Conformité - réserve
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 19 février 2024 par la Cour de cassation (chambre criminelle, arrêt n° 310 du 13 février 2024) d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) posée par Mme Juliette P. portant sur la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du second alinéa de l’article 397–6 du code de procédure pénale (CPP), dans sa rédaction résultant de la loi n° 2021–1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République, et de l’article 65–3 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, dans sa rédaction résultant de la même loi.
Dans sa décision n° 2024–1088 QPC du 17 mai 2024, le Conseil constitutionnel a déclaré conformes à la Constitution le second alinéa de l’article 397–6 du CPP, dans cette rédaction, ainsi que, sous une réserve d’interprétation, le renvoi opéré par le second alinéa de l’article 65-3 de la loi du 29 juillet 1881, dans la même rédaction, à la seconde phrase du deuxième alinéa de l’article 65 de ladite loi.
Dans cette affaire, Mmes Jacqueline Gourault et Véronique Malbec ont estimé devoir s’abstenir de siéger. Le Conseil constitutionnel a dûment constaté, conformément à l’article 14 de l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, qu’il devait, en raison d’un cas de force majeure, déroger au quorum prévu par cet article.
I. – Les dispositions renvoyées
A. – Objet des dispositions renvoyées
1. – La spécificité de la procédure applicable en matière d’infractions de presse
* De façon plus large que ce que son seul intitulé pourrait laisser penser, la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse « affirme le principe de la liberté de la communication publique en général »1. Elle définit les infractions dites « de presse » et le régime procédural qui leur est applicable en cherchant à établir un équilibre entre la protection de la liberté d’expression et les conditions de poursuite des infractions qui peuvent résulter de son exercice.
La loi du 29 juillet 1881 réprime ainsi certains abus de la liberté d’expression commis tant « par la voie de la presse » que « par tout autre moyen de publication »2, ce qui recouvre, aux termes de son article 23, tous discours, cris ou menaces proférés dans des lieux ou réunions publics, tous écrits, imprimés, dessins, gravures, peintures, emblèmes, images ou tout autre support de l’écrit, de la parole ou de l’image vendus ou distribués, mis en vente ou exposés dans des lieux ou réunions publics, tous placards ou affiches exposés au regard du public, ainsi que tout moyen de communication au public par voie électronique3.
Ces infractions spéciales, définies aux articles 23 à 41–1 de la loi précitée, sont principalement :
– la provocation à commettre un crime ou un délit, lorsqu’elle a ou non été suivie d’effet, l’apologie et la contestation de certains crimes (articles 23 à 24 bis) ;
– la publication de fausses nouvelles de nature à troubler la paix publique (article 27) ;
– la diffamation et l’injure (articles 29 à 35 quater) ;
– l’outrage commis contre les agents diplomatiques étrangers (article 37) ;
– la publication de certaines informations relatives à une procédure juridictionnelle et l’enregistrement des audiences (articles 38 à 41-1).
* La poursuite et la répression des infractions de presse sont régies par des règles largement dérogatoires au droit commun qui se justifient tant par « la volonté de protéger au moyen d’un rituel judiciaire minutieux la liberté de la presse »4 que par le souci de « permettre au juge répressif de se prononcer rapidement afin de conserver à la sanction un caractère exemplaire en lien direct avec l’infraction commise »5.
La spécificité du contentieux de la presse tient en particulier à :
– la brièveté des délais de prescription de l’action publique et de l’action civile, qui, en application du premier alinéa de l’article 65 de la loi du 29 juillet 1881, sont fixés à trois mois pour les crimes, délits et contraventions relevant de cette loi6. Le délai court « à compter du jour où [les faits] auront été commis ou du jour du dernier acte d’instruction ou de poursuite s’il en a été fait », de sorte que la prescription est acquise non seulement s’il s’est écoulé plus de trois mois entre le premier acte de publication et le premier acte de poursuite, mais également s’il s’est écoulé plus de trois mois entre deux actes de poursuite. Il s’agit, selon la Cour de cassation, d’une « exception péremptoire d’ordre public qui doit être relevée d’office par le juge »7 ;
– l’exigence d’articulation et de qualification des faits incriminés dans les actes introductifs d’instance. Une telle exigence s’impose au ministère public, en cas de réquisitoire aux fins d’ouverture d’une information judiciaire8, comme à la victime, qu’elle agisse par la voie d’une plainte avec constitution de partie civile ou d’une citation directe9. Cette formalité doit être observée à peine de nullité de la poursuite. L’objectif est de permettre à la personne mise en cause de connaître, dès l’introduction de l’instance, la nature des faits qui lui sont reprochés et leur étendue, pour qu’elle soit en mesure de préparer utilement sa défense ;
– l’instauration d’un régime de responsabilité « en cascade » destiné à répondre à la difficulté que peut rencontrer la victime d’une infraction commise par voie de presse pour en identifier l’auteur et fondé sur l’idée que le directeur de la publication a nécessairement donné son aval à cette publication10. L’article 42 de la loi du 29 juillet 1881 place ainsi en première ligne le directeur de la publication ou l’éditeur, qui engagent leur responsabilité de plein droit ; à défaut, viennent ensuite les auteurs, puis les imprimeurs, et enfin les vendeurs, distributeurs et afficheurs. Ce régime de responsabilité a été transposé dans le domaine de la communication électronique par l’article 93–3 de la loi n° 82–652 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle, avec toutefois la possibilité pour le directeur de la publication de s’exonérer de sa responsabilité en rapportant la preuve soit qu’il n’avait pas connaissance du message litigieux avant sa mise en ligne, soit qu’il a agi avec diligence pour le retirer lorsqu’il en a eu connaissance11 ;
– l’exclusion des procédures rapides de jugement. Le premier alinéa de l’article 397–6 du CPP prévoit ainsi que les procédures de convocation par procès–verbal, de comparution immédiate et de comparution différée ne sont pas applicables en matière de délits de presse. L’article 495-16 du même code exclut également le recours à la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité.
2. – Le mouvement de « déspécialisation » de la procédure applicable en matière d’infractions de presse
Les règles dérogatoires prévues par la loi du 29 juillet 1881, protectrices de la liberté d’expression, ont, ces dernières années, été remises en cause dans un certain nombre d’hypothèses12. Ce mouvement de « déspécialisation » de la procédure applicable aux infractions de presse vise à « normaliser la répression des abus de la liberté d’expression, c’est-à-dire à lui faire suivre autant que possible les règles de répression des infractions de droit commun »13.
Cette déspécialisation peut prendre deux formes : soit le législateur fait sortir une infraction de presse du champ d’application de la loi du 29 juillet 1881 pour la faire entrer dans le code pénal et la soumettre ainsi à la procédure pénale de droit commun14 ; soit, de manière moins radicale, il assouplit des règles dérogatoires ou en exclut l’application pour certaines infractions de presse, tout en les maintenant au sein de la loi du 29 juillet 1881. C’est cette seconde voie qu’a récemment suivie le législateur, pour certains délits de presse, en permettant le recours à des procédures rapides de jugement (a.) et en modifiant les règles relatives à la prescription (b.).
a. – L’applicabilité des procédures rapides de jugement à certains délits de presse (les premières dispositions objet de la décision commentée)
* Ainsi qu’il a été dit plus haut, l’article 397–6 du CPP pose, à son premier alinéa, le principe selon lequel les procédures rapides de jugement prévues aux articles 393 à 397-5 du CPP – à savoir la convocation par procès–verbal, la comparution immédiate et la comparution à délai différé – ne sont pas applicables aux délits de presse15. Cette interdiction trouve sa source dans la spécificité de ces infractions et la nécessité d’entourer leur jugement de garanties propres à assurer le respect de la liberté d’expression16.
Cependant, devant la « multiplication sans cesse croissante des appels à la haine sur internet [qui] impose une réponse pénale empreinte de célérité », le législateur a souhaité « faire évoluer le cadre procédural applicable à la poursuite des délits de provocation à la commission d’infractions et à la haine discriminatoire afin d’apporter une réponse rapide aux comportements qui, dans un contexte d’évolutions majeures des outils de communication, portent une atteinte grave à notre capacité à faire société »17.
À cette fin, ajouté par l’article 46 de la loi du 24 août 2021 précitée, le second alinéa de l’article 397–6 du CPP (les premières dispositions objet de la décision commentée) prévoit que, par dérogation à son premier alinéa, les procédures rapides de jugement sont applicables à certains délits réprimés par la loi du 29 juillet 1881.
Le procureur de la République peut ainsi désormais poursuivre selon la procédure de comparution immédiate, de comparution par procès-verbal ou de comparution à délai différé les délits de presse suivants :
– la provocation directe non suivie d’effet à commettre des atteintes volontaires à la vie ou à l’intégrité de la personne, des agressions sexuelles, des vols, extorsions et destructions, ainsi que des dégradations et détériorations volontaires dangereuses pour les personnes (premier à troisième alinéas de l’article 24) ;
– la provocation directe à l’un des crimes et délits portant atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation (quatrième alinéa de l’article 24) ;
– l’apologie des crimes visés au premier alinéa de l’article 24, des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité, des crimes de réduction en esclavage ou d’exploitation d’une personne réduite en esclavage ou des crimes et délits de collaboration avec l’ennemi, y compris si ces crimes n’ont pas donné lieu à la condamnation de leurs auteurs (cinquième alinéa de l’article 24) ;
– la provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée (septième alinéa de l’article 24) ;
– la provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes à raison de leur sexe, de leur orientation sexuelle ou identité de genre ou de leur handicap (huitième alinéa de l’article 24) ;
– la contestation d’un crime contre l’humanité, d’un crime de génocide, d’un crime de réduction en esclavage ou d’exploitation d’une personne réduite en esclavage ou d’un crime de guerre (article 24 bis) ;
– l’injure envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée (troisième alinéa de l’article 33) ;
– l’injure envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur sexe, de leur orientation sexuelle ou identité de genre ou de leur handicap (quatrième alinéa de l’article 33).
Toutes ces infractions exposent leur auteur à une peine d’amende ainsi qu’à une peine d’emprisonnement – dont le maximum encouru est d’un an, dans les cas les moins graves, à cinq ans, pour les faits les plus graves18.
* Toutefois, le second alinéa de l’article 397–6 du CPP exclut expressément le recours aux procédures rapides de jugement lorsque « ces délits résultent du contenu d’un message placé sous le contrôle d’un directeur de la publication en application de l’article 6 de la [loi du 29 juillet 1881] ou de l’article 93–2 de la loi n° 82–652 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle », c’est–à–dire lorsque le régime de responsabilité « en cascade » est susceptible d’être mis en œuvre.
Comme l’avait souligné le Conseil d’État dans son avis sur le projet de loi confortant le respect des principes de la République, « Il en résulte que tout message à caractère public diffusé sur un support dont le contenu est éditorialisé sous le contrôle d’un directeur de publication demeure exclu du cadre procédural rendu applicable aux infractions de presse par le projet. […] / Cette exclusion s’étend également aux directeurs de publication de services de communication au public en ligne, même édités à titre non professionnel ("blog") qui, en application de l’article 93-2 de la loi du 29 juillet 1881 [en réalité, de la loi du 29 juillet 1982], doivent être dotés d’un directeur de la publication. Le "blogueur", cumulant les qualités d’auteur et de directeur de la publication, ne pourra de ce fait être jugé selon les procédures accélérées. / En revanche, l’auteur d’un message rendu public au sein d’un "espace de contributions personnelles" au sens de l’article 93–3 de la loi du 29 juillet 1881 [en réalité, de la loi du 29 juillet 1982], c’est-à-dire sans qu’il y ait eu possibilité de contrôle par le directeur de la publication, ne relevant pas du régime de responsabilité en cascade, il peut être poursuivi suivant les procédures accélérées permises par le projet, qu’il soit détenteur ou non d’une carte de presse. / Il en est de même des internautes postant des commentaires sur un blog, sans le contrôle préalable du titulaire du blog »19.
