Conformité
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 18 octobre 2023 par le Conseil d’État (décision n° 472830 du 11 octobre 2023) d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) posée par la société Europe métal concept portant sur la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l’article L. 2223–18–1–1 du code général des collectivités territoriales (CGCT), dans sa rédaction issue de la loi n° 2022–217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale.
Dans sa décision n° 2023-1075 QPC du 18 janvier 2024, le Conseil constitutionnel a déclaré conformes à la Constitution les paragraphes I et III de l’article L. 2223–18–1–1 du CGCT, dans cette rédaction.
Dans cette affaire, Mme Jacqueline Gourault a estimé devoir s’abstenir de siéger.
I. – Les dispositions contestées
A. – Objet des dispositions contestées
1. – Le régime juridique applicable à la crémation issu de la loi du 19 décembre 2008
a. – L’adaptation de la législation funéraire au recours accru à la crémation
* La crémation est un mode de sépulture autorisé en France depuis la loi du 15 novembre 18871 qui dispose à son article 3, que « Tout majeur ou mineur émancipé, en état de tester, peut régler les conditions de ses funérailles, notamment en ce qui concerne le caractère civil ou religieux à leur donner et le mode de sa sépulture »2.
Soumise à l’autorisation du maire3, chargé d’assurer la police des funérailles et des cimetières4, la crémation nécessite, sauf exception, une volonté clairement affirmée par le défunt ou par la personne pourvoyant aux funérailles5.
D’un usage longtemps marginal, la crémation a connu au cours des dernières décennies un développement qui a conduit le législateur à préciser progressivement le cadre juridique qui lui est applicable6.
* La loi du 8 janvier 1993 relative à la législation dans le domaine funéraire7 a, tout d’abord, amélioré l’accès à la crémation.
Elle a ainsi étendu le monopole communal en matière de création et d’extension des cimetières à la création et à la gestion des crématoriums8, laquelle peut être exercée en régie ou par délégation de service public9.
Elle a également encadré les conditions de fonctionnement des crématoriums10, défini les conditions d’habilitation des régies, entreprises ou associations des services des pompes funèbres et réglementé leur activité commerciale. Elle a en outre renforcé l’information des familles des défunts, en particulier à travers la création du règlement national des pompes funèbres11.
Ces dispositions ont été complétées notamment par l’ordonnance du 28 juillet 200512 afin de prévoir la mise en place d’« espaces pour le dépôt ou l’inhumation des urnes ou la dispersion des cendres dans le cimetière » et de mettre un terme à la possibilité de disposer des cendres dans des sites cinéraires privés13.
Le décret n° 2007-328 du 12 mars 2007 relatif à la protection des cendres funéraires a par la suite apporté des précisions sur la destination des cendres.
Il prévoyait ainsi la remise de l’urne funéraire à toute personne ayant pourvu aux funérailles et, sur autorisation du maire, la possibilité de l’inhumer dans une sépulture, de la déposer dans une case de columbarium ou de la sceller sur un monument funéraire. Il encadrait également la possibilité de déposer ou inhumer l’urne dans une propriété privée ou de disperser les cendres en pleine nature.
* Le rapport d’information de MM. Jean-Pierre Sueur et Jean-René Lecerf précité faisait toutefois le constat que ces premières avancées demeuraient « insuffisantes eu égard au développement de la pratique de la crémation » du fait notamment du caractère facultatif de la création d’équipements cinéraires par les communes ou les intercommunalités, dont pouvaient résulter des difficultés d’accès à la crémation, et de l’indétermination du statut des cendres des défunts14.
b. – La réforme introduite par la loi du 19 décembre 2008
* Reprenant les recommandations de ce rapport, la loi du 19 décembre 2008, dite « loi Sueur »15, a modifié plusieurs dispositions du CGCT afin, tout d’abord, de renforcer les obligations des communes et des établissements publics de coopération intercommunale en matière d’opérations cinéraires.
L’article L. 2223-1 prévoit ainsi que les communes et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) de 2 000 habitants et plus, compétents en matière de cimetière, ont l’obligation de disposer « d’au moins un site cinéraire destiné à l’accueil des cendres des personnes décédées dont le corps a donné lieu à crémation ». Par ailleurs, l’article L. 2223–2 précise que ce site cinéraire « comprend un espace aménagé pour leur dispersion et doté d’un équipement mentionnant l’identité des défunts, ainsi qu’un columbarium ou des espaces concédés pour l’inhumation des urnes ».
L’article L. 2223–27 prévoit en outre que le service des pompes funèbres est gratuit pour les personnes dépourvues de ressources suffisantes. Par conséquent, lorsque ce service public n’est pas assuré par la commune, celle-ci prend en charge les frais d’obsèques de ces personnes. Lorsque le défunt en a exprimé la volonté, le maire fait procéder à la crémation du corps.
Par ailleurs, l’article L. 2223-40 précise les conditions dans lesquelles les communes et les intercommunalités exercent leur compétence en matière de création et de gestion, directe ou par voie de gestion déléguée, des crématoriums et des sites cinéraires, sous le contrôle du préfet16, tandis que l’article L. 2223–23 indique notamment les critères pris en compte par le préfet pour accorder une habilitation à une régie, une entreprise ou une association fournissant un service de pompes funèbres17.
La loi du 19 décembre 2008 a également renforcé les conditions d’exercice de la profession d’opérateur funéraire et institué plusieurs dispositions visant à sécuriser les démarches des familles des défunts18.
Ces dispositions, qui visaient ainsi à répondre aux difficultés d’accès à la crémation dans certaines communes et à mieux encadrer le fonctionnement des crématoriums, ont été complétées par l’introduction d’un statut ad hoc pour les cendres issues d’une crémation et de règles prévoyant leur destination.
* L’exposé des motifs de la proposition de loi à l’origine de la loi du 19 décembre 2008 soulignait que « L’acte de la crémation du corps aboutit à ce que, par la dématérialisation du corps, celui-ci devient dispersable, partageable, portatif et privatisable. Alors que le corps qui est destiné à l’inhumation ne peut reposer que dans un cimetière, par définition public, accède à un statut public et donc à la protection que ce statut garantit au travers des pouvoirs du maire (ordre, décence, neutralité) ainsi qu’à la protection pénale accordée aux sépultures (en cas de violation de sépultures, tout particulièrement), les cendres se trouvent entièrement privatisées ». Or, il relevait que « Le vide législatif actuel - qui constitue une exception française par rapport aux autres pays d’Europe - pose de nombreux problèmes » au regard des règles de décence devant s’appliquer aux restes humains, des conditions de conservation des urnes et du travail du deuil et de la mémoire.
- Pour répondre à ce constat, la loi de 19 décembre 2008 a, d’une part, introduit un nouvel article 16-1-1 au sein du code civil disposant que « Le respect dû au corps humain ne cesse pas avec la mort. Les restes des personnes décédées, y compris les cendres de celles dont le corps a donné lieu à crémation, doivent être traités avec respect, dignité et décence ». Les cendres sont ainsi explicitement assimilées à la dépouille mortelle.
