Conformité - réserve
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 3 janvier 2025 par le Conseil d’État (décision n° 498271 du 27 décembre 2024), dans les conditions prévues à l’article 61-1 de la Constitution, d’une question prioritaire de constitutionnalité. Cette question a été posée pour M. Rachadi S. par la SCP Guérin – Gougeon, avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2025-1129 QPC. Elle est relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du 1° de l’article L. 230 du code électoral et de l’article L. 236 du même code, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2001-1248 du 21 décembre 2001 relative aux chambres régionales des comptes et à la Cour des comptes.
Au vu des textes suivants :
– la Constitution ;
– l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
– le code électoral ;
– le code pénal ;
– le code de procédure pénale ;
– la loi n° 2001-1248 du 21 décembre 2001 relative aux chambres régionales des comptes et à la Cour des comptes ;
– la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique ;
– le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ;
Au vu des pièces suivantes :
– les observations en intervention présentées pour l’association Anticor par Me Jérémy Afane-Jacquart, avocat au barreau de Paris, enregistrées le 21 janvier 2025 ;
– les observations présentées pour le requérant par la SCP Guérin – Gougeon, enregistrées le 23 janvier 2025 ;
– les observations présentées par le Premier ministre, enregistrées le 24 janvier 2025 ;
– les observations en intervention présentées pour M. Hubert F. par la SCP Waquet, Farge, Hazan, Féliers, avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, enregistrées le même jour ;
– les observations en intervention présentées pour M. Sinclair V. par la SELARL Le Prado – Gilbert, avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, enregistrées le même jour ;
– les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Après avoir entendu Me Myriam Gougeon, avocate au Conseil d’État et à la Cour de cassation, et Me Victor Margerin, avocat au barreau de Saint-Pierre, pour le requérant, Me Élodie Le Prado, avocate au Conseil d’État et à la Cour de cassation, pour M. Sinclair V., Me Hélène Farge, avocate au Conseil d’État et à la Cour de cassation, pour M. Hubert F., Me Afane-Jacquart, pour l’association Anticor, et M. Benoît Camguilhem, désigné par le Premier ministre, à l’audience publique du 18 mars 2025 ;
Et après avoir entendu le rapporteur ;
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S’EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT :
1. La question prioritaire de constitutionnalité doit être considérée comme portant sur les dispositions applicables au litige à l’occasion duquel elle a été posée. Dès lors, le Conseil constitutionnel est saisi, pour celle des dispositions dont la rédaction n’a pas été précisée, du 1° de l’article L. 230 du code électoral dans sa rédaction résultant de la loi du 11 octobre 2013 mentionnée ci-dessus.
2. Le 1° de l’article L. 230 du code électoral, dans cette rédaction, prévoit que ne peuvent être conseillers municipaux :« Les individus privés du droit électoral ».
3. L’article L. 236 du même code, dans sa rédaction résultant de la loi du 21 décembre 2001 mentionnée ci-dessus, prévoit :« Tout conseiller municipal qui, pour une cause survenue postérieurement à son élection, se trouve dans un des cas d’inéligibilité prévus par les articles L. 230, L. 231 et L. 232 est immédiatement déclaré démissionnaire par le préfet, sauf réclamation au tribunal administratif dans les dix jours de la notification, et sauf recours au Conseil d’État, conformément aux articles L. 249 et L. 250. Lorsqu’un conseiller municipal est déclaré démissionnaire d’office à la suite d’une condamnation pénale définitive prononcée à son encontre et entraînant de ce fait la perte de ses droits civiques et électoraux, le recours éventuel contre l’acte de notification du préfet n’est pas suspensif ».
4. Selon le requérant, en imposant que soit immédiatement déclaré démissionnaire d’office le conseiller municipal condamné à une peine d’inéligibilité, y compris lorsque le juge pénal en ordonne l’exécution provisoire, ces dispositions, telles qu’interprétées par la jurisprudence constante du Conseil d’État, porteraient une atteinte disproportionnée au droit d’éligibilité. Au soutien de ce grief, il fait valoir que ces dispositions auraient pour effet de priver l’élu concerné de son mandat avant même qu’il ait été statué définitivement sur le recours contre sa condamnation, alors qu’aucune disposition ne garantirait en outre que le juge ait pris en compte toutes les conséquences pour l’élu de l’exécution provisoire de la peine.
