Conformité
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 7 juillet 2022 par la Cour de cassation (chambre commerciale, arrêt n° 574 du même jour) d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) posée par la société Amazon EU relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du 1° du paragraphe I de l'article L. 442–1 du code de commerce, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance n° 2019–359 du 24 avril 2019 portant refonte du titre IV du livre IV du code de commerce relatif à la transparence, aux pratiques restrictives de concurrence et aux autres pratiques prohibées.
Dans sa décision n° 2022–1011 QPC du 6 octobre 2022, le Conseil constitutionnel a déclaré ces dispositions conformes à la Constitution, dans cette rédaction.
I. – Les dispositions contestées
A. – Historique et objet des dispositions contestées
1. – Les pratiques déloyales ou restrictives de concurrence
* Le droit français de la concurrence a été marqué, dès son origine, par l'idée que les relations entre fournisseurs et distributeurs sont déséquilibrées et que, au vu de l'importance de ces rapports pour la formation des prix et pour le consommateur final, ces relations doivent être réglementées. Par conséquent, plutôt que de s'en remettre à la seule liberté contractuelle et au droit des obligations, les pouvoirs publics ont souhaité que ces relations fassent l'objet d'un encadrement spécifique.
À ce titre, à partir des années 1950 et afin de protéger le développement du commerce moderne, ont été prohibées certaines pratiques qualifiées de « restrictives de concurrence » et considérées comme « déloyales » telles que, notamment, les prix imposés, les augmentations discriminatoires de prix ou les refus de vente. Ces comportements se voient ainsi sanctionnés pour eux-mêmes, sans condition tenant à leurs effets réels sur le marché1.
Ces règles ont été reprises par l'ordonnance du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence2, remaniées par la loi « Galland »3 de 1996 et codifiées, en 20004, au sein du titre IV du livre IV du code de commerce5. Le législateur a régulièrement modifié les dispositions relatives aux pratiques restrictives de concurrence, les complétant au fur et à mesure que se développaient des comportements qu'il souhaitait voir cesser ou de nouvelles pratiques tentant de contourner de précédentes interdictions.
* En l'état actuel du droit, tel qu'il résulte de l'ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019 précitée, les articles L. 442-1 et suivants du code de commerce énoncent une série de pratiques prohibées6 car réputées restrictives de concurrence, parmi lesquelles figurent notamment : l'obtention d'avantages sans contrepartie ou disproportionnés7, l'imposition d'un déséquilibre significatif dans les relations commerciales8, la rupture brutale de relations commerciales établies9, la violation des obligations résultant du droit de l'Union européenne encadrant des activités d'intermédiation10, la violation de certaines interdictions de revente hors réseau11 ou encore la fixation de prix abusivement bas pour les produits agricoles et les denrées alimentaires12.
* Ces pratiques peuvent faire l'objet de sanctions pénales13 ou, de manière générale, de sanctions civiles.
Dans ce dernier cas, l'article L. 442-4 du code de commerce prévoit que l'action est portée devant des juridictions spécialisées, qui peuvent statuer par la voie du référé. Elle peut être intentée par toute personne ayant un intérêt à agir, et notamment par la victime de telles pratiques, mais également par le président de l'Autorité de la concurrence, le ministère public ou le ministre chargé de l'économie, lequel bénéficie d'une action autonome.
Peuvent être ordonnées, selon les cas, la cessation de la pratique en cause, la réparation du préjudice subi, le constat de la nullité des clauses ou contrats illicites et la restitution des avantages indus.
En outre, à la demande du ministère public ou du ministre chargé de l'économie, une amende civile peut être prononcée14.
2. – La prohibition de l'avantage sans contrepartie ou manifestement disproportionné (les dispositions contestées)
* Les notions d'avantage sans contrepartie ou manifestement disproportionné – et leur prohibition dans les relations commerciales au titre des pratiques restrictives de concurrence – ont été introduites dans le code de commerce15 par la loi du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques (dite « NRE »)16.
Dans l'exposé des motifs de son projet de loi, le Gouvernement expliquait que « La concentration de la distribution et les dérives de comportement dans les relations entre fournisseurs et distributeurs créent le besoin d'une régulation commerciale adaptée à ce nouvel environnement. (…) Les mesures proposées ont pour objet en premier lieu de favoriser le développement de meilleures pratiques commerciales entre fournisseurs et distributeurs et de mieux identifier les pratiques abusives ». Un de ces articles visait, en particulier, à établir « le principe d'une contrepartie proportionnée pour les fournisseurs lors de l'octroi d'un avantage financier au distributeur ».
Au premier rang des nouvelles pratiques abusives contre laquelle la loi entendait lutter, était particulièrement visée la « coopération commerciale fictive », qui consiste en des prélèvements opérés par les distributeurs sur leurs fournisseurs en vue de financer certaines opérations commerciales d'intérêt commun, notamment promotionnelles, mais sans aucune contrepartie réelle pour le fournisseur ou avec une contrepartie sans rapport avec la valeur des prestations effectuées par le distributeur17.
Afin de mieux lutter contre ce phénomène, a ainsi été érigé en pratique illicite, engageant la responsabilité de son auteur, le fait « d'obtenir ou de tenter d'obtenir d'un partenaire commercial un avantage quelconque ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné au regard de la valeur du service rendu ».
Comme exemple d'une telle pratique prohibée, ces mêmes dispositions mentionnaient expressément la participation non justifiée par un intérêt commun et sans contrepartie proportionnée au financement d'animations commerciales, d'acquisitions ou d'investissements.