Ainsi, seuls les propos communiqués au public hors le truchement de l’écrit – c’est-à-dire les « discours, cris ou menaces proférés dans des lieux ou réunions publics » visés par l’article 23 de la loi du 29 juillet 1881 – et les messages adressés « par un internaute à un service de communication au public en ligne et mis par ce service à la disposition du public dans un espace de contributions personnelles identifié comme tel », visés par le dernier alinéa de l’article 93-3 de la loi du 29 juillet 1982, peuvent donner lieu à des poursuites selon l’une des procédures rapides de jugement prévues aux articles 393 à 397-5 du CPP.
b. – La modification des règles relatives à la prescription de l’action publique et aux réquisitions aux fins d’enquête (les secondes dispositions objet de la décision commentée)
* Conformément à l’article 65 de la loi du 29 juillet 1881, l’action publique et l’action civile résultant des infractions de presse se prescrivent par trois mois.
La loi n° 2004–204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, dite « Perben II », a créé un article 65–3 portant dans certains cas ce délai à un an, afin de « renforce[r] la lutte contre les discriminations, raciales en particulier » et de « mieux appréhender certains faits particulièrement graves commis, en particulier, sur le réseau Internet »20. Cet allongement du délai de prescription concernait alors le délit de provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence, prévu au huitième alinéa de l’article 24 de la loi du 29 juillet 1881, le délit de contestation des crimes contre l’humanité, prévu à son article 24 bis, et les délits de diffamation et d’injure publiques à raison de l’origine ou de l’appartenance ou de la non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, prévus au deuxième alinéa de son article 32 et au troisième alinéa de son article 3321.
Le législateur a ensuite complété cette liste afin de soumettre également à ce délai de prescription d’un an l’ensemble des infractions aggravées par un mobile discriminatoire22.
L’article 65-3 de la loi du 29 juillet 1881 a été modifié en dernier lieu par l’article 48 de la loi du 24 août 2021 précitée, qui a étendu le délai de prescription d’un an à l’ensemble des délits mentionnés à l’article 24 de la loi du 29 juillet 1881 (cf. supra) et, en particulier, aux provocations directes non suivies d’effet. Selon l’exposé sommaire de l’amendement à l’origine de cette extension, son objectif était double : « faciliter la poursuite et la condamnation des auteurs de provocation à la commission d’un crime ou d’un délit et améliorer l’intelligibilité de la loi »23.
* Par ailleurs, depuis la loi n° 2017–86 du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté, le second alinéa de ce même article 65–3 prévoit que, pour les délits visés à son premier alinéa, les dispositions du deuxième alinéa de l’article 65 de la loi du 29 juillet 1881 ne sont pas applicables (les secondes dispositions objet de la décision commentée).
Aux termes de ces dernières dispositions, issues de la loi n° 93-2 du 4 janvier 1993 portant réforme de la procédure pénale24, « avant l’engagement des poursuites, seules les réquisitions aux fins d’enquête seront interruptives de prescription » et « Ces réquisitions devront, à peine de nullité, articuler et qualifier les provocations, outrages, diffamations et injures à raison desquels l’enquête est ordonnée ».
Il en résulte, pour les délits ci-dessus énumérés prévus à l’article 24, à l’article 24 bis, aux deuxième et troisième alinéas de l’article 32 et aux troisième et quatrième alinéas de l’article 33 de la loi du 29 juillet 1881, que les réquisitions aux fins d’enquête avant l’engagement des poursuites n’ont pas à articuler et qualifier les faits incriminés.
Selon l’exposé des motifs de la loi du 27 janvier 2017 précitée, le législateur a ainsi entendu améliorer « la répression des délits de provocations, de diffamations et d’injures racistes ou discriminatoires [en] supprimant pour ces délits l’exigence d’articulation et de qualification des faits dans les réquisitions du parquet interruptives de prescription. […] / Sont ainsi conservées les garanties essentielles de la loi de 1881 (notamment l’interdiction de la comparution immédiate et la prescription abrégée d’un an), mais sont supprimés tous les obstacles aux poursuites qui ne sont actuellement pas justifiés, principalement ceux liés aux difficultés de qualification ».
B. – Origine de la QPC et question posée
À la suite de la publication d’un message sur le réseau social Twitter, Mme Juliette P. avait été poursuivie, selon la procédure de comparution immédiate, du chef de provocation publique et directe non suivie d’effet à commettre un crime ou un délit, sur le fondement notamment de l’article 24 de la loi du 29 juillet 1881.
À l’audience à laquelle l’affaire avait été renvoyée, Mme Juliette P. avait soulevé une QPC portant, d’une part, sur le second alinéa de l’article 397–6 du CPP et, d’autre part, sur l’article 65–3 de la loi du 29 juillet 1881.
Par un jugement du 15 novembre 2023, le tribunal judiciaire l’avait transmise à la Cour de cassation.
Dans son arrêt du 13 février 2024 précité, la chambre criminelle de la Cour de cassation avait jugé que « Les moyens tirés de ce qu’existerait un principe fondamental reconnu par les lois de la République selon lequel les délits de presse, d’une part, ne pourraient pas être jugés par le tribunal correctionnel selon une procédure d’urgence, d’autre part, seraient soumis à des règles particulières d’acquisition ou d’interruption de la prescription de l’action publique, soulèvent des questions qui peuvent être regardées comme nouvelles, au sens et pour l’application de l’article 23-5 de l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ». Elle avait donc renvoyé la QPC au Conseil constitutionnel.
II. – L’examen de la constitutionnalité des dispositions contestées
* En premier lieu, la requérante, rejointe par les parties intervenantes, reprochait aux dispositions du second alinéa de l’article 397-6 du CPP d’étendre à certains délits de presse la possibilité de recourir à la procédure de comparution immédiate, alors que les conditions de mise en œuvre de cette procédure seraient incompatibles avec le jugement d’infractions de cette nature. Il en résultait, selon elles, une méconnaissance d’un principe fondamental reconnu par les lois de la République (PFRLR), qu’elles demandaient au Conseil constitutionnel de reconnaître, imposant l’application d’une procédure spéciale en matière de délits de presse. Les parties requérante et intervenantes faisaient par ailleurs valoir que ces dispositions instituaient, en méconnaissance du principe d’égalité devant la justice, une différence de traitement injustifiée entre les personnes poursuivies pour une même infraction, selon qu’elles sont ou non jugées suivant la procédure de comparution immédiate, ainsi qu’entre les personnes poursuivies pour des infractions distinctes, selon que celles-ci entrent ou non dans le champ des dispositions renvoyées. Elles soutenaient enfin qu’en permettant de recourir à une procédure d’urgence pour faire cesser le trouble causé par de telles infractions, ces dispositions portaient à la liberté d’expression et de communication une atteinte qui ne serait ni nécessaire, ni adaptée, ni proportionnée.
En second lieu, la requérante, rejointe par les parties intervenantes, reprochait aux dispositions de l’article 65–3 de la loi du 29 juillet 1881 de supprimer, pour certains délits de presse, l’exigence d’articulation et de qualification des faits dans les réquisitions aux fins d’enquête. Selon elles, elles méconnaissaient ainsi le PFRLR imposant l’application d’une procédure spéciale en matière de délits de presse, qu’elles demandaient au Conseil constitutionnel de reconnaître, ainsi que les droits de la défense et la liberté d’expression et de communication.
* Au regard de ces griefs, le Conseil constitutionnel a jugé que la QPC portait uniquement sur le second alinéa de l’article 397–6 du CPP et sur le renvoi opéré par le second alinéa de l’article 65–3 de la loi du 29 juillet 1881 à la seconde phrase du deuxième alinéa de l’article 65 de la même loi25 (paragr. 5).
* L’une des parties intervenantes faisait par ailleurs valoir que les dispositions contestées de l’article 65-3 de la loi du 29 juillet 1881 étaient contraires au principe d’égalité devant la justice.
A. – L’existence d’un principe fondamental reconnu par les lois de la République imposant l’application d’une procédure spéciale en matière de délits de presse
1. – La jurisprudence constitutionnelle relative aux principes fondamentaux reconnus par les lois de la République
Le Préambule de la Constitution de 1958 fait référence au Préambule de la Constitution de 1946, lequel « réaffirme solennellement », sans les énumérer, « les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République ». Depuis sa décision du 16 juillet 1971 relative à la liberté d’association26, le Conseil constitutionnel a reconnu que ces principes ont valeur constitutionnelle et que le législateur ne peut y déroger sans méconnaître la Constitution.
Il a reconnu, depuis cette date, une dizaine de PFRLR, le dernier en date étant celui relatif à l’existence d’un droit propre à l’Alsace-Moselle, dégagé en 201127. Il a également explicitement écarté la reconnaissance de tels principes à de nombreuses occasions, compte tenu des conditions exigées par sa jurisprudence28.
* Trois conditions doivent être réunies pour la reconnaissance d’un PFRLR.
– Pour être « fondamental », le principe doit, tout d’abord, énoncer une règle suffisamment importante, avoir un degré suffisant de généralité et intéresser des domaines essentiels pour la vie de la Nation, à savoir les droits et libertés fondamentaux, la souveraineté nationale ou l’organisation des pouvoirs publics29. La norme contenue dans les lois de la République doit ainsi être suffisamment générale et non contingente.
C’est le plus souvent sur la base de ce critère de fondamentalité que le Conseil est conduit à écarter la qualification de PFRLR. Le Conseil a ainsi jugé que ne revêtait pas un caractère absolu ou un degré suffisant de généralité la règle électorale selon laquelle, en cas d’égalité de suffrages, le candidat le plus âgé doit être déclaré élu30, ni l’attribution d’allocations familiales à toutes les familles, quelle que soit leur situation31, ni la règle selon laquelle est français tout individu né en France d’un étranger qui lui-même y est né32, non plus que la gratuité de la circulation sur les ponts des routes nationales ou départementales33.
Plus récemment, dans sa décision n° 2020-810 DC du 21 décembre 2020, le Conseil constitutionnel a refusé de faire suite à une demande d’élévation au rang d’un PFRLR de la règle selon laquelle les mérites des candidats à un poste de professeur ou de maître de conférences doivent être évalués par une instance nationale, compte tenu de son caractère « accessoire » du PFRLR, déjà reconnu par la jurisprudence constitutionnelle, d’indépendance des enseignants-chercheurs : le Conseil a ainsi jugé que si cette règle « constitue une garantie légale possible du principe d’indépendance des enseignants-chercheurs, elle ne peut en elle-même être regardée comme figurant au nombre des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République mentionnés par le premier alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 »34.