5. Ce grief est ainsi dirigé contre la procédure de démission d’office applicable à un conseiller municipal privé de son droit électoral. Par conséquent, la question prioritaire de constitutionnalité porte sur le renvoi opéré, au sein de l’article L. 236 du code électoral, au 1° de l’article L. 230 du même code.
6. Certaines parties intervenantes rejoignent le requérant au soutien du grief qu’il soulève. L’une d’elles considère en outre que, pour les mêmes motifs, les dispositions contestées seraient contraires au droit à un recours juridictionnel effectif. Elles soutiennent par ailleurs que ces dispositions institueraient une différence de traitement injustifiée entre les élus locaux et les élus nationaux, dès lors que la déchéance du mandat d’un parlementaire ne peut intervenir qu’en cas de condamnation définitive à une peine d’inéligibilité. Il en résulterait une méconnaissance des principes d’égalité devant la loi et devant la justice. Enfin, selon elles, ces dispositions seraient entachées d’incompétence négative et méconnaîtraient le principe de libre administration des collectivités territoriales, le principe de la séparation des pouvoirs ainsi que l’article 2 de la Constitution.
– Sur le grief tiré de la méconnaissance du droit d’éligibilité :
7. Aux termes de l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, la loi « doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse. Tous les citoyens étant égaux à ses yeux sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents ». Le législateur est compétent, en vertu de l’article 34 de la Constitution, pour fixer les règles concernant le régime électoral des assemblées locales ainsi que les conditions d’exercice des mandats électoraux et des fonctions électives des membres des assemblées délibérantes des collectivités territoriales. Il ne saurait priver un citoyen du droit d’éligibilité dont il jouit en vertu de l’article 6 de la Déclaration de 1789 que dans la mesure nécessaire au respect du principe d’égalité devant le suffrage et à la préservation de la liberté de l’électeur.
8. En vertu de l’article 131-26–2 du code pénal, sauf décision contraire spécialement motivée, la peine complémentaire d’inéligibilité est obligatoirement prononcée à l’encontre des personnes coupables d’un crime ou de certains délits.
9. Il résulte du quatrième alinéa de l’article 471 du code de procédure pénale que le juge peut ordonner l’exécution provisoire de cette peine.
10. En application du 1° de l’article L. 230 du code électoral, les personnes privées du droit électoral en raison de leur condamnation à une telle peine ne peuvent être conseillers municipaux.
11. Selon les dispositions contestées de l’article L. 236 du même code, le conseiller municipal qui, pour une cause survenue postérieurement à son élection, se trouve dans ce cas d’inéligibilité est immédiatement déclaré démissionnaire d’office par le préfet.
12. Il résulte de la jurisprudence constante du Conseil d’État, telle qu’elle ressort notamment de la décision de renvoi de la question prioritaire de constitutionnalité, que le préfet est tenu de déclarer immédiatement démissionnaire d’office le conseiller municipal non seulement en cas de condamnation à une peine d’inéligibilité devenue définitive, mais aussi lorsque la condamnation est assortie de l’exécution provisoire.
13. En premier lieu, les dispositions contestées visent à garantir l’effectivité de la décision du juge ordonnant l’exécution provisoire d’une peine d’inéligibilité afin d’assurer, en cas de recours, l’efficacité de la peine et de prévenir la récidive.
14. Ce faisant, d’une part, elles mettent en œuvre l’exigence constitutionnelle qui s’attache à l’exécution des décisions de justice en matière pénale. D’autre part, elles contribuent à renforcer l’exigence de probité et d’exemplarité des élus et la confiance des électeurs dans leurs représentants. Ainsi, elles mettent en œuvre l’objectif de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l’ordre public.
