Non renvoi
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Par une ordonnance en date du 7 novembre 2024, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis au tribunal administratif de Nancy la requête de M. D et autres, où elle a été enregistrée sous le n° 2403501.
Par cette requête, enregistrée le 28 octobre 2024 au greffe du tribunal administratif de Strasbourg et par deux mémoires, enregistrés le 28 janvier et le 21 mars 2025, M. F D, Mme I J, Mme C H, Mme L épouse K, M. E K, Mme B G épouse A et M. M A demandent au tribunal :
1°) d'annuler la décision en date du 8 octobre 2024 par laquelle le maire de la commune de Strasbourg a refusé de retirer ou d'abroger la décision en date du 12 octobre 2023 de non-opposition à la déclaration préalable déposée par la société Foncia Alsace Bourgogne Franche Comté pour le compte du syndicat des copropriétaires de la résidence " Les Périscopes 1 " ;
2°) d'enjoindre au maire de la commune de Strasbourg de retirer la décision de non-opposition dans un délai de 48 heures, de s'opposer aux travaux faisant l'objet de la déclaration préalable, en application des articles L. 480-1, L. 480-2 et L. 480-4 du code de l'urbanisme, et de constater l'existence de travaux réalisés malgré une opposition, d'ordonner l'arrêt des travaux, et de transmettre un procès-verbal au procureur de la République, au préfet et aux ministres intéressés, aux parties à l'instance et au tribunal administratif, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Strasbourg les entiers dépens de l'instance et la somme de 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
4°) de dispenser les requérants de leur quote-part de dépens, frais et honoraires exposés par le syndicat des copropriétaires dans le présent litige, en application de l'article 10-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 ;
5°) de transmettre une copie du jugement au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Strasbourg en application de l'article R. 751-10 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- ils justifient d'un intérêt pour agir en qualité de copropriétaires, les travaux d'isolation par l'extérieur devant être réalisés sur la façade de leurs lots privatifs et ayant pour effet, en raison de l'absence de système de ventilation, de modifier les conditions de jouissance de leur bien et de les exposer à un risque sanitaire ;
- le maire de la commune devait retirer la décision de non-opposition à déclaration préalable de travaux du 12 octobre 2023 obtenue par fraude ; le pétitionnaire, qui a été destinataire de quatre assignations devant le tribunal judiciaire contestant la validité des décisions d'assemblées générales des copropriétaires autorisant le syndic à réaliser les travaux et d'un jugement indiquant que le procès-verbal était considéré comme nul, avait connaissance d'une opposition à travaux antérieurement à la signature de l'attestation prévue à l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme ; le maire ayant eu connaissance ultérieurement des jugements judiciaires annulant tout ou partie des décisions d'assemblées générales autorisant les travaux, il était tenu de procéder au retrait de l'autorisation ;
- même sans fraude, la décision de non-opposition à déclaration préalable de travaux doit être annulée du fait de la compétence liée de l'administration tenue de suivre les jugements du tribunal judicaire annulant tout ou partie des décisions d'assemblée générale ;
- les travaux ayant commencé, ils ont été réalisés sans autorisation et ne peuvent être régularisés rétroactivement par une décision de l'assemblée générale des copropriétaires ; il appartient au syndicat de copropriété de remettre en état l'immeuble et de se retourner contre le syndic ; les travaux étant arrêtés depuis février 2024, l'autorisation de travaux sera caduque et périmée en février 2025, en application de l'article R. 424-17 du code de l'urbanisme.
Par un mémoire en défense enregistré le 10 décembre 2024, la société Foncia Alsace Bourgogne Franche Comté (ABFC), représentée par Me Jung, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge des requérants d'une somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- la requête est irrecevable ;
- les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.
