Tribunal de grande instance de Laval

Ordonnance du 7 septembre 2010 N° 10/00827

07/09/2010

Renvoi

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE

Service civil

13 place Saint Tugal

53015 - Laval cedex

02.43.49.57.00

Affaire Sté LAVAL DISTRIBUTION

C/ SYNDICAT DEPARTEMENTAL POUR L’ELECTRICITE ET LE GAZ

N° dos : 10/00827

Nature de l'affaire : 59B

REPUBLIQUE FRANCAISE

Au nom du Peuple Francais

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE LAVAL

ORDONNANCE DU 07 Septembre 2010

Nous, Clotilde RIBET, Vice-Président du Tribunal de Grande Instance de LAVAL, chargée de la mise en état, assistée de Gisèle GENDRY, greffier, prononçons l'ordonnance suivante après avoir entendu les parties à l'audience de la mise en état du 15 juin 2010

Entre :

Société LAVAL DISTRIBUTION

[adresse 1]

[LOCALITE 2]

représentée par la SCP DESBOIS-BOULIOU, avocats au barreau de LAVAL, postulants et par Me Robert ALBERTI, avocat au Barreau de PARTS, plaidant,

Et :

SYNDICAT DEPARTEMENTAL POUR L'ELECTRICITE ET LE GAZ

[LOCALITE 3]

[adresse 4]

[LOCALITE 5]

représentée par la SCP “AA&C”, avocats au barreau de LAVAL, (Me Karine COCHARD)

.*.*.*.*.*.*.*.*.*.*.*.

EXPOSE DU LITIGE,

Par acte du 3 juillet 2008, la société par actions simplifiée (SAS) Laval distribution a assigné le syndicat départemental pour l'électricité et le gaz de la [LOCALITE 6] devant fe tribunal e grande instance de Laval afin notamment de :

- déclarer mal fondée la décision du Président de ce syndicat en date du 27 mai 2008 qui lui a refusé de lui accorder un dégrèvement de 10.171 euros,

- prononcer la décharge des impositions litigieuses,

- annuler les titres exécutoires décernés par ce syndicat,

- ordonner le remboursement des taxes acquittées avec intérêts au taux légal à compter du jour de leur paiement,

- le condamner à lui payer la somme de 3.600 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Au cours de cette instance, la SAS LAVAL distribution soutient qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, Le Conseil constitutionnel peut être saisi.de cette question sur renvoi du Conseil d'Etat ou de la Cour de Cassation qui se prononce dans un délai déterminé.

En application de l’article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, devant les juridictions relevant du Conseil d'Etat ou de la Cour de cassation, le moyen tiré de ce qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution est, à peine d'irrecevabilité, présenté dans un écrit distinct et motivé.

En l'espèce, la SAS Laval Distribution prétend que l’article L 2333-5 du Code général des collectivités territoriales porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, en ce que cet article crée une rupture du principe d'égalité devant l'impôt.

En réplique, le Syndicat départemental pour l'électricité et le gaz de la Mayenne s’en rapporte à justice quant à la saisine du Conseil constitutionnel.

La présente affaire a été communiquée au ministère public le 20 mai 2010 qui a fait connaître son avis le 9 juin 2010. Le ministère public soutient que la question prioritaire de constitutionnalité soulevée présente un caractère sérieux puisque parmi les usagers d'électricité disposant d'une puissance supérieure à 250 kVA, seuls sont taxés ceux qui ont souscrit une convention avec les collectivités bénéficiaires de la taxe avant le 5 décembre 1984.

DISCUSSION,

Sur le moyen tiré de l’atteinte portée aux droits et libertés par la Constitution :

Le moyen tiré de l'atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution a été présenté le 15 mars 2010 dans un écrit distinct des conclusions de la SAS Laval Distribution, et motivé. Il est donc recevable.

Sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité à la Cour de cassation :

L'article 23-2 de l'ordonnance précitée dispose que la juridiction transmet sans délai la question prioritaire de constitutionnalité à la Cour de cassation si les conditions suivantes sont remplies :

1°) La disposition contestée est applicable au litige ou à la procédure, ou constitue le fondement des poursuites ;

2°) Elle n’a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances ;

3°) La question n'est pas dépourvue de caractère sérieux.

La disposition contestée est applicable au litige ou à la procédure, puisqu'elle est relative à la taxation par les collectivités territoriales des usagers d'électricité disposant d’une puissance supérieure à 250 kVa ce qui est le cas de la SAS Laval distribution. Elle n’a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel. En outre, elle n’est pas dépourvue de caractère sérieux, en ce que le litige dont est saisi le Tribunal de Grande Instance porte sur le remboursement des taxes acquittées sur le fondement de l’article L2333-5 du Code général des collectivités territoriales depuis 1985.

Il y a donc lieu de transmettre à la Cour de cassation la question suivante :

L'article L2333-5 du Code général des collectivités territoriales porte t-il atteinte aux droits et libertés garantis par l’article 13 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

Sur les autres demandes des parties et les dépens,

En application des dispositions de l’article 23-3 de l'ordonnance n" 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, lorsqu'une question est transmise, la juridiction sursoit à statuer jusqu'à réception de la décision de la Cour de cassation ou, s’il a été saisi, du Conseil constitutionnel.

Le cours de l'instruction n’est pas suspendu et la juridiction peut prendre les mesures provisoires ou conservatoires nécessaires. En outre, lorsque le sursis à statuer risquerait d'entraîner des conséquences irrémédiables ou manifestement excessives pour les droits d’une partie, la juridiction qui décide de transmettre la question peut statuer sur les points qui doivent être immédiatement tranchés,

En l'espèce, aucun élément ne rend nécessaire que soient ordonnées des mesures provisoires ou conservatoires, ni que des points du litige soient immédiatement tranchés.

Il sera donc sursis à statuer sur l’ensemble des demandes des parties, et les dépens seront réservés.

PAR CES MOTIFS,

Statuant par décision contradictoire, insusceptible de : recours indépendamment du jugement sur le fond,

Ordonnons la transmission à la Cour de cassation de la question suivante :

L'article L2333-5 du Code général des collectivités territoriales. porte t-il atteinte aux droits et libertés garantis par la constitution, notamment l'article 13 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 consacrant le principe d égalité devant les charges publiques.

Disons que la présente ordonnance sera adressée à la Cour de Cassation dans les huit jours de son prononcé avec les mémoires ou conclusions des parties relatifs à la question prioritaire de constitutionnalité ;

Disons que les parties et le ministère public seront avisés par tout moyen de la présente décision ;

Sursoyons à statuer sur les demandes des parties ;

Disons que l'affaire sera rappelée à à une audience de mise en état qui sera fixée à notre diligence dès réception de la décision relative à la question prioritaire de constitutionnalité.

Réservons les dépens

LE JUGE DE LA MISE EN ETAT

LE GREFFIER