À cet égard, les travaux préparatoires soulignaient que si l’application de ces principes « au corps humain mort » n’allait pas de soi, puisque « le droit au respect du corps humain est un droit subjectif de la personne » et qu’il « devrait donc logiquement disparaître lorsque la personne qui est titulaire de ce droit disparaît, les morts n’ayant plus de personnalité juridique », « les dépouilles mortelles bénéficient également d’une protection légale, le code pénal réprimant les atteintes au respect dû aux morts telles l’atteinte à l’intégrité d’un cadavre et la violation ou la profanation de sépulture. Lorsque la protection de l’intégrité du corps concerne un défunt, son fondement n’est plus la protection de la vie, mais la protection du caractère sacré, de la dignité de la personne humaine qui demeure après le décès. Considérer le cadavre comme une chose serait nier la personne qui a habité le corps. L’impératif de respect de la dignité de la personne a donc amené à étendre aux défunts la protection prévue »19.
Ces dispositions consacrent ainsi l’application des principes de « respect, dignité et décence » aux restes des personnes décédées, qui comprennent les cendres des personnes dont le corps a fait l’objet d’une crémation.
- D’autre part, la loi du 19 décembre 2008 a instauré un régime juridique propre aux cendres des défunts au sein d’une sous–section du CGCT intitulée « Destination des cendres », composée des articles L. 2223–18–1 à L. 2223–18–4.
L’article L. 2223-18-1 prévoit ainsi qu’après la crémation du corps, « les cendres du défunt sont pulvérisées et recueillies dans une urne cinéraire munie extérieurement d’une plaque portant l’identité du défunt et le nom du crématorium ». Dans l’attente d’une décision relative à la destination de ces cendres, celles-ci peuvent être conservées durant un an au crématorium ou dans un lieu de culte dans l’attente d’une décision relative à la destination des cendres.
Au terme de ce délai et en l’absence de décision de la personne ayant qualité pour pourvoir aux funérailles, les cendres sont dispersées dans l’espace aménagé à cet effet du cimetière de la commune du lieu du décès ou dans l’espace le plus proche aménagé à cet effet.
L’article L. 2223–18–2 du CGCT précise, quant à lui, qu’à la demande de la personne ayant qualité pour pourvoir aux funérailles, les cendres sont en leur totalité :
– soit conservées dans l’urne cinéraire, qui peut être inhumée dans une sépulture ou déposée dans une case de columbarium ou scellée sur un monument funéraire à l’intérieur d’un cimetière ou d’un site cinéraire ;
– soit dispersées dans un espace aménagé à cet effet d’un cimetière ou d’un site cinéraire ;
– soit dispersées en pleine nature, sauf sur les voies publiques.
Dans ce dernier cas, l’article L. 2223-18-3 prévoit que la personne ayant qualité pour pourvoir aux funérailles doit en faire la déclaration à la mairie de la commune du lieu de naissance du défunt, et son identité, la date et le lieu de dispersion sont inscrits sur un registre ad hoc.
Enfin, l’article L. 2223-18-4 réprime d’une amende de 15 000 euros par infraction le fait de créer, de posséder, d’utiliser ou de gérer, à titre onéreux ou gratuit, tout lieu collectif, en dehors d’un cimetière public ou d’un lieu de dépôt ou de sépulture autorisé, destiné au dépôt temporaire ou définitif des urnes ou à la dispersion des cendres, en violation du CGCT.
La réforme introduite par la loi du 19 décembre 2008 a ainsi permis de mieux assurer l’accès à la crémation et de sécuriser la destination des cendres. Toutefois, pour répondre à de nouvelles problématiques liées à cette pratique funéraire, le législateur est de nouveau intervenu dans le cadre de la loi du 21 février 2022 pour compléter la législation en vigueur, notamment au regard du traitement à réserver aux métaux issus de la crémation.
2. – L’introduction d’un régime propre aux métaux issus de la crémation par la loi du 21 février 2022 (les dispositions objet de la décision commentée)
* Lors de l’examen de la loi du 21 février 2022 précitée, plusieurs dispositions ont été introduites à l’initiative du sénateur Jean-Pierre Sueur afin de faire évoluer le droit funéraire.
Parmi ces dispositions20, un nouvel article L. 2223-18-1-1 a été inséré au sein du CGCT afin d’encadrer les conditions dans lesquelles les métaux issus d’une crémation peuvent être récupérés et cédés (les dispositions objet de la décision commentée).
À la suite de la crémation, des métaux peuvent en effet ne pas avoir été détruits par la combustion21. Il peut s’agir des éléments métalliques du cercueil, des effets personnels du défunt qui y sont déposés, ou bien d’éléments intégrés à son corps de son vivant, telles que les prothèses.
Or, avant la loi du 21 février 2022, ces métaux, séparés des cendres restituées à la famille22, étaient considérés comme des déchets. Ils étaient donc récupérés puis cédés par les gestionnaires de crématorium à des entreprises spécialisées dans leur recyclage, sans encadrement légal ou réglementaire particulier. Selon les travaux préparatoires, ce commerce, qui s’est développé dans les années 2010, représentait environ deux millions d’euros annuels en 2021, soit 5 à 15 euros par crémation23.
Le sénateur Jean–Pierre Sueur avait ainsi relevé, dans une question écrite24, qu’« aucune disposition législative ni réglementaire ne semble exister à cet égard : ni sur les conditions dans lesquelles ces métaux sont confiés par les gestionnaires des crématoriums à une entreprise plutôt qu’à une autre ; ni sur les conditions dans lesquelles ces entreprises reversent une part du produit qu’elles retirent du traitement de ces métaux aux crématoriums ou, dans certains cas, à une fondation ; ni sur la part de ce produit susceptible de revenir aux familles des défunts concernés ». Il demandait, en conséquence, quelles dispositions législatives et réglementaires le ministre de l’intérieur comptait prendre pour y remédier.
Dans une réponse publiée le 21 mai 2020, le ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales relevait que « les métaux issus de la crémation ne peuvent pas être assimilés juridiquement aux cendres funéraires, c’est-à-dire aux restes mortels du défunt. Dès lors, leur récupération au sortir de l’appareil crématoire par l’opérateur funéraire gestionnaire de l’équipement est légale ». Il soulignait toutefois que « son cadre demande à être précisé, au regard des enjeux liés au recyclage et à la valorisation des métaux, ainsi qu’à l’utilisation du produit financier ainsi généré ».
Saisi pour avis d’un projet de décret visant à encadrer ces pratiques, le Conseil d’État avait tout d’abord considéré que « ces métaux sont des choses ordinaires distinctes des cendres du défunt qui doivent être traitées avec respect, dignité et décence »25. Toutefois, il avait considéré « que les dispositions du projet [de décret] tranchent des questions relatives au devenir de choses se trouvant, avant la crémation, dans le corps du défunt ou sur son cercueil. Elles touchent dès lors aux principes fondamentaux de la propriété, matière qui relève de la loi en vertu de l’article 34 de la Constitution ».
Selon le Conseil d’État, il revenait donc au législateur d’encadrer lui-même la récupération et la valorisation de ces métaux.