Par un mémoire distinct, enregistré le 13 décembre 2024, et un mémoire enregistré le 4 mars 2025, M. D et autres demandent au tribunal :
1°) de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionalité (QPC) tendant à déclarer contraires à la Constitution l'article 42 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 et les articles L. 242-1 et L. 242-2 du code des relations entre le public et l'administration, et, à titre subsidiaire, d'adopter l'ensemble des réserves d'interprétation permettant de rendre compatible ces dispositions ainsi que les articles R. 423-1, R. 600-2 et R. 600-6 du code de l'urbanisme ;
2°) de surseoir à statuer jusqu'à la réception de la décision du Conseil d'Etat ou, s'il est saisi, du Conseil constitutionnel ;
3°) de rappeler que le sursis à statuer emporte suspension du délai de cristallisation des moyens énoncés à l'article R. 600-5 du code de l'urbanisme.
Ils soutiennent que :
- l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965 limite à deux mois l'effet suspensif du délai de contestation d'une décision d'assemblée générale de copropriétaires, lorsqu'elle statue en application des articles 25 et 26 ;
- les articles L. 242-1 et L. 242-2 du code des relations entre le public et l'administration et les articles R. 423-1, R. 600-2 du code de l'urbanisme ne permettent pas à l'administration de retirer une décision lorsque le juge judiciaire est intervenu postérieurement pour annuler l'habilitation du mandataire à déposer une autorisation d'urbanisme ;
- l'article R. 600-6 du code de l'urbanisme fixe à 10 mois le délai de jugement par le tribunal administratif ;
- l'application combinée de l'ensemble de ces dispositions, en ce qu'elles ne permettent pas au copropriétaire qui conteste une décision d'assemblée générale des copropriétaires autorisant la réalisation de travaux de bénéficier d'un effet suspensif pendant l'instruction de sa contestation devant le juge judiciaire, et, lorsqu'il a eu gain de cause, de bénéficier de l'effectivité de la décision judiciaire devant l'administration et le tribunal administratif, méconnait le droit au recours effectif et le droit de propriété garantis par les articles 2, 16 et 17 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789.
Par un mémoire enregistré le 19 février 2025, la société Foncia ABFC a présenté des observations sur le mémoire tendant à la transmission d'une QPC.
Par un courrier en date du 18 mars 2025, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que le jugement à intervenir est susceptible d'être fondé sur les moyens relevés d'office tirés de :
- l'incompétence de la juridiction administrative pour dispenser les requérants de leur quote-part de dépens, frais et honoraires exposés par le syndicat des copropriétaires dans le litige, en application de l'article 10-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 ;
- l'irrecevabilité des conclusions tendant à transmettre une copie du jugement au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Strasbourg en application de l'article R. 751-1 du code de justice administrative, qui relèvent du pouvoir propre du juge.
Par un mémoire enregistré le 22 mars 2025, M. D et autres ont présenté des observations sur les moyens relevés d'office.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Constitution, notamment son article 61-1 ;
- la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ;
- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
- la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Milin-Rance, rapporteure,
- les conclusions de M. Gottlieb, rapporteur public,
- les observations de M. D,
- et les observations Me Balland, représentant la société Foncia ABFC.
Connaissance prise des notes en délibéré présentées par M. D et autres, enregistrées le 25 et le 26 mars 2025.
Considérant ce qui suit :
1. Le 1er septembre 2023, la société Foncia Alsace Bourgogne Franche Comté (ABFC) a déposé auprès des services de la commune de Strasbourg une déclaration préalable de travaux, complétée le 22 septembre 2023, portant sur la réalisation de travaux d'isolation et de ravalement de façade, la réfection des toitures, le changement des menuiseries et la création d'auvents sur l'immeuble " [...] " situé au [...] à Strasbourg (Bas-Rhin). Par une décision du 12 octobre 2023, le maire de la commune ne s'est pas opposé à la réalisation de ces travaux. Par un courrier en date du 12 septembre 2024, M. D et autres, copropriétaires et résidents de cet immeuble, ont demandé au maire de la commune de retirer ou d'abroger sa décision de non-opposition à déclaration préalable. Ils demandent au tribunal d'annuler la décision du 8 octobre 2024 par laquelle le maire de la commune a rejeté leur demande.
