Cour administrative d'appel de Lyon

Ordonnance du 17 janvier 2011 N° 10LY02704

17/01/2011

Renvoi

COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL

DE LYON

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE,

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS,

 

 

N° 10LY02704

 

ASSOCIATION VIVRAVIRY

 

 

LE PRÉSIDENT DE LA 1ère CHAMBRE

DE LA COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL DE LYON

 

 

Vu, enregistrée au greffe de la Cour le 8 décembre 2010, le mémoire distinct et motivé par lequel l’ASSOCIATION VIVRAVIRY demande à la Cour de transmettre au Conseil d’Etat en application de l’article 2 de la loi organique n° 2009-1523 du 10 décembre 2009 l’examen de la question de la constitutionnalité des dispositions de l’article L. 600-1-1 du code de l’urbanisme qui dispose qu’une association n’est recevable à agir contre une décision relative à l’occupation ou à l’utilisation des sols que si le dépôt des statuts de l’association en préfecture est intervenu antérieurement à l’affichage en mairie de la demande du pétitionnaire ;

 

L’ASSOCIATION VIVRAVIRY soutient que l’article L. 600-1-1 du code de l’urbanisme qui subordonne la recevabilité du recours d’une association à l’encontre d’une décision relative à l’occupation ou à l’utilisation du sol au fait que le dépôt en préfecture de ses statuts soit intervenu avant l’affichage en mairie de la demande d’autorisation d’occupation ou d’utilisation du sol porte atteinte au droit des associations d’agir en justice et, par voie de conséquence, à la liberté d’association ; qu’une association n’a vocation à se protéger des effets d’une décision susceptible de léser son objet social qu’après que cette menace s’est manifestée ; que le législateur, en édictant l’article L. 600-1-1 du code de l’urbanisme a supprimé tout droit d’ester en justice des associations créées pour contester un projet d’urbanisation donné ; que le droit d’agir en justice est garanti par la constitution ; que l’article L. 600-1-1 du code de l’urbanisme porte atteinte au principe d’égalité devant la justice entre personnes morales et personnes physiques qui découle du principe d’égalité devant la loi proclamé par la déclaration des droits de l’homme et des citoyens de 1789 et réaffirmé par ce préambule de la constitution ;

 

Vu, enregistré comme ci-dessus le 24 décembre 2010, le mémoire en défense présenté pour la commune de Viry qui conclut au rejet de la demande de transmission de la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par l’ASSOCIATION VIVRAVIRY au motif que celle-ci ne présente pas un caractère sérieux ; que la création relève d’un choix effectué dans le cadre d’un environnement juridique donné ; que la création d’une association n’est pas obligatoire pour former un recours à l’encontre d’un acte administratif ; qu’une association même concernée par l’article L. 600-1-1 du code de l’urbanisme peut saisir la juridiction civile en application de l’article L. 480-13 du code de l’urbanisme ; que le conseil constitutionnel, comme l’article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales admettent parfaitement des limitations du droit au recours si elles sont proportionnées aux objectifs légitimes qui ont été poursuivis ; qu’en l’espèce c’est le principe de sécurité juridique qui a été poursuivi ; que la loi n’interdit pas les recours individuels ; qu’elle n’e porte pas atteinte à la liberté d’association ; que l’atteinte au principe d’égalité devant la justice, et, a fortiori son caractère excessif, ne sont pas démontrés ; que les personnes morales et les personnes physiques ne sont pas dans la même situation ;

 

Vu, enregistré comme ci-dessus le 24 décembre 2010, le mémoire en défense présenté pour la SCI CIRI-VIRY qui conclut au rejet de la demande de transmission de la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par l’ASSOCIATION VIVRAVIRY au motif qu’elle ne présente pas un caractère sérieux ; qu’elle ne porte pas atteinte au droit d’agir en justice ni à la liberté d’association ; que les dispositions de l’article L. 600-1-1 du code de l’urbanisme n’instituent pas une irrecevabilité perpétuelle mais ne s’appliquent qu’à l’égard des demandes d’autorisation affichées antérieurement au dépôt de leurs statuts en préfecture ; qu’il n’y a pas d’atteinte à l’égalité devant la justice ; que la distinction en fonction de la date de constitution de l’association procède d’un impératif de sécurité juridique ;