Dans un registre voisin de cette décision, le Conseil a jugé, dans sa décision n° 2021-823 DC du 13 août 2021, que le droit reconnu aux parents d’opter pour une instruction des enfants au sein de la famille, tel qu’institué par la loi du 28 mars 1882 portant sur l’organisation de l’enseignement primaire, ne pouvait constituer une composante du PFRLR de la liberté de l’enseignement. Il a ainsi relevé que « en prévoyant que "L’instruction primaire est obligatoire … elle peut être donnée soit dans les établissements d’instruction primaire ou secondaire, soit dans les écoles publiques ou libres, soit dans les familles, par le père de famille lui-même ou par toute personne qu’il aura choisie", l’article 4 de la loi du 28 mars 1882 mentionnée ci-dessus n’a fait de l’instruction en famille qu’une modalité de mise en œuvre de l’instruction obligatoire. Il n’a ainsi pas fait de l’instruction en famille une composante du principe fondamental reconnu par les lois de la République de la liberté de l’enseignement »35.
De la même manière, dans sa décision n° 2022-842 DC du 12 août 2022, relative à la loi de finances rectificative pour 2022, le Conseil a refusé de regarder comme un PFRLR le « principe selon lequel le secteur de l’audiovisuel public ne pourrait être financé que par une redevance », dès lors qu’« en se bornant à prévoir que, "en vue d’en consacrer le produit aux dépenses de la radiodiffusion, il est institué … sur les installations réceptrices de radiodiffusion, une redevance pour droit d’usage", l’article 109 de la loi du 31 mai 1933 n’a eu ni pour objet ni pour effet de consacrer un principe selon lequel le secteur de l’audiovisuel public ne pourrait être financé que par une redevance. Cette loi ne saurait donc avoir donné naissance à un principe fondamental reconnu par les lois de la République »36.
Enfin, dans sa décision n° 2022-844 DC du 15 décembre 2022, le Conseil a, dans le prolongement de sa décision n° 2020-810 DC du 21 décembre 2020 précitée, jugé que la règle invoquée du « monopole de l’État pour la collation des grades et diplômes nationaux » ne pouvait être regardée, en elle-même, comme figurant au nombre des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République mentionnés par le premier alinéa du Préambule de la Constitution de 194637.
– Outre son caractère fondamental, il faut, ensuite, que le principe trouve un ancrage textuel dans une ou plusieurs lois intervenues sous un régime républicain antérieur à 194638.
Ainsi, dans sa décision n° 2002-465 DC du 13 janvier 2003, le Conseil a jugé que le principe dit de « faveur », en vertu duquel la loi ne pourrait permettre aux accords collectifs de travail de déroger aux lois et règlements ou aux conventions de portée plus large que dans un sens plus favorable aux salariés, ne saurait être regardé comme un PFRLR dès lors qu’il « ne résulte d’aucune disposition législative antérieure à la Constitution de 1946, et notamment pas de la loi du 24 juin 1936 » ayant modifié certaine dispositions du code du travail applicables aux conventions collectives39.
De la même manière, dans sa décision n° 2011-635 DC du 4 août 2011, le Conseil était saisi de dispositions modifiant les règles de majorité applicables aux délibérations de la cour d’assises afin de prévoir que toute décision défavorable à l’accusé se forme à la majorité de six voix au moins (sur neuf) lorsque la cour d’assises statue en premier ressort (contre huit voix sur douze sous l’empire du droit alors en vigueur). Les requérants faisaient valoir qu’« en permettant qu’une décision défavorable à l’accusé soit adoptée avec seulement l’accord de trois jurés et trois magistrats ces dispositions portent atteinte "au principe fondamental reconnu par les lois de la République selon lequel l’existence d’un jury populaire suppose que ses décisions ne peuvent être prises qu’à la majorité absolue des jurés" ». Le Conseil a jugé « qu’une tradition républicaine ne saurait être utilement invoquée pour soutenir qu’un texte législatif qui la contredit serait contraire à la Constitution qu’autant qu’elle aurait donné naissance à un principe fondamental reconnu par les lois de la République ; qu’en l’espèce, aucune loi de la République antérieure à la Constitution de 1946 n’a fixé le principe selon lequel lorsque les jurés et les magistrats délibèrent ensemble, les décisions de la cour d’assises défavorables à l’accusé ne peuvent être adoptées qu’à la majorité absolue des jurés »40.
– Il faut, enfin, qu’il n’ait jamais été dérogé à ce principe par une loi républicaine antérieure à l’entrée en vigueur de la Constitution de 1946, comme cela a été le cas en matière d’amnistie, de prohibition des jeux ou de rétroactivité des contrats41.
C’est au regard de ce critère de la continuité républicaine que, dans sa décision n° 2019-785 QPC du 24 mai 2019, le Conseil a écarté l’invitation à dégager un PFRLR imposant au législateur de prévoir un délai de prescription de l’action publique pour les infractions « dont la nature n’est pas d’être imprescriptible », notamment pour les infractions continues. Il a ainsi jugé que : « Si, dans leur très grande majorité, les textes pris en matière de procédure pénale dans la législation républicaine intervenue avant l’entrée en vigueur de la Constitution de 1946 comportent des dispositions relatives à la prescription de l’action publique en matière criminelle, la prescription a été écartée, deux fois au moins, par les lois du 9 mars 1928 et du 13 janvier 1938 pour certains crimes »42.
C’est également sur ce fondement que le Conseil constitutionnel a jugé, dans sa décision n° 2023–1069/1070 QPC du 24 novembre 2023, que le principe, invoqué par les requérants, de l’intervention d’un jury pour juger les crimes de droit commun ne pouvait être regardé comme répondant à l’ensemble des critères requis pour la reconnaissance d’un PFRLR. Tout en soulignant l’importance du principe de l’intervention du jury en matière criminelle, le Conseil a, d’une part, constaté que si, « dans leur très grande majorité, les textes pris en matière de procédure pénale dans la législation républicaine intervenue avant l’entrée en vigueur de la Constitution de 1946 comportent des dispositions prévoyant que le jugement des crimes relève de la compétence d’une juridiction composée de magistrats et d’un jury […] , le principe de l’intervention du jury en matière criminelle a été écarté par les lois des 24 février 1875, 9 mars 1928 et 13 janvier 1938 […] pour certains crimes ». D’autre part, se plaçant à cet égard également sur le terrain de la fondamentalité, il a relevé que les dispositions antérieures à la Constitution de 1946 « n’ont eu ni pour objet ni pour effet de réserver à une juridiction composée d’un jury le jugement des crimes "de droit commun", catégorie qui n’a au demeurant été définie par aucun texte »43.
2. – L’application à l’espèce
Comme il l’avait déjà fait dans de précédentes décisions44, le Conseil constitutionnel a rappelé sa jurisprudence constante selon laquelle « une tradition républicaine ne saurait être utilement invoquée pour soutenir qu’un texte législatif qui la contredit serait contraire à la Constitution qu’autant qu’elle aurait donné naissance à un principe fondamental reconnu par les lois de la République au sens du premier alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 » (paragr. 7).
Il a alors examiné si les critères requis pour la reconnaissance d’un tel principe, présentés ci-dessus, étaient ou non réunis en l’espèce s’agissant du principe que la requérante et les parties intervenantes l’invitaient à consacrer, et qui imposait selon elles l’application d’une procédure spéciale en matière de délits de presse.
Le Conseil constitutionnel a tout d’abord affirmé que, contrairement à ce que soutenait le Premier ministre dans ses observations, rien ne s’oppose à ce que des règles de procédure soient reconnues comme constituant un PFRLR (paragr. 8). Ont à cet égard déjà été érigés en PFRLR le principe de compétence propre de la juridiction administrative45 ou encore le principe d’une juridiction spécialisée ou d’une procédure appropriée en matière de justice pénale des mineurs46.
Toutefois, en l’espèce, le Conseil a jugé que « les règles spéciales de procédure instituées par la loi du 29 juillet 1881 pour la poursuite et la répression de certaines infractions de presse, pour importantes qu’elles soient, ne constituent que l’une des formes possibles de garantie légale de la liberté d’expression et de communication proclamée par l’article 11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 » (même paragr.).
Par ces motifs, le Conseil a souligné l’ancrage de la procédure spéciale applicable aux infractions de presse dans le cadre constitutionnel protecteur de la liberté d’expression et de communication consacré par l’article 11 de la Déclaration de 1789. Si certaines dispositions de cette loi viennent incontestablement poser des garanties pour l’exercice de la liberté d’expression, il n’en demeure pas moins que, sur le fondement direct de l’article 11 de la Déclaration, le Conseil constitutionnel a développé un contrôle entier de proportionnalité – c’est-à-dire son contrôle le plus exigeant – en s’assurant que les atteintes portées par la loi à l’exercice de la liberté d’expression sont nécessaires, adaptées et proportionnées à l’objectif poursuivi.
Dans le droit fil de sa décision n° 2020–810 DC du 21 décembre 2020 précitée, il en a dès lors déduit que, compte tenu du caractère principiel de l’exigence constitutionnelle à laquelle ces règles spéciales se rattachent47, elles ne pouvaient, en elles-mêmes, « être regardées comme figurant au nombre des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République mentionnés par le premier alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 » (même paragr.).
Le grief tiré de la méconnaissance d’un PFRLR imposant l’application d’une procédure spéciale en matière de délits de presse étant dès lors inopérant, le Conseil constitutionnel a jugé qu’il ne pouvait donc qu’être écarté (paragr. 9).
B. – L’examen de la constitutionnalité des dispositions contestées de l’article 397–6 du CPP
1. – L’examen du grief tiré de la méconnaissance de la liberté d’expression et de communication
a. – La jurisprudence constitutionnelle
* La protection constitutionnelle de la liberté d’expression et de communication se fonde sur l’article 11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789. Dès sa décision n° 84-181 DC du 11 octobre 1984, le Conseil constitutionnel a jugé sur ce fondement que le droit de libre communication et la liberté de parler, écrire et imprimer constituaient « une liberté fondamentale, d’autant plus précieuse que son exercice est l’une des garanties essentielles du respect des autres droits et libertés et de la souveraineté nationale »48.
Dans sa décision n° 2009-580 DC du 10 juin 2009, après avoir rappelé que la liberté d’expression et de communication est « d’autant plus précieuse que son exercice est une condition de la démocratie et l’une des garanties du respect des autres droits et libertés », le Conseil a jugé que « les atteintes portées à l’exercice de cette liberté doivent être nécessaires, adaptées et proportionnées à l’objectif poursuivi »49. Ce faisant, il a expressément soumis les atteintes à cette liberté à son degré de contrôle le plus exigeant qui soit, celui du contrôle entier de proportionnalité.
Cette même décision a reconnu l’importance, pour l’exercice de cette liberté, des services de communication au public en ligne, le Conseil ayant jugé que : « en l’état actuel des moyens de communication et eu égard au développement généralisé des services de communication au public en ligne ainsi qu’à l’importance prise par ces services pour la participation à la vie démocratique et l’expression des idées et des opinions, ce droit implique la liberté d’accéder à ces services »50. Sur ce fondement, il a censuré un dispositif de coupure administrative de l’accès à internet de toute personne, notamment depuis son domicile, en cas d’usage non respectueux de la propriété intellectuelle51.
* En matière pénale, le Conseil constitutionnel reconnaît au législateur la possibilité d’instituer des incriminations réprimant les abus de l’exercice de la liberté d’expression et de communication dès lors que ces abus « portent atteinte à l’ordre public et aux droits des tiers »52. Toutefois, les peines et délits ainsi instaurés n’échappent pas à l’exigence que l’atteinte portée à la liberté d’expression et de communication soit nécessaire, adaptée et proportionnée.
