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Commentaire de la décision 2023-1057 QPC

20/09/2023

Non conformité totale - effet différé

Le Conseil constitutionnel a été saisi le 12 mai 2023 par la Cour de cassation (chambre criminelle, arrêt n° 709 du 11 mai 2023) d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) posée par M. José M. portant sur la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du premier alinéa de l’article 702–1 du code de procédure pénale (CPP) et du quatrième alinéa de l’article 703 du même code.

 

Dans sa décision n° 2023-1057 QPC du 7 juillet 2023, le Conseil constitutionnel a déclaré contraires à la Constitution le premier alinéa de l’article 702–1 du CPP, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2009–1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire, et la seconde phrase du quatrième alinéa de l’article 703 du même code, dans sa rédaction résultant de la loi n° 93–2 du 4 janvier 1993 portant réforme de la procédure pénale.

 

I. – Les dispositions contestées

 

A. – Objet des dispositions contestées

 

1. – Le relèvement des peines d’interdiction, de déchéance ou d’incapacité et des mesures de publication

 

* Dès 1810, le code pénal prévoyait que pouvaient exceptionnellement s’appliquer, outre des peines privatives de liberté et d’amende, des peines visant à interdire l’exercice de certaines activités professionnelles ou sociales, considérées comme présentant des risques particuliers, afin de prévenir la récidive ou la commission de nouveaux manquements. Ces peines pouvaient ainsi s’apparenter à des mesures de sûreté1.

 

Prononcées à titre complémentaire2 ou accessoire3 de la peine principale, ces peines se sont multipliées dans le code pénal et d’autres codes4, notamment du fait de l’application croissante de mesures pénales aux activités économiques. Outre les mesures d’interdiction, elles peuvent également prendre la forme de mesures de déchéance5, d’incapacité6 ou de publication7.

 

Toutefois, le législateur, constatant que ces peines pouvaient avoir des conséquences imprévisibles ou disproportionnées sur la situation de la personne condamnée, a instauré des procédures permettant au juge de prononcer leur relèvement8.

 

La loi du 29 décembre 19729 avait ainsi introduit un article 55-1 dans l’ancien code pénal afin de permettre au juge de relever une peine d’interdiction, de déchéance ou d’incapacité résultant de plein droit d’une condamnation soit lorsqu’il prononce la condamnation (relèvement immédiat), soit postérieurement à la condamnation à la suite d’une demande formée par la personne condamnée (relèvement différé).

 

Cet article a, par la suite, été complété par la loi du 11 juillet 197510 afin d’étendre la procédure de relèvement différé aux mesures de publication et aux peines prononcées à titre complémentaire.

 

* Ces dispositions, désormais prévues par l’article 132-21 du code pénal11 et par les articles 702-1 et 703 du CPP, s’appliquent à toutes les personnes, qu’elles soient physiques ou morales, et à toutes les mesures d’interdiction, de déchéance, d’incapacité ou de publication susceptibles d’être prononcées par une juridiction répressive (sont donc exclues de leur champ les sanctions prononcées par des instances disciplinaires ou par des autorités administratives).

 

La demande de relèvement n’est toutefois pas possible lorsque ces peines ont été prononcées à titre de peine principale par le juge12.

 

Les peines accessoires ou complémentaires pouvant ainsi être relevées sont de nature très diverse. Elles peuvent, par exemple, contraindre la liberté d’aller et venir de la personne condamnée, notamment en cas d’interdiction de séjour13 ou d’interdiction du territoire français (ITF)14. Elles peuvent également affecter ses activités professionnelles, notamment en cas d’interdiction d’exercer l’activité à l’occasion de laquelle l’infraction a été commise, d’exclusion de certains marchés ou d’incapacité à exercer certaines professions15. Elles peuvent aussi consister en la confiscation d’un animal ou d’un bien16.

 

Si le juge décide de faire droit à la demande du requérant, il peut prononcer soit le relèvement total de la mesure, soit son relèvement partiel (réduction de sa durée ou de son champ). Dans ce second cas, le relèvement ne constitue pas une cause d’extinction de la peine, mais un mode d’aménagement visant à en atténuer la sévérité.

 

Il est fait mention de cette décision de relèvement total ou partiel en marge du jugement ou de l’arrêt de condamnation et au casier judiciaire.

 

2. – La procédure de relèvement différé

 

Le titre XII du livre IV du CPP relatif aux « demandes présentées en vue d’être relevé des interdictions, déchéances, incapacités ou mesures de publication » comprend deux articles qui fixent le champ d’application, la procédure et les effets du relèvement différé.

 

* Le premier alinéa de l’article 702–1 du CPP (les premières dispositions objet de la décision commentée) dispose qu’une personne frappée d’une interdiction, d’une déchéance, d’une incapacité ou d’une mesure de publication quelconque, résultant de plein droit d’une condamnation pénale ou prononcée dans le jugement de condamnation à titre de peine complémentaire, peut en demander le relèvement. Il précise que la juridiction compétente est celle qui a prononcé la condamnation ou, en cas de pluralité de condamnations, celle qui a statué la dernière. Dans le cas où la condamnation a été prononcée par une cour d’assises, il prévoit que la juridiction compétente est la chambre de l’instruction dans le ressort de laquelle la cour d’assises a son siège.