 

Vu, enregistré comme ci-dessus le 10 janvier 2011, le mémoire en réplique présenté pour l’ASSOCIATION VIVRAVIRY tendant aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes moyens ;

 

Vu les autres pièces du dossier ;

 

Vu la Constitution, notamment son préambule et son article 61-1 ;

 

Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment ses articles 23-1 à 23-3 ;

 

Vu le décret n° 2010-148 du 16 février 2010 portant application de la loi organique n° 2009-1523 du 10 décembre 2009 relative à l’application de l’article 61-1 de la Constitution ;

 

Vu le jugement n° 0800253 du Tribunal administratif de Grenoble du 30 septembre 2010 ;

 

Vu le code de justice administrative, notamment son article R. 771-7 ;

 

Considérant, en premier lieu, qu’aux termes de l’article 61-1 de la Constitution : « Lorsque à l’occasion d’une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d’Etat ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé » ;

 

Considérant, en deuxième lieu, qu’aux termes de l’article 23-2 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : « La juridiction statue sans délai par une décision motivée sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d’Etat ou à la Cour de cassation. Il est procédé à cette transmission si les conditions suivantes sont remplies : /1° La disposition contestée est applicable au litige ou à la procédure ou constitue le fondement des poursuites ; 2° Elle n’a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances ; 3° La question n’est pas dépourvue de caractère sérieux » ;

 

Considérant, en troisième lieu, qu’aux termes de l’article R. 771-7 du code de justice administrative : « Les présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel, le vice-président du tribunal administratif de Paris, les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours ou les magistrats désignés à cet effet par le chef de juridiction peuvent, par ordonnance, statuer sur la transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité » ;

 

Considérant que les dispositions de l’article L. 600-1-1 constituent le fondement du jugement attaqué et sont applicables pour régler au fond la requête présentée le 7 décembre 2010 pour l’ASSOCIATION VIVRAVIRY ; qu’en l’état des informations dont dispose la Cour, il n’apparaît pas que le Conseil constitutionnel se soit prononcé sur leur conformité à la constitution ou que cette question soit pendante devant lui ; que le moyen tiré de le restriction du droit d’agir en justice des associations, et par voie de conséquence, l’atteinte à la liberté qui leur est garantie, par le biais d’une amputation à leur capacité juridique ainsi que la méconnaissance par le législateur du principe d’égalité devant la justice entre personnes morales et personnes physiques présentent un caractère sérieux ; qu’ainsi, il y a lieu de transmettre au Conseil d’Etat la question prioritaire de constitutionnalité susanalysée ;

 

 

ORDONNE :

 

Article 1er : La question prioritaire de constitutionnalité afférente aux dispositions de l’article L. 600-1-1 du code de l’urbanisme est transmise au Conseil d’Etat.

 

Article 2 : Il est sursis à statuer sur la requête n° 10LY02704 jusqu’à ce qu’il ait été statué par le Conseil d’Etat et par le Conseil constitutionnel sur la question de constitutionnalité ci-dessus analysée.

 

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à l’ASSOCIATION VIVRAVIRY, à la commune de Viry, à la société CIRI-VIRY et au Président de la section du contentieux du Conseil d’Etat.

 

Fait à Lyon, le 17 janvier 2011

 

Le Président de la 1ère chambre,

 

 

 

Alain BÉZARD

 

 

La République mande au ministre de l’écologie, du développement durable des transports et du logement, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente ordonnance.

 

Pour expédition,

Le greffier,

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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N 10LY02704

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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