* Poursuivant la lutte contre la coopération commerciale fictive, plusieurs lois ont complété ce texte en introduisant de nouveaux exemples de pratiques susceptibles de constituer un avantage injustifié :
– la loi dite « Dutreil »18 de 2005 y a ajouté la globalisation artificielle du chiffre d'affaires et la demande d'alignement sur les conditions commerciales obtenues par d'autres clients ;
– la loi dite « Hamon » du 17 mars 2014 relative à la consommation19 a ajouté à ces exemples la pratique des demandes supplémentaires, en cours d'exécution du contrat, visant à maintenir ou accroître abusivement ses marges ou sa rentabilité ;
– et celle, dite « Sapin 2 », du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique20 a étendu la liste des types de prestations susceptibles de donner lieu à des avantages injustifiés (promotion commerciale, services rendus par une centrale internationale regroupant des distributeurs).
Au total, avant sa réforme en 2019, le 1° du paragraphe I de l'ancien article L. 442–6 du code de commerce dressait une longue liste de pratiques commerciales au titre de la prohibition des avantages injustifiés21.
Cette sédimentation de dispositions accumulées au fil des années et devenues difficilement lisibles, entremêlant éléments de définition et exemples de pratiques prohibées, avait fait l'objet de critiques et de propositions de réécriture22.
* L'article 17 de la loi n° 2018–938 du 30 octobre 2018, dite « Egalim »23, a habilité le Gouvernement à prendre par voie d'ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi nécessaire pour modifier le titre IV du livre IV du code de commerce, en particulier afin de « réorganiser ce titre et clarifier ses dispositions, notamment en supprimant les dispositions devenues sans objet » et de « simplifier et [...] préciser les définitions des pratiques mentionnées à l'article L. 442-6 ».
Sur le fondement de cette habilitation, l'ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019 a réécrit les dispositions de l'ancien article L. 442–6 du code de commerce, qui ont été réparties entre quatre nouveaux articles (L. 442–1 à L. 442–4). En particulier, la liste des treize pratiques restrictives de concurrence, assortie de ses nombreux exemples, a été refondue au sein de l'article L. 442-1.
Selon le rapport au Président de la République relatif à cette ordonnance, certaines des treize pratiques énumérées par l'ancien article L. 442–6 n'avaient jamais fait l'objet d'une action en justice ou seulement « de manière sporadique », et l'essentiel du contentieux était concentré sur l'avantage injustifié, le déséquilibre significatif et la rupture brutale d'une relation commerciale.
Il a donc été décidé de recentrer le nouveau texte sur ces trois pratiques « tout en apportant des modifications à leur champ d'application », « afin de simplifier et de rendre plus intelligible l'environnement légal pour les opérateurs économiques (…). Ainsi, cette simplification n'a pas pour objet de rendre les pratiques et clauses actuellement prohibées licites. Il s'agit de recentrer les pratiques restrictives de concurrence sur des notions générales qui permettent d'englober les nombreuses clauses et pratiques énumérées dans [l'ancien article] L. 442-6 du code de commerce ».
* La prohibition de l'avantage injustifié résulte désormais du 1° du paragraphe I de cet article L. 442-1 (les dispositions objet de la décision commentée), qui prévoit que : « I. – Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, dans le cadre de la négociation commerciale, de la conclusion ou de l'exécution d'un contrat, par toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services : / 1° D'obtenir ou de tenter d'obtenir de l'autre partie un avantage ne correspondant à aucune contrepartie ou manifestement disproportionné au regard de la valeur de la contrepartie consentie ; ».
La définition de l'avantage injustifié conserve ainsi ses deux branches qui visent un ensemble de pratiques commerciales tendant à l'obtention soit d'un avantage fictif, sans contrepartie réelle, soit d'un avantage qui a bien une contrepartie, mais dérisoire.
À titre d'exemple, sous l'empire de l'ancienne rédaction de ces dispositions, la Cour de cassation avait jugé24 qu'un avantage manifestement disproportionné était caractérisé lorsque les services n'étaient pas clairement définis, que leur évaluation relevait d'une disproportion manifeste et que leur facturation n'était pas établie en considération de la consistance des services rendus mais en fonction d'un taux global arrêté préalablement. Il était d'ailleurs souligné que ce taux, dénué de rapport avec la valeur réelle des prestations, était « imposé ».
Quant à la contrepartie fictive, elle se rapproche de la notion de contrepartie illusoire mentionnée à l'article 1169 du code civil. Est ainsi fictif un service qui n'est pas précisé et qui ne correspond à rien25.
* La portée de certaines des expressions retenues par cette nouvelle rédaction est toutefois plus large qu'auparavant :
– concernant la portée temporelle de la prohibition, la nouvelle formulation retenue vise désormais explicitement tous les stades de la relation contractuelle, y compris les négociations préalables (le premier alinéa du paragraphe I précisant que les pratiques sont appréhendées « dans le cadre de la négociation commerciale, de la conclusion ou de l'exécution d'un contrat ») ;
– concernant l'auteur de la pratique prohibée, il s'agit de « toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services » (et non plus seulement du producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers) ;
– concernant la relation contractuelle visée, ces dispositions visent l'avantage injustifié obtenu de « l'autre partie » (et non plus d'un « partenaire commercial »). Le rapport précité accompagnant l'ordonnance du 24 avril 2019 explique à cet égard qu'il s'agit, ce faisant, de surmonter la jurisprudence de la Cour de cassation qui excluait de la prohibition de l'avantage injustifié les relations commerciales n'ayant pas vocation à être reconduites dans la durée ;
– concernant la nature de la contrepartie absente ou dérisoire, la rédaction adoptée ne mentionne plus qu'il doit s'agir forcément d'un « service commercial ». Selon le même rapport, il s'agit ainsi de clarifier, comme cela résultait déjà de certaines jurisprudences, que la prohibition de l'avantage injustifié ne se limite pas aux seuls accords de « coopération commerciale » portant sur de tels services.
Les modifications ainsi apportées aux dispositions prohibant l'obtention d'un avantage injustifié ont été critiquées par une partie de la doctrine comme induisant le risque d'une généralisation du contrôle de la lésion dans les relations d'affaires26.