– En témoignent, par exemple, les décisions n° 2016–611 QPC du 10 février 2017 et n° 2017-682 QPC du 15 décembre 2017 par lesquelles le Conseil a censuré, à deux reprises, un délit de consultation habituelle de sites internet terroristes sur le fondement de la liberté d’expression et de communication.
Dans ces décisions, le Conseil a jugé, sur le fondement de l’article 34 de la Constitution – selon lequel la loi fixe les règles concernant les droits civiques et les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques –, qu’« il est loisible au législateur d’édicter des règles de nature à concilier la poursuite de l’objectif de lutte contre l’incitation et la provocation au terrorisme sur les services de communication au public en ligne, qui participe de l’objectif de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l’ordre public et de prévention des infractions, avec l’exercice du droit de libre communication et de la liberté de parler, écrire et imprimer »53.
Toutefois, au titre du contrôle des exigences d’adaptation et de proportionnalité requises en matière d’atteinte à la liberté de communication, et pour s’en tenir à la seconde décision, le Conseil a relevé que « les dispositions contestées n’imposent pas que l’auteur de la consultation habituelle des services de communication au public en ligne concernés ait la volonté de commettre des actes terroristes », qu’elles répriment d’une peine de deux ans d’emprisonnement « le seul fait de consulter à plusieurs reprises un service de communication au public en ligne, sans que soit retenue l’intention terroriste de l’auteur de la consultation comme élément constitutif de l’infraction » et que la portée du « motif légitime » autorisant la consultation ne peut être déterminée. Il en a conclu que ces dispositions faisaient « peser une incertitude sur la licéité de la consultation de certains services de communication au public en ligne et, en conséquence, de l’usage d’internet pour rechercher des informations » et portaient ainsi « une atteinte à l’exercice de la liberté de communication qui n’est pas nécessaire, adaptée et proportionnée »54.
Ainsi, alors que la décision n° 2009-580 DC du 10 juin 2009 précitée censurait un dispositif limitant l’accès technique à internet, en permettant la suspension de l’abonnement de l’internaute, ces deux décisions nos 2016–611 QPC et 2017–682 QPC étendent la protection constitutionnelle à la consultation de contenus sur internet.
– En témoigne également, s’agissant cette fois de mesures administratives de restriction à l’exercice de la liberté d’expression, la décision n° 2020–801 DC du 18 juin 2020 par laquelle le Conseil constitutionnel a censuré, sur le fondement de l’article 11 de la Déclaration de 1789, des dispositions de la loi dite « Avia » visant à lutter contre les contenus haineux sur internet qui imposaient notamment à certains opérateurs de plateforme en ligne de retirer, dans un délai d’une heure, des contenus diffusés en ligne à caractère terroriste ou pédopornographique.
Après avoir rappelé que le droit à la libre communication des pensées et des opinions implique la liberté d’accéder aux services de communication au public en ligne, le Conseil a pour la première fois expressément ajouté que ce droit implique la liberté de s’exprimer au moyen de ces services de communication au public en ligne.
Le Conseil a également rappelé, plus classiquement, que, sur le fondement de l’article 34 de la Constitution, le législateur peut instituer des dispositions destinées à faire cesser des abus de la liberté d’expression et de communication qui portent atteinte à l’ordre public et aux droits des tiers. Toutefois, les atteintes portées à l’exercice de cette liberté doivent être nécessaires, adaptées et proportionnées à l’objectif poursuivi.
Puis, examinant les dispositions contestées, le Conseil constitutionnel a admis que l’objectif poursuivi par le législateur était de nature à justifier l’adoption de mesures susceptibles de restreindre l’exercice de la liberté d’expression et de communication. Il a ainsi reconnu que « la diffusion d’images pornographiques représentant des mineurs, d’une part, et la provocation à des actes de terrorisme ou l’apologie de tels actes, d’autre part, constituent des abus de la liberté d’expression et de communication qui portent gravement atteinte à l’ordre public et aux droits des tiers ». Le Conseil a ensuite considéré qu’en imposant aux éditeurs et hébergeurs de retirer, à la demande de l’administration, les contenus que cette dernière estime contraires aux articles 227-23 et 421-2-5 du code pénal, le législateur a entendu faire cesser de tels abus.
Cependant, le Conseil a considéré que, en dépit de la pertinence de l’objectif poursuivi, les dispositions contestées portaient à la liberté d’expression une atteinte qui n’était pas adaptée, nécessaire et proportionnée. Il a tout d’abord constaté que la détermination du caractère illicite des contenus « ne repos[ait] pas sur leur caractère manifeste » et qu’elle était « soumise à la seule appréciation de l’administration ». Ainsi, en visant des contenus dont le caractère illicite n’apparaît pas manifestement et peut être sujet à débat, les dispositions censurées permettaient que soient retirés des contenus en réalité licites. Par ailleurs, l’appréciation sur ce point de l’administration ne présentait pas à cet égard une garantie suffisante. Le Conseil a ensuite constaté que le délai d’une heure laissé à l’éditeur ou l’hébergeur pour déférer à la demande de l’administration ne lui permettait pas, même en contestant en référé cette demande, d’en faire examiner la légalité avant de devoir y déférer, sous peine d’une lourde sanction pénale pouvant atteindre un an d’emprisonnement et 250 000 euros d’amende55.
* Il ne résulte cependant pas de cette jurisprudence relative à la matière pénale que la liberté d’expression et de communication serait absolue.
– Ainsi, dans sa décision n° 2015-512 QPC du 8 janvier 2016, le Conseil a admis la constitutionnalité du délit de négationnisme, prévu à l’article 24 bis de la loi du 29 juillet 1881 et réprimant la contestation de l’existence de faits commis durant la seconde guerre mondiale qualifiés de crimes contre l’humanité et sanctionnés comme tels par une juridiction française ou internationale.
Il a en effet estimé, d’une part, que les propos incriminés « constituent en eux-mêmes une incitation au racisme et à l’antisémitisme » et donc, à ce titre, un « abus de l’exercice de la liberté d’expression et de communication qui porte atteinte à l’ordre public et aux droits des tiers ». D’autre part, il s’est attaché au caractère limité de l’atteinte ainsi portée à la liberté d’expression et de communication. À ce titre, il a relevé sa spécificité liée à ce que l’incrimination pénale visait « à lutter contre certaines manifestations particulièrement graves d’antisémitisme et de haine raciale » et il a observé que « seule la négation, implicite ou explicite, ou la minoration outrancière de ces crimes est prohibée » et « que les dispositions contestées n’ont ni pour objet ni pour effet d’interdire les débats historiques ».
Il en a conclu que l’atteinte était nécessaire, adaptée et proportionnée à l’objectif poursuivi par le législateur56.
– De la même manière, dans sa décision n° 2018-706 QPC du 18 mai 2018, le Conseil constitutionnel a été saisi du délit d’apologie de terrorisme, introduit en 2014 dans le code pénal et dont il a jugé qu’il ne méconnaissait pas la liberté d’expression et de communication.
Le Conseil s’est tout d’abord assuré que les faits en cause constituaient bien un abus de l’exercice de la liberté d’expression à l’origine d’un trouble à l’ordre public. Il a ainsi relevé que « l’apologie publique, par la large diffusion des idées et propos dangereux qu’elle favorise, crée par elle-même un trouble à l’ordre public » et que « le juge se prononce en fonction de la personnalité de l’auteur de l’infraction et des circonstances de cette dernière, notamment l’ampleur du trouble causé à l’ordre public ».
Il s’est ensuite attaché au caractère suffisamment précis des faits incriminés, pour constater qu’ils « ne créent pas d’incertitude sur la licéité des comportements susceptibles de tomber sous le coup du délit ». Puis, il a jugé que « si, en raison de son insertion dans le code pénal, le délit contesté n’est pas entouré des garanties procédurales spécifiques aux délits de presse prévues par la loi du 29 juillet 1881 [...], les actes de terrorisme dont l’apologie est réprimée sont des infractions d’une particulière gravité susceptibles de porter atteinte à la vie ou aux biens ».
Enfin, après avoir rappelé que les peines encourues pour ce délit n’étaient pas manifestement disproportionnées à la gravité des faits en cause, il a conclu que l’atteinte portée à la liberté d’expression et de communication était nécessaire, adaptée et proportionnée à l’objectif poursuivi57.
* Il convient enfin de relever que le Conseil constitutionnel a déjà eu à de nombreuses reprises l’occasion de se prononcer sur la conformité à la Constitution, au regard notamment de l’article 11 de la Déclaration de 1789, de certaines règles de preuve ou de procédure dérogatoires au droit commun instituées par la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse.
– Ainsi, dans sa décision n° 2011–131 QPC du 20 mai 2011, il était saisi des dispositions du cinquième alinéa de l’article 35 de la loi du 29 juillet 1881 qui interdisaient de rapporter la preuve des faits diffamatoires lorsque l’imputation se réfère à des faits qui remontent à plus de dix ans. Or la possibilité de rapporter la preuve de tels faits était une garantie de la liberté d’expression, puisqu’elle faisait disparaître le caractère diffamatoire des propos, de sorte qu’en l’interdisant, le législateur supprimait une garantie.
Procédant dès lors à un contrôle sur le fondement de l’article 11 de la Déclaration de 1789, le Conseil a tout d’abord relevé « qu’en interdisant de rapporter la preuve des faits diffamatoires lorsque l’imputation se réfère à des faits qui remontent à plus de dix ans, le cinquième alinéa de l’article 35 a pour objet d’éviter que la liberté d’expression ne conduise à rappeler des faits anciens portant atteinte à l’honneur et à la considération des personnes qu’elles visent ; que la restriction à la liberté d’expression qui en résulte poursuit un objectif d’intérêt général de recherche de la paix sociale ».
Toutefois, il a jugé « que cette interdiction vise sans distinction, dès lors qu’ils se réfèrent à des faits qui remontent à plus de dix ans, tous les propos ou écrits résultant de travaux historiques ou scientifiques ainsi que les imputations se référant à des événements dont le rappel ou le commentaire s’inscrivent dans un débat public d’intérêt général ; que, par son caractère général et absolu, cette interdiction porte à la liberté d’expression une atteinte qui n’est pas proportionnée au but poursuivi » 58.
– Dans sa décision n° 2013-302 QPC du 12 avril 2013 précitée, le Conseil constitutionnel était saisi des dispositions de l’article 65-3 de la loi du 29 juillet 1881, dans sa rédaction issue de la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004, portant de trois mois à un an le délai de prescription de l’action publique et de l’action civile pour certains délits de presse.
Les requérants faisaient valoir qu’en allongeant la durée de la prescription pour ces seuls délits, ces dispositions portaient atteinte aux principes d’égalité devant la loi et devant la justice. Ils ajoutaient que la prescription trimestrielle prévue par l’article 65 de la loi du 29 juillet 1881 constituait l’une des garanties essentielles de la liberté de la presse.
Se plaçant sur le fondement tant de l’article 6 de la Déclaration de 1789 que de son article 11, le Conseil a tout d’abord constaté « que les règles de la prescription applicables à ces délits ne se distinguent des règles applicables aux autres infractions prévues et réprimées par la loi du 29 juillet 1881 que par la durée de ce délai de prescription ; qu’en particulier, ce délai d’un an court à compter du jour où les délits ont été commis ou du jour du dernier acte d’instruction ou de poursuite, s’il en a été fait ».