Sur la compétence de la juridiction administrative :
2. Il n'appartient pas à la juridiction administrative de dispenser les requérants de leur quote-part de dépens, frais et honoraires exposés par le syndicat des copropriétaires dans le litige, en application de l'article 10-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1985. Les conclusions à cette fin doivent être rejetées comme étant présentées devant une juridiction incompétente pour en connaitre.
Sur la question prioritaire de constitutionnalité :
3. Aux termes de l'article 61-1 de la Constitution : " Lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé. / Une loi organique détermine les conditions d'application du présent article ".
4. Il résulte des dispositions combinées de l'article LO. 771-1 du code de justice administrative et des articles 23-1 et 23-2 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel que le tribunal administratif, saisi d'un moyen tiré de ce qu'une ou plusieurs dispositions législatives portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution présenté dans un écrit distinct et motivé, statue sans délai par une décision motivée sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'État et procède à cette transmission si est remplie la triple condition que les dispositions contestées soient applicables au litige ou à la procédure, qu'elles n'aient pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question ne soit pas dépourvue de caractère sérieux. Le second alinéa de l'article 23-2 de la même ordonnance précise que : " En tout état de cause, la juridiction doit, lorsqu'elle est saisie de moyens contestant la conformité d'une disposition législative, d'une part, aux droits et libertés garantis par la Constitution et, d'autre part, aux engagements internationaux de la France, se prononcer par priorité sur la transmission de la question de constitutionnalité au Conseil d'État (...) ".
5. Aux termes de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis : " Les dispositions de l'article 2224 du code civil relatives au délai de prescription et à son point de départ sont applicables aux actions personnelles relatives à la copropriété entre copropriétaires ou entre un copropriétaire et le syndicat. (...) Sauf urgence, l'exécution par le syndic des travaux décidés par l'assemblée générale en application des articles 25 et 26 de la présente loi est suspendue jusqu'à l'expiration du délai de deux mois mentionné au deuxième alinéa du présent article (...) ". Les dispositions précitées n'étant pas applicables à la procédure suivie, ni au litige relatif à un refus du maire de la commune de procéder au retrait d'une décision de non-opposition à déclaration préalable, les requérants ne peuvent utilement invoquer l'exception de leur inconstitutionnalité, ni directement, ni de façon combinée avec d'autres dispositions.
6. De même, le litige n'entre pas dans le champ d'application des dispositions de l'article R. 600-6 du code de l'urbanisme fixant un délai de 10 mois pour statuer sur les requêtes relatives aux permis de construire portant sur plus de deux logements. De plus, ces dispositions, de nature règlementaire, ne peuvent faire l'objet d'une question prioritaire de constitutionnalité, directement ou de façon combinée avec d'autres dispositions de nature législative. L'exception d'inconstitutionnalité de ces dispositions doit également être écartée comme étant inopérante.
7. Aux termes de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme : " Le délai de recours contentieux à l'encontre d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15. " Les requérants ne peuvent davantage utilement invoquer l'inconstitutionnalité de ces dispositions, de nature réglementaire, qui ne s'appliquent pas à un litige portant sur un refus de retrait d'une décision de non-opposition à déclaration préalable devenue définitive, et ne peuvent dès lors faire l'objet d'une question prioritaire de constitutionnalité.
8. Aux termes de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme : " Les demandes de permis de construire, d'aménager ou de démolir et les déclarations préalables sont adressées par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés : a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux ; (...) ". Si les requérants ont demandé, par courrier en date du 12 septembre 2024, le retrait de la décision de non-opposition à travaux au motif qu'elle aurait été obtenue par fraude, en violation des dispositions précitées, celles-ci sont de nature réglementaire et ne peuvent, dès lors, faire l'objet d'une question prioritaire de constitutionnalité, ni directement ni combinées avec d'autres dispositions de nature législative.
9. Les dispositions de l'article L. 242-2 du code des relations entre le public et l'administration n'étant pas applicables au litige, les requérants ne peuvent utilement en invoquer l'inconstitutionnalité.