B. – Origine de la QPC et question posée
Le 23 juin 2020, l'association ILEC (Institut de liaisons des entreprises de consommation), qui rassemble une centaine d'entreprises fabriquant et commercialisant des produits de grande consommation, avait assigné devant le tribunal de commerce de Paris la société de droit luxembourgeois Amazon EU, qui gère les activités de commerce de détail en ligne du groupe Amazon en Europe et notamment la boutique en ligne « amazon.fr ».
L'association avait demandé qu'il soit enjoint à cette société de cesser de mentionner dans ses documents contractuels, et de mettre en œuvre, douze pratiques et clauses illicites imposées à ses fournisseurs – en particulier certaines pratiques relevant de l'avantage injustifié prohibé par l'article L. 442-1 du code de commerce –, et qu'elle soit condamnée à lui payer la somme de cinq millions d'euros au titre du préjudice collectif subi par ses adhérents.
En défense, la société Amazon EU avait invité le tribunal de commerce à transmettre à la Cour de cassation une question prioritaire de constitutionnalité dirigée contre les dispositions du 1° du paragraphe I de l'article L. 442-1 du code de commerce.
Par jugement du 10 mai 2022, le tribunal de commerce de Paris avait transmis la question précitée à la Cour de cassation.
Par son arrêt précité du 7 juillet 2022, la chambre commerciale de la Cour de cassation avait renvoyé la question au Conseil constitutionnel au motif qu'elle présentait un caractère sérieux « au regard de la liberté contractuelle et de la liberté d'entreprendre, en ce que cette disposition est de nature à permettre au juge de procéder à un contrôle des conditions économiques pour caractériser l'existence d'une disproportion manifeste entre l'avantage recherché ou obtenu par une partie exerçant des activités de production, de distribution ou de services et la valeur de la contrepartie consentie par celle-ci, quand bien même ces conditions économiques auraient fait l'objet d'une libre négociation entre les parties ».
II. – L'examen de la constitutionnalité des dispositions contestées
La société requérante reprochait tout d'abord aux dispositions du 1° du paragraphe I de l'article L. 442-1 du code de commerce de méconnaître la liberté contractuelle et la liberté d'entreprendre.
Au soutien de ces griefs, elle faisait valoir que ces dispositions permettraient au juge de procéder à un contrôle des conditions économiques de toute relation commerciale, alors même que ces conditions seraient librement négociées entre les parties. Elle reprochait également à ces dispositions de prévoir que la personne qui a obtenu ou tenté d'obtenir un avantage sans contrepartie ou manifestement disproportionné engage sa responsabilité, sans préciser le seuil à partir duquel est caractérisé un tel avantage. Pour ce dernier motif, elle estimait ensuite que ces dispositions méconnaissaient l'objectif à valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi ainsi que le principe d'égalité devant la loi, dès lors qu'elles laisseraient au juge toute latitude pour caractériser cet avantage.
Enfin, elle soutenait que, compte tenu de leur imprécision et au regard des sanctions prévues, ces dispositions méconnaissaient le principe de légalité des délits et des peines.
Par ailleurs, l'association Institut de liaisons des entreprises de consommation, partie au litige à l'occasion duquel la QPC avait été soulevée, défendait la constitutionnalité des dispositions contestées.
A. – La jurisprudence constitutionnelle relative à la liberté contractuelle et à la liberté d'entreprendre
* La liberté d'entreprendre et la liberté contractuelle se rattachent à l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, aux termes duquel « La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi, l'exercice des droits naturels de chaque homme n'a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la société la jouissance de ces mêmes droits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la loi ». Leur valeur constitutionnelle a été reconnue explicitement, respectivement, par la décision n° 81–132 DC du 16 janvier 198227 et par la décision n° 2000–437 DC du 19 décembre 200028.
La liberté d'entreprendre comprend la liberté d'accéder à une profession ou à une activité économique29, ainsi que la liberté dans l'exercice de cette profession ou de cette activité30. Elle inclut aussi la liberté de fixer les prix31.
La liberté contractuelle protège les conditions de formation et d'exécution des contrats. Le législateur ne saurait porter aux conventions légalement conclues une atteinte qui ne soit pas justifiée par un motif d'intérêt général suffisant32.
Compte tenu de la proximité du contrôle exercé à leur égard, il arrive souvent que le Conseil constitutionnel se livre à un contrôle commun à ces deux exigences constitutionnelles33. Il juge à cet égard qu'« il est loisible au législateur d'apporter à la liberté d'entreprendre et à la liberté contractuelle, qui découlent de l'article 4 de la Déclaration de 1789, des limitations liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par l'intérêt général, à la condition qu'il n'en résulte pas d'atteintes disproportionnées au regard de l'objectif poursuivi »34.
Par conséquent, toute limitation de ces libertés doit être justifiée par une exigence constitutionnelle ou par un objectif d'intérêt général. Le Conseil s'assure que les atteintes apportées aux libertés contractuelle et d'entreprendre sont justifiées par cette exigence ou cet objectif et qu'elles sont proportionnées. S'il exerce en principe un contrôle restreint de l'absence de disproportion manifeste face à un objectif de valeur constitutionnelle, il procède à un contrôle entier face à un objectif d'intérêt général35.
À plusieurs reprises déjà, le Conseil a rangé au nombre de ces objectifs celui de préservation de l'ordre public économique36.
* Le Conseil a déjà eu l'occasion de prononcer certaines censures motivées par une atteinte disproportionnée à la liberté de fixer les prix soit au regard des exigences de la liberté d'entreprendre – seule ou combinée avec le droit de propriété –, soit au regard de la liberté contractuelle.
