Renvoi
N° F 24-86.512 F-D
N° 00270
4 FÉVRIER 2025
RB5