10. Aux termes de l'article L. 242-1 du code des relations entre le public et l'administration : " L'administration ne peut abroger ou retirer une décision créatrice de droits de sa propre initiative ou sur la demande d'un tiers que si elle est illégale et si l'abrogation ou le retrait intervient dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision ". Pour justifier la transmission au Conseil d'Etat de la question de constitutionnalité de ces dispositions, sur le fondement desquelles la décision contestée a été prise, les requérants soutiennent que leur application méconnaitrait le droit au recours effectif et le droit de propriété dans la mesure où elles ne permettraient pas, hors fraude avérée, de tirer toutes les conséquences d'une décision judiciaire annulant l'assemblée générale des copropriétaires habilitant son mandataire à déposer une demande d'autorisation d'urbanisme en procédant, sans condition de délai, au retrait de celle-ci. Toutefois, alors que ces dispositions visent, en fixant un délai de quatre mois pour procéder au retrait d'une décision illégale, à assurer un équilibre entre les principes de légalité et de sécurité juridique, elles n'ont ni pour objet ni pour effet, en vertu de l'indépendance des législations, de faire obstacle à l'exécution d'un jugement du tribunal judiciaire qui, hors fraude avérée, est sans incidence sur la légalité de l'autorisation d'urbanisme.
11. Il résulte de ce qui précède, en tout état de cause, que la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par les requérants ne présente pas de caractère sérieux et ne peut, dès lors, faire l'objet d'une transmission au Conseil d'Etat.
Sur les conclusions en annulation :
12. Il résulte des articles R. 423-1, R. 431-4 et R. 431-5 du code de l'urbanisme que, sous réserve de la fraude, le pétitionnaire qui fournit l'attestation prévue à l'article R. 431-5 du code de l'urbanisme selon laquelle il remplit les conditions fixées par l'article R. 423-1 du même code doit être regardé comme ayant qualité pour présenter sa demande.
13. Il en résulte également qu'une demande d'autorisation d'urbanisme concernant un terrain soumis au régime juridique de la copropriété peut être régulièrement présentée par son propriétaire, son mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par lui à exécuter les travaux, alors même que la réalisation de ces travaux serait subordonnée à l'autorisation de l'assemblée générale de la copropriété, une contestation sur ce point ne pouvant être portée, le cas échéant, que devant le juge judiciaire.
14. Les autorisations d'utilisation du sol, qui ont pour seul objet de s'assurer de la conformité des travaux qu'elles autorisent avec la législation et la réglementation d'urbanisme, étant accordées sous réserve du droit des tiers, il n'appartient pas à l'autorité compétente de vérifier, dans le cadre de l'instruction d'une demande d'autorisation d'urbanisme, la validité de l'attestation établie par le demandeur. Toutefois, lorsque l'autorité saisie de la demande vient à disposer au moment où elle statue, sans avoir à procéder à une instruction lui permettant de les recueillir, d'informations de nature à établir le caractère frauduleux de cette attestation ou faisant apparaître, sans que cela puisse donner lieu à une contestation sérieuse, que le pétitionnaire ne dispose, contrairement à ce qu'implique l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme, d'aucun droit à la déposer, il lui revient de refuser pour ce motif l'autorisation d'urbanisme sollicitée.