* À cette fin, un nouvel article L. 2223–18–1–1 a été inséré au sein du CGCT par la loi du 21 février 2022.
Son paragraphe I énonce tout d’abord le principe selon lequel « Sans considération de leur origine, les métaux issus de la crémation ne sont pas assimilés aux cendres du défunt ».
Tous les métaux recueillis à l’issue de la crémation, qu’ils proviennent du cercueil, d’un effet personnel du défunt ou d’une prothèse sont donc considérés comme distincts des cendres du défunt, et par conséquent, du régime de protection qui s’attache à ces dernières.
Ce même paragraphe précise ensuite que « Ces métaux font l’objet d’une récupération par le gestionnaire du crématorium pour cession, à titre gratuit ou onéreux, en vue du traitement approprié pour chacun d’eux ». Le gestionnaire du crématorium est ainsi tenu de céder ces métaux qui sont valorisés différemment selon leur nature.
Alors que l’amendement initial de M. Sueur subordonnait la récupération de ces métaux à l’absence de « volonté contraire et non équivoque exprimée dans le contrat prévoyant des prestations d’obsèques à l’avance ou dans un écrit adressé à l’opérateur funéraire avant la crémation et visant à ce que les métaux éventuellement issus de la crémation soient remis à l’issue de celle‑ci à la personne ayant qualité pour pourvoir aux funérailles »26, cette condition a été supprimée au cours de la navette au motif que, « En pratique, la récupération de ces métaux peut s’avérer difficilement réalisable, car la quantité et la composition des résidus métalliques présents dans le corps humain ne sont pas connus, ni de la famille, ni des opérateurs funéraires, avant la crémation »27.
Le paragraphe II de cet article précise que les recettes financières résultant le cas échéant de la cession de ces métaux ne peuvent être destinées qu’à financer la prise en charge des obsèques des personnes dépourvues de recettes suffisantes ou faire l’objet d’un don à une association d’intérêt général ou une fondation reconnue d’utilité publique.
Son paragraphe III prévoit que les dispositions de ses deux premiers paragraphes figurent sur tout document contractuel relatif à la crémation du défunt et sont affichées dans la partie des crématoriums ouverte au public.
Enfin, son paragraphe IV renvoie à un décret en Conseil d’État le soin de préciser ses conditions d’application.
Le décret n° 2022-1127 du 5 août 2022 portant diverses mesures relatives à la réglementation funéraire, pris en application de ces dispositions, apporte ainsi certaines précisions sur les conditions dans lesquelles les métaux issus de la crémation peuvent être cédés. Il prévoit également que les dispositions de l’article L. 2223-18-1-1 du CGCT relatives à la récupération et à la valorisation des métaux issus de la crémation sont « reproduites dans le devis relatif à la crémation. Ces dispositions figurent également, le cas échéant, dans le contrat prévoyant des prestations d’obsèques à l’avance lorsqu’il stipule le recours à la crémation »28.
B. – Origine de la QPC et question posée
La société Europe métal concept avait formé un recours en excès de pouvoir devant le Conseil d’État contre le décret du 5 août 2022 précité. À cette occasion, elle avait soulevé une QPC à l’encontre de l’article L. 2223–18–1–1 du CGCT.
Dans sa décision du 11 octobre 2023 précitée, le Conseil d’État avait jugé que « les moyens tirés de ce [que les dispositions de cet article] portent atteinte au principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine découlant du premier alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 et au droit de propriété soulèvent une question présentant un caractère sérieux ». Il l’avait donc renvoyée au Conseil constitutionnel.
II. – L’examen de la constitutionnalité des dispositions contestées
* La société requérante reprochait à ces dispositions de permettre au gestionnaire du crématorium de récupérer et de céder les métaux issus de la crémation, quelle que soit leur origine, alors qu’ils auraient été, pour certains d’entre eux, indissociables du corps du défunt et auraient ainsi dû faire l’objet de la même protection que celle attachée à ses cendres. Il en résultait selon elle une méconnaissance du principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine.
Elle faisait également valoir que, à supposer que les métaux issus de la crémation ne soient pas assimilés aux cendres du défunt, ces dispositions méconnaissaient le droit de propriété dans la mesure où elles permettaient leur récupération et leur cession par le gestionnaire du crématorium, sans que les ayants droit ne puissent faire valoir leurs droits sur ces métaux ni être informés de leur valeur.
* Au regard de ces griefs, le Conseil constitutionnel a jugé que la QPC portait sur les paragraphes I et III de l’article L. 2223–18–1–1 du CGCT (paragr. 4 de la décision commentée).
A. – La jurisprudence constitutionnelle relative au principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine
* Le Conseil constitutionnel a reconnu pour la première fois la valeur constitutionnelle du principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine dans sa décision n° 94–343/344 DC du 27 juillet 1994. Il a ainsi considéré que « le Préambule de la Constitution de 1946 a réaffirmé que tout être humain, sans distinction de race, de religion ni de croyance, possède des droits inaliénables et sacrés ; que la sauvegarde de la dignité de la personne contre toute forme d’asservissement et de dégradation est au nombre de ces droits et constitue un principe à valeur constitutionnelle »29.
Lors du délibéré, le Président Robert Badinter a souligné qu’« à l’occasion de l’examen de ces lois, [il] est possible de consacrer la valeur constitutionnelle de la dignité de la personne humaine avec toutes les conséquences qui en découlent l’intégrité, l’inviolabilité, la non-patrimonialité » et considéré qu’« il est certain que la dignité de l’homme inclut le respect dû au cadavre »30.
Monsieur Jacques Robert a, quant à lui, relevé que « Le respect de la dignité de la personne humaine […] implique le respect de la vie, même embryonnaire, et le respect dû aux morts »31.
À la suite de cette première décision, le Conseil constitutionnel a contrôlé diverses dispositions sur le fondement du principe de sauvegarde de la dignité humaine32, notamment dans le domaine de la bioéthique, sans toutefois se prononcer formellement sur l’application de ce principe aux personnes décédées.
* Dans ce cadre, le Conseil peut être amené à rappeler qu’il ne dispose pas d’un pouvoir de même nature que celui du Parlement lorsqu’il est saisi, sous un prisme constitutionnel, de questions qui relèvent plus largement de débats éthiques ou de société, en particulier, dans le domaine du droit des personnes et de la famille.
Le Conseil veille en effet à marquer clairement la différence entre le rôle qui lui est imparti par la Constitution et celui du Parlement. Il rappelle ainsi que ses articles 61 et 61-1 ne lui confèrent pas « un pouvoir général d’appréciation et de décision de même nature que celui du Parlement », de sorte qu’il ne lui appartient pas « de substituer son appréciation à celle du législateur »33.
Le choix du Conseil constitutionnel d’opérer, sur ces questions de société, un contrôle restreint s’est notamment manifesté à l’occasion de l’examen de dispositions relatives à l’interruption volontaire de grossesse ou, plus récemment, de la législation sur la fin de vie.