 

Il en résulte qu’en matière correctionnelle, la demande de relèvement doit être formée soit devant le tribunal correctionnel, soit devant la chambre des appels correctionnels, selon le degré de la juridiction qui a prononcé la peine, alors qu’en matière criminelle, cette demande est directement examinée par la chambre de l’instruction, que la peine ait été prononcée par une cour d’assises ou par une cour d’assises d’appel.

 

Lorsqu’une même peine accessoire ou complémentaire a été prononcée à l’occasion de plusieurs condamnations (par exemple, une ITF prononcée à la suite d’une condamnation pour un délit jugé par un tribunal correctionnel et d’une condamnation pour un crime jugé par une cour d’assises), la demande de relèvement de cette peine ne peut être formée que devant la dernière juridiction qui a statué, quand bien même elle serait d’un niveau inférieur17 ou d’une nature différente de l’autre juridiction.

 

Le troisième alinéa de l’article 702-1 du CPP précise que, sauf lorsqu’il s’agit d’une peine accessoire18, la demande de relèvement ne peut être portée devant la juridiction compétente qu’à l’issue d’un délai de six mois suivant la décision initiale de condamnation. En cas de refus, la personne condamnée ne peut présenter une autre demande qu’à l’expiration d’un nouveau délai de six mois après cette décision. Il en est de même, le cas échéant, des demandes ultérieures.

 

Le dernier alinéa de cet article dispose enfin que, sauf exception, les juridictions statuent sur la demande de relèvement dans une formation à juge unique19.

 

* L’article 703 du CPP apporte des précisions relatives au déroulement de la procédure de relèvement différé.

 

Il précise notamment que la demande de relèvement doit comporter certaines mentions obligatoires et être adressée, selon les cas, au procureur de la République ou au procureur général. La juridiction saisie statue alors en chambre du conseil sur les conclusions du ministère public, le requérant ou son conseil ayant été entendu ou dûment convoqué.

 

Le quatrième alinéa de cet article (les secondes dispositions objet de la décision commentée) dispose, quant à lui, que la décision prise par la juridiction est signifiée à la requête du ministère public lorsqu’elle est rendue hors de la présence du requérant ou de son conseil et qu’elle peut, selon le cas, être frappée d’appel ou déférée à la Cour de cassation.

 

En effet, les arrêts de la chambre d’instruction et des chambres des appels correctionnels étant, en application de l’article 567 du CPP, rendus en dernier ressort, ils sont insusceptibles d’appel.

 

La possibilité pour le requérant de faire appel de la décision prise sur sa demande de relèvement varie donc en fonction de la nature et du degré de la juridiction qui l’a prise.

 

- Si la peine complémentaire ou accessoire a été prononcée par une juridiction correctionnelle de première instance, la personne condamnée peut former une demande de relèvement devant cette juridiction et, en cas de refus, faire appel de sa décision. Elle bénéficie ainsi d’un double degré de juridiction.

 

- En revanche, si la peine complémentaire ou accessoire a été prononcée par une juridiction correctionnelle d’appel, en cas de refus de cette juridiction de faire droit à la demande de relèvement, la personne condamnée ne peut pas faire appel de cette décision. Il en va de même si la peine a été prononcée par une cour d’assises puisque la demande de relèvement ne peut alors être formée que devant la chambre de l’instruction, dont la décision n’est pas susceptible d’appel. Dans ces deux hypothèses, la personne condamnée dispose seulement de la possibilité de former un pourvoi en cassation à l’encontre de la décision de refus.

 

- Enfin, en cas de pluralité de condamnations, la personne condamnée bénéficie d’un double degré de juridiction uniquement dans le cas où la dernière juridiction qui a statué est une juridiction correctionnelle de première instance.

 

* Quelle que soit la nature ou le degré de la juridiction compétente pour se prononcer sur la demande de relèvement, il lui appartient d’apprécier les conséquences de la peine complémentaire ou accessoire pour la personne condamnée au jour où elle se prononce20. Dans le cadre de son contrôle de proportionnalité de la nécessité de maintenir la peine, elle peut ainsi prendre en compte notamment le comportement de la personne ou l’évolution de sa situation21. Par ailleurs, si la juridiction peut tenir compte de l’infraction initialement réprimée, cette dernière ne peut à elle seule justifier le maintien de la peine, sauf à remettre en cause l’exercice même du droit à en demander le relèvement22.

 

B. – Origine de la QPC et question posée

 

Par un arrêt du 8 octobre 2013, une cour d’assises avait condamné M. José M., ressortissant étranger, à une peine de vingt ans de réclusion criminelle et à une peine complémentaire d’interdiction définitive du territoire français.

 

Après avoir rejeté, par des arrêts des 4 mars 2016 et 20 mars 2018, les deux premières demandes de relèvement formées par le requérant, la chambre de l’instruction avait rejeté une troisième demande par un arrêt du 18 mai 2022.

 

Le requérant avait alors formé un pourvoi contre cette décision, à l’occasion duquel il avait soulevé une QPC portant sur le premier alinéa de l’article 702-1 du CPP et le quatrième alinéa de l’article 703 du même code.