Il a ensuite jugé « qu’en portant de trois mois à un an le délai de la prescription pour les délits qu’il désigne, l’article 65-3 de la loi du 29 juillet 1881 a pour objet de faciliter la poursuite et la condamnation, dans les conditions prévues par cette loi, des auteurs de propos ou d’écrits provoquant à la discrimination, à la haine ou à la violence, diffamatoires ou injurieux, à caractère ethnique, national, racial, ou religieux ou contestant l’existence d’un crime contre l’humanité ; que le législateur a précisément défini les infractions auxquelles cet allongement du délai de la prescription est applicable ; que la différence de traitement qui en résulte, selon la nature des infractions poursuivies, ne revêt pas un caractère disproportionné au regard de l’objectif poursuivi ; qu’il n’est pas porté atteinte aux droits de la défense ; que, dans ces conditions, les dispositions contestées ne méconnaissent pas les exigences constitutionnelles précitées »59.
– Dans sa décision n° 2013–311 QPC du 17 mai 2013, le Conseil constitutionnel était saisi des dispositions de l’article 53 de la loi du 29 juillet 1881 prévoyant les mentions que doit contenir, à peine de nullité, l’acte introductif d’instance, y compris lorsque l’action est engagée devant les juridictions civiles.
Procédant à un contrôle sur le fondement tant de l’article 16 de la Déclaration de 1789 que de son article 11, le Conseil a jugé « qu’en imposant que la citation précise et qualifie le fait incriminé et que l’auteur de la citation élise domicile dans la ville où siège la juridiction saisie, le législateur a entendu que le défendeur soit mis à même de préparer utilement sa défense dès la réception de la citation et, notamment, puisse, s’il est poursuivi pour diffamation, exercer le droit, qui lui est reconnu par l’article 55 de la loi du 29 juillet 1881, de formuler en défense une offre de preuve dans un délai de dix jours à compter de la citation ; que la conciliation ainsi opérée entre, d’une part, le droit à un recours juridictionnel du demandeur et, d’autre part, la protection constitutionnelle de la liberté d’expression et le respect des droits de la défense ne revêt pas, y compris dans les procédures d’urgence60, un caractère déséquilibré ; que l’obligation de dénoncer la citation au ministère public ne constitue pas davantage une atteinte substantielle au droit d’agir devant les juridictions ; qu’il résulte de ce qui précède que les griefs tirés de l’atteinte au droit à un recours juridictionnel effectif doivent être écartés » 61.
– Enfin, dans sa décision n° 2020-863 QPC du 13 novembre 2020, le Conseil constitutionnel était saisi notamment des dispositions de l’article 55 de la loi du 29 juillet 1881 imposant au prévenu poursuivi pour diffamation un délai de dix jours pour formuler une offre de preuve de la vérité des faits.
La requérante soutenait que ces dispositions interdisaient à la juridiction civile des référés, saisie par une personne s’estimant victime d’une diffamation, de statuer avant l’expiration d’un délai de dix jours à compter de cette saisine, ce qui empêchait, selon elle, le prononcé de mesures conservatoires de nature à préserver ses intérêts.
Se plaçant là encore sur le fondement tant de l’article 16 de la Déclaration de 1789 que de son article 11, le Conseil a relevé, en premier lieu, qu’« en instituant ce délai de dix jours, le législateur a souhaité permettre à l’auteur des propos susceptibles d’être jugés diffamatoires de préparer sa défense et, à cette fin, de disposer du temps nécessaire à la formulation de l’offre de preuve tendant à établir la vérité des faits en cause. Il a ainsi apporté une garantie en faveur de l’exercice de la liberté d’expression et de communication et des droits de la défense ». Il a constaté, en second lieu, que, « d’une part, si les dispositions contestées empêchent le juge de statuer sans délai, y compris à titre conservatoire, elles ne privent pas la personne qui s’estime diffamée de la possibilité d’obtenir, à l’expiration du délai de dix jours, que soient prescrites les mesures nécessaires à la protection de ses intérêts. D’autre part, ces dispositions ne font pas davantage obstacle à ce que cette personne puisse obtenir réparation du préjudice que lui a, le cas échéant, causé la diffamation ». Il en a déduit que « le législateur a assuré une conciliation qui n’est pas manifestement déséquilibrée entre, d’une part, la liberté d’expression et de communication et les droits de la défense et, d’autre part, le droit à un recours juridictionnel effectif »62.
b. – L’application à l’espèce
Après avoir rappelé sa formulation de principe relative à la liberté d’expression et de communication et précisé que les atteintes portées à l’exercice de cette liberté doivent être nécessaires, adaptées et proportionnées à l’objectif poursuivi (paragr. 10), le Conseil constitutionnel a décrit l’objet des dispositions contestées.
À cet égard, il a constaté que le premier alinéa de l’article 397–6 du CPP exclut l’application des procédures de convocation par procès–verbal, de comparution immédiate et de comparution à délai différé pour le jugement des délits de presse (paragr. 11). Puis, il a relevé que, par dérogation, les dispositions contestées permettent de recourir à ces procédures accélérées pour le jugement de certains délits de provocation, d’apologie de crimes, de contestation de crimes ou d’injure prévus par la loi du 29 juillet 1881 (paragr. 12).
Ces dispositions étant ainsi susceptibles de porter atteinte à la liberté d’expression et de communication, il revenait au Conseil constitutionnel d’identifier l’objectif poursuivi par le législateur, puis d’apprécier le caractère nécessaire, adapté et proportionné de l’atteinte au regard de cet objectif.
Le Conseil a tout d’abord relevé que, « en adoptant ces dispositions, le législateur a entendu faciliter la poursuite et la condamnation des auteurs de propos ou écrits ayant un caractère haineux, violent ou discriminatoire, en particulier sur internet ». Il a considéré que le législateur avait ainsi poursuivi l’objectif de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l’ordre public (paragr. 13).
Le Conseil a ensuite souligné le caractère limité du champ d’application des dispositions contestées.
À ce titre, il a constaté que les procédures accélérées de jugement « ne sont pas applicables lorsque le délit résulte du contenu d’un message placé sous le contrôle d’un directeur de la publication en application de l’article 6 de la loi du 29 juillet 1881 ou de l’article 93-2 de la loi du 29 juillet 1982 mentionnée ci–dessus ». Il en résulte que « seuls sont susceptibles d’être poursuivis selon l’une de ces procédures les auteurs de discours, cris ou menaces proférés dans des lieux ou réunions publics ainsi que les auteurs de messages adressés à un service de communication au public en ligne et mis par ce service à la disposition du public dans un espace de contributions personnelles identifié comme tel » (paragr. 14).
Le Conseil a également observé que le recours à l’une des procédures accélérées de jugement n’est possible que pour les délits de presse passibles d’une peine d’emprisonnement énumérés aux articles 24 et 24 bis de la loi du 29 juillet 1881 et aux troisième et quatrième alinéas de l’article 33 de la même loi. Ainsi, « le recours à une telle procédure n’est prévu que pour la répression d’abus de la liberté d’expression d’une particulière gravité et demeure exclu en matière de diffamation » (paragr. 15).
Enfin, s’attachant aux garanties reconnues à la personne poursuivie selon une procédure accélérée, le Conseil a relevé que, d’une part, celle-ci « bénéficie du droit d’être assistée par un avocat de son choix ou commis d’office et, le cas échéant, par un interprète, ainsi que de l’accès au dossier de la procédure. En cas de recours à la procédure de comparution immédiate, cette personne, qui est obligatoirement assistée par un avocat, a la faculté de refuser d’être jugée le jour même afin de disposer d’un délai supplémentaire pour préparer sa défense ». D’autre part, « en application de l’article 397-2 du code de procédure pénale, le tribunal peut, à la demande des parties ou d’office, ordonner un supplément d’information ou, s’il estime que la complexité de l’affaire nécessite des investigations supplémentaires approfondies, renvoyer le dossier au procureur de la République » (paragr. 16).
Le Conseil constitutionnel a déduit de tout ce qui précède que l’atteinte portée à la liberté d’expression et de communication par le second alinéa de l’article 397–6 du CPP était nécessaire, adaptée et proportionnée à l’objectif poursuivi. Il a donc écarté le grief tiré de la méconnaissance de cette liberté (paragr. 17).
2. – L’examen du grief tiré de la méconnaissance du principe d’égalité devant la justice
a. – La jurisprudence constitutionnelle
* Aux termes de l’article 6 de la Déclaration de 1789 : « La loi … doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse ». De manière constante, le Conseil constitutionnel juge que le principe d’égalité devant la loi « ne s’oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu’il déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général pourvu que, dans l’un et l’autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l’objet de la loi qui l’établit »63.
Sur ce fondement, le Conseil veille, de manière générale, à ce que les différences de traitement opérées par la loi soient à la fois justifiées par une raison suffisante – qu’elle procède d’une différence de situation ou d’un motif d’intérêt général – et en adéquation avec l’objet de la loi.
* En matière de justice, l’exigence d’égalité est renforcée. Le Conseil constitutionnel se fonde alors en effet sur l’article 6, précité, et sur l’article 16 de la Déclaration de 1789, en vertu duquel « Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution » qui assure la garantie des droits et, en particulier, les droits de la défense, le droit à un recours juridictionnel effectif et le droit à un procès équitable.
Il juge, sur ce double fondement, que « Si le législateur peut prévoir des règles de procédure différentes selon les faits, les situations et les personnes auxquelles elles s’appliquent, c’est à la condition que ces différences ne procèdent pas de distinctions injustifiées et que soient assurées aux justiciables des garanties égales »64.
Le principe d’égalité devant la justice implique donc non seulement la prohibition des distinctions injustifiées, à l’instar du principe d’égalité devant la loi, mais également l’obligation d’assurer, en cas de distinctions justifiées, des garanties égales aux justiciables.
Au regard de ce principe, la jurisprudence du Conseil constitutionnel a notamment pour objet de veiller au respect du droit des justiciables placés dans une situation identique à être jugés devant les mêmes formations de jugement, ou selon des garanties de procédure égales, et à ne pas voir celles-ci varier en fonction de critères qui ne seraient pas objectifs et rationnels65.
À ce titre, le Conseil s’assure qu’une différence de traitement, qu’elle soit d’ordre juridictionnel66 ou procédural67, est justifiée par une différence de situation et qu’elle ne prive pas le justiciable d’une garantie reconnue à d’autres.
* Dans sa décision n° 2011-113/115 QPC du 1er avril 2011, le Conseil a admis que les règles de procédure pénale diffèrent selon que la personne est poursuivie pour un crime devant la cour d’assises ou pour un délit ou une contravention devant le tribunal correctionnel ou le tribunal de police : « Considérant […] que les personnes accusées de crime devant la cour d’assises sont dans une situation différente de celle des personnes qui sont poursuivies pour un délit ou une contravention devant le tribunal correctionnel ou le tribunal de police ; que, par suite, le législateur a pu, sans méconnaître le principe d’égalité, édicter pour le prononcé des arrêts de la cour d’assises des règles différentes de celles qui s’appliquent devant les autres juridictions pénales »68.
