Tribunal de grande instance de Toulon

Jugement du 5 mai 2010 n° 1473/10

05/05/2010

Renvoi

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de TOULON

CONTRADICTOIRE

JUGEMENT CORRECTIONNEL DU : 05 MAI 2010

N° de Jugement : C 1473/10 (DL)

N° de Parquet : 0921898

A l'audience publique du TRIBUNAL CORRECTIONNEL, au Palais de Justice de TOULON le CINQ MAI DEUX MILLE DIX

composé de Madame Camille BERTHET, Juge désigné comme Juge Unique, conformément aux dispositions de l’article 398 alinéa 3 du Code de procédure pénale,

assisté de Madame Martine TAMBON, Greffier,

en présence de Madame Sylvie MARCHELLI,Substitut du Procureur de la République a été appelée l'affaire :

ENTRE :

Monsieur le PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE, près ce Tribunal, demandeur et poursuivant,

ET :

NOM : [A B]

DATE DE NAISSANCE : [DateNaissance 1] 1963

LIEU DE NAISSANCE : [LOCALITE 2]

FILIATION : de [A C] et de [D E]

NATIONALITÉ : FRANCAISE

ADRESSE : [LOCALITE 3]

VILLE : [LOCALITE 4]

SITUATION FAMILIALE : divorcé

PROFESSION : Electricien

Déjà condamné, libre

Comparant et assisté de Maître Pierric MATHIEU, avocat au barreau de TOULON

Prévenu de :

RÉCIDIVE DE CONDUITE D’UN VEHICULE EN ETAT D’IVRESSE MANIFESTE EN RECIDIVE

REFUS, PAR LE CONDUCTEUR D'UN VEHICULE, DE SE SOUMETTRE AUX VERIFICATIONS TENDANT A ETABLIR L'ETAT ALCOOLIQUE

À l’appel de la cause, le Président a constaté l’identité du prévenu et a donné connaissance de l’acte saisissant le Tribunal ;

Maître MATHIEU soulève une question prioritaire de constitutionnalité et dépose à l’appui de sa demande des conclusions de nullité et des conclusions aux fins de transmission de question prioritaire de constitutionnalité dûment visées à l’audience de ce jour ;

Le Ministère Public entendu en ses observations écarte les conclusions et dit s’opposer à la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité à la Cour de Cassation ;

Le Greffier a tenu note ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi, le Tribunal a statué en ces termes ;

LE TRIBUNAL

Attendu qu’a été notifiée par Officier de Police Judiciaire à [LOCALITE 5] à [A B] par procès-verbal en date du 19 octobre 2009 sur instructions de Monsieur le Procureur de la République et dans les délais prévus par l’article 552 du Code de Procédure Pénale, une convocation à l’audience de ce jour ; que conformément à l’article 390-1 du Code de

Procédure Pénale, cette convocation vaut citation à personne ;

Attendu que le prévenu a comparu ;

Qu'il y a lieu de statuer contradictoirement ;

Attendu que [A B] est prévenu :

d’avoir à [LOCALITE 6] 83210, le 18/10/2009, en tout cas sur le territoire national et depuis temps n’emportant pas prescription, conduit un véhicule en état d’ivresse manifeste,

et ce, en état de récidive légale, pour avoir été condamné le 1 juin 2005 par le Tribunal de Grande Instance de TOULON pour des faits assimilés.

faits prévus par ART. L. 234-1 SIL §V C. ROUTE et réprimés par ART. L. 234-1 II, §I, ART. L. 234-2 §I, ART. L. 224-12, ART. L. 234-12 §I, ART. L. 234-13 C. ROUTE, ART. 132-10 C. PENALART.132-8 à 132-16 du C. PENAL,

d’avoir à [LOCALITE 7], le 18/10/2009, en tout cas sur le territoire national et depuis temps n’emportant pas prescription, étant conducteur d’un véhicule, refusé de se soumettre aux vérifications médicales, cliniques et biologiques destinées à établir la preuve de l’état alcoolique par éthylomètre.

faits prévus par ART. L. 234-8 §I, ART. L. 234-4, ART. L. 234-6, ART. L. 234-9 C. ROUTE et réprimés par ART. L. 234-8, ART. L. 224-12 C. ROUTE

Attendu que cette affaire n’est pas en état d’être jugée à l’audience de ce Jour ;

Sur la question prioritaire de constitutionnalité :

Attendu que le conseil de [B A] a déposé in limine litis des conclusions écrites et motivées aux fins de question prioritaire de constitutionnalité ; qu'il souhaite en effet voir poser à la Cour de cassation la question de la constitutionnalité de l'article L. 234-13 du Code de la route, et de sa compatibilité avec, notamment, l'article 8 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen, et avec l'article 7 de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme ;

Attendu que la question posée recouvre les trois critères posés par l'article 61-1 de la Constitution du 4 octobre 1958 ; qu'en effet :

1° la disposition législative contestée est applicable au présent litige, [B A] se voyant reprocher des faits de récidive de conduite en état d'ivresse manifeste, l'article L. 234-13 du Code de la route étant dès lors applicable au cas d'espèce ;

2° La disposition législative critiquée n'a jusque-là pas été soumise à l'appréciation du Conseil constitutionnel ;

3° La question posée présente un caractère sérieux ; qu'en effet, le conseil de [B A] pose la question légitime de savoir si l'article L. 234-13 du code de la route, prévoyant l'annulation de plein droit du permis de conduire lorsque le prévenu est en état de récidive de conduite sous l'empire d'un état alcoolique ou en état d'ivresse manifeste, est compatible avec les dispositions précitées à valeur constitutionnelle, qui pose le principe du caractère strictement nécessaire de la peine, adaptée aux circonstances de l'infraction et à la personnalité de son auteur ;

Attendu qu'il y a dès lors lieu de faire droit aux conclusions aux fins de question prioritaire de constitutionnalité et de transmettre à la Cour de cassation la question suivante :

“L'article L 234-13 du Code de la Route est-il contraire à l’article 8 de la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen, et à l’article 7 de la Déclaration Universelle des droits de l'Homme ?”

SUR L'ACTION PUBLIQUE ET L'ACTION CIVILE :

En l’espèce, aucun élément ne rend nécessaire que soient ordonnées des mesures provisoires ou conservatoire, ni que des points du litige soient immédiatement tranchés.

Il sera donc sursis à statuer sur l’action publique et l’action civile, l'examen de l’affaire étant renvoyé à l’audience du 6 octobre 2010 ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, en premier ressort et par jugement contradictoire, à l’égard de [A B] , non susceptible de recours ;

Avant dire droit,

Ordonne la transmission à la Cour de cassation de la question suivante :

“L'article L 234-13 du Code de la Route est-il contraire à l’article 8 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen, et à l’article 7 de la déclaration universelle des droits de l’homme ?”

Dit que la présente décision sera adressée par le greffe à la Cour de cassation dans les huit jours de son prononcé avec les conclusions relatives à la question prioritaire de constitutionnalité ;

Sursoit à statuer sur les poursuites engagées à l’encontre de [A B] ;

Renvoie l’examen de la présente affaire à l’audience du 06 octobre 2010 à 8 h 30.

Dit que la présente décision n’est pas assujettie à un droit fixe de procédure.

Le tout en application des articles 406 et suivants et 485 du Code de Procédure Pénale et des textes susvisés.

Et le présent jugement a été signé par le Président et le Greffier.

LE PRESIDENT