- Dans sa décision n° 2001-446 DC du 27 juin 2001, saisi d’un grief tiré d’une atteinte au « principe du respect de tout être humain dès le commencement de sa vie », à propos d’une disposition portant de dix à douze semaines de grossesse le délai pendant lequel peut être pratiquée une interruption volontaire de grossesse lorsque la femme enceinte se trouve, du fait de son état, dans une situation de détresse, le Conseil a considéré que le législateur n’avait en l’espèce pas rompu l’équilibre entre « la sauvegarde de la dignité de la personne humaine contre toute forme de dégradation », d’une part, et « la liberté de la femme qui découle de l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen », d’autre part34.
- Dans sa décision n° 2014-700 du 31 juillet 2014, saisi de la suppression de toute référence à une situation de détresse pour l’accès à une interruption volontaire de grossesse, il s’est borné, pour rejeter le même grief, à relever qu’une telle modification ne méconnaissait aucune exigence constitutionnelle35.
- Dans sa décision n° 2015-727 DC du 21 janvier 2016, saisi de dispositions supprimant le délai d’une semaine imposé entre la demande formulée par la femme d’interrompre sa grossesse et la confirmation écrite de cette demande, le Conseil a jugé : « qu’en supprimant le délai d’une semaine entre la demande de la femme d’interrompre sa grossesse et la confirmation écrite de cette demande, le législateur n’a pas rompu l’équilibre que le respect de la Constitution impose entre, d’une part, la sauvegarde de la dignité de la personne humaine contre toute forme de dégradation et, d’autre part, la liberté de la femme qui découle de l’article 2 de la Déclaration de 1789, dès lors que l’article L. 2212-5 du code de la santé publique dans sa rédaction résultant de l’article 82 fait obstacle à ce que la demande d’interruption de grossesse et sa confirmation écrite interviennent au cours d’une seule et même consultation »36.
- Dans sa décision n° 2017-632 QPC du 2 juin 2017, le Conseil était saisi de dispositions habilitant le médecin en charge d’un patient hors d’état d’exprimer sa volonté à arrêter ou à ne pas mettre en œuvre, au titre du refus de l’obstination déraisonnable, des traitements qui apparaissaient inutiles, disproportionnés ou sans autre effet que le seul maintien artificiel de la vie.
Dans le droit fil de sa jurisprudence, il a tout d’abord fondé sa décision sur le principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine, dont il a rappelé le caractère de principe à valeur constitutionnelle, et, non, comme le lui suggérait l’association requérante, sur celui du droit à la vie, ainsi que sur le principe à valeur constitutionnelle de la liberté personnelle. Il a ainsi estimé que la législation sur la fin de vie mettait en cause ces deux exigences constitutionnelles.
Il en a déduit, qu’en cette matière, « Il appartient […] au législateur, compétent en application de l’article 34 de la Constitution pour fixer les règles concernant les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques, notamment en matière médicale, de déterminer les conditions dans lesquelles une décision d’arrêt des traitements de maintien en vie peut être prise, dans le respect de la dignité de la personne ». Puis, après avoir rappelé les différentes garanties prévues par le législateur, il a jugé « qu’en adoptant les dispositions contestées, le législateur, qui a assorti de garanties suffisantes la procédure qu’il a mise en place, n’a pas porté d’atteinte inconstitutionnelle au principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine et à la liberté personnelle »37.
- De même, dans sa décision n° 2022–1022 QPC du 10 novembre 202238, le Conseil était saisi de dispositions permettant au médecin d’écarter les directives anticipées d’un patient relatives à sa fin de vie, lorsqu’elles se révélaient manifestement inappropriées ou non conformes à sa situation médicale.
Il a considéré qu’en permettant au médecin d’écarter ces directives anticipées, le législateur avait pris en compte le fait que ces dernières sont rédigées avant que le patient ne soit confronté à sa fin de vie, et qu’il avait, ce faisant, « entendu garantir le droit de toute personne à recevoir les soins les plus appropriés à son état et assurer la sauvegarde de la dignité des personnes en fin de vie ». Puis il a rappelé qu’il ne disposait pas d’un pouvoir général d’appréciation et de décision de même nature que celui du Parlement, et qu’il ne lui appartenait pas de substituer son appréciation à celle du législateur sur les conditions dans lesquelles un médecin peut écarter les directives anticipées d’un patient en fin de vie hors d’état d’exprimer sa volonté.
Le Conseil a ensuite rappelé l’ensemble des garanties prévues par les dispositions contestées et jugé que le législateur n’avait méconnu ni le principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine ni la liberté personnelle.
* Le Conseil s’est également prononcé, sur le fondement du principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine et de l’inviolabilité du corps humain, sur des dispositions prévoyant des examens ou des prélèvements opérés directement sur une personne.
- Dans sa décision n° 2007-557 DC du 15 novembre 2007, le Conseil était saisi de dispositions permettant le recours aux empreintes génétiques pour établir la filiation de personnes qui sollicitent la délivrance d’un visa pour rejoindre leurs parents au titre du regroupement familial. Il a jugé que le grief tiré de l’atteinte à la dignité de personne humaine manquait en fait, dès lors que, « en autorisant ce mode supplétif de preuve d’un lien de filiation, le dispositif critiqué n’instaure pas une mesure de police administrative ; qu’en outre, la loi n’autorise pas l’examen des caractéristiques génétiques du demandeur de visa mais permet, à la demande de ce dernier ou de son représentant légal, son identification par ses seules empreintes génétiques dans des conditions proches de celles qui sont prévues par le deuxième alinéa de l’article 16-11 du code civil »39.
- De même, saisi de dispositions permettant aux officiers de police judiciaire de décider d’office un prélèvement biologique aux fins de rapprochement ou de conservation au fichier national automatisé des empreintes génétiques, le Conseil a relevé, dans sa décision n° 2010–25 QPC du 16 septembre 2010, que ce prélèvement ne pouvait être effectué sans l’accord de l’intéressé que « lorsqu’il n’est pas possible de procéder à un prélèvement biologique sur une personne, l’identification de son empreinte génétique peut être réalisée à partir de matériel biologique qui se serait naturellement détaché de son corps », et « qu’en tout état de cause, le prélèvement n’implique aucune intervention corporelle interne ; qu’il ne comporte aucun procédé douloureux, intrusif ou attentatoire à la dignité des personnes »40.
Il a également constaté que « la disposition contestée n’autorise pas l’examen des caractéristiques génétiques des personnes ayant fait l’objet de ces prélèvements mais permet seulement leur identification par les empreintes génétiques »41. Il en a déduit que les griefs tirés de l’atteinte à l’inviolabilité du corps humain et au principe du respect de la dignité de la personne humaine manquaient en fait.
- Dans sa décision n° 2013-674 DC du 1er août 2013, saisi de dispositions portant sur les autorisations de recherches sur l’embryon humain et les cellules souches embryonnaires, le Conseil a jugé que, compte tenu des garanties prévues par le législateur pour la délivrance de ces autorisations, le principe de sauvegarde de la dignité humaine n’était pas méconnu42.