15. En second lieu, d’une part, la démission d’office ne peut intervenir qu’en cas de condamnation à une peine d’inéligibilité expressément prononcée par le juge pénal, à qui il revient d’en moduler la durée. Celui-ci peut, en considération des circonstances propres à chaque espèce, décider de ne pas la prononcer.
16. D’autre part, le juge décide si la peine doit être assortie de l’exécution provisoire à la suite d’un débat contradictoire au cours duquel la personne peut présenter ses moyens de défense, notamment par le dépôt de conclusions, et faire valoir sa situation.
18. Il résulte de ce qui précède que, sous cette réserve, les dispositions contestées ne portent pas une atteinte disproportionnée au droit d’éligibilité. Le grief tiré de la méconnaissance de cette exigence constitutionnelle doit donc être écarté.
– Sur le grief tiré de la méconnaissance du droit à un recours juridictionnel effectif :
19. Selon l’article 16 de la Déclaration de 1789 : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution ». Il résulte de cette disposition qu’il ne doit pas être porté d’atteinte substantielle au droit des personnes intéressées d’exercer un recours effectif devant une juridiction.
20. L’acte par lequel le préfet déclare démissionnaire d’office un conseiller municipal condamné à une peine d’inéligibilité assortie de l’exécution provisoire se borne à tirer les conséquences de la condamnation prononcée par le juge pénal. Il est sans incidence sur l’exercice des voies de recours ouvertes contre la décision de condamnation.
21. Au surplus, l’intéressé peut former contre l’arrêté prononçant la démission d’office une réclamation devant le tribunal administratif ainsi qu’un recours devant le Conseil d’État. Il résulte par ailleurs de la jurisprudence constante du Conseil d’État que cette réclamation a pour effet de suspendre l’exécution de l’arrêté, sauf en cas de démission d’office notifiée à la suite d’une condamnation pénale définitive.
22. Le grief tiré de la méconnaissance du droit à un recours juridictionnel effectif ne peut donc qu’être écarté.
– Sur le grief tiré de la méconnaissance du principe d’égalité devant la loi :
23. Le principe d’égalité, garanti par l’article 6 de la Déclaration de 1789, ne s’oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu’il déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général, pourvu que, dans l’un et l’autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l’objet de la loi qui l’établit.
24. Selon les articles L.O. 136 et L.O. 296 du code électoral, est déchu de plein droit de la qualité de membre du Parlement celui dont l’inéligibilité se révèle après la proclamation des résultats et l’expiration du délai pendant lequel elle peut être contestée ou qui, pendant la durée de son mandat, se trouve dans l’un des cas d’inéligibilité prévus par le même code.
25. En application de ces dispositions, il appartient au Conseil constitutionnel de constater la déchéance d’un membre du Parlement en cas de condamnation pénale définitive à une peine d’inéligibilité.
26. Il en résulte une différence de traitement entre les membres du Parlement et les conseillers municipaux quant aux effets, sur l’exercice d’un mandat en cours, d’une condamnation pénale déclarée exécutoire par provision.
27. En vertu de l’article 3 de la Constitution, les membres du Parlement participent à l’exercice de la souveraineté nationale et, aux termes du premier alinéa de son article 24, ils votent la loi et contrôlent l’action du Gouvernement.
28. Dès lors, au regard de leur situation particulière et des prérogatives qu’ils tiennent de la Constitution, les membres du Parlement se trouvent dans une situation différente de celle des conseillers municipaux.
29. Ainsi, la différence de traitement résultant des dispositions contestées, qui est fondée sur une différence de situation, est en rapport direct avec l’objet de la loi.
30. Le grief tiré de la méconnaissance du principe d’égalité devant la loi doit donc être écarté.
31. Il résulte de tout ce qui précède que, sous la réserve énoncée au paragraphe 17, les dispositions contestées, qui ne sont pas entachées d’incompétence négative et qui ne méconnaissent ni le principe de libre administration des collectivités territoriales, ni le principe d’égalité devant la justice, ni en tout état de cause l’article 2 de la Constitution et le principe de la séparation des pouvoirs, non plus qu’aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarées conformes à la Constitution.