 

Dans son arrêt précité du 11 mai 2023, la Cour de cassation avait jugé que cette question présentait un caractère sérieux au motif qu’ « en application des articles 702–1, alinéa 1er, et 703, alinéa 4, du code de procédure pénale, une personne condamnée à une peine d’interdiction du territoire français par une juridiction correctionnelle bénéficie d’un double degré de juridiction pour l’examen de sa requête en relèvement si sa peine a été définitivement prononcée par la juridiction de première instance. Tel n’est pas le cas de la personne condamnée par une juridiction criminelle, qui doit porter cette demande directement devant la chambre de l’instruction, peu important que sa peine ait été prononcée par une juridiction du premier ou du second degré. / Par ailleurs, une personne condamnée par au moins une juridiction correctionnelle et une juridiction criminelle peut bénéficier du double degré de juridiction, ou en être privée, uniquement en raison de la nature et du degré de la dernière juridiction ayant statué, nonobstant la nature et la gravité de l’ensemble des infractions ayant donné lieu à ses condamnations. / Enfin, une personne condamnée pour au moins un crime ou un délit pourra bénéficier, ou non, du double degré de juridiction pour l’examen de sa demande en relèvement d’interdiction selon que le délit aura été jugé par la cour d’assises, au titre du délit connexe, ou postérieurement, par le tribunal correctionnel. / Ces différences de traitement peuvent, du point de vue de l’accès aux voies de recours, ne pas être pleinement justifiées par la différence des situations ». Elle avait donc renvoyé la QPC au Conseil constitutionnel.

 

II. – L’examen de la constitutionnalité des dispositions contestées

 

* La Cour de cassation n’ayant pas précisé, dans son arrêt de renvoi, la version dans laquelle le premier alinéa de l’article 702–1 du CPP et le quatrième alinéa de l’article 703 du même code étaient renvoyés, il revenait au Conseil constitutionnel de la déterminer lui-même.

 

Conformément à sa jurisprudence constante, selon laquelle la QPC doit être considérée comme portant sur les dispositions applicables au litige à l’occasion duquel elle a été posée, le Conseil a jugé, en l’espèce, qu’il était saisi du premier alinéa de l’article 702–1 du CPP dans sa rédaction résultant de la loi n° 2009–1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire et du quatrième alinéa de l’article 703 du même code dans sa rédaction résultant de la loi n° 93–2 du 4 janvier 1993 portant réforme de la procédure pénale (paragr. 1).

 

Le requérant reprochait à ces dispositions de ne permettre à une personne d’interjeter appel de la décision statuant sur sa demande de relèvement que lorsque cette mesure avait été prononcée par une juridiction correctionnelle de première instance ou, en cas de pluralité de condamnations, lorsque cette juridiction s’était prononcée en dernier. En revanche, lorsque la peine dont elle demandait le relèvement avait été prononcée par une juridiction correctionnelle d’appel ou une cour d’assises ou lorsque, en cas de pluralité de condamnations, l’une de ces juridictions avait statué en dernier, la personne était privée de la faculté d’interjeter appel de la décision. Il en résultait, selon lui, une distinction injustifiée contraire au principe d’égalité devant la justice ainsi qu’une méconnaissance de la garantie des droits.

 

* Au regard de ces griefs, le Conseil constitutionnel a jugé que la QPC portait sur le premier alinéa de l’article 702-1 du CPP et sur la seconde phrase du quatrième alinéa de l’article 703 du même code (paragr. 5).

 

A. – La jurisprudence constitutionnelle relative au principe d’égalité devant la justice

 

* Aux termes de l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 : « La loi … doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse ». De manière constante, le Conseil constitutionnel juge que le principe d’égalité devant la loi « ne s’oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu’il déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général pourvu que, dans l’un et l’autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l’objet de la loi qui l’établit »23.

 

Sur ce fondement, le Conseil veille, de manière générale, à ce que les différences de traitement opérées par la loi soient à la fois justifiées par une raison suffisante – qu’elle procède d’une différence de situation ou d’un motif d’intérêt général – et en adéquation avec les objectifs que leur assigne le législateur.

 

* En matière de justice, l’exigence d’égalité est renforcée. Le Conseil constitutionnel se fonde alors en effet sur l’article 6, précité, et sur l’article 16 de la Déclaration de 1789, en vertu duquel « Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution ». Sur ce second fondement sont garantis, en particulier, les droits de la défense, le droit à un recours juridictionnel effectif et le droit à un procès équitable.

 

Le Conseil juge, sur ce double fondement, que « Si le législateur peut prévoir des règles de procédure différentes selon les faits, les situations et les personnes auxquelles elles s’appliquent, c’est à la condition que ces différences ne procèdent pas de distinctions injustifiées et que soient assurées aux justiciables des garanties égales »24.

 

Le principe d’égalité devant la justice implique donc non seulement la prohibition des distinctions injustifiées, à l’instar du principe d’égalité devant la loi, mais également l’obligation d’assurer, en cas de distinctions justifiées, des garanties égales aux justiciables.

 

Au regard de ce principe, la jurisprudence du Conseil constitutionnel a un double objet :

 

– D’une part, elle garantit l’égalité entre les parties à une même procédure : c’est « l’équilibre des droits des parties ». Cette dimension du principe constitutionnel d’égalité devant la justice implique de comparer la situation des différentes parties à une même procédure et, notamment, en procédure pénale, celle de la personne mise en cause (mis en examen ou prévenu), de la partie civile et du ministère public25.

 

– D’autre part, elle s’assure du respect du droit des justiciables placés dans une situation identique à être jugés devant les mêmes formations de jugement ou selon des garanties de procédure égales. À ce titre, le Conseil constitutionnel veille à ce qu’une différence de traitement, qu’elle soit d’ordre juridictionnel26 ou procédural27, ne soit pas injustifiée et à ce qu’elle ne prive pas le justiciable d’une garantie reconnue à d’autres. Il s’assure également que la différence de traitement repose sur des critères objectifs et rationnels28.