- Plus récemment, dans sa décision n° 2018–768 QPC du 21 mars 2019, le Conseil était saisi de dispositions permettant de réaliser des examens biologiques osseux afin de déterminer l’âge d’une personne. Il a rappelé que ces examens ne peuvent être réalisés sans l’accord de la personne et qu’ils « n’impliquent aucune intervention corporelle interne et ne comportent aucun procédé douloureux, intrusif ou attentatoire à la dignité des personnes »43. Il a jugé en conséquence que les griefs tirés de l’atteinte au principe du respect de la dignité de la personne humaine et à l’inviolabilité du corps humain manquaient en fait.
* Par ailleurs, le Conseil constitutionnel a pu examiner, sur le fondement du droit au respect de la vie privée et du droit de mener une vie familiale normale, des dispositions portant sur des dépouilles mortelles.
Dans sa décision n° 2011–173 QPC du 30 septembre 2011, le Conseil était ainsi saisi des conditions de réalisation des expertises génétiques sur une personne décédée à des fins d’actions en matière de filiation.
Il a d’abord rappelé que « les dispositions contestées ne permettent, à l’occasion d’une action en justice tendant soit à l’établissement ou la contestation d’un lien de filiation, soit à l’obtention ou à la suppression de subsides, de recourir à l’identification par empreintes génétiques sur une personne décédée, que si celle–ci avait, de son vivant, donné son accord exprès à l’exécution d’une telle mesure d’instruction ; qu’ainsi, en dehors de ce cas, les parties au procès ne peuvent avoir recours à l’expertise génétique sur le corps de la personne décédée avec laquelle un lien biologique est revendiqué ou contesté »44.
Il a ensuite précisé qu’en prévoyant que les personnes décédées sont présumées ne pas avoir consenti à une identification par empreintes génétiques, le législateur avait entendu faire obstacle aux exhumations « afin d’assurer le respect dû aux morts », et qu’il « n’appartient pas au Conseil constitutionnel de substituer son appréciation à celle du législateur sur la prise en compte, en cette matière, du respect dû au corps humain »45. Il en a déduit que les griefs tirés de la méconnaissance du respect dû à la vie privée et au droit de mener une vie familiale normale devaient être écartés.
Le commentaire de cette décision rappelait que « Plusieurs législations manifestent l’importance consacrée par le législateur à cet objectif. Ainsi, en 1994, le nouveau code pénal a accru la répression des infractions portant atteinte au respect dû aux morts. De même, la loi n° 2008-1350 du 19 décembre 2008 a créé dans le code civil un nouvel article 16-1-1 aux termes duquel "le respect dû au corps humain ne cesse pas avec la mort. – Les restes des personnes décédées, y compris les cendres de celles dont le corps a donné lieu à crémation, doivent être traités avec respect, dignité et décence" ».
* Il peut par ailleurs être relevé que la Cour de cassation et le Conseil d’État ont chacun considéré que le respect dû au corps humain s’applique également aux dépouilles mortelles.
Dans une décision du 2 juillet 1993, le Conseil d’État a ainsi jugé que « les principes déontologiques fondamentaux relatifs au respect de la personne humaine, qui s’imposent au médecin dans ses rapports avec son patient ne cessent pas de s’appliquer avec la mort de celui-ci »46.
De son côté, la chambre criminelle de la Cour de cassation a considéré, dans un arrêt du 25 octobre 2000, à propos de l’appropriation par des fossoyeurs, dans l’exercice de leurs fonctions, des débris d’or et de bijoux trouvés au cours de travaux de nettoyage de fosses communes et de concessions non renouvelées, « objets qu’ils savaient ne pas être abandonnés », que la cour d’appel dont l’arrêt était attaqué avait caractérisé tant le délit de vol par personne chargée d’une mission de service public que les délits de violation de sépultures et d’atteintes à l’intégrité de cadavres, dont « l’élément intentionnel […] résulte de l’accomplissement volontaire d’un acte portant directement atteinte au respect dû aux morts »47.
Mais surtout, dans un arrêt du 16 septembre 2010, la première chambre civile de la Cour de cassation a jugé, à propos d’une exposition de cadavres à des fins commerciales, « Qu’il ressort [des dispositions de l’article 16–1–1 du code civil] qui sont d’ordre public, que le législateur, qui prescrit la même protection aux corps humains vivants et aux dépouilles mortelles, a ainsi entendu réserver à celles-ci un caractère inviolable et digne d’un respect absolu, conformément à un principe fondamental de toute société humaine », et énoncé que « le respect dû au corps humain ne cesse pas avec la mort et les restes des personnes décédées, y compris les cendres de celles dont le corps a donné lieu à crémation, doivent être traités avec respect, dignité et décence »48. Dans le cadre de la même affaire, la Cour de cassation a jugé que « le principe d’ordre public, selon lequel le respect dû au corps humain ne cesse pas avec la mort, préexistait à la loi n° 2008-1350 du 19 décembre 2008 d’où est issu l’article 16-1-1 du code civil »49.
B. – La jurisprudence constitutionnelle relative au droit de propriété
* Au sein du champ d’application de la protection constitutionnelle dont bénéficie le droit de propriété, le Conseil constitutionnel distingue la protection contre la privation de propriété, fondée sur l’article 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, de celle contre les atteintes portées à l’exercice du droit de propriété, fondée sur l’article 2 de cette déclaration.
La première n’autorise à priver un individu de sa propriété que si « la nécessité publique, légalement constatée, l’exige évidemment, et sous la condition d’une juste et préalable indemnité »50. La seconde conduit le Conseil à s’assurer que les atteintes portées à l’exercice du droit de propriété sont justifiées par un motif d’intérêt général et « proportionnées à l’objectif poursuivi »51. Le Conseil s’assure également, sur le fondement de l’article 2, que les limitations apportées à l’exercice du droit de propriété n’aboutissent pas à en dénaturer le sens et la portée52.
Dans le cadre du contrôle des atteintes portées à l’exercice du droit de propriété, le Conseil constitutionnel juge de manière constante qu’« il est loisible au législateur d’apporter aux conditions d’exercice du droit de propriété des personnes privées, protégé par l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, des limitations liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par l’intérêt général, à la condition qu’il n’en résulte pas d’atteintes disproportionnées au regard de l’objectif poursuivi »53.
Il veille ainsi à ce que l’atteinte soit liée à une exigence constitutionnelle ou justifiée par un motif d’intérêt général, puis il s’assure ensuite que cette atteinte est proportionnée à l’objectif poursuivi.
* Le Conseil s’est prononcé plus particulièrement sur l’invocabilité du droit de propriété en matière successorale dans sa décision n° 2012–274 QPC du 28 septembre 2012, relative aux modalités de calcul de l’indemnité de réduction due par le donataire ou le légataire d’une exploitation agricole aux autres héritiers en Alsace–Moselle.
Il a ainsi jugé que « les héritiers ne deviennent propriétaires des biens du défunt qu’en vertu de la loi successorale » et a, par suite, rejeté pour inopérance « le grief tiré de ce que la disposition contestée, qui définit les modalités selon lesquelles sont appréciés les droits respectifs des donataires ou légataires et des héritiers réservataires dans la succession, porterait atteinte au droit de propriété des héritiers »54.