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :
Article 1er. – Sous la réserve énoncée au paragraphe 17, le renvoi opéré, au sein de l’article L. 236 du code électoral, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2001-1248 du 21 décembre 2001 relative aux chambres régionales des comptes et à la Cour des comptes, au 1° de l’article L. 230 du même code, est conforme à la Constitution.
Article 2. – Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l’article 23-11 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée.
Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 27 mars 2025, où siégeaient : M. Richard FERRAND, Président, M. Philippe BAS, Mme Jacqueline GOURAULT, M. Alain JUPPÉ, Mme Véronique MALBEC, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET, François SÉNERS et Mme Laurence VICHNIEVSKY.
Rendu public le 28 mars 2025.
Abstracts
4.2.2.3.2
Procédure administrative
Le Conseil constitutionnel est saisi de l'article L. 236 du code électoral qui prévoit que le conseiller municipal qui, pour une cause survenue postérieurement à son élection, se trouve privé du droit électoral du fait, notamment, d'une peine complémentaire d'inéléigibilité prononcée par le juge pénal, est immédiatement déclaré démissionnaire d’office par le préfet. Il résulte de la jurisprudence constante du Conseil d’État que le préfet est tenu de déclarer immédiatement démissionnaire d’office le conseiller municipal non seulement en cas de condamnation à une peine d’inéligibilité devenue définitive, mais aussi lorsque la condamnation est assortie de l’exécution provisoire. Il est reproché à ces dispositions ainsi interprétées d'avoir pour effet de priver l’élu concerné de son mandat avant même qu’il ait été statué définitivement sur le recours contre sa condamnation, alors qu’aucune disposition ne garantirait en outre que le juge ait pris en compte toutes les conséquences pour l’élu de l’exécution provisoire de la peine. Le Conseil juge que l’acte par lequel le préfet déclare démissionnaire d’office un conseiller municipal condamné à une peine d’inéligibilité assortie de l’exécution provisoire se borne à tirer les conséquences de la condamnation prononcée par le juge pénal. Il est sans incidence sur l’exercice des voies de recours ouvertes contre la décision de condamnation. Au surplus, l’intéressé peut former contre l’arrêté prononçant la démission d’office une réclamation devant le tribunal administratif ainsi qu’un recours devant le Conseil d’État. Il résulte par ailleurs de la jurisprudence constante du Conseil d’État que cette réclamation a pour effet de suspendre l’exécution de l’arrêté, sauf en cas de démission d’office notifiée à la suite d’une condamnation pénale définitive. Le grief tiré de la méconnaissance du droit à un recours juridictionnel effectif ne peut donc qu’être écarté.
2025-1129 QPC, 28 mars 2025, paragr. 20 21 22
5.1.4.14
Elections
Le Conseil constitutionnel est saisi de l'article L. 236 du code électoral qui prévoit que le conseiller municipal qui, pour une cause survenue postérieurement à son élection, se trouve privé du droit électoral du fait, notamment, d'une peine complémentaire d'inéléigibilité prononcée par le juge pénal, est immédiatement déclaré démissionnaire d’office par le préfet. Il résulte de la jurisprudence constante du Conseil d’État que le préfet est tenu de déclarer immédiatement démissionnaire d’office le conseiller municipal non seulement en cas de condamnation à une peine d’inéligibilité devenue définitive, mais aussi lorsque la condamnation est assortie de l’exécution provisoire. Il était reproché à ces dispositions telles qu'interprétés d'instituer une différence de traitement injustifiée entre les élus locaux et les élus nationaux, dès lors que la déchéance du mandat d’un parlementaire ne peut intervenir qu’en cas de condamnation définitive à une peine d’inéligibilité. Il juge que, selon les articles L.O. 136 et L.O. 296 du code électoral, est déchu de plein droit de la qualité de membre du Parlement celui dont l’inéligibilité se révèle après la proclamation des résultats et l’expiration du délai pendant lequel elle peut être contestée ou qui, pendant la durée de son mandat, se trouve dans l’un des cas d’inéligibilité prévus par le même code. En application de ces dispositions, il appartient au Conseil constitutionnel de constater la déchéance d’un membre du Parlement en cas de condamnation pénale définitive à une peine d’inéligibilité. Il en résulte une différence de traitement entre les membres du Parlement et les conseillers municipaux quant aux effets, sur l’exercice d’un mandat en cours, d’une condamnation pénale déclarée exécutoire par provision. En vertu de l’article 3 de la Constitution, les membres du Parlement participent à l’exercice de la souveraineté nationale et, aux termes du premier alinéa de son article 24, ils votent la loi et contrôlent l’action du Gouvernement. Dès lors, au regard de leur situation particulière et des prérogatives qu’ils tiennent de la Constitution, les membres du Parlement se trouvent dans une situation différente de celle des conseillers municipaux. Ainsi, la différence de traitement résultant des dispositions contestées, qui est fondée sur une différence de situation, est en rapport direct avec l’objet de la loi. Grief écarté.