Par ailleurs, dans sa décision n° 2023-1069/1070 QPC du 24 novembre 2023 précitée69, le Conseil constitutionnel, saisi des dispositions instituant les cours criminelles départementales, a jugé : « En premier lieu, d’une part, les personnes jugées devant une cour criminelle départementale sont, eu égard à la nature des faits qui leur sont reprochés et aux circonstances exigées pour leur renvoi devant cette juridiction, dans une situation différente de celle des personnes jugées devant une cour d’assises. Ainsi, en retenant de tels critères, le législateur n’a pas instauré de discriminations injustifiées entre ces personnes. / D’autre part, si les accusés ne sont pas soumis aux mêmes règles de majorité selon qu’ils comparaissent devant une cour d’assises ou devant une cour criminelle départementale, cette différence de traitement est justifiée par une différence de situation tenant à la composition respective de ces deux juridictions. / En second lieu, à l’exception de celles mettant en jeu la présence du jury, les règles de procédure applicables devant la cour criminelle départementale sont identiques à celles applicables devant la cour d’assises. En outre, la cour criminelle départementale présente, par sa composition, les mêmes garanties d’indépendance et d’impartialité. Sont ainsi assurées aux accusés, qu’ils soient jugés devant une cour d’assises ou devant une cour criminelle départementale, des garanties équivalentes ». Il a donc écarté les griefs tirés de la méconnaissance des principes d’égalité devant la loi et devant la justice.
* En revanche, le Conseil constitutionnel censure des dispositions qui créent sans justification des distinctions entre les justiciables.
Ainsi, dans la décision n° 2007-559 DC du 6 décembre 2007, le Conseil était saisi de dispositions permettant à tout représentant à l’assemblée de la Polynésie française, lorsqu’il saisit le tribunal administratif ou le Conseil d’État d’un recours en annulation d’un acte de la Polynésie française, d’assortir ce recours d’une demande de suspension sans qu’il soit justifié de la condition d’urgence. Le Conseil constitutionnel a jugé que, par ces dispositions, « le législateur a instauré une différence de situation entre les représentants à l’assemblée de la Polynésie française et les autres justiciables qui n’est pas justifiée au regard de l’objectif de contrôle juridictionnel des actes administratifs ; qu’il a, par suite, méconnu le principe d’égalité devant la justice ; qu’il s’ensuit que le deuxième alinéa du II de l’article 32 doit être déclaré contraire à la Constitution »70.
Dans sa décision n° 2015-492 QPC du 16 octobre 2015, le Conseil a censuré des dispositions qui prévoyaient que seule une association se proposant, par ses statuts, de défendre les intérêts moraux et l’honneur de la Résistance ou des déportés peut exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les délits d’apologie des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité réprimés par le cinquième alinéa de l’article 24 de la loi du 29 juillet 1881. Le Conseil a jugé : « Considérant, d’une part, que le législateur n’a pas prévu une répression pénale différente pour l’apologie des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité selon que ces crimes ont été commis ou non pendant la seconde guerre mondiale ; que, d’autre part, il ne ressort ni des dispositions contestées ou d’une autre disposition législative ni des travaux préparatoires de la loi du 13 juillet 1990 l’existence de motifs justifiant de réserver aux seules associations défendant les intérêts moraux et l’honneur de la Résistance ou des déportés la faculté d’exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne l’apologie des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité ; que, par suite, les dispositions contestées, en excluant du bénéfice de l’exercice des droits reconnus à la partie civile les associations qui se proposent de défendre les intérêts moraux et l’honneur des victimes de crimes de guerre ou de crimes contre l’humanité autres que ceux commis durant la seconde guerre mondiale, méconnaissent le principe d’égalité devant la justice »71.
Plus récemment, dans sa décision n° 2021-909 QPC du 26 mai 2021, à propos de dispositions prévoyant que la personne citée directement par la partie civile à comparaître devant le tribunal de police ne peut, dans la même instance, demander que cette dernière soit condamnée, en cas de relaxe, au paiement de dommages-intérêts pour abus de constitution de partie civile, le Conseil a constaté que cette possibilité était ouverte, en cas de désistement de la partie civile, pour la personne directement citée devant le tribunal de police en application de l’article 536 du CPP. Elle l’est aussi pour le prévenu qui, après avoir été cité directement devant le tribunal de police, est relaxé en appel, en application de l’article 549 du même code. Il en a déduit que « Dès lors, les dispositions contestées procèdent à une distinction injustifiée entre les justiciables poursuivis par citation directe devant le tribunal de police. Par conséquent, elles méconnaissent le principe d’égalité devant la justice et doivent donc être déclarées contraires à la Constitution »72.
b. – L’application à l’espèce
Dans la décision commentée, après avoir rappelé sa formulation de principe relative au principe d’égalité devant la justice, qui découle des articles 6 et 16 de la Déclaration de 1789 (paragr. 18), le Conseil constitutionnel s’est assuré que les différences de traitement dénoncées par la requérante et les parties intervenantes ne procédaient pas d’une distinction injustifiée et que les justiciables bénéficiaient de garanties égales.
En premier lieu, il a relevé, d’une part, que « si les auteurs des délits de presse visés par les dispositions contestées sont susceptibles de ne pas être soumis à la même procédure de jugement selon que ces délits résultent ou non d’un message placé sous le contrôle d’un directeur de la publication, cette différence de traitement est justifiée par une différence de situation tenant à l’obligation d’identification du directeur de la publication et au régime de responsabilité spécifique qui résulte des articles 42 de la loi du 29 juillet 1881 et 93-3 de la loi du 29 juillet 1982 » (paragr. 19).
D’autre part, il a constaté que « les personnes jugées selon une procédure accélérée à raison de ces délits de presse sont, eu égard à la nature et à la gravité des faits qui leur sont reprochés, dans une situation différente de celle des personnes jugées pour les autres délits de presse » (même paragr.).
Il a ainsi jugé que les différences de traitement résultant des dispositions contestées étaient justifiées par des différences de situation.
En second lieu, le Conseil constitutionnel devait vérifier que les justiciables bénéficiaient de garanties égales. À cet égard, il a rappelé que des garanties spécifiques, précédemment énumérées, sont prévues en faveur de la personne poursuivie selon une procédure accélérée de jugement, telles que le droit à l’assistance d’un avocat, l’accès au dossier ou encore la faculté de refuser d’être jugée le jour même dans le cadre d’une comparution immédiate. Il en a déduit que sont ainsi assurées aux personnes poursuivies en matière de délits de presse des garanties équivalentes, qu’elles soient jugées selon une procédure accélérée ou selon la procédure prévue pour ces délits (paragr. 20).
Le Conseil a donc écarté le grief tiré de la méconnaissance du principe d’égalité devant la justice (paragr. 21).
Par conséquent, le second alinéa de l’article 397–6 du CPP ne méconnaissant aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel l’a déclaré conforme à la Constitution (paragr. 22).
C. – L’examen de la constitutionnalité des dispositions contestées de l’article 65–3 de la loi du 29 juillet 1881
1. – L’examen du grief tiré de la méconnaissance de la liberté d’expression et de communication
Dans la décision commentée, le Conseil constitutionnel s’est tout d’abord attaché à décrire l’objet des dispositions contestées de l’article 65-3 de la loi du 29 juillet 1881.
Après avoir rappelé que « Le deuxième alinéa de l’article 65 de la loi du 29 juillet 1881 prévoit que, avant l’engagement des poursuites, seules les réquisitions aux fins d’enquête sont interruptives de prescription et qu’elles doivent, à peine de nullité, articuler et qualifier les faits à raison desquels l’enquête est ordonnée » (paragr. 23), il a constaté que « Les dispositions contestées suppriment l’exigence d’articulation et de qualification des faits dans les réquisitions aux fins d’enquête pour certains délits de provocation, d’apologie de crimes, de contestation de crimes, de diffamation ou d’injure prévus par la loi du 29 juillet 1881 » (paragr. 24).
Cette suppression d’une garantie procédurale spécifique étant de nature à porter atteinte à la liberté d’expression et de communication, il revenait là encore au Conseil constitutionnel d’identifier l’objectif poursuivi par le législateur, puis d’apprécier le caractère nécessaire, adapté et proportionné de l’atteinte au regard de cet objectif.
En premier lieu, se référant aux travaux préparatoires de la loi du 27 janvier 2017 précitée, dont sont issues les dispositions contestées, le Conseil a jugé « que, en les adoptant, le législateur a entendu faciliter la poursuite et la condamnation des auteurs des infractions prévues par la loi du 29 juillet 1881 pour lesquelles le délai de prescription a été porté de trois mois à un an. Il a ainsi poursuivi l’objectif de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l’ordre public » (paragr. 25).
En deuxième lieu, il a relevé, d’une part, que « lorsque des poursuites sont engagées, l’acte introductif d’instance doit, à peine de nullité, articuler et qualifier les faits incriminés en application des articles 50 et 53 de la loi du 29 juillet 1881 » (paragr. 26). La suppression de l’exigence d’articulation et de qualification des faits ne concerne en effet que les réquisitions aux fins d’enquête prises avant l’engagement des poursuites.
D’autre part, le Conseil a jugé que « les dispositions contestées n’ont pas pour objet et ne sauraient avoir pour effet de déroger aux dispositions des articles 61–1 et 63-1 du code de procédure pénale selon lesquelles toute personne entendue librement ou placée en garde à vue doit immédiatement être informée de la date et du lieu présumés et de la qualification de l’infraction qu’elle est soupçonnée d’avoir commise ou tenté de commettre » (même paragr.). Par cette réserve d’interprétation, il a ainsi entendu assurer que, nonobstant l’absence d’articulation et de qualification des faits dans les réquisitions aux fins d’enquête, les personnes mises en cause soient bien précisément informées, lorsqu’elles sont entendues au cours d’une enquête policière, des faits qui leur sont reprochés.
En dernier lieu, le Conseil a observé que « l’exigence d’articulation et de qualification des faits n’est supprimée que pour les réquisitions aux fins d’enquête relatives aux délits de presse passibles d’une peine d’emprisonnement énumérés aux articles 24 et 24 bis de la loi du 29 juillet 1881 ainsi qu’aux deuxième et troisième alinéa de l’article 32 et aux troisième et quatrième alinéas de l’article 33 de la même loi ». La suppression de cette exigence n’est donc prévue que pour la répression d’abus de la liberté d’expression limitativement énumérés et d’une particulière gravité (paragr. 27).
Par conséquent, sous la réserve précédemment énoncée, le Conseil constitutionnel a écarté le grief tiré de la méconnaissance de la liberté d’expression et de communication (paragr. 28).
2. – L’examen du grief tiré de la méconnaissance du principe d’égalité devant la justice
De la même manière qu’il l’a fait pour les premières dispositions objet de la décision commentée, le Conseil constitutionnel s’est assuré que la différence de traitement résultant des dispositions contestées de l’article 65-3 de la loi du 29 juillet 1881 ne procédait pas d’une distinction injustifiée et que les justiciables bénéficiaient de garanties égales.
Dans le droit fil de la jurisprudence présentée ci-dessus, il a d’abord relevé que, « eu égard à la nature et à la gravité des faits qui leur sont reprochés, les personnes mises en cause pour l’un des délits entrant dans le champ d’application des dispositions contestées sont dans une situation différente de celle des personnes mises en cause pour les autres délits relevant de la loi du 29 juillet 1881 » (paragr. 29).
Le Conseil a ensuite jugé que, « pour les mêmes motifs que ceux énoncés au paragraphe 26 et sous la même réserve que celle énoncée à ce paragraphe, sont assurées aux personnes mises en cause des garanties équivalentes » (paragr. 30).
Il a dès lors écarté le grief tiré de la méconnaissance du principe d’égalité devant la justice (paragr. 31).
Jugeant que le renvoi opéré par le second alinéa de l’article 65–3 de la loi du 29 juillet 1881 à la seconde phrase du deuxième alinéa de l’article 65 de la même loi ne méconnaissait pas non plus les droits de la défense ni aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel l’a déclaré, sous la réserve énoncée au paragraphe 26, conforme à la Constitution (paragr. 32).