Le commentaire de cette décision souligne que « c’est l’essence même du droit des successions d’établir les règles par lesquelles les personnes qu’il désigne comme héritiers seront appelées à succéder. Les héritiers ne deviennent propriétaires des biens du défunt que parce que la loi successorale, ou le legs dont la loi successorale reconnaît la validité, les désigne comme tel. Le droit de propriété ne peut donc être invoqué par un héritier pour contester les dispositions de la loi successorale relatives aux droits d’une autre personne appelée à la succession ».
C. – L’application à l’espèce
* Dans la décision commentée, le Conseil constitutionnel a examiné, en premier lieu, le grief tiré de la méconnaissance du principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine.
Saisi de dispositions relevant du droit funéraire, le Conseil s’est d’abord attaché à préciser la portée de ce principe en cette matière. Il a ainsi rappelé qu’il ressort du premier alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 que la sauvegarde de la dignité de la personne humaine contre toute forme d’asservissement et de dégradation est un principe à valeur constitutionnelle. Puis il a jugé, de manière inédite, que « Le respect dû à la dignité de la personne humaine ne cesse pas avec la mort » (paragr. 5).
Ce faisant, le Conseil constitutionnel a considéré, à l’instar du Conseil d’État et de la Cour de cassation, que le principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine, dont il garantit le respect pour toute personne vivante, s’applique également aux personnes décédées.
Ensuite, après avoir rappelé que, lorsqu’il est procédé à la crémation du corps du défunt, les cendres sont pulvérisées et recueillies dans une urne cinéraire, le Conseil constitutionnel a relevé qu’il résultait « des dispositions contestées que les métaux issus de la crémation sont récupérés par le gestionnaire du crématorium et cédés en vue d’en assurer le traitement approprié » (paragr. 6 et 7).
Il lui revenait alors d’examiner si, en prévoyant la récupération et la cession de tels métaux, ces dispositions méconnaissaient le principe de la sauvegarde de la dignité de la personne humaine.
À cette fin, le Conseil a tout d’abord rappelé que selon l’article 16–1–1 du code civil, les restes des personnes décédées, y compris les cendres de celles dont le corps a donné lieu à crémation, doivent être traités avec respect, dignité et décence. Puis, il a constaté que « les métaux issus de la crémation, quand bien même ils proviendraient d’objets intégrés au corps du défunt, sont distincts des cendres de ce dernier » (paragr. 8). En effet, si les cendres du défunt sont assimilées à sa dépouille mortelle et bénéficient à ce titre de la même protection, il n’en va pas de même des métaux qui, séparés du corps au cours de la crémation, redeviennent à l’issue de celle-ci des objets distincts des restes du défunt.
Dès lors, le Conseil en a déduit qu’« en prévoyant que ces métaux ne sont pas assimilables aux cendres du défunt et en confiant au gestionnaire du crématorium leur récupération et leur cession en vue de leur traitement, les dispositions contestées ne portent pas atteinte au principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine » (paragr. 9). En conséquence, il a écarté le grief tiré de la méconnaissance de ce principe (paragr. 10).
* Le Conseil constitutionnel a procédé, dans un second temps, à l’examen du grief tiré de la méconnaissance du droit de propriété.
Il a ainsi rappelé la formulation de principe selon laquelle en l’absence de privation du droit de propriété au sens de l’article 17 de la Déclaration de 1789, il résulte néanmoins de son article 2 que les atteintes portées à ce droit doivent être justifiées par un motif d’intérêt général et proportionnées à l’objectif poursuivi (paragr. 11).
Puis, il a relevé qu’en adoptant les dispositions contestées, le législateur avait entendu encadrer la récupération et les conditions de cession des métaux issus de la crémation en vue d’en assurer le traitement approprié et qu’il avait, ce faisant, poursuivi un objectif d’intérêt général (paragr. 12).
Il s’est alors attaché à examiner si l’atteinte au droit de propriété des ayants droit du défunt pouvant résulter de ces dispositions était proportionnée à cet objectif.
À cet égard, le Conseil a d’abord constaté que « Si les dispositions contestées font obstacle à ce que les ayants droit puissent se voir remettre les métaux issus de la crémation ou le produit de leur cession, quand bien même ils proviendraient de biens ayant appartenu au défunt », les dispositions contestées « n’ont ni pour objet ni pour effet de les priver des droits qu’ils peuvent faire valoir en temps utile sur ces biens en vertu de la loi successorale » (paragr. 13). Les ayants droit du défunt conservent ainsi la possibilité de faire valoir, le cas échéant, leurs droits sur les biens susceptibles d’être placés dans le cercueil du défunt avant la crémation.
Il a ensuite souligné que ces dispositions « prévoient par ailleurs que les conditions de récupération des métaux issus de la crémation et les règles d’affectation du produit éventuel de leur cession doivent figurer sur tout document de nature contractuelle prévoyant la crémation, et sont affichées dans la partie du crématorium ouverte au public » (paragr. 14). Toute personne organisant les funérailles du défunt est donc informée des conditions dans lesquelles les éventuels métaux issus de la crémation sont récupérés et cédés par les crématoriums.
Le Conseil en a conclu que les dispositions contestées ne méconnaissaient pas le droit de propriété et que le grief tiré de la méconnaissance de ce droit devait être écarté (paragr. 15).
Ces dispositions ne méconnaissant aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, il les a déclarées conformes à la Constitution (paragr. 16).
_______________________________________
1 Loi du 15 novembre 1887 relative à la liberté des funérailles et le décret du 27 avril 1889 relatif à l’incinération.
2 En application de cet article, le défunt peut également charger une ou plusieurs personnes de veiller à l’exécution de ses dispositions. Le texte ajoute que « Sa volonté, exprimée dans un testament ou dans une déclaration faite en forme testamentaire, soit par devant notaire, soit sous signature privée, a la même force qu'une disposition testamentaire relative aux biens, elle est soumise aux mêmes règles quant aux conditions de la révocation ».
3 Selon le cas, le maire de la commune du lieu du décès, de la commune de fermeture du cercueil ou de la commune dans laquelle est pratiquée la crémation, lorsque le décès a eu lieu à l’étranger (article R. 2213–34 du CGCT).
4 Article L. 2213–8 du CGCT
5 Le maire doit notamment s’assurer, avant d’autoriser la crémation, que cette dernière résulte de « L’expression écrite des dernières volontés du défunt ou, à défaut, [de] la demande de toute personne qui a qualité pour pourvoir aux funérailles et justifie de son état civil et de son domicile » (article R. 2213-34 du CGCT). Dans le même sens, en application de l’article L. 2223-4 du CGCT, lorsque des restes exhumés sont destinés à être réinhumés dans un ossuaire, « Le maire peut […] faire procéder à la crémation des restes exhumés en l’absence d’opposition connue ou attestée du défunt ». Par conséquent, « Les restes des personnes qui avaient manifesté leur opposition à la crémation sont distingués au sein de l’ossuaire ».