2025-1129 QPC, 28 mars 2025, paragr. 24 25 26 27 28 29 30
8.1.1.4.1
Liberté de vote
En vertu de l’article 131-26–2 du code pénal, sauf décision contraire spécialement motivée, la peine complémentaire d’inéligibilité est obligatoirement prononcée à l’encontre des personnes coupables d’un crime ou de certains délits. Il résulte du quatrième alinéa de l’article 471 du code de procédure pénale que le juge peut ordonner l’exécution provisoire de cette peine. En application du 1° de l’article L. 230 du code électoral, les personnes privées du droit électoral en raison de leur condamnation à une telle peine ne peuvent être conseillers municipaux. Selon les dispositions contestées de l’article L. 236 du même code, le conseiller municipal qui, pour une cause survenue postérieurement à son élection, se trouve dans ce cas d’inéligibilité est immédiatement déclaré démissionnaire d’office par le préfet. Il résulte de la jurisprudence constante du Conseil d’État, telle qu’elle ressort notamment de la décision de renvoi de la question prioritaire de constitutionnalité, que le préfet est tenu de déclarer immédiatement démissionnaire d’office le conseiller municipal non seulement en cas de condamnation à une peine d’inéligibilité devenue définitive, mais aussi lorsque la condamnation est assortie de l’exécution provisoire. En premier lieu, les dispositions contestées visent à garantir l’effectivité de la décision du juge ordonnant l’exécution provisoire d’une peine d’inéligibilité afin d’assurer, en cas de recours, l’efficacité de la peine et de prévenir la récidive. Ce faisant, d’une part, elles mettent en œuvre l’exigence constitutionnelle qui s’attache à l’exécution des décisions de justice en matière pénale. D’autre part, elles contribuent à renforcer l’exigence de probité et d’exemplarité des élus et la confiance des électeurs dans leurs représentants. Ainsi, elles mettent en œuvre l’objectif de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l’ordre public. En second lieu, d’une part, la démission d’office ne peut intervenir qu’en cas de condamnation à une peine d’inéligibilité expressément prononcée par le juge pénal, à qui il revient d’en moduler la durée. Celui-ci peut, en considération des circonstances propres à chaque espèce, décider de ne pas la prononcer.D’autre part, le juge décide si la peine doit être assortie de l’exécution provisoire à la suite d’un débat contradictoire au cours duquel la personne peut présenter ses moyens de défense, notamment par le dépôt de conclusions, et faire valoir sa situation. Sauf à méconnaître le droit d’éligibilité garanti par l’article 6 de la Déclaration de 1789, il revient alors au juge, dans sa décision, d’apprécier le caractère proportionné de l’atteinte que cette mesure est susceptible de porter à l’exercice d’un mandat en cours et à la préservation de la liberté de l’électeur. Il résulte de ce qui précède que, sous cette réserve, les dispositions contestées ne portent pas une atteinte disproportionnée au droit d’éligibilité. Rejet du grief.