 

* Ainsi, dans sa décision n° 93-334 DC du 20 janvier 1994, le Conseil a admis la conformité à la Constitution de dispositions ayant pour objet de différer à la soixante–douzième heure de garde à vue l’intervention de l’avocat lorsque cette mesure est soumise à des règles particulières de prolongation, ce qui est le cas pour des infractions en matière de stupéfiants et de terrorisme. Le Conseil a jugé que : « Il est loisible au législateur, compétent pour fixer les règles de la procédure pénale en vertu de l’article 34 de la Constitution, de prévoir des règles de procédure différentes selon les faits, les situations et les personnes auxquels elles s’appliquent, mais à la condition que ces différences de procédures ne procèdent pas de discriminations injustifiées et que soient assurées aux justiciables des garanties égales, notamment quant au respect du principe des droits de la défense ; / Considérant que le droit de la personne à s’entretenir avec un avocat au cours de la garde à vue, constitue un droit de la défense qui s’exerce durant la phase d’enquête de la procédure pénale ; / Considérant que la différence de traitement prévue par l’article 18 de la loi, s’agissant du délai d’intervention de l’avocat au regard des infractions dont s’agit, correspond à des différences de situation liées à la nature de ces infractions ; que la différence de traitement mise en cause ne procède donc pas d’une discrimination injustifiée »29.

 

De la même manière, dans sa décision n° 2011-113/115 QPC du 1er avril 2011, le Conseil a admis que les règles de procédure pénale diffèrent selon que la personne est poursuivie pour un crime devant la cour d’assises ou pour un délit ou une contravention devant le tribunal correctionnel ou le tribunal de police : « Considérant […] que les personnes accusées de crime devant la cour d’assises sont dans une situation différente de celle des personnes qui sont poursuivies pour un délit ou une contravention devant le tribunal correctionnel ou le tribunal de police ; que, par suite, le législateur a pu, sans méconnaître le principe d’égalité, édicter pour le prononcé des arrêts de la cour d’assises des règles différentes de celles qui s’appliquent devant les autres juridictions pénales »30.

 

Dans sa décision n° 2013-302 QPC du 12 avril 2013, le Conseil a également validé des dispositions allongeant la durée de la prescription pour certains délits prévus par la loi du 29 juillet 1881. Il a ainsi jugé : « qu’en portant de trois mois à un an le délai de la prescription pour les délits qu’il désigne, l’article 65-3 de la loi du 29 juillet 1881 a pour objet de faciliter la poursuite et la condamnation, dans les conditions prévues par cette loi, des auteurs de propos ou d’écrits provoquant à la discrimination, à la haine ou à la violence, diffamatoires ou injurieux, à caractère ethnique, national, racial, ou religieux ou contestant l’existence d’un crime contre l’humanité ; que le législateur a précisément défini les infractions auxquelles cet allongement du délai de la prescription est applicable ; que la différence de traitement qui en résulte, selon la nature des infractions poursuivies, ne revêt pas un caractère disproportionné au regard de l’objectif poursuivi ; qu’il n’est pas porté atteinte aux droits de la défense ; que, dans ces conditions, les dispositions contestées ne méconnaissent pas les exigences constitutionnelles précitées »31.

 

* En revanche, le Conseil censure des dispositions qui créent sans justification des distinctions entre les justiciables.

 

Dans la décision n° 2007-559 DC du 6 décembre 2007, le Conseil était saisi de dispositions permettant à tout représentant à l’assemblée de la Polynésie française, lorsqu’il saisit le tribunal administratif ou le Conseil d’État d’un recours en annulation d’un acte de la Polynésie française, d’assortir ce recours d’une demande de suspension sans qu’il soit justifié de la condition d’urgence. Le Conseil constitutionnel a jugé que, par ces dispositions, « le législateur a instauré une différence de situation entre les représentants à l’assemblée de la Polynésie française et les autres justiciables qui n’est pas justifiée au regard de l’objectif de contrôle juridictionnel des actes administratifs ; qu’il a, par suite, méconnu le principe d’égalité devant la justice ; qu’il s’ensuit que le deuxième alinéa du II de l’article 32 doit être déclaré contraire à la Constitution »32.

 

Dans sa décision n° 2015-492 QPC du 16 octobre 2015, le Conseil a censuré des dispositions qui prévoyaient que seule une association se proposant, par ses statuts, de défendre les intérêts moraux et l’honneur de la Résistance ou des déportés peut exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les délits d’apologie des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité réprimés par le cinquième alinéa de l’article 24 de la loi du 29 juillet 1881. Le Conseil a jugé : « Considérant, d’une part, que le législateur n’a pas prévu une répression pénale différente pour l’apologie des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité selon que ces crimes ont été commis ou non pendant la seconde guerre mondiale ; que, d’autre part, il ne ressort ni des dispositions contestées ou d’une autre disposition législative ni des travaux préparatoires de la loi du 13 juillet 1990 l’existence de motifs justifiant de réserver aux seules associations défendant les intérêts moraux et l’honneur de la Résistance ou des déportés la faculté d’exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne l’apologie des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité ; que, par suite, les dispositions contestées, en excluant du bénéfice de l’exercice des droits reconnus à la partie civile les associations qui se proposent de défendre les intérêts moraux et l’honneur des victimes de crimes de guerre ou de crimes contre l’humanité autres que ceux commis durant la seconde guerre mondiale, méconnaissent le principe d’égalité devant la justice »33.