- Ainsi, par sa décision n° 2015-468/469/472 QPC du 22 mai 201537, le Conseil a censuré pour violation de la liberté d'entreprendre des dispositions qui encadraient les modalités selon lesquelles les entreprises qui mettent à la disposition de leur clientèle une ou plusieurs voitures de transport avec chauffeur (VTC) doivent déterminer, lors de la réservation préalable, le prix des prestations qu'elles proposent à leur clientèle. Il a jugé « qu'en interdisant certains modes de tarification pour la détermination du prix des prestations que les entreprises qui mettent à la disposition de leur clientèle une ou plusieurs voitures avec chauffeur proposent aux consommateurs lors de la réservation préalable, les dispositions contestées ont porté à la liberté d'entreprendre une atteinte qui n'est pas justifiée par un motif d'intérêt général en lien direct avec l'objectif poursuivi ».
- Dans sa décision n° 2015–715 DC du 5 août 201538, le Conseil était notamment saisi de dispositions permettant à l'Autorité de la concurrence de prononcer des injonctions structurelles en cas d'existence d'une position dominante et de détention d'une part de marché supérieure à 50 % par une entreprise ou un groupe d'entreprises exploitant un ou plusieurs magasins de commerce de détail en France métropolitaine.
Le Conseil a d'abord relevé que « le législateur a entendu corriger ou mettre fin aux accords et actes par lesquels s'est, dans le commerce de détail, constituée une situation de puissance économique portant atteinte à une concurrence effective dans une zone considérée se traduisant par des pratiques de prix ou de marges élevés en comparaison des moyennes habituellement constatées dans le secteur économique concerné ; qu'il a ainsi poursuivi un objectif de préservation de l'ordre public économique et de protection des consommateurs ».
Il a toutefois censuré ces dispositions, jugeant qu'une telle injonction structurelle pouvait « conduire à la remise en cause des prix ou des marges pratiqués par l'entreprise ou le groupe d'entreprises et, le cas échéant, à l'obligation de modifier, compléter ou résilier des accords ou actes, ou de céder des actifs alors même que la position dominante de l'entreprise ou du groupe d'entreprises a pu être acquise par les mérites et qu'aucun abus n'a été constaté ; que, d'autre part, les dispositions contestées s'appliquent sur l'ensemble du territoire de la France métropolitaine et à l'ensemble du secteur du commerce de détail, alors même qu'il ressort des travaux préparatoires que l'objectif du législateur était de remédier à des situations particulières dans le seul secteur du commerce de détail alimentaire ; qu'ainsi, eu égard aux contraintes que ces dispositions font peser sur les entreprises concernées et à leur champ d'application, les dispositions de l'article L. 752-26 du code de commerce portent tant à la liberté d'entreprendre qu'au droit de propriété une atteinte manifestement disproportionnée au regard du but poursuivi »39.
- Dans sa décision n° 2016–742 DC du 22 décembre 201640, le Conseil était saisi de l'article 28 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 qui créait, dans son paragraphe I, une contribution sociale à la charge des fournisseurs agréés de produits du tabac et fixait, dans son paragraphe II, les conditions dans lesquelles les redevables de cette contribution pouvaient la répercuter sur les producteurs de tabac. S'agissant de ce second paragraphe, le Conseil a estimé qu'« en encadrant la possibilité, pour le redevable de la contribution instituée à l'article L. 137–27 du code de la sécurité sociale, d'en répercuter le coût sur les producteurs de tabac, le législateur a entendu garantir une répercussion homogène de la contribution et éviter des distorsions de compétitivité entre ces producteurs. Il a ainsi poursuivi un objectif d'intérêt général. Toutefois, les dispositions contestées limitent la capacité des fournisseurs de produits du tabac à négocier librement leurs prix avec chacun des producteurs avec lesquels ils sont en relation contractuelle. Il en résulte, compte tenu de l'objectif poursuivi, une atteinte disproportionnée à la liberté contractuelle. Par suite, les dispositions du paragraphe II de l'article 28 sont contraires à la Constitution »41.
* Le Conseil a en outre déjà été amené à se prononcer sur la conformité à la liberté d'entreprendre et à la liberté contractuelle de dispositions prohibant certaines pratiques restrictives de concurrence.
- Dans sa décision n° 2011–126 QPC du 13 mai 201142, le Conseil a confronté à la liberté d'entreprendre le second alinéa du paragraphe III de l'ancien article L. 442–6 du code de commerce (dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-3 du 3 janvier 2008), prévoyant les différentes mesures, dont l'amende civile, ouvertes au ministère de l'économie et au parquet pour lutter contre certaines pratiques restrictives de concurrence (pratiques qui incluaient déjà le fait d'obtenir ou de tenter d'obtenir d'un partenaire commercial un avantage quelconque ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné au regard de la valeur du service rendu).
Le Conseil a jugé « qu'en adoptant les dispositions contestées, le législateur a attribué à l'autorité publique un pouvoir d'agir pour faire cesser des pratiques restrictives de concurrence mentionnées au même article, constater la nullité de clauses ou contrats illicites, ordonner le remboursement des paiements indus faits en application des clauses annulées, réparer les dommages qui en ont résulté et prononcer une amende civile contre l'auteur desdites pratiques ; qu'ainsi, il a entendu réprimer ces pratiques ; qu'eu égard aux objectifs de préservation de l'ordre public économique qu'il s'est assignés, le législateur a opéré une conciliation entre le principe de la liberté d'entreprendre et l'intérêt général tiré de la nécessité de maintenir un équilibre dans les relations commerciales ; que l'atteinte portée à la liberté d'entreprendre par les dispositions contestées n'est pas disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi »43.
Faisant écho à une précédente décision dans laquelle il s'était référé aux « objectifs [que le législateur] s'assigne en matière d'ordre public dans l'équilibre des rapports entre partenaires commerciaux »44, avant d'écarter le grief tiré de la méconnaissance du principe de légalité des délits et des peines dirigé contre les anciennes dispositions prohibant le déséquilibre significatif dans les relations commerciales, le Conseil avait ici employé pour la première fois les termes « ordre public économique ».