2025-1129 QPC, 28 mars 2025, paragr. 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18
8.1.1.4.1
Liberté de vote
En vertu de l’article 131-26–2 du code pénal, sauf décision contraire spécialement motivée, la peine complémentaire d’inéligibilité est obligatoirement prononcée à l’encontre des personnes coupables d’un crime ou de certains délits. Il résulte du quatrième alinéa de l’article 471 du code de procédure pénale que le juge peut ordonner l’exécution provisoire de cette peine. En application du 1° de l’article L. 230 du code électoral, les personnes privées du droit électoral en raison de leur condamnation à une telle peine ne peuvent être conseillers municipaux. Selon les dispositions contestées de l’article L. 236 du même code, le conseiller municipal qui, pour une cause survenue postérieurement à son élection, se trouve dans ce cas d’inéligibilité est immédiatement déclaré démissionnaire d’office par le préfet. Il résulte de la jurisprudence constante du Conseil d’État, telle qu’elle ressort notamment de la décision de renvoi de la question prioritaire de constitutionnalité, que le préfet est tenu de déclarer immédiatement démissionnaire d’office le conseiller municipal non seulement en cas de condamnation à une peine d’inéligibilité devenue définitive, mais aussi lorsque la condamnation est assortie de l’exécution provisoire. En premier lieu, les dispositions contestées visent à garantir l’effectivité de la décision du juge ordonnant l’exécution provisoire d’une peine d’inéligibilité afin d’assurer, en cas de recours, l’efficacité de la peine et de prévenir la récidive. Ce faisant, d’une part, elles mettent en œuvre l’exigence constitutionnelle qui s’attache à l’exécution des décisions de justice en matière pénale. D’autre part, elles contribuent à renforcer l’exigence de probité et d’exemplarité des élus et la confiance des électeurs dans leurs représentants. Ainsi, elles mettent en œuvre l’objectif de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l’ordre public. D’autre part, le juge décide si la peine doit être assortie de l’exécution provisoire à la suite d’un débat contradictoire au cours duquel la personne peut présenter ses moyens de défense, notamment par le dépôt de conclusions, et faire valoir sa situation. En second lieu, d’une part, la démission d’office ne peut intervenir qu’en cas de condamnation à une peine d’inéligibilité expressément prononcée par le juge pénal, à qui il revient d’en moduler la durée. Celui-ci peut, en considération des circonstances propres à chaque espèce, décider de ne pas la prononcer. Sauf à méconnaître le droit d’éligibilité garanti par l’article 6 de la Déclaration de 1789, il revient alors au juge, dans sa décision, d’apprécier le caractère proportionné de l’atteinte que cette mesure est susceptible de porter à l’exercice d’un mandat en cours et à la préservation de la liberté de l’électeur. Il résulte de ce qui précède que, sous cette réserve, les dispositions contestées ne portent pas une atteinte disproportionnée au droit d’éligibilité. Grief écarté.
2025-1129 QPC, 28 mars 2025, paragr. 8 9 10 11 12 13 14 16 15 17 18
11.6.3.5.1.1
Délimitation visant le renvoi à une autre disposition législative opéré par la disposition soumise au Conseil
Saisi, notamment, de l’article L. 236 du code électoral, le Conseil constitutionnel juge, au vu du grief dirigé contre la procédure de démission d’office applicable à un conseiller municipal privé de son droit électoral, que la question prioritaire de constitutionnalité porte sur le renvoi opéré, au sein de cet article L. 236 du code électoral, au 1° de l’article L. 230 du même code.
2025-1129 QPC, 28 mars 2025, paragr. 5
11.6.3.5.2
Détermination de la version de la disposition législative soumise au Conseil constitutionnel
La question prioritaire de constitutionnalité doit être considérée comme portant sur les dispositions applicables au litige à l’occasion duquel elle a été posée. La rédaction de l'une des dispositions renvoyées n'ayant pas été déterminée, le Conseil constitutionnel y procède en déterminant la rédaction applicable au litige.