 

Dans sa décision n° 2021-909 QPC du 26 mai 2021, s’agissant de dispositions prévoyant que la personne citée directement par la partie civile à comparaître devant le tribunal de police ne peut, dans la même instance, demander que cette dernière soit condamnée, en cas de relaxe, au paiement de dommages-intérêts pour abus de constitution de partie civile, le Conseil a constaté que cette possibilité était ouverte, en cas de désistement de la partie civile, pour la personne directement citée devant le tribunal de police en application de l’article 536 du CPP. Elle l’est aussi pour le prévenu qui, après avoir été cité directement devant le tribunal de police, est relaxé en appel, en application de l’article 549 du même code. Il en a déduit que « Dès lors, les dispositions contestées procèdent à une distinction injustifiée entre les justiciables poursuivis par citation directe devant le tribunal de police. Par conséquent, elles méconnaissent le principe d’égalité devant la justice et doivent donc être déclarées contraires à la Constitution »34.

 

* Si le Conseil constitutionnel juge de manière constante que le principe de double degré de juridiction n’est pas une exigence constitutionnelle35, il sanctionne, suivant la même logique, des dispositions qui réservent de manière injustifiée un double degré de juridiction à certains justiciables et l’excluent pour d’autres. 

 

Par exemple, dans sa décision n° 80-127 DC du 20 janvier 1981, le Conseil a censuré des dispositions permettant à la partie civile de présenter de nouvelles demandes en cause d’appel et de se constituer, pour la première fois, en cause d’appel. Il a jugé que « si la faculté pour la victime s’étant constituée partie civile en première instance de présenter des demandes nouvelles en cause d’appel et celle pour la personne lésée de se constituer partie civile pour la première fois en appel ne sont ouvertes qu’autant que des motifs sérieux peuvent être invoqués par les intéressés, leur exercice pourtant serait nécessairement générateur d’inégalités devant la justice, puisque, selon l’attitude de la personne qui demande réparation, les prévenus bénéficieraient ou ne bénéficieraient pas d’un double degré de juridiction en ce qui concerne les intérêts civils »36.

 

Dans sa décision n° 84-183 DC du 18 janvier 1985, le Conseil a censuré des dispositions prévoyant que lorsque la cour d’appel n’a pas statué au fond dans les deux mois suivant le prononcé du jugement entrepris, celui-ci acquiert autorité de la chose jugée. Il a ainsi jugé : « qu’il résulte de ces dispositions que, dans toutes les procédures d’appel prévues par la loi, les justiciables sont placés quelles que soient leurs diligences, dans des situations différentes au regard des garanties qu’offre l’exercice d’une même voie de recours selon que la cour d’appel statue ou non dans le délai qui lui est imparti ; que le premier alinéa de l’article 175 méconnaît ainsi le principe d’égal accès des citoyens à la justice et doit être déclaré non conforme à la Constitution »37.

 

Dans sa décision n° 2010-81 QPC du 17 décembre 2010, le Conseil constitutionnel a censuré, au regard du principe d’égalité devant la justice, des dispositions permettant à la chambre de l’instruction de se dire seule compétente pour statuer en matière de détention provisoire, privant ainsi le détenu d’un double degré de juridiction. Le Conseil a jugé « que ces dispositions confèrent à la chambre de l’instruction le pouvoir discrétionnaire de priver une personne mise en examen, durant toute la procédure d’instruction, des garanties prévues par les articles 144–1 et 147 du code de procédure pénale qui prescrivent au juge d’instruction ou au juge des libertés et de la détention d’ordonner sa mise en liberté immédiate dès que les conditions légales de la détention ne sont plus remplies, de celles prévues par l’article 148 du même code pour l’examen des demandes de mise en liberté en première instance et du droit à un double degré de juridiction instauré pour toute décision en matière de détention provisoire ; que l’éventuelle divergence entre les positions respectives des juridictions de première instance et d’appel relativement à la nécessité ultérieure de la détention de la personne mise en examen ne peut toutefois justifier qu’il soit ainsi porté atteinte aux droits qui sont accordés par la loi à toute personne placée en détention provisoire »38.

 

Enfin, dans sa décision n° 2021–925 QPC du 21 juillet 202139, particulièrement topique quant au contrôle opéré par le Conseil constitutionnel sur les distinctions en matière d’accès à un double degré de juridiction, le Conseil était saisi de dispositions prévoyant que, lorsque les condamnations prononcées contre une même personne sont devenues définitives, le tribunal ou la cour qui a prononcé l’une des peines est compétent pour statuer sur la demande de confusion de peines de la personne condamnée et que, lorsque les peines ont été prononcées par une cour d’assises, la demande doit être portée devant la chambre de l’instruction.

 

Après avoir rappelé qu’en application de l’article 567 du CPP, les arrêts de la chambre d’instruction et des juridictions correctionnelles d’appel sont rendus en dernier ressort, le Conseil a constaté que, « dès lors, il résulte des dispositions contestées que, dans le cas où les peines dont elle demande la confusion ont toutes été prononcées par des cours d’assises ou des juridictions correctionnelles d’appel, la personne condamnée porte sa demande devant une juridiction dont la décision est insusceptible d’appel. En revanche, dans le cas où au moins l’une des peines dont elle demande la confusion a été prononcée par une juridiction correctionnelle de première instance, la personne condamnée porte sa demande devant une juridiction dont la décision est susceptible d’appel ».

