Tribunal de grande instance de Draguignan

Jugement du 11 février 2011 n° 11/01253

11/02/2011

Renvoi

EXTRAIT DES MINUTES DU GREFFE DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE DRAGUIGNAN (VAR)

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE DRAGUIGNAN

Chambre 2 - JAF Cabinet C

DU 11 fevrier 2011

Dossier 11/01253

AFFAIRE :

[A-B C] C/ [G, H, D E] épouse [C]

JUGEMENT DU 11 FEVRIER 2011

TRANSMISSION. DE LA QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITÉ

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

PRÉSIDENT : Madame Christine LORENZINI, Vice-président,

GREFFIER : Madame Suzanne PELOUX, Greffier

DÉBATS :

À l’audience non publique du 21 janvier 2011 mis en délibéré au 11 février 2011

JUGEMENT :

Prononcé publiquement, par décision contradictoire et insusceptible de recours par Madame Christine LORENZINI

NOM DES PARTIES :

DEMANDEUR À LA QUESTION PRIORITAIRE:

Monsieur [A-B C]

né le [DateNaissance 1] 1962 à [LOCALITE 2] ([...])

[LOCALITE 3]

[adresse 4]

[LOCALITE 5]

représenté par Me Muriel GESTAS, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

D'UNE PART ;

DEFENDERESSE :

Madame [G, H, D E] épouse [C]

née le [DateNaissance 6] 1965 à [LOCALITE 7] ([...])

[LOCALITE 8]

[adresse 9]

[LOCALITE 10]

représentée par Me Isabelle CALDERART, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

D'AUTRE PART ;

En application de l'article 61-1 de la Constitution, lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question

Sur renvoi du Conseil d'Etat ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé.

En application de l'article 23-1 de l'ordonnance n°58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, devant les juridictions relevant du Conseil d'Etat ou de la Cour de cassation, le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution est, à peine d'irrecevabilité, présenté dans un n écrit distinct et motivé.

En l'espèce, Monsieur [C] prétend que les dispositions de l’article 274-2° du Code Civil porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, en ce qu'elles portent atteinte au droit de propriété .

Madame [E] épouse [C] n'a pas conclu sur la question.

La présente affaire a été communiquée au ministère public le 7 janvier 2011, qui a fait connaître son avis le 10 janvier 2011, régulièrement communiqué aux deux parties en présence. Le ministère public soutient que la question posée répond aux conditions légales et requiert la transmission à la Cour de Cassation de la question suivante :

" L'article 274-2° porte-il atteinte aux droits et libertés garantis par l’article 17 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen ?

L'affaire a été évoquée à l'audience de Mise en Etat du 21 janvier 2011, Monsieur [C] maintenant sa demande, Madame [E] ne comparaissant pas à l'audience.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur le moyen tiré de l’atteinte portée aux droits et libertés garantis par la Constitution par [disposition législative]

Sur la recevabilité du moyen tiré de l'atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution:

Le moyen tiré de l'atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution a été présenté le 20 octobre 2010 dans un écrit distinct des conclusions de Monsieur [C] sur le fond, et motivé. Il est donc recevable.

Sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité à la Cour de cassation:

L'article 23-2 de l'ordonnance précitée dispose que la juridiction transmet sans délai la question prioritaire de constitutionnalité à la Cour de cassation si les conditions suivantes sont remplies:

1° La disposition contestée est applicable au litige ou à la procédure, ou constitue le fondement des poursuites ;

2° Elle n’a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances ;

3° La question n'est pas dépourvue de caractère sérieux.

La disposition contestée est applicable au litige ou à la procédure, puisqu'elle est relative à la demande présentée par son épouse d'attribution à titre de prestation compensatoire de la propriété des droits du mari sur un bien immobilier dépendant de la communauté existant entre les époux.

Au jour de la présente décision, elle n’a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.

En outre, elle n'est pas dépourvue de caractère sérieux, en ce que le droit à prestation compensatoire n'a pas Valeur constitutionnelle, ne relève pas d'une nécessité publique et n'octroie aucune indemnisation au conjoint dépossédé.

Il y a donc lieu de transmettre à la Cour de cassation la question suivante:

Les dispositions de l’article 274-2° portent-t-elle atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution et, notamment à l'article 17 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen en ce qu'elles permettent au Juge d'attribuer de manière forcée un bien, propriété d'un débiteur condamné à payer une prestation compensatoire .

Sur les autres demandes des parties et les dépens:

En application des dispositions de l’article 23-3 de l'ordonnance n°58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, lorsqu'une question est transmise, la juridiction sursoit à statuer jusqu'à réception de la décision de la Cour de cassation ou, s’il a été saisi, du Conseil constitutionnel.

Le cours de l'instruction n'est pas suspendu et la juridiction peut prendre les mesures provisoires ou conservatoires nécessaires. En outre, lorsque le sursis à statuer risquerait d'entraîner des conséquences irrémédiables ou manifestement excessives pour les droits d'une partie, la juridiction qui décide de transmettre la question peut statuer sur les points qui doivent être immédiatement tranchés.

En l'espèce, aucun élément ne rend nécessaire que soient ordonnées des mesures provisoires où conservatoires, ni que des points du litige soient immédiatement tranchés.

Il sera donc sursis à statuer sur l'ensemble des demandes des parties, et les dépens seront réservés.

PAR CES MOTIFS:

Le Juge aux Affaires Familiales, statuant publiquement, par jugement contradictoire, insusceptible de recours indépendamment du jugement sur le fond,

ORDONNE la transmission à la Cour de cassation de la question suivante:

Les dispositions de l’article 274-2° portent-t-elle atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution et, notamment à l'article 17 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen en ce qu'elles permettent au Juge d'attribuer de manière forcée un bien, propriété d'un débiteur condamné à payer une prestation compensatoire ?

DIT que le présent jugement sera adressé à la Cour de cassation dans les huit jours de son prononcé avec les mémoires ou conclusions des parties relatifs à la question prioritaire de constitutionnalité :

DIT que les parties et le ministère public seront avisés par tout moyen de la présente décision:

SURSOIT à statuer sur les demandes des parties ;

DIT que l'affaire sera rappelée à la mise en état du 27 octobre 2011 si la question prioritaire de constitutionnalité est transmise au Conseil constitutionnel, ou à la mise en état du 23 juin 2011 dans le cas contraire:

RÉSERVE les dépens ;

AINSI JUGE ET PRONONCE AU PALAIS DE JUSTICE DE DRAGUIGNAN LE 11 FEVRIER DEUX MIL ONZE.

LE GREFFIER LE JUGE AUX AFFAIRES FAMILIALES