2025-1129 QPC, 28 mars 2025, paragr. 1
11.6.3.5.3
Examen des dispositions telles qu'interprétées par une jurisprudence constante
En vertu de l’article 131-26–2 du code pénal, sauf décision contraire spécialement motivée, la peine complémentaire d’inéligibilité est obligatoirement prononcée à l’encontre des personnes coupables d’un crime ou de certains délits. Il résulte du quatrième alinéa de l’article 471 du code de procédure pénale que le juge peut ordonner l’exécution provisoire de cette peine. En application du 1° de l’article L. 230 du code électoral, les personnes privées du droit électoral en raison de leur condamnation à une telle peine ne peuvent être conseillers municipaux. Selon les dispositions contestées de l’article L. 236 du même code, le conseiller municipal qui, pour une cause survenue postérieurement à son élection, se trouve dans ce cas d’inéligibilité est immédiatement déclaré démissionnaire d’office par le préfet. Il résulte de la jurisprudence constante du Conseil d’État, telle qu’elle ressort notamment de la décision de renvoi de la question prioritaire de constitutionnalité, que le préfet est tenu de déclarer immédiatement démissionnaire d’office le conseiller municipal non seulement en cas de condamnation à une peine d’inéligibilité devenue définitive, mais aussi lorsque la condamnation est assortie de l’exécution provisoire.
2025-1129 QPC, 28 mars 2025, paragr. 8 9 10 11 12
14.1.4.1
Statut et mandat des élus locaux
En vertu de l’article 131-26–2 du code pénal, sauf décision contraire spécialement motivée, la peine complémentaire d’inéligibilité est obligatoirement prononcée à l’encontre des personnes coupables d’un crime ou de certains délits. Il résulte du quatrième alinéa de l’article 471 du code de procédure pénale que le juge peut ordonner l’exécution provisoire de cette peine. En application du 1° de l’article L. 230 du code électoral, les personnes privées du droit électoral en raison de leur condamnation à une telle peine ne peuvent être conseillers municipaux. Selon les dispositions contestées de l’article L. 236 du même code, le conseiller municipal qui, pour une cause survenue postérieurement à son élection, se trouve dans ce cas d’inéligibilité est immédiatement déclaré démissionnaire d’office par le préfet. Il résulte de la jurisprudence constante du Conseil d’État, telle qu’elle ressort notamment de la décision de renvoi de la question prioritaire de constitutionnalité, que le préfet est tenu de déclarer immédiatement démissionnaire d’office le conseiller municipal non seulement en cas de condamnation à une peine d’inéligibilité devenue définitive, mais aussi lorsque la condamnation est assortie de l’exécution provisoire. En premier lieu, les dispositions contestées visent à garantir l’effectivité de la décision du juge ordonnant l’exécution provisoire d’une peine d’inéligibilité afin d’assurer, en cas de recours, l’efficacité de la peine et de prévenir la récidive. Ce faisant, d’une part, elles mettent en œuvre l’exigence constitutionnelle qui s’attache à l’exécution des décisions de justice en matière pénale. D’autre part, elles contribuent à renforcer l’exigence de probité et d’exemplarité des élus et la confiance des électeurs dans leurs représentants. Ainsi, elles mettent en œuvre l’objectif de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l’ordre public. En second lieu, d’une part, la démission d’office ne peut intervenir qu’en cas de condamnation à une peine d’inéligibilité expressément prononcée par le juge pénal, à qui il revient d’en moduler la durée. Celui-ci peut, en considération des circonstances propres à chaque espèce, décider de ne pas la prononcer. D’autre part, le juge décide si la peine doit être assortie de l’exécution provisoire à la suite d’un débat contradictoire au cours duquel la personne peut présenter ses moyens de défense, notamment par le dépôt de conclusions, et faire valoir sa situation. Sauf à méconnaître le droit d’éligibilité garanti par l’article 6 de la Déclaration de 1789, il revient alors au juge, dans sa décision, d’apprécier le caractère proportionné de l’atteinte que cette mesure est susceptible de porter à l’exercice d’un mandat en cours et à la préservation de la liberté de l’électeur. Il résulte de ce qui précède que, sous cette réserve, les dispositions contestées ne portent pas une atteinte disproportionnée au droit d’éligibilité. Greif écarté.
2025-1129 QPC, 28 mars 2025, paragr. 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18