Non renvoi
N° R 24-90.017 F-D
N° 00374
25 FÉVRIER 2025
ODVS
QPC PRINCIPALE : NON LIEU À RENVOI AU CC
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 25 FÉVRIER 2025
La chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, par arrêt en date du 28 novembre 2024, reçu le 6 décembre suivant à la Cour de cassation, a transmis une question prioritaire de constitutionnalité dans la procédure suivie contre M. [M] [U] du chef de viol aggravé.
Des observations ont été produites.
Sur le rapport de M. Pradel, conseiller référendaire, les observations de la SCP Le Guerer, Bouniol-Brochier, Lassalle-Byhet, avocat de M. [M] [U], et les conclusions de Mme Gulphe-Berbain, avocat général, après débats en l'audience publique du 25 février 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Pradel, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
1. La question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :
« Les dispositions de l'alinéa 3 de l'article 164 du code de procédure pénale méconnaissent-elles les droits de la défense garantis par l'article 16 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen en ce qu'elles excluent la présence de l'avocat lors de l'entretien avec un médecin ou un psychologue expert ainsi que le principe d'égalité devant la loi garanti par l'article 6 de la même déclaration, en ce que, tout d'abord, il s'agit de la seule hypothèse dans laquelle un mis en examen pourra être interrogé sur les faits qui lui sont reprochés hors la présence d'un avocat, en ce que, ensuite, les déclarations tenues dans le cadre de cet échange ne font pas l'objet d'une retranscription intégrale ou d'un enregistrement, de sorte que le mis en examen ne pourra pas les contester en apportant la preuve de leur inexactitude, en ce que, enfin, la présence de l'avocat est prévue par le code de procédure pénale dans d'autres hypothèses mais expressément exclue dans le cadre d'un entretien avec un médecin ou un psychologue expert ? ».
2. La disposition législative contestée est applicable à la procédure et n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.
3. La question, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle.
4. La question posée ne présente pas un caractère sérieux pour les motifs qui suivent.
5. En premier lieu, les dispositions critiquées ne portent pas atteinte aux droits de la défense, dès lors que, d'une part, les déclarations faites par la personne mise en examen à un médecin ou à un psychologue expert, hors la présence d'un avocat, ne peuvent servir d'unique fondement à une déclaration de culpabilité et seront, le cas échéant, soumises au débat contradictoire devant la juridiction de jugement dans le respect des droits de la défense, d'autre part, la personne mise en examen n'est pas privée de la possibilité, par l'intermédiaire de son avocat, de modifier ou de compléter les questions posées à l'expert, et, après achèvement des opérations, de présenter des observations sur le rapport déposé, ou formuler une demande, notamment aux fins de complément d'expertise ou de contre-expertise.
6. En second lieu, le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations distinctes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que dans l'un ou l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit et qu'elle ne crée pas de discriminations injustifiées.
7. Les dispositions critiquées n'instaurent aucune différence de traitement entre les justiciables dès lors que la personne mise en examen pourra être assistée de son avocat pour tous les autres actes de la procédure et que ces dispositions s'appliquent de manière uniforme à toutes les personnes mises en examen placées dans la même situation.
8. Elles sont en lien direct avec l'objet de la loi en ce que le traitement différent réservé aux expertises médicales et psychologiques est justifié par le souci de préserver le secret médical ou l'intimité de la personne concernée et que ces dispositions n'ont vocation à s'appliquer qu'à titre exceptionnel, dans le cadre d'une expertise médicale ou psychologique.
9. Ainsi, il n'y a pas lieu de renvoyer la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en audience publique du vingt-cinq février deux mille vingt-cinq.
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