• Commentaire QPC

Commentaire de la décision 99-413 DC

18/02/2023

- La résolution modifiant l'article 73 bis du règlement du Sénat dont était saisi le Conseil constitutionnel avait pour premier objet de tirer les conséquences de l'élargissement des compétences reconnues au Parlement par la nouvelle rédaction de l'article 88-4 de la Constitution, à la suite de la révision constitutionnelle du 25 janvier 1999.

En effet, sont désormais transmis au Parlement les projets et les propositions de l'Union européenne comportant des dispositions de nature législative. Ainsi, sont soumis aux assemblées des textes relevant du deuxième pilier - politique étrangère et de sécurité commune - et surtout du troisième pilier, - refondu par le traité d'Amsterdam - , et qui comporte des matières aussi importantes que la lutte contre le terrorisme, le trafic de drogue, le trafic d'armes, la corruption et la fraude.

De même, s'agissant des autres catégories de projets - propositions d'actes à caractère réglementaire; documents qui ne portent ni sur des actes communautaires ni sur des actes de l'Union - (documents de consultation de la commission, accords interinstitutionnels) , exclus jusqu'alors de la saisine du Parlement puisque la rédaction de l'article 88-4 ne visait que les actes transmis au Conseil de l'Union européenne, le Constituant a fait le choix d'un mécanisme facultatif.

La deuxième phrase de l'article 88-4, dans sa rédaction issue de la révision du 25 janvier 1999, dispose ainsi que le Gouvernement " peut également leur soumettre les autres projets ou propositions d'actes ainsi que tout document émanant d'une institution de l'Union européenne ".

La rédaction de l'article 73 bis est donc harmonisée, sur un plan formel, avec les nouvelles règles constitutionnelles. Si la Délégation pour l'Union européenne constate que le Gouvernement n'a pas déposé un texte - et non plus seulement une proposition d'acte communautaire - qui lui paraît devoir être soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution, elle en saisit le Président du Sénat qui demande au Gouvernement de soumettre ce texte à cette assemblée. En 1993, le Conseil constitutionnel avait jugé utile d'assortir son approbation de la précédente rédaction de l'article 73 bis d'une réserve pour souligner qu'il ne saurait être question " de créer à l'égard du Gouvernement l'obligation de transmettre au Sénat des propositions d'actes communautaires qu'il considérerait ne pas comporter de dispositions de nature législative ". À cet égard, les demandes des assemblées ne constituent que des voeux et non des injonctions.

Dans la présente décision, le Conseil constitutionnel a réitéré cette réserve, d'autre plus justifiée dans le cas présent que la nouvelle rédaction englobe des projets ou des documents que le Gouvernement peut discrétionnairement soumettre aux assemblées. Or, la formulation retenue par le Sénat était pour le moins ambiguë et susceptible de laisser penser que le Sénat aurait pu exiger la transmission de textes que le Gouvernement a la simple faculté et non l'obligation de lui soumettre.

- Le second objet de la résolution du Sénat, qui ne soulevait pas de difficulté constitutionnelle particulière, était de profiter de l'occasion pour rationaliser la procédure, jusqu'à présent lourde et complexe, d'adoption de résolutions sur les projets d'actes communautaires.

À cet effet, la seconde réunion de la commission compétente a été supprimée, les délais d'inscription d'une résolution à l'ordre du jour ont été réduits, tandis que la Délégation pour l'Union européenne - qui aurait, semble-t-il, souhaité disposer d'une compétence identique à celle des commissions - s'est vu finalement reconnaître une mission générale d'instruction des textes européens que, dans la pratique, elle exerçait déjà.

Enfin, le droit d'amendement du Gouvernement sur les propositions de résolution a été également supprimé, sans que cela pose une quelconque difficulté constitutionnelle puisqu'il trouvait sa source non dans la Constitution, mais dans une disposition du règlement du Sénat. Il n'a d'ailleurs pas été prévu par le règlement de l'Assemblée nationale sans que le Conseil constitutionnel s'en soit ému dans sa décision n° 92-314 DC du 17 décembre 1992.