15. Les requérants font valoir que les décisions de l'assemblée générale des copropriétaires de la résidence " [...] ", en date des 17 octobre 2018, 6 mars 2019, 12 décembre 2019 et 29 novembre 2022, qui ont approuvé la réalisation des travaux de rénovation et habilité le syndic à solliciter les autorisations d'urbanisme nécessaires à la réalisation du projet, ont été annulées totalement ou partiellement par quatre jugements du tribunal judicaire de Strasbourg en date des 30 mai, 6 juin et 29 octobre 2024 et soutiennent qu'à la date à laquelle la société Foncia ABFC a déposé la déclaration préalable de travaux le 1er septembre 2023 et a attesté être autorisée par l'assemblée des copropriétaires à cette fin, le syndic avait connaissance des contestations introduites devant le juge judiciaire. Toutefois, alors que le syndic mandataire des copropriétaires n'est pas tenu d'informer l'administration de l'existence de contestations devant le juge judiciaire des résolutions l'habilitant à déposer une demande d'autorisation d'urbanisme, et si, en l'espèce, les quatre jugements susmentionnés du tribunal judicaire de Strasbourg ont prononcé l'annulation de l'assemblée générale en date du 17 octobre 2018 pour convocation irrégulière des copropriétaires, de la résolution n° 15 de l'assemblée générale du 6 mars 2019 pour défaut de mise en concurrence des entreprises, de l'assemblée générale du 12 décembre 2019 en raison du caractère irrégulier du procès-verbal, et de l'assemblée générale du 29 novembre 2022 pour convocation irrégulière des copropriétaires, il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment de l'ordonnance du juge de la mise en état en date du 25 mai 2023 déclarant la demande des requérants recevable, que le syndic de copropriété de la résidence " [...] " se soit livré à des manœuvres ou qu'il ait tenté de dissimuler à l'administration des informations dans l'intention d'obtenir indument l'autorisation d'urbanisme sollicitée. Par suite, en l'absence de fraude, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le maire de la commune de Strasbourg était tenu de procéder au retrait ou à l'abrogation de la décision du 12 octobre 2023.
16. L'autorité de la chose jugée par le juge civil ne peut utilement être invoquée en l'absence d'identité d'objet, de cause et de parties. En vertu de l'indépendance des législations, et en l'absence de fraude avérée, l'annulation judiciaire de l'assemblée générale des copropriétaires en date du 17 octobre 2018, de la résolution n° 15 de l'assemblée générale du 6 mars 2019, de l'assemblée générale du 12 décembre 2019 et de l'assemblée générale du 29 novembre 2022 est sans incidence sur la légalité de l'autorisation d'urbanisme. Par suite, et en tout état de cause, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'autorité de la chose jugée imposait au maire de la commune de Strasbourg de procéder au retrait ou à l'abrogation de la décision du 12 octobre 2023.
17. La circonstance qu'en application de l'article R. 424-17 du code de l'urbanisme, la décision de non-opposition à déclaration préalable devienne caduque après un an d'interruption de travaux, qui, au demeurant, est sans incidence sur sa légalité, n'est pas davantage de nature à démontrer que le maire de la commune de Strasbourg était tenu de procéder au retrait ou à l'abrogation sollicités.
18. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée en défense, que M. D et autres ne sont pas fondés à demander l'annulation de la décision du 8 octobre 2024 par laquelle le maire de la commune de Strasbourg a refusé de procéder au retrait ou à l'abrogation de la décision du 12 octobre 2023 de non-opposition à déclaration préalable de travaux.
Sur les frais du litige :
19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que la somme réclamée par M. D et autres au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens soit mise à la charge de la commune de Strasbourg, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.
20. Il y a lieu de mettre à la charge solidaire de M. D et autres une somme de 2 000 euros à verser à la société Foncia ABFC au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
21. La présente instance ne comporte aucuns dépens. Par suite, les conclusions présentées à ce titre par M. D et autres doivent être rejetées.
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article R. 751-10 du code de justice administrative :
22. Le requérant n'est pas recevable à demander la transmission d'une copie du jugement au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Strasbourg en application de l'article R. 751-10 du code de justice administrative, qui relève du pouvoir propre du juge.
D E C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de transmettre au conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionalité soulevée par M. D et autres.
Article 2 : La requête de M. D et autres est rejetée.
Article 3 : M. D et autres verseront solidairement à la société Foncia ABFC une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la société Foncia ABFC est rejeté.
Article 5 : Le présent jugement sera notifié à M. F D, représentant unique des requérants, à la commune de Strasbourg et à la société Foncia Alsace Bourgogne Franche Comté.
Délibéré après l'audience du 25 mars 2025, à laquelle siégeaient :
M. Coudert, président,
Mme Milin-Rance, première conseillère,
Mme Grandjean, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 avril 2025.
La rapporteure,
F. Milin-Rance
Le président,
B. Coudert
La greffière,
A. Mathieu
La République mande et ordonne au préfet du Bas-Rhin en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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