- Plus récemment, dans sa décision n° 2018–749 QPC du 30 novembre 201845, le Conseil constitutionnel était saisi de la prohibition d'une pratique restrictive de concurrence particulière, le « déséquilibre significatif » dans les relations commerciales. Il a déclaré conformes à la Constitution les dispositions du 2° du paragraphe I de l'article L. 442-6 du code de commerce, dans sa rédaction résultant de la loi du 6 août 2015 n° 2015-990, aux termes duquel engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers, de « soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ».
Dans la droite ligne de sa décision n° 2011-126 QPC précitée, le Conseil a tout d'abord relevé que, « en adoptant les dispositions contestées, le législateur a entendu rétablir un équilibre des rapports entre partenaires commerciaux. Il a ainsi poursuivi un objectif d'intérêt général ». Le Conseil a ensuite insisté sur le fait que les dispositions contestées visaient seulement à éviter le déséquilibre significatif dans les droits et obligations de partenaires commerciaux, lequel peut être établi au moyen de différents critères. En l'occurrence, il a relevé que, telles qu'interprétées par la Cour de cassation, « les dispositions contestées permettent au juge de se fonder sur le prix pour caractériser l'existence d'un déséquilibre significatif dans les obligations des partenaires commerciaux ».
Comme le souligne le commentaire de la décision à cet égard, le Conseil a relevé que la jurisprudence de la Cour de cassation « n'a nullement pour effet de conférer au juge le pouvoir de fixer lui-même, en toute hypothèse, le ʺjuste prixʺ des biens ou prestations en cause. Il lui appartient seulement de s'assurer de l'absence d'abus caractérisé de l'un des opérateurs, qui aurait profité de sa position pour imposer ʺson prixʺ sans réelle négociation ou contrepartie ». Le Conseil a ainsi admis, comme le jugeait la Cour de cassation, que le juge pouvait se fonder sur le prix pour caractériser un déséquilibre dans les obligations et a conclu que l'atteinte portée à la liberté d'entreprendre et à la liberté contractuelle n'était pas disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi.
B. – La jurisprudence constitutionnelle sur le principe de légalité des délits et des peines
* Le principe de légalité des délits et des peines découle de l'article 8 de la Déclaration de 1789, selon lequel « La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu'en vertu d'une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée ». Sa valeur constitutionnelle a été affirmée dès la décision n° 80–127 DC du 20 janvier 198146.
Ainsi que le Conseil a déjà eu l'occasion de le rappeler expressément, il résulte de sa jurisprudence constante que « le principe de légalité des peines, qui découle de cet article, s'applique à toute sanction ayant le caractère d'une punition et non aux seules peines prononcées par les juridictions répressives. En vertu de ce principe, le législateur ou, dans son domaine de compétence, le pouvoir réglementaire, doivent fixer les sanctions ayant le caractère d'une punition en des termes suffisamment clairs et précis »47.
* Ce principe s'impose ainsi à l'ensemble des dispositions répressives, et non pas seulement à la matière pénale au sens strict. En dehors de cette matière, le Conseil constitutionnel a déjà admis que l'exigence de définition des infractions se trouve satisfaite :
– en matière disciplinaire, « dès lors que les textes applicables font référence aux obligations auxquelles les intéressés sont soumis en raison de l'activité qu'ils exercent, de la profession à laquelle ils appartiennent ou de l'institution dont ils relèvent »48 ;
– en matière de sanctions administratives, « par la référence aux obligations auxquelles » le titulaire d'une autorisation administrative ou le responsable d'une fonction publique « est soumis en vertu des lois et règlements »49.
Ce principe a également vocation à s'appliquer au prononcé d'une amende civile.
Le Conseil l'a d'abord jugé dans sa décision n° 2010-85 QPC du 13 janvier 2011 précitée, dans laquelle avait été déclarée conforme à la Constitution une première version des dispositions prohibant le déséquilibre significatif des relations commerciales.
De même, dans la décision n° 2017-750 DC du 23 mars 2017, le Conseil constitutionnel a censuré sur le fondement du principe de légalité des délits et des peines les dispositions de la loi relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d'ordre instituant à leur encontre une amende civile, en raison des lacunes relevées dans la définition de l'obligation de mise en œuvre de « mesures de vigilance raisonnable » qu'elles faisaient peser sur elles, mais aussi dans la délimitation des normes de référence que devaient prendre en compte les sociétés dans l'élaboration et la mise en œuvre de leur plan de vigilance. À cela s'ajoutaient l'imprécision du périmètre des partenaires économiques qui devaient entrer dans le champ d'application du plan de vigilance ainsi que l'imprécision relative à l'éventualité d'un cumul de l'amende civile pour chaque manquement à l'obligation définie.
Le Conseil a jugé, en conséquence, que « Compte tenu de la généralité des termes qu'il a employés, du caractère large et indéterminé de la mention des "droits humains" et des "libertés fondamentales" et du périmètre des sociétés, entreprises et activités entrant dans le champ du plan de vigilance qu'il instituait, le législateur ne pouvait, sans méconnaître les exigences découlant de l'article 8 de la Déclaration de 1789 et en dépit de l'objectif d'intérêt général poursuivi par la loi déférée, retenir que peut être soumise au paiement d'une amende d'un montant pouvant atteindre dix millions d'euros la société qui aurait commis un manquement défini en des termes aussi insuffisamment clairs et précis »50.