6 Selon le rapport d’information n° 372 du 31 mai 2006 de MM. Jean-Pierre Sueur et Jean-René Lecerf, fait au nom de la commission des lois du Sénat, sur le bilan et les perspectives de la législation funéraire, la crémation concernait moins de 1 % des décès en 1980, 10 % en 1993 et 23,5 % en 2004. Elle concernerait désormais 40 % des décès, selon les estimations de la fédération nationale du funéraire.
7 Loi n° 93–23 du 8 janvier 1993 relative à la législation dans le domaine funéraire.
8 Reprenant les dispositions d’un décret du 23 prairial an XII (1804), la loi du 28 décembre 1904 portant abrogation des lois conférant aux fabriques des églises et aux consistoires, le monopole des inhumations a en effet attribué aux communes le monopole du service extérieur des pompes funèbres. Son article 2 précisait que « Le service extérieur des pompes funèbres, comprenant exclusivement le transport des corps, la fourniture des corbillards, cercueils, tentures extérieures des maisons mortuaires, les voitures de deuil, ainsi que les fournitures et le personnel nécessaires aux inhumations, exhumations et crémations, appartient aux communes, à titre de service public. Celles-ci peuvent assurer ce service soit directement, soit par entreprise (…) ». Cette compétence est ainsi exercée, selon les cas, par la commune ou l’intercommunalité, sous le contrôle du représentant de l’État.
9 La loi du 28 décembre 1904 a en revanche supprimé le monopole communal des pompes funèbres et prévu que la mission de service public relevant du service extérieur des pompes funèbres peut être assurée non seulement par les communes et intercommunalités, mais également par toute entreprise ou association habilitée. Dans un avis du 19 décembre 1995 (section intérieur, n° 358102), le Conseil d’État a précisé que ce service, défini par l’article L. 2223–19 du CGCT, revêtait le caractère d’un service public industriel et commercial.
10 Cette loi a notamment renvoyé à un décret le soin de préciser les règles applicables à ces installations (soit les prescriptions techniques devant être respectées mais également les conditions d’accueil du public).
11 Article L. 2223-20 du CGCT. Le règlement national des pompes funèbres est établi par décret en Conseil d’État après avis du Conseil national des opérations funéraires. Il définit les modalités d’information des familles et les obligations des régies et des entreprises ou associations habilitées à fournir les prestations énumérées à l’article L. 2223-19. Ce règlement détermine notamment « Les conditions dans lesquelles est assurée l’information des familles, en particulier les mentions que doivent comporter les devis fournis par les prestataires faisant apparaître de façon distincte les prestations obligatoires, et plus généralement les modalités d’application des textes réglementaires pris sur la base de l’article L. 113-3 du code de la consommation ».
12 Ordonnance n° 2005-855 du 28 juillet 2005 relative aux opérations funéraires.
13 Ces derniers n’offrant pas la même sécurité de prise en charge à long terme des cendres.
14 Ce rapport mettait ainsi en exergue deux principales difficultés : d’une part, il soulignait que « Le maintien du caractère facultatif de la création d’équipements cinéraires par les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale pose (…) question. Le rapport de présentation de l’ordonnance du 28 juillet 2005 au Président de la République souligne que "cela ne répondrait pas à un besoin de la population dans chacune des communes, et notamment dans les petites communes rurales où les pratiques crématistes sont moins fréquentes". Pour autant, est-il légitime de tolérer qu’une partie de la population ne puisse faire le choix de la crémation, conformément au principe de liberté des funérailles posé par la loi du 15 novembre 1887, faute d’équipements ? » D’autre part, il relevait que « Le développement de la crémation invite à s’interroger sur le statut des cendres. Si la dépouille mortelle inhumée dans un cimetière connaît une protection, tant civile que pénale, qu’en est-il des cendres ? Celles-ci peuvent-elle faire l’objet d’un partage ? être mélangées avec celles d’autres êtres humains ou même d’un animal domestique ? À ces questions, la jurisprudence apporte des réponses contradictoires. Il appartient, à tout le moins, au législateur de poser les règles permettant d’assurer la dignité, la décence et le respect dus aux cendres ».
15 La loi n° 2008-1350 du 19 décembre 2008 relative à la législation funéraire.
16 L’article L. 2223-40 du CGCT précise notamment que « Toute création ou extension de crématorium ne peut avoir lieu sans l’autorisation du représentant de l’État dans le département, accordée après une enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l’environnement et un avis de la commission départementale compétente en matière d’environnement, de risques sanitaires et technologiques ».
17 Selon l’article L. 2223-23, « Les régies, les entreprises ou les associations et chacun de leurs établissements qui, habituellement, sous leur marque ou non, fournissent aux familles des prestations énumérées à l’article L. 2223-19 ou définissent cette fourniture ou assurent l’organisation des funérailles doivent être habilités à cet effet selon des modalités et une durée prévues par décret en Conseil d’État ». Pour accorder cette habilitation, le représentant de l’État dans le département s’assure notamment « De conditions minimales de capacité professionnelle du dirigeant et des agents ». Par ailleurs, l’article L. 2223-24 interdit l’exercice des fonctions de dirigeant ou de gestionnaire d’un service de pompes funèbres aux personnes ayant commis certaines infractions.
18 Encadrement des devis fournis par les régies, entreprises et associations (article L. 2223-21-1), interdiction de certaines offres de service (article L. 2223-33), création d’un fichier national destiné à centraliser les contrats d’assurance obsèques (article L. 2223-34-2), etc.
19 Rapport n° 664 de M. Philippe Gosselin, fait au nom de la commission des lois de l’Assemblée nationale, du 30 janvier 2008.
20 Ces dispositions visaient à améliorer les devis-type des services de pompes funèbres, informer les familles lors du renouvellement des concessions et réduire le délai de reprise des concessions à l’abandon, autoriser certaines prestations à domicile des opérateurs funéraires, prévoir l’abrogation immédiate de l’habilitation de l’opérateur funéraire en cas de cessation définitive de son activité et autoriser le transfert du corps vers un cercueil adapté à la crémation en cas de rapatriement de l’étranger.
21 À l’inverse de la matière organique, que la combustion transforme intégralement en gaz carbonique.
22 Lesquelles sont composées des constituants minéraux des os qui ont été broyés et mélangés aux calcius (les cendres au sens strict qui résultent de la combustion).
23 Rapport n° 4721 (2021-2022) de Mmes Élodie Jacquier-Laforge et Maïna Sage et M. Bruno Questel, fait au nom de la commission des lois de l’Assemblée nationale, déposé le 3 décembre 2021.
24 Question écrite n° 13845 (15ème législature) de M. Jean–Pierre Sueur publiée dans le JO Sénat du 16 janvier 2020.
25 CE, Avis (section de l’intérieur), 26 janvier 2021, n° 401820, Activité juridictionnelle et consultative des juridictions administratives en 2021, rapport public du Conseil d’État, p. 234.