_______________________________________
1 Rapport d’information n° 767 de MM. François Pillet et Thani Mohamed Soilihi, fait au nom de la commission des lois du Sénat, déposé le 6 juillet 2016, « L’équilibre de la loi du 29 juillet 1881 à l’épreuve d’Internet ».
2 Selon l’intitulé de son chapitre IV : « Des crimes et délits commis par la voie de la presse ou par tout autre moyen de publication ».
3 S’agissant, plus particulièrement, de la diffusion d’un message sur internet, la Cour de cassation retient que celui–ci présente un caractère public chaque fois qu’il est susceptible d’atteindre un public indéterminé. Tel n’est pas le cas lorsque les destinataires du message sont liés par une communauté d’intérêts, définie comme « un groupe de personnes liées par une appartenance commune, des aspirations et des objectifs partagés, formant une entité suffisamment fermée pour ne pas être perçue comme des tiers par rapport à l’auteur des propos mis en cause » (Cass. crim., 28 avril 2009, n° 08-85.249). Ainsi, ne constituent pas des injures publiques celles diffusées sur un compte de réseau social accessible aux seules personnes agréées, en nombre très restreint, par l’auteur des propos injurieux, et qui forment entre elles une communauté d’intérêts (Cass. civ. 1re, 10 avril 2013, n° 11-19.530). En revanche, revêt un caractère public un message électronique envoyé à cinquante-trois destinataires dont des associations, des journalistes et des fonctionnaires, toutes ces personnes ayant des qualités, des compétences et des intérêts distincts (Cass. crim., 9 novembre 2010, n° 10-84.345).
4 Marc Domingo, « Atteintes à la réputation : la protection judiciaire pénale », Gazette du Palais, 6 septembre 1994, p. 999.
5 Emmanuel Dreyer, « Déroulement du procès », JurisClasseur. Communication, fasc. 3090, 2009, n° 1.
6 Contre une année pour les contraventions, six années pour les délits et vingt années pour les crimes, selon les délais de droit commun prévus aux articles 7, 8 et 9 du CPP.
7 Cass. crim., 6 mai 2003, n° 02-84.348.
8 Article 50 de la loi du 29 juillet 1881.
9 Article 53 de la loi du 29 juillet 1881.
10 Aux termes de l’article 6 de la loi du 29 juillet 1881, « Toute publication de presse doit avoir un directeur de la publication ».
11 Le dernier alinéa de l’article 93-3 de la loi du 29 juillet 1982 prévoit ainsi que : « Lorsque l’infraction résulte du contenu d’un message adressé par un internaute à un service de communication au public en ligne et mis par ce service à la disposition du public dans un espace de contributions personnelles identifié comme tel, le directeur ou le codirecteur de publication ne peut pas voir sa responsabilité pénale engagée comme auteur principal s’il est établi qu’il n’avait pas effectivement connaissance du message avant sa mise en ligne ou si, dès le moment où il en a eu connaissance, il a agi promptement pour retirer ce message ». Dans sa décision n° 2011-164 QPC du 16 septembre 2011, le Conseil constitutionnel, saisi de ces dispositions, a jugé que « compte tenu, d’une part, du régime de responsabilité spécifique dont bénéficie le directeur de la publication en vertu des premier et dernier alinéas de l’article 93-3 et, d’autre part, des caractéristiques d’internet qui, en l’état des règles et des techniques, permettent à l’auteur d’un message diffusé sur internet de préserver son anonymat, les dispositions contestées ne sauraient, sans instaurer une présomption irréfragable de responsabilité pénale en méconnaissance des exigences constitutionnelles précitées, être interprétées comme permettant que le créateur ou l’animateur d’un site de communication au public en ligne mettant à la disposition du public des messages adressés par des internautes, voie sa responsabilité pénale engagée en qualité de producteur à raison du seul contenu d’un message dont il n’avait pas connaissance avant la mise en ligne ; que, sous cette réserve, les dispositions contestées ne sont pas contraires à l’article 9 de la Déclaration de 1789 » (décision n° 2011-164 QPC du 16 septembre 2011, M. Antoine J. [Responsabilité du « producteur » d’un site en ligne], cons. 7).
12 Au point qu’une partie de la doctrine dénonce une « déconstruction » de la loi du 29 juillet 1881 (voir, par exemple, en ce sens : Thomas Besse, « L’irrésistible rétrécissement du droit pénal de la presse », Recueil Dalloz 2022, p. 407).
13 Jean-Baptiste Thierry, « La déspécialisation de la procédure pénale applicable aux infractions de presse », AJ pénal 2021, p. 504.
14 C’est le cas notamment de la provocation au terrorisme et de l’apologie du terrorisme, prévues et réprimées par l’article 421-2-5 du code pénal depuis la loi n° 2014-1353 du 13 novembre 2014 renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme.
15 Ni, non plus, en matière « de délits politiques ou d’infractions dont la procédure de poursuite est prévue par une loi spéciale ».
16 Par exemple, en matière de diffamation, l’article 55 de la loi du 29 juillet 1881 laisse un délai de dix jours au prévenu qui entend prouver la vérité des faits diffamatoires pour signifier au ministère public ou au plaignant une copie de ses pièces et la liste de ses témoins. En application de l’article 56 de la même loi, le ministère public ou le plaignant dispose alors d’un délai de cinq jours pour signifier au prévenu la copie des pièces et la liste des témoins par lesquels il entend faire la preuve contraire.
17 Point 2.1 de l’étude d’impact du projet de loi dont est issue la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République.
18 Ne sont ainsi pas visés par le second alinéa de l’article 397-6 du CPP les cris ou chants séditieux proférés dans les lieux ou réunions publics, prévus et réprimés par le sixième alinéa de l’article 24 de la loi du 29 juillet 1881, qui constituent une contravention de la cinquième classe.
19 CE, avis n° 401549 du 3 décembre 2020, rectifié le 7 décembre 2020, sur le projet de loi confortant le respect des principes de la République, point 112.
20 Rapport n° 856 (tome 1) de M. Jean-Luc Warsmann fait au nom de la commission des lois de l’Assemblée nationale, déposé le 14 mai 2003.
21 Dans sa décision n° 2013-302 QPC du 12 avril 2013, M. Laurent A. et autres (Délai de prescription d’un an pour les délits de presse à raison de l’origine, l’ethnie, la nation, la race ou la religion), le Conseil constitutionnel a déclaré l’article 65-3 de la loi du 29 juillet 1881, dans sa rédaction issue de la loi du 9 mars 2004 précitée, conforme à la Constitution.
22 Loi n° 2014-56 du 27 janvier 2014 visant à harmoniser les délais de prescription des infractions prévues par la loi sur la liberté de la presse du 29 juillet 1881, commises en raison du sexe, de l’orientation ou de l’identité sexuelle ou du handicap. Son article 1er a ainsi ajouté à l’article 65-3 de la loi du 29 juillet 1881 la référence au neuvième alinéa de l’article 24, au troisième alinéa de l’article 32 et au quatrième alinéa de l’article 33 de cette même loi.
23 Amendement n° 1160 déposé le 14 janvier 2021 par M. Pierre-Yves Bournazel et alii.
24 Antérieurement à cette loi, la Cour de cassation n’attribuait un effet interruptif de prescription qu’aux actes susceptibles de mettre en mouvement l’action publique (Cass. crim., 10 décembre 1991, n° 90-85.068), tels que la plainte avec constitution de partie civile, le réquisitoire introductif ou la citation directe. En revanche, dans le cadre de la procédure pénale de droit commun, les procès-verbaux d’enquête sont susceptibles d’avoir un effet interruptif de prescription.
25 Depuis sa décision n° 2019-782 QPC du 17 mai 2019, Mme Élise D. (Déductibilité de l’assiette de l’impôt de solidarité sur la fortune des dettes du redevable à l’égard de ses héritiers ou de personnes interposées), le Conseil constitutionnel a fait évoluer sa jurisprudence pour tenir compte d’une manière d’écrire la loi consistant, au sein d’une disposition législative, à opérer un renvoi à d’autres dispositions. La délimitation du champ de la QPC peut donc consister à identifier, compte tenu des griefs du requérant, le renvoi particulier opéré par les dispositions dont le Conseil constitutionnel est saisi à une autre disposition.
26 Décision n° 71-44 DC du 16 juillet 1971, Loi complétant les dispositions des articles 5 et 7 de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association (Liberté d’association).
27 Liberté d’association (décision n° 71-44 DC du 16 juillet 1971, Loi complétant les dispositions des articles 5 et 7 de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association), droits de la défense (décision n° 76-70 DC du 2 décembre 1976, Loi relative au développement et à la prévention des accidents du travail), liberté d’enseignement (décision n° 77-87 DC du 23 novembre 1977, Loi complémentaire à la loi n° 59-1557 du 31 décembre 1959 modifiée par la loi n° 71-400 du 1er juin 1971 et relative à la liberté de l’enseignement), liberté de conscience (même décision), indépendance de la juridiction administrative (décision n° 80-119 DC du 22 juillet 1980, Loi portant validation d’actes administratifs, validation d’actes administratifs), compétence exclusive de la juridiction administrative en matière d’annulation d’actes administratifs (décision n° 86-224 DC du 23 janvier 1987, Loi transférant à la juridiction judiciaire le contentieux des décisions du Conseil de la concurrence), libertés universitaires (décision n° 83-165 DC du 20 janvier 1984, Loi relative à l’enseignement supérieur), justice pénale des mineurs (décision n° 2002-461 DC du 29 août 2002, Loi d’orientation et de programmation pour la justice), existence d’un droit propre à l’Alsace-Moselle (décision n° 2011-157 QPC du 5 août 2011, Société SOMODIA [Interdiction du travail le dimanche en Alsace-Moselle]). À noter cependant que les droits de la défense sont aujourd’hui directement rattachés à l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 (décisions n° 2006–535 DC du 30 mars 2006, Loi pour l’égalité des chances, cons. 41, et n° 2006–540 DC du 27 juillet 2006, Loi relative au droit d’auteur et aux droits voisins dans la société de l’information, cons. 11).
28 Voir par exemple, parmi les principes refusés non indiqués ci-après, au sujet d’un principe de l’affectation exclusive du produit de la contribution sociale généralisée au financement de la sécurité sociale, la décision n° 2001-447 DC du 18 juillet 2001, Loi relative à la prise en charge de la perte d’autonomie des personnes âgées et à l’allocation personnalisée d’autonomie, cons. 17, ou concernant un principe dit de « compétence générale des collectivités », la décision n° 2010-618 DC du 9 décembre 2010, Loi de réforme des collectivités territoriales, cons. 54.
29 Décision n° 98-407 DC du 14 janvier 1999, Loi relative au mode d’élection des conseillers régionaux et des conseillers à l’Assemblée de Corse et au fonctionnement des conseils régionaux, cons. 9, et décision n° 2013–669 DC du 17 mai 2013, Loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe, cons. 21.
30 Décision n° 98-407 DC du 14 janvier 1999 précitée, cons. 9.
31 Décision n° 97-393 DC du 18 décembre 1997, Loi de financement de la sécurité sociale pour 1998, cons. 29.
32 Décision n° 93-321 DC du 20 juillet 1993, Loi réformant le code de la nationalité, cons. 18.
33 Décision n° 79-107 DC du 12 juillet 1979, Loi relative à certains ouvrages reliant les voies nationales ou départementales, cons. 3.