Enfin, dans sa décision 2018-749 QPC précitée, le Conseil a rappelé que ce principe s'applique également à la violation de certaines obligations entre partenaires commerciaux, sanctionnée d'une amende civile : « Compte tenu des objectifs qu'il s'assigne en matière d'ordre public dans l'équilibre des rapports entre partenaires commerciaux, il lui est loisible d'assortir la violation de certaines obligations d'une amende civile à la condition de respecter les exigences des articles 8 et 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, au rang desquelles figure le principe de légalité des délits et des peines qui lui impose d'énoncer en des termes suffisamment clairs et précis la prescription dont il sanctionne le manquement »51.
* Il ressort également de la jurisprudence du Conseil que des incriminations fondées sur des notions qu'il appartient au juge d'interpréter pour apprécier les situations de fait en relevant ne sont pas, pour autant, des incriminations arbitraires52.
Le Conseil a ainsi récemment jugé, dans sa décision n° 2021–933 QPC du 30 septembre 2021, que « les termes "un caractère sexuel" et "absence d'accord de la personne pour la diffusion" sont suffisamment clairs et précis pour garantir contre le risque d'arbitraire. Il appartient aux juridictions compétentes d'apprécier le caractère sexuel des paroles ou images diffusées ainsi que l'absence de consentement de la personne à cette diffusion »53.
Lorsque le texte litigieux ne définit pas l'infraction de manière claire et précise, le Conseil tient compte, le cas échéant, des précisions apportées par la jurisprudence54 ou des éclaircissement apportés par d'autres textes55.
Par exemple, dans la décision précitée n° 2010–85 QPC du 13 janvier 2011, le Conseil constitutionnel a admis que l'exigence de précision était satisfaite par la référence à la notion de « déséquilibre significatif ». Il a relevé que la notion, reprenant les termes d'une directive communautaire, existait déjà dans le code de la consommation, que son contenu était précisé par la jurisprudence et, en outre, que la juridiction saisie pouvait consulter la commission d'examen des pratiques commerciales, composée des représentants des secteurs économiques intéressées. Par conséquent, il a jugé qu'« eu égard à la nature pécuniaire de la sanction et à la complexité des pratiques que le législateur a souhaité prévenir et réprimer, l'incrimination est définie en des termes suffisamment clairs et précis pour ne pas méconnaître le principe de légalité des délits »56.
C. – L'application à l'espèce
* Dans la décision commentée, le Conseil constitutionnel a examiné, en premier lieu, la conformité des dispositions contestées à la liberté d'entreprendre et à la liberté contractuelle, dont il a rappelé qu'elles découlent de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.
Il a repris sa formulation de principe selon laquelle le législateur peut apporter à ces deux libertés « des limitations liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par l'intérêt général, à la condition qu'il n'en résulte pas d'atteintes disproportionnées au regard de l'objectif poursuivi » (paragr. 3).
Dans ce cadre, le Conseil a d'abord rappelé l'objet des dispositions contestées, qui permettent d'engager la responsabilité de professionnels – ceux exerçant des activités de production, de distribution ou de services – dans une circonstance particulière – avoir obtenu ou tenté d'obtenir, dans le cadre d'une relation commerciale, certains avantages de l'autre partie (paragr. 4).
S'inscrivant ensuite dans la lignée des décisions n° 2011–126 QPC et 2018–749 QPC précitées, qui portaient déjà sur des pratiques restrictives de concurrence prohibées par la loi, il a considéré que, ce faisant, le législateur avait entendu « préserver l'ordre public économique, réprimer certaines pratiques restrictives de concurrence et assurer un équilibre des relations commerciales », et qu'il avait « ainsi poursuivi un objectif d'intérêt général » (paragr. 5).
Le Conseil s'est ensuite attaché à déterminer l'exacte portée des dispositions contestées. Il a ainsi observé qu'elles « permettent, lorsqu'il est saisi, au juge de contrôler les conditions économiques de la relation commerciale uniquement pour constater une pratique illicite tenant à l'obtention d'un avantage soit dépourvu de contrepartie, soit manifestement disproportionné au regard de cette dernière » (paragr. 6).
Contrairement à ce que soutenait la société requérante, en s'appuyant sur les critiques d'une partie de la doctrine qui dénonçait l'interventionnisme du législateur dans les relations d'affaires, ces dispositions ne conduisent pas à instaurer un « contrôle généralisé de la lésion » ou une « fixation judiciaire des prix » : elles visent uniquement à prohiber une pratique restrictive de concurrence déterminée, qui peut donner lieu à l'engagement de la responsabilité pour faute du cocontractant. Elles ne confèrent, en tout état de cause, au juge aucun pouvoir de révision du prix ou de réfaction du contrat, ce dernier étant chargé, en cas de contestation, d'évaluer une disproportion – qui doit être manifeste – entre certaines obligations.
Le Conseil en a déduit que l'atteinte portée par les dispositions contestées à la liberté d'entreprendre et à la liberté contractuelle n'était pas disproportionnée au regard de l'objectif ainsi poursuivi (paragr. 7).
* En second lieu, le Conseil s'est prononcé sur le grief tiré de la méconnaissance du principe de légalité des délits et des peines. De ce principe, qui découle de l'article 8 de la Déclaration de 1789, et qui ne concerne pas seulement les peines prononcées par les juridictions pénales mais s'étend à toute sanction ayant le caractère d'une punition, le Conseil tire la norme de concrétisation selon laquelle le législateur doit « fixer les sanctions ayant le caractère d'une punition en des termes suffisamment clairs et précis » (paragr. 8).
En l'espèce, le Conseil a jugé que la notion d'avantage « manifestement disproportionné au regard de la valeur de la contrepartie consentie » ne présentait pas de caractère imprécis ou équivoque, s'agissant d'une notion reposant sur des termes courants utilisés dès 2001 par le législateur dans le but de prohiber certaines pratiques commerciales entre fournisseurs et distributeurs, et qui reprend un standard juridique classique. Il a donc écarté le grief tiré de la méconnaissance du principe de légalité des délits et des peines (paragr. 9).