 

Il a estimé qu’« une telle distinction, qui n’est au demeurant pas fondée sur la nature criminelle ou correctionnelle de la peine, est sans lien avec l’objet des dispositions contestées, qui est de permettre à une personne condamnée de demander la confusion de peines après que les condamnations sont devenues définitives ». Il en a déduit que, les dispositions contestées procédant à une distinction injustifiée entre les personnes condamnées qui demandent la confusion de peines après qu’elles sont devenues définitives, elles méconnaissaient le principe d’égalité devant la justice et les a censurées pour ce motif.

 

Le commentaire de la décision soulignait que, « Au-delà de ne trouver aucune justification, cette distinction semblait résulter uniquement d’un effet de bord de dispositions alignant la compétence des juridictions pour connaître des demandes de confusion de peines sur la compétence des juridictions pour connaître des incidents d’exécution ».

 

B. – L’application à l’espèce

 

* Dans la décision commentée, après avoir rappelé sa formulation de principe relative à l’égalité devant la justice qui découle des articles 6 et 16 de la Déclaration de 1789 (paragr. 6), le Conseil constitutionnel s’est attaché à décrire l’objet des dispositions contestées.

 

Il a d’abord relevé que les personnes reconnues coupables de certains crimes et délits peuvent être frappées d’une mesure d’interdiction, de déchéance, d’incapacité ou de publication résultant de plein droit de leur condamnation pénale ou prononcée dans le jugement de condamnation à titre de peine complémentaire (paragr. 7).

 

Puis il a constaté qu’en application des dispositions contestées, « le relèvement de ces mesures peut être demandé à la juridiction qui a prononcé la condamnation ou, en cas de pluralité de condamnations, à la juridiction qui a statué en dernier. Lorsque la condamnation a été prononcée par une cour d’assises, la juridiction compétente pour statuer sur cette demande est la chambre de l’instruction. La décision peut être, selon le cas, frappée d’appel ou déférée à la Cour de cassation » (paragr. 8).

 

Le Conseil a alors déterminé la portée de ces dispositions. Il a ainsi observé que, les arrêts de la chambre de l’instruction et des juridictions correctionnelles d’appel étant rendus en dernier ressort en application de l’article 567 du CPP, il résultait des dispositions contestées que, lorsque la mesure dont le relèvement est demandé a été prononcée par l’une de ces juridictions ou, en cas de pluralité de condamnations, par une telle juridiction statuant en dernier, la personne condamnée porte sa demande devant une juridiction dont la décision est insusceptible d’appel. Il a en revanche constaté que, lorsque cette mesure a été prononcée par une juridiction correctionnelle de première instance ou, en cas de pluralité de condamnations, par une telle juridiction statuant en dernier, la personne condamnée porte sa demande devant une juridiction dont la décision est susceptible d’appel (paragr. 9).

 

Ainsi, les dispositions contestées instauraient bien une différence de traitement entre les justiciables en fonction de la nature et du degré de la juridiction ayant prononcé la mesure dont le relèvement était demandé.

 

* Il appartenait dès lors au Conseil constitutionnel d’apprécier si cette différence de traitement quant au bénéfice d’un double degré de juridiction était justifiée.

 

Or, il ne résultait ni des travaux parlementaires ni de l’économie générale du dispositif que cette distinction procédait d’une volonté particulière du législateur.

 

S’inscrivant dans le droit fil de sa décision n° 2021–925 QPC précitée, le Conseil a donc considéré qu’« une telle distinction, qui n’est au demeurant pas fondée sur la nature criminelle ou correctionnelle de la peine, est sans lien avec l’objet des dispositions contestées, qui est de permettre à une personne condamnée de demander le relèvement d’une mesure d’interdiction, de déchéance, d’incapacité ou de publicité prononcée à son encontre » (paragr. 10).

 

Il a dès lors jugé que les dispositions contestées procédaient à une distinction injustifiée entre les personnes condamnées qui demandent le relèvement d’une telle mesure, en méconnaissance du principe d’égalité devant la justice (paragr. 11). Par conséquent, sans qu’il soit besoin d’examiner l’autre grief, il les a déclarées contraires à la Constitution (paragr. 12).

 

En ce qui concerne les effets dans le temps de la déclaration d’inconstitutionnalité, l’abrogation immédiate des dispositions contestées aurait eu pour conséquence de priver les justiciables de la possibilité de demander le relèvement d’une mesure d’interdiction, de déchéance, d’interdiction ou de publicité. Le Conseil constitutionnel a jugé qu’une telle abrogation entraînerait des conséquences manifestement excessives et l’a donc reportée au 31 mars 2024. Enfin, il a jugé que les « mesures prises avant cette date en application des dispositions déclarées contraires à la Constitution ne peuvent être contestées sur le fondement de cette inconstitutionnalité » (paragr. 14).

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1 Claude Zambeaux et Claudia Ghica Lemarchand, « Relèvement des interdictions, déchéances, incapacités ou mesures de publication », JurisClasseur Procédure pénale, fasc. 20, 1er mars 2015 (dernière mise à jour : 5 février 2020), § 5.

2 La peine principale correspond à la peine encourue pour chaque comportement infractionnel, dont elle détermine le degré de gravité. La peine complémentaire s’ajoute en principe à la peine principale (article 131-10 du code pénal en matière de crime et délit et article 131-12 du même code pour les contraventions). Le juge peut toutefois choisir de la substituer à la peine principale (article 131-11 du même code pour les crimes et délits et article 131-18 pour les contraventions). Dans certains cas, la loi prévoit que la peine complémentaire présente un caractère obligatoire.

