2011 qui déclarent conformes à la Constitution les dispositions de l’article L723-2 dans son premier et troisième alinéa et L724-7 du Code de commerce, dispositions relatives à l'élection et aux conditions d'éligibilité des juges consulaires, à ce titre retire sa demande portant sur les articles L.723-1 à L. 723- 14 du Code de Commerce.

LA SAS EURELOC, en réponse à la question prioritaire de constitutionnalité, demande :

Vu l’article 23-2 et l’article 23-3 de l'Ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958,

- Constater que les conditions requises par l'article 23-2 de l'Ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ne sont pas réunies en ce que les dispositions législatives contestées ont été déclarées conformes à la Constitution selon décision en date du 1° avril 2011.

En conséquence,

à titre principal,

- Rejeter la demande de transmission à la Cour de cassation de la question prioritaire de constitutionnalité développée par la SARL [A B],

Subsidiairement, en cas de transmission de la question prioritaire de constitutionnalité

- Constater que le sursis à statuer risquerait d'entrainer des conséquences irrémédiables et manifestement excessives pour les droits dé la SAS EURELOC

En conséquence,

Le Tribunal de commerce sera en mesure de statuer sur les points suivants :

- Ordonner là consignation de la somme de 74 293.13 euros correspondant à la valeur d'achat du matériel afin de préserver les droits de la SAS EURELOC.

SUR CE :

Attendu que le moyen tiré de l'atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution a été présenté le 15 septembre 2011 par l'EURL [A B] dans un écrit distinct des conclusions et motivé et qu'il est donc recevable ;

Attendu que par décision du 1er avril 2011 N° 2011-114, le Conseil constitutionnel a déclaré conforme à la Constitution les 1er et 3ème alinéas de l’article L.723-2 et l'article L.724-7 du Code de commerce ;

que pour le surplus, les dispositions contestées sont applicables au litige puisqu'elles sont relatives au statut de magistrats consulaires saisis de l'instance ;

que les dispositions contestées n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel ;

qu'en outre, elles ne sont pas dépourvus de caractère sérieux en ce qu'elles concernent le statut des magistrats composant la juridiction en charge du litige ;

attendu qu'il convient par suite de transmettre sans délai la question prioritaire de constitutionnalité à la Cour de Cassation et de surseoir à statuer sur les demandes des parties ;

attendu que les dépens seront réservés.

Statuant par décision exécutoire de plein droit, par ordonnance contradictoire et en dernier ressort, après en avoir délibéré,

Vu l'article 23.1 de l'ordonnance n°58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil Constitutionnel.

Vu les articles 126.1 et suivants du Code de Procédure Civile.

Ordonne la transmission à la Cour de Cassation de la question prioritaire de constitutionnalité portant sur les dispositions des articles L722.6 à L722.16, L724,1 à L724.6 du Code de Commerce, pris sous l'angle des principes d'indépendance, d'impartialité et de compétences professionnelles.

Dit que la présente décision sera adressée à la Cour de Cassation dans un délai de 8 jours avec les mémoires des parties relatifs à la question prioritaire de constitutionnalité.

Dit que le greffe avisera sans délai les parties et le ministère public de la présente décision en y joignant l'avis aux parties prévu à l'article 126.7 du Code de Procédure Civile.

Sursoit à statuer sur les demandes des parties.

Réserve les dépens.

Suivent les signatures :

- Michèle RAYMONDIS, Président

- Anick FABRE, Greffier