26 Amendement n° COM-391 de M. Jean-Pierre Sueur, adopté par la commission des lois du Sénat, le 30 juin 2021.
27 Amendement n° CL 1626 de Mme Élodie Jacquier-Laforge, M. Bruno Questel et Mme Maïna Sage, adopté par la commission des lois de l’Assemblée nationale le mercredi 24 novembre 2021. À cet égard, le Conseil national des opérations funéraires (CNOF), groupe de travail mis en place en 2019 et composé de représentants des communes et de leurs groupements, des régies municipales, des différentes catégories d’entreprises de pompes funèbres ainsi que des organisations syndicales de salariés et des associations de consommateurs, avait pu considérer qu’« il n’est pas possible de restituer ces résidus métalliques à la famille au titre de biens faisant partie de l’indivision successorale, à l’image des éléments issus d’opérations médicales chez les vivants comme les prothèses, les plaques, les dispositifs divers et variés, les vis médiales ou les piles cardiaques, qui ne sont jamais remis au patient ou à sa famille après leur retrait. Il revient en tout état de cause au gestionnaire du crématorium de gérer la destination et les suites à donner à ces résidus métalliques » (compte-rendu de la séance du 7 juillet 2020 du CNOF, page 30 et suiv.).
28 Article R. 2223-103-1, paragraphe III, du CGCT.
29 Décision n° 94-343/344 DC, Loi relative au respect du corps humain et loi relative au don et à l’utilisation des éléments et produits du corps humain, à l’assistance médicale à la procréation et au diagnostic prénatal, cons. 2. Cf. aussi, pour des sujets autres que la bioéthique, la décision n° 2010-71 QPC du 26 novembre 2010, Mlle Danielle S., cons. 28 et 29 ou la décision n° 2014-393 QPC du 25 avril 2014, M. Angelo R., cons. 4.
30 Compte rendu de la séance du 26 juillet 1994, p. 28.
31 Ibid., p. 23.
32 Par exemple, en matière de garde à vue (notamment décisions nos 2023-855 DC du 16 novembre 2023, Loi d’orientation et de programmation du ministère de la justice 2023‑2027, paragr. 36 à 41, n° 2023–1064 QPC du 6 octobre 2023, Association des avocats pénalistes [Conditions d’exécution des mesures de garde à vue], paragr. 12 à 23), de peines privatives de liberté (décision n° 2021-898 QPC du 16 avril 2021, Section française de l’observatoire international des prisons [Conditions d’incarcération des détenus II], paragr. 12 à 15), d’hospitalisation d’office (décision n° 2010-71 QPC du 26 novembre 2010, Mlle Danielle S. [Hospitalisation sans consentement], cons. 28 et 29) ou de droit à un logement décent (décision n° 2023-853 DC du 26 juillet 2023, Loi visant à protéger les logements contre l’occupation illicite, paragr. 23 à 26).
33 Voir, notamment, les décisions n° 94–343/344 DC du 27 juillet 1994, Loi relative au respect du corps humain et loi relative au don et à l’utilisation des éléments et produits du corps humain, à l’assistance médicale à la procréation et au diagnostic prénatal, cons. 10, et n° 2012–249 QPC du 16 mai 2012, Société Cryo-Save France (Prélèvement de cellules du sang de cordon ou placentaire ou de cellules du cordon ou du placenta), cons. 7.
34 Décision n° 2001–446 DC du 27 juin 2001, Loi relative à l’interruption volontaire de grossesse et à la contraception, cons. 5.
35 Décision n° 2014-700 DC du 31 juillet 2014, Loi pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, cons. 4.
36 Décision n° 2015–727 DC du 21 janvier 2016, Loi de modernisation de notre système de santé, cons. 41 à 43.
37 Décision n° 2017–632 QPC du 2 juin 2017, Union nationale des associations de familles de traumatisés crâniens et de cérébro-lésés (Procédure collégiale préalable à la décision de limitation ou d’arrêt des traitements d’une personne hors d’état d’exprimer sa volonté), paragr. 8 à 14.
38 Décision n° 2022–1022 QPC du 10 novembre 2022, Mme Zohra M. et autres (Refus du médecin d’appliquer des directives anticipées manifestement inappropriées ou non conformes à la situation médicale du patient), cons. 11 à 15.
39 Décision n° 2007–557 DC du 15 novembre 2007, Loi relative à la maîtrise de l’immigration, à l’intégration et à l’asile, cons. 18.
40 Décision n° 2010–25 QPC du 16 septembre 2010, M. Jean–Victor C. (Fichier empreintes génétiques), cons. 13.
41 Ibid, cons. 14.
42 Décision n° 2013-674 DC du 1er août 2013, Loi tendant à modifier la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique en autorisant sous certaines conditions la recherche sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires, cons. 14 et 17. Voir également, plus récemment, décision n° 2021-821 DC du 29 juillet 2021, Loi relative à la bioéthique, paragr. 29 à 35.
43 Décision n° 2018–768 QPC du 21 mars 2019, M. Adama S. (Examens radiologiques osseux aux fins de détermination de l’âge), paragr. 18.
44 Décision n° 2011–173 QPC du 30 septembre 2011, M. Louis C. et autres (Conditions de réalisation des expertises génétiques sur une personne décédée à des fins d’actions en matière de filiation), cons. 5.
45 Ibid, cons. 6.
46 Conseil d’État, ass., 2 juillet 1993, Milhaud, n° 124960.
47 Cass. crim., 25 octobre 2000, n° 00-82.152.
48 Cass. civ. 1re, 16 septembre 2010, n° 09-67-456.
49 Cass. civ. 1re, 29 octobre 2014, n° 13-19.729.
50 Décisions n° 81–132 DC du 16 janvier 1982, Loi de nationalisation, cons. 13, 44 et 46 et n° 2011–169 QPC du 30 septembre 2011, Consorts M. et autres (Définition du droit de propriété), cons. 6.
51 Décisions n° 2010–60 QPC du 12 novembre 2010, M. Pierre B. (Mur mitoyen), cons. 3 et n° 2011–151 QPC du 13 juillet 2011, M. Jean-Jacques C. (Attribution d’un bien à titre de prestation compensatoire), cons. 3.
52 Le Conseil a ainsi censuré sur ce fondement une disposition législative permettant de contraindre un créancier poursuivant à devenir propriétaire d’un bien immobilier détenu par son débiteur, en le déclarant, sous certaines conditions, adjudicataire de l’immeuble ainsi mis aux enchères (décision n° 98–403 DC du 29 juillet 1998, Loi d’orientation relative à la lutte contre les exclusions, cons. 38 à 40).
53 Voir, en dernier lieu, les décisions n° 2023–1050 QPC du 26 mai 2023, Époux T. (Obligation de relogement en cas de délivrance d’un congé à un locataire âgé et disposant de faibles ressources), paragr. 8, et n° 2022-1005 QPC du 29 juillet 2022, Mme Marie D. (Interdiction de recevoir des libéralités pour les membres des professions de santé), paragr. 3.
54 Décision n° 2012–274 QPC du 28 septembre 2012, Consorts G. (Calcul de l’indemnité de réduction due par le donataire ou le légataire d’une exploitation agricole en Alsace–Moselle), cons. 12.