3 La peine accessoire est attachée de plein droit à une condamnation pénale sans avoir à être expressément prononcée (Gérard Cornu [dir.], Vocabulaire juridique, PUF, 14e éd., 2022). Depuis la refonte du code pénal par la loi n° 92-684 du 22 juillet 1992, son article 132-17 dispose expressément qu’« Aucune peine ne peut être appliquée si la juridiction ne l’a expressément prononcée ». Est ainsi exclue l’application de peines accessoires résultant automatiquement d’une condamnation pénale, sans que le juge ne se prononce. Toutefois, certaines peines accessoires résultant de dispositions prévues dans d’autres codes ou textes de loi demeurent en vigueur.

4 Par exemple, le code de commerce ou le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA).

5 La déchéance correspond à la « perte d’un droit, d’une fonction, d’une qualité ou d’un bénéfice, encourue à titre de sanction, pour cause d’indignité, d’incapacité, de fraude, d’incurie, etc. » (in Vocabulaire juridique, précité).

6 Définie comme « l’inaptitude juridique, qui dans les cas déterminés par la loi (on parle d’incapacité légale ou de droit) empêche une personne d’acquérir ou d’exercer valablement un droit » (ibidem).

7 Les mesures de publication recouvrent les peines d’affichage de la décision prononcée ou de diffusion de celle–ci prévues par l’article 131-35 du code pénal, qui peuvent être prononcées alternativement ou cumulativement.

8 À ce titre, l’exposé des motifs du projet de loi n° 367 tendant à simplifier et à compléter certaines dispositions relatives à la procédure pénale, aux peines et à leur exécution, déposé le 30 juin 1972 sur le bureau du Sénat, relevait que : « De nombreuses interdictions, déchéances ou incapacités professionnelles sont attachées, de plein droit et sans qu’il soit toujours nécessaire de les prononcer, à certaines condamnations pénales. Ces mesures, qu’on les qualifie peines accessoires, peines complémentaires ou mesures de sûreté, sont édictées dans l’intérêt général, pour assurer l’assainissement de certaines professions. […] Or, dans l’état actuel de notre droit positif, l’interdiction d’exercice de ces professions résulte très souvent, d’une façon automatique, d’une condamnation pénale quel que soit le quantum de la peine prononcée. L’expérience a révélé qu’un système aussi rigoureux dans ses conséquences n’était pas satisfaisant : bien des condamnations – quelquefois à une simple amende – ne justifient pas une sanction indirecte aussi lourde, qui dépasse la volonté du législateur et le souhait du juge et qui peut éventuellement compromettre sans raison la réinsertion sociale des personnes qu’elle frappe ».

9 Loi n° 72-1226 du 29 décembre 1972 simplifiant et complétant certaines dispositions relatives à la procédure pénale, aux peines et à leur exécution.

10 Loi n° 75-624 du 11 juillet 1975 modifiant et complétant certaines dispositions de droit pénal.

11 Le deuxième alinéa de l’article 132-21 du code pénal dispose ainsi que : « Toute personne frappée d'une interdiction, déchéance ou incapacité quelconque qui résulte de plein droit, en application de dispositions particulières, d'une condamnation pénale, peut, par le jugement de condamnation ou par jugement ultérieur, être relevée en tout ou partie, y compris en ce qui concerne la durée, de cette interdiction, déchéance ou incapacité, dans les conditions fixées par le code de procédure pénale ». Le relèvement immédiat ne peut porter que sur les peines accessoires à la condamnation.

12 Cass. crim., 31 mai 1994, n° 93-83.486.

13 Article 131–31 du code pénal.

14 Article 131–30 du code pénal.

15 Voir, pour exemple, la décision n° 2021-904 QPC du 7 mai 2021, M. Thomas O. (Incapacité d’exercer la profession d’éducateur sportif).

16 Voir notamment les articles 131-10 à 131-11 du code pénal relatifs aux peines complémentaires encourues pour certains crimes ou délits et les articles 131-12 à 131-18 du même code pour les peines complémentaires pouvant être prononcées en matière contraventionnelle.

17 Cass. crim., 9 octobre 1978, n° 78-91.831.

18 Dans le cas d’une peine accessoire, la première demande de relèvement peut être formée sans délai. En revanche, en cas de refus, le demandeur ne pourra formuler une nouvelle demande qu’au terme du délai de six mois.

19 Pour statuer sur la demande de relèvement, le tribunal correctionnel est composé d’un seul magistrat exerçant les pouvoirs du président. Il en est de même de la chambre des appels correctionnels ou de la chambre de l’instruction, qui est composée de son seul président, siégeant à juge unique. Ce magistrat peut toutefois, si la complexité du dossier le justifie, décider d’office ou à la demande du condamné ou du ministère public de renvoyer le jugement du dossier devant la formation collégiale de la juridiction. Le magistrat ayant ordonné ce renvoi fait alors partie de la composition de cette juridiction.

20 Voir, sur ce point, Martine Herzog–Evans, Droit de l’exécution des peines, Dalloz action, 2023/2024.

21 Voir par exemple, Cass. crim, 7 décembre 2021, n° 20-84.367.

22 Cass. crim, 3 mars 2004, n° 03–85.791.

23 Décision n° 2023-1049 QPC du 26 mai 2023, Société Nexta 2022 (Exclusion des opérations portant sur les titres et contrats financiers du champ de la révision pour imprévision), paragr. 3.