Ces dispositions ne méconnaissant pas non plus le principe d'égalité, ni aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel les a donc déclarées conformes à la Constitution (paragr. 10).
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1 Ces pratiques « restrictives de concurrence » se distinguent ainsi de celles dites « anti-concurrentielles », régies par le titre II du livre IV du code de commerce (ententes illicites, abus de position dominante, etc.) et réprimées, elles, en raison de leurs effets concurrentiels néfastes.
2 Ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence ; voir notamment son titre IV (« De la transparence et des pratiques restrictives »).
3 Loi n° 96-588 du 1er juillet 1996 sur la loyauté et l'équilibre des relations commerciales.
4 Ordonnance n° 2000-912 du 18 septembre 2000 relative à la partie législative du code de commerce.
5 Intitulé « De la transparence, des pratiques restrictives de concurrence et d'autres pratiques prohibées ».
6 Le code de commerce énonce également une série de clauses prohibées susceptibles d'être frappées de nullité (notamment la revente à perte, visée à l'art. L. 442-5, et l'imposition d'un prix minimal de revente, visée à l'art. L. 442-6).
7 1° du paragraphe I de l'art. L. 442-1.
8 2° du paragraphe I de l'art. L. 442-1.
9 Paragraphe II de l'art. L. 442-1.
10 Paragraphe III de l'art. L. 442-1.
11 Art. L. 442-2.
12 Art. L. 442-7.
13 Des amendes délictuelles sont expressément prévues pour réprimer certaines pratiques restrictives de concurrence, comme la revente à perte ou l'imposition d'un prix minimal de revente (art. L. 442-6 du code de commerce).
14 Amende dont le montant ne peut excéder le plus élevé des trois montants suivants :
- cinq millions d'euros ;
- le triple du montant des avantages indûment perçus ou obtenus ;
- 5 % du chiffre d'affaires hors taxes réalisé en France par l'auteur des pratiques lors du dernier exercice clos depuis l'exercice précédant celui au cours duquel les pratiques ont été mises en œuvre.
15 Ces dispositions figuraient au a du 2° du paragraphe I de l'article L. 442-6 du code de commerce, avant d'être déplacées au 1° du I du même article, puis recodifiées à l'article L. 442-1 du même code par l'ordonnance du 24 avril 2019.
16 Loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques.
17 Ainsi que l'exposait le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques du Sénat : « La coopération commerciale désigne l'ensemble des services spécifiques, distincts des services liés à l'achat ou à la vente, fournis par les distributeurs à leurs fournisseurs, moyennant le versement d'une rémunération. (…) Elle consiste à faire participer le fournisseur au financement de diverses opérations commerciales et, notamment, d'opérations publicitaires telles que la mise en avant de produits en tête de gondole, l'organisation d'animations en magasin, ou encore la promotion de produits dans des catalogues publicitaires. Cependant, se développe, depuis peu, une coopération commerciale dite "fictive", c'est-à-dire dépourvue de contrepartie réelle, le fournisseur se voyant alors contraint de verser des primes ou de consentir des ristournes sans obtenir en retour un avantage commercial particulier. C'est cette coopération commerciale et fictive qui est ici visée » (avis n° 4 [Sénat – 2000-2001] de M. Pierre Hérisson, fait au nom de la commission des affaires économiques, déposé le 4 octobre 2000).
18 Loi n° 2005-882 du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises. La loi Dutreil a, en outre, ajouté deux pratiques restrictives de concurrence. Elle a imposé la rédaction d'un contrat annuel précisant les services rendus et les modalités de leurs exécutions et redéfini le calcul du seuil de revente à perte. Sur ce même sujet, la loi « Chatel » (loi n° 2008-3 du 3 janvier 2008 pour le développement de la concurrence au service des consommateurs) a imposé la rédaction d'un contrat unique fixant l'intégralité des conditions relatives à la coopération commerciale ainsi qu'à l'opération de vente et aux autres services.
19 Loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation.
20 Loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique.
21 « Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers : / 1° D'obtenir ou de tenter d'obtenir d'un partenaire commercial un avantage quelconque ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné au regard de la valeur du service rendu. Un tel avantage peut notamment consister en la participation, non justifiée par un intérêt commun et sans contrepartie proportionnée, au financement d'une opération d'animation ou de promotion commerciale, d'une acquisition ou d'un investissement, en particulier dans le cadre de la rénovation de magasins, du rapprochement d'enseignes ou de centrales de référencement ou d'achat ou de la rémunération de services rendus par une centrale internationale regroupant des distributeurs. Un tel avantage peut également consister en une globalisation artificielle des chiffres d'affaires, en une demande d'alignement sur les conditions commerciales obtenues par d'autres clients ou en une demande supplémentaire, en cours d'exécution du contrat, visant à maintenir ou accroître abusivement ses marges ou sa rentabilité ».
22 Réflexions menées dans le cadre des « États généraux de l'alimentation », réunis en 2017 à l'initiative du Gouvernement, et complétées en janvier 2018 par le « Rapport pour une réforme du droit de la concurrence » de la commission établie sous la présidence de MM. Guy Canivet et Frédéric Jenny.
23 Loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous.
24 Cass. com., 11 septembre 2012, Société Carrefour, n° 11-14.620.
25 Cour d'appel de Paris, 29 juin 2016, n° 14/09786.
26 Voir notamment : Cyril Grimaldi, « Vers un contrôle généralisé de la lésion en droit français ? », Recueil Dalloz, 2019, p. 388 ; Clémence Mouly-Guillemaud, « Déséquilibre significatif et rupture brutale : variations introduites par la refonte du Titre IV du Livre IV du Code de commerce », RLDC, n° 172, juillet 2019 ; Martine Behar-Touchais, « Les différentes pratiques restrictives de concurrence dans les ordonnances du 24 avril 2019 », La Semaine Juridique - Entreprise et affaires, n° 29, 18 juillet 2019.