34 Décision n° 2020-810 DC du 21 décembre 2020, Loi de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030 et portant diverses dispositions relatives à la recherche et à l’enseignement supérieur, paragr. 8. Comme l’indique le commentaire de cette décision, « sans entrer dans un débat sur la continuité historique du principe invoqué, il peut être relevé le caractère en tout état de cause accessoire du principe invoqué à celui d’indépendance des enseignants-chercheurs d’ores et déjà reconnu par le Conseil constitutionnel. […] Ce caractère accessoire a conduit le Conseil à voir dans la règle de qualification nationale, qui ne présentait pas un caractère "fondamental" au sens du Préambule de la Constitution de 1946, une "garantie légale" du PFRLR déjà consacré, et non un principe constitutionnel en elle-même ».
35 Décision n° 2021-823 DC du 13 août 2021, Loi confortant le respect des principes de la République, paragr. 72.
36 Décision n° 2022-842 DC du 12 août 2022, Loi relative à la loi de finances rectificative pour 2022, paragr. 25.
37 Décision n° 2022-844 DC du 15 décembre 2022, Loi portant mesures d’urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi, paragr. 42.
38 Décision n° 86-224 DC du 23 janvier 1987 précitée, cons. 15 ; décision n° 2008-563 DC du 21 février 2008, Loi facilitant l’égal accès des femmes et des hommes au mandat de conseiller général, cons. 3.
39 Décision n° 2002-465 DC du 13 janvier 2003, Loi relative aux salaires, au temps de travail et au développement de l’emploi, cons. 3. En revanche, le Conseil a jugé que le principe de faveur constitue un principe fondamental du droit du travail au sens de l’article 34 de la Constitution, dont il appartient au législateur de déterminer le contenu et la portée (décision n° 2004-494 DC du 29 avril 2004, Loi relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social, cons. 9).
40 Décision n° 2011-635 DC du 4 août 2011, Loi sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et le jugement des mineurs, cons. 24 et 25.
41 Décision n° 88-244 DC du 20 juillet 1988, Loi portant amnistie, cons. 12 ; décision n° 89-254 DC du 4 juillet 1989, Loi modifiant la loi n° 86-912 du 6 août 1986 relative aux modalités d’application des privatisations, cons. 13 ; décision n° 2010-605 DC du 12 mai 2010, Loi relative à l’ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d’argent et de hasard en ligne, cons. 7.
42 Décision n° 2019-785 QPC du 24 mai 2019, M. Mario S. (Point de départ du délai de prescription de l’action publique en matière criminelle), paragr. 6.
43 Décision n° 2023–1069/1070 QPC du 24 novembre 2023, M. Sékou D. et autre (Cours criminelles départementales), paragr. 14 à 17.
44 Voir, en dernier lieu, la décision n° 2023-1069/1070 QPC du 24 novembre 2023 précitée.
45 Décision n° 86-224 DC du 23 janvier 1987 précitée, cons. 15.
46 Décision n° 2002–461 DC du 29 août 2002 précitée, cons. 26.
47 En ce sens, M. Bruno Genevois a pu affirmer que, « S’il n’est pas douteux que la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse figure au nombre des grandes lois républicaines relatives à l’exercice des libertés publiques et si, à ce titre, il peut être soutenu qu’elle énonce des PFRLR, elle pâlit de la comparaison avec les dispositions de l’article 11 de la Déclaration de 1789 qui proclament "en lettres de feu" la libre communication des pensées et des opinions. La préférence donnée par la décision n° 84-181 DC du 10 et 11 octobre 1984, à l’article 11 de la Déclaration se justifie d’autant plus que le juge constitutionnel a su intégrer dans son raisonnement les destinataires de la liberté proclamée par l’article 11 » (« Une catégorie de principes de valeur constitutionnelle : les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République », RFDA, 1998, p. 477).
48 Décision n° 84–181 DC du11 octobre 1984, Loi visant à limiter la concentration et à assurer la transparence financière et le pluralisme des entreprises de presse, cons. 37.
49 Décision n° 2009–580 DC du 10 juin 2009, Loi favorisant la diffusion et la protection de la création sur internet, cons. 15.
50 Ibid., cons. 12.
51 Ibid., cons. 16.
52 Décision n° 2012-647 DC du 28 février 2012, Loi visant à réprimer la contestation de l’existence des génocides reconnus par la loi, cons. 5.
53 Décision n° 2016–611 QPC du 10 février 2017, M. David P. (Délit de consultation habituelle de sites internet terroristes), paragr. 5 ; décision n° 2017–682 QPC du 15 décembre 2017, M. David P. (Délit de consultation habituelle des sites internet terroristes II), paragr. 4.
54 Décision n° 2017–682 QPC précitée, paragr. 15 et 16.
55 Décision n° 2020-801 DC du 18 juin 2020, Loi visant à lutter contre les contenus haineux sur internet, paragr. 4 à 9. Voir, depuis, la décision n° 2022-841 DC du 13 août 2022, Loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière de prévention de la diffusion de contenus à caractère terroriste en ligne, par laquelle le Conseil constitutionnel a déclaré conformes à la Constitution des dispositions désignant l’autorité compétente pour émettre une injonction de retrait de contenus à caractère terroriste après avoir notamment relevé que « la détermination du caractère terroriste des contenus en cause n’est pas laissée à la seule appréciation de l’autorité administrative que les dispositions contestées désignent pour émettre des injonctions de retrait » (paragr. 16).
56 Décision n° 2015-512 QPC du 8 janvier 2016, M. Vincent R. (Délit de contestation de l’existence de certains crimes contre l’humanité), cons. 7 et 8. En revanche, dans sa décision n° 2016-745 DC du 26 janvier 2017, le Conseil constitutionnel a censuré d’office l’infraction réprimant la négation, la minoration ou la banalisation de façon outrancière de certains crimes de génocide, crimes contre l’humanité, crimes de réduction en esclavage ou crimes de guerre, lorsque cette négation, cette minoration ou cette banalisation constituent une incitation à la violence ou à la haine par référence à la prétendue race, la couleur, la religion, l’ascendance ou l’origine nationale. Il a notamment jugé que, compte tenu de l’existence d’autres infractions déjà en vigueur, le seul effet des dispositions contrôlées était d’obliger le juge à se prononcer sur l’existence d’un crime dont la négation, la minoration ou la banalisation est alléguée, sans être saisi au fond de ce crime et sans qu’une juridiction n’ait auparavant statué sur celui-ci. Le Conseil en a conclu que « ces dispositions font peser une incertitude sur la licéité d’actes ou de propos portant sur des faits susceptibles de faire l’objet de débats historiques qui ne satisfait pas à l’exigence de proportionnalité qui s’impose s’agissant de l’exercice de la liberté d’expression » (décision n° 2016–745 DC du 26 janvier 2017, Loi relative à l’égalité et à la citoyenneté, paragr. 196).
57 Décision n° 2018-706 QPC du 18 mai 2018, M. Jean-Marc R. (Délit d’apologie d’actes de terrorisme), paragr. 21 à 24.
58 Décision n° 2011–131 QPC du 20 mai 2011, Mme Térésa C. et autre (Exception de vérité des faits diffamatoires de plus de dix ans), cons. 5 et 6. Par la suite, le Conseil a été saisi des dispositions du sixième alinéa de l’article 35 de la loi du 29 juillet 1881 interdisant de rapporter la preuve d’un fait diffamatoire amnistié ou prescrit. Dans sa décision n° 2013-319 QPC du 7 juin 2013, il les a déclarées contraires à la Constitutions aux motifs « que l’interdiction prescrite […] vise sans distinction, dès lors qu’ils se réfèrent à un fait constituant une infraction amnistiée ou prescrite, ou qui a donné lieu à une condamnation effacée par la réhabilitation ou la révision, tous les propos ou écrits résultant de travaux historiques ou scientifiques ainsi que les imputations se référant à des événements dont le rappel ou le commentaire s’inscrivent dans un débat public d’intérêt général ; que, par son caractère général et absolu, cette interdiction porte à la liberté d’expression une atteinte qui n’est pas proportionnée au but poursuivi » (décision n° 2013-319 QPC du 7 juin 2013, M. Philippe B. [Exception de vérité des faits diffamatoires constituant une infraction amnistiée ou prescrite, ou ayant donné lieu à une condamnation effacée par la réhabilitation ou la révision], cons. 9).
59 Décision n° 2013-302 QPC du 12 avril 2013 précitée, cons. 5 et 6.
60 Était ainsi visée la procédure de référé devant les juridictions civiles.
61 Décision n° 2013–311 QPC du 17 mai 2013, Société Écocert France (Formalités de l’acte introductif d’instance en matière de presse), cons. 5.
62 Décision n° 2020-863 QPC du 13 novembre 2020, Société Manpower France (Délai de dix jours accordé au défendeur en matière de diffamation), paragr. 10 à 12.
63 Voir, par exemple, la décision n° 2023-1049 QPC du 26 mai 2023, Société Nexta 2022 (Exclusion des opérations portant sur les titres et contrats financiers du champ de la révision pour imprévision), paragr. 3.
64 Décision n° 2022-999 QPC du 17 juin 2022, Établissement public La Monnaie de Paris (Impossibilité pour le témoin assisté d’interjeter appel de la décision de refus du juge d’instruction de constater la prescription de l’action publique), paragr. 5.
65 La jurisprudence du Conseil constitutionnel a également pour objet de veiller à l’égalité entre les parties à une même procédure. Cette dimension du principe constitutionnel d’égalité devant la justice implique de comparer la situation des différentes parties à une même procédure et, notamment, en procédure pénale, celle de la personne mise en cause (mis en examen ou prévenu), de la partie civile et du ministère public (voir, par exemple, sur la communication des pièces aux parties : décisions n° 2011-160 QPC du 9 septembre 2011, M. Hovanes A. [Communication du réquisitoire définitif aux parties], cons. 4 et n° 2012-284 QPC du 23 novembre 2012, Mme Maryse L. [Droit des parties non assistées par un avocat et expertise pénale], cons. 3).
66 À travers, notamment, l’existence de dispositions attribuant un contentieux spécifique à une juridiction spécialisée. Voir, par exemple, la décision n° 2018-756 QPC du 17 janvier 2019, M. Jean-Pierre F. (Compétence des juridictions spécialisées en matière militaire pour les infractions commises par des militaires de la gendarmerie dans le service du maintien de l’ordre).
67 Voir, par exemple, décision n° 2019-803 QPC du 27 septembre 2019, Mme Fabienne V. (Mise en mouvement de l’action publique en cas d’infraction commise par un militaire lors d’une opération extérieure).
68 Décision n° 2011-113/115 QPC du 1er avril 2011, M. Xavier P. et autre (Motivation des arrêts d’assises) cons. 9.
69 Décision n° 2023-1069/1070 QPC du 24 novembre 2023 précitée, paragr. 21 à 23.
70 Décision n° 2007-559 DC du 6 décembre 2007, Loi organique tendant à renforcer la stabilité des institutions et la transparence de la vie politique en Polynésie française, cons. 26.
71 Décision n° 2015-492 QPC du 16 octobre 2015, Association Communauté rwandaise de France (Associations pouvant exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne l’apologie des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité), cons. 7.
72 Décision n° 2021-909 QPC du 26 mai 2021, Mme Line M. (Impossibilité d’obtenir devant le tribunal de police la condamnation de la partie civile pour constitution abusive), paragr. 9.