24 Décision n° 2022-999 QPC du 17 juin 2022, Établissement public La Monnaie de Paris (Impossibilité pour le témoin assisté d’interjeter appel de la décision de refus du juge d’instruction de constater la prescription de l’action publique), paragr. 5.

25 Voir, par exemple, sur la communication des pièces aux parties : décisions n° 2011-160 QPC du 9 septembre 2011, M. Hovanes A. (Communication du réquisitoire définitif aux parties), cons. 3, et n° 2012-284 QPC du 23 novembre 2012, Mme Maryse L. (Droit des parties non assistées par un avocat et expertise pénale), cons. 3 ; et sur les frais irrépétibles : décisions n° 2011-112 QPC du 1er avril 2011, Mme Marielle D. (Frais irrépétibles devant la Cour de cassation) cons. 3, n° 2011-190 QPC du 21 octobre 2011, M. Bruno L. et autre (Frais irrépétibles devant les juridictions pénales), cons. 4, n° 2019-773 QPC du 5 avril 2019, Société Uber B.V. et autre (Frais irrépétibles devant les juridictions pénales II), paragr. 4, et n° 2021-910 QPC du 26 mai 2021, Mme Line M. (Frais irrépétibles devant les juridictions pénales III), paragr. 6.

26 À travers, notamment, l’existence de dispositions attribuant un contentieux spécifique à une juridiction spécialisée. Voir, par exemple, la décision n° 2018-756 QPC du 17 janvier 2019, M. Jean-Pierre F. (Compétence des juridictions spécialisées en matière militaire pour les infractions commises par des militaires de la gendarmerie dans le service du maintien de l’ordre).

27 Voir, par exemple, la décision n° 2019-803 QPC du 27 septembre 2019, Mme Fabienne V. (Mise en mouvement de l’action publique en cas d’infraction commise par un militaire lors d’une opération extérieure).

28 Voir, par exemple, s’agissant de compositions différentes du conseil de discipline des avocats de Paris et des autres barreaux, la décision n° 2011-179 QPC du 29 septembre 2011, Mme Marie-Claude A. (Conseil de discipline des avocats), cons. 4, ou, pour la réduction de peine encourue dont peuvent bénéficier certains délinquants, selon le concours qu’ils ont apporté aux services enquêteurs, la décision n° 2013-679 DC du 4 décembre 2013, Loi relative à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière, cons. 15 et 16.

29 Décision n° 93-334 DC du 20 janvier 1994, Loi instituant une peine incompressible et relative au nouveau code pénal et à certaines dispositions de procédure pénale, cons. 17 à 19.

30 Décision n° 2011-113/115 QPC du 1er avril 2011, M. Xavier P. et autre (Motivation des arrêts d’assises) cons. 9.

31 Décision n° 2013-302 QPC du 12 avril 2013, M. Laurent A. et autres (Délai de prescription d’un an pour les délits de presse à raison de l’origine, l’ethnie, la nation, la race ou la religion), cons. 6.

32 Décision n° 2007-559 DC du 6 décembre 2007, Loi organique tendant à renforcer la stabilité des institutions et la transparence de la vie politique en Polynésie française, cons. 26.

33 Décision n° 2015-492 QPC du 16 octobre 2015, Association Communauté rwandaise de France (Associations pouvant exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne l’apologie des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité), cons. 7.

34 Décision n° 2021-909 QPC du 26 mai 2021, Mme Line M. (Impossibilité d’obtenir devant le tribunal de police la condamnation de la partie civile pour constitution abusive), paragr. 9.

35 Décision n° 2013-338/339 QPC du 13 septembre 2013, Société Invest Hôtels Saint-Dizier Rennes et autre (Prise de possession d’un bien exproprié selon la procédure d’urgence), cons. 8. Voir également les décisions n° 2012–243/244/245/246 QPC du 14 mai 2012, Société Yonne républicaine et autre (Saisine obligatoire de la commission arbitrale des journalistes et régime d’indemnisation de la rupture du contrat de travail), cons. 13, et n° 2004-491 DC du 12 février 2004, Loi complétant le statut d’autonomie de la Polynésie française, cons. 4.

36 Décision n° 80-127 DC du 20 janvier 1981, Loi renforçant la sécurité et protégeant la liberté des personnes, cons. 71.

37 Décision n° 84-183 DC du 18 janvier 1985, Loi relative au redressement et à la liquidation judiciaire des entreprises, cons. 15.

38 Décision n° 2010-81 QPC du 17 décembre 2010, M. Boubakar B. (Détention provisoire : réserve de compétence de la chambre de l’instruction), cons. 7. Alors que les requérants mettaient en avant une méconnaissance du « principe du double degré de juridiction », le Conseil a censuré ces dispositions en se fondant sur le principe d’égalité devant la justice et la différence de traitement en résultant selon que la chambre d’instruction choisit ou non d’évoquer. Il ressort du commentaire de cette décision que le Conseil n’a pas choisi de constitutionnaliser les règles applicables au double degré de juridiction existant, compte tenu de sa jurisprudence, et qu’il s’est à dessein fondé sur cette autre exigence constitutionnelle. 

39 Décision n° 2021–925 QPC du 21 juillet 2021, M. Ryan P. (Double degré de juridiction pour l’examen d’une requête en confusion de peines).