27 Décision n° 81-132 DC du 16 janvier 1982, Loi de nationalisation.
28 Décision n° 2000-437 DC du 19 décembre 2000, Loi de financement de la sécurité sociale pour 2001.
29 Décision n° 2011-139 QPC du 24 juin 2011, Association pour le droit à l'initiative économique (Conditions d'exercice de certaines activités artisanales).
30 Décision n° 2012-285 QPC du 30 novembre 2012, M. Christian S. (obligation d'affiliation à une corporation d'artisans en Alsace-Moselle).
31 Décision n° 90-287 DC du 16 janvier 1991, Loi portant dispositions relatives à la santé publique et aux assurances sociales.
32 Décision n° 2002-465 DC du 13 janvier 2003, Loi relative aux salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi, cons. 4.
33 Décision n° 2017-649 QPC du 4 août 2017, Société civile des producteurs phonographiques et autre (Extension de la licence légale aux services de radio par internet), paragr. 10 à 13.
34 Décision n° 2017-649 QPC précitée, paragr. 6.
35 Le Conseil constitutionnel rappelle en outre parfois qu'il ne dispose pas d'un pouvoir d'appréciation de même nature que celui du Parlement et ne peut donc substituer son appréciation à celle du législateur (décision n° 2014-434 QPC du 5 décembre 2014, Société de laboratoires de biologie médicale Bio Dômes Unilabs SELAS [Tarif des examens de biologie médicale], cons. 6).
36 Voir notamment les décisions n° 2011-126 QPC du 13 mai 2011, Société Système U Centrale Nationale et autre (Action du ministre contre des pratiques restrictives de concurrence), cons. 5, n° 2012-280 QPC du 12 octobre 2012, Société Groupe Canal Plus et autre (Autorité de la concurrence : organisation et pouvoir de sanction), cons. 11 et, en dernier lieu, n° 2021-965 QPC du 28 janvier 2022, Société Novaxia développement et autres (Sanction des entraves aux contrôles et enquêtes de l'Autorité des marchés financiers), paragr. 11.
37 Décision n° 2015-468/469/472 QPC du 22 mai 2015, Société UBER France SAS et autre (Voitures de transport avec chauffeur - Interdiction de la « maraude électronique » - Modalités de tarification - Obligation de retour à la base), cons. 20.
38 Décision n° 2015-715 DC du 5 août 2015, Loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques.
39 Ibid, paragr. 32
40 Décision n° 2016-742 DC du 22 décembre 2016, Loi de financement de la sécurité sociale pour 2017.
41 Ibid, paragr. 28 et 29.
42 Décision n° 2011-126 QPC du 13 mai 2011, Société Système U Centrale Nationale et autre (Action du ministre contre des pratiques restrictives de concurrence).
43 Ibid, cons. 5.
44 Décision n° 2010–85 QPC du 13 janvier 2011, Établissements Darty et fils (Déséquilibre significatif dans les relations commerciales), cons. 3.
45 Décision n° 2018-749 QPC du 30 novembre 2018, Société Interdis et autres (Déséquilibre significatif dans les relations commerciales II).
46 Décision n° 80-127 DC du 20 janvier 1981, Loi renforçant la sécurité et protégeant la liberté des personnes, cons. 7.
47 Décision n° 2017-630 QPC du 19 mai 2017, M. Olivier D. (Renvoi au décret pour fixer les règles de déontologie et les sanctions disciplinaires des avocats), paragr. 6.
48 Décision n° 2011-199 QPC du 25 novembre 2011, M. Michel G. (Discipline des vétérinaires), cons. 7.
49 Décision n° 88-248 DC du 17 janvier 1989, Loi modifiant la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, cons. 37, et n° 2011-210 QPC du 13 janvier 2012, M. Ahmed S. (Révocation des fonctions de maire), cons. 4.
50 Décision n° 2017-750 DC du 23 mars 2017, Loi relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d'ordre, paragr. 13.
51 Décision n° 2018-749 QPC du 30 novembre 2018 précitée, paragr. 8.
52 Décision n° 2009-590 DC du 22 octobre 2009, Loi relative à la protection pénale de la propriété littéraire et artistique sur internet, cons. 29 ; décision n° 2012-271 QPC du 21 septembre 2012, Association Comité radicalement anti-corrida Europe et autre (Immunité pénale en matière de courses de taureaux), cons. 5.
53 Décision n° 2021–933 QPC du 30 septembre 2021, Mme Saadia K. (Diffusion d'enregistrements ou de documents portant sur des paroles ou des images présentant un caractère sexuel), paragr. 5.
54 Voir par exemple, sur la notion d'infractions commises en « bande organisée », la décision n° 2004-492 DC du 2 mars 2004, Loi portant adaptation aux évolutions de la criminalité, cons. 13 : « la jurisprudence dégagée par les juridictions pénales a apporté les précisions complémentaires utiles pour caractériser la circonstance aggravante de bande organisée, laquelle suppose la préméditation des infractions et une organisation structurée de leurs auteurs ». Voir aussi, concernant la notion « d'identité de genre », jugée suffisamment précise, compte tenu des travaux parlementaires et du fait qu'elle figure également à l'article 225-1 du code pénal dans sa version issue de la loi du 18 novembre 2016 et est utilisée dans la convention du Conseil de l'Europe du 12 avril 2011 et dans la directive du 13 décembre 2011, la décision n° 2016-745 DC du 26 janvier 2017, Loi relative à l'égalité et à la citoyenneté, paragr. 89.
55 Voir par exemple la décision n° 84–181 DC du 11 octobre 1984, Loi visant à limiter la concentration et à assurer la transparence financière et le pluralisme des entreprises de presse.
56 Décision n° 2010-85 QPC du 13 janvier 2011 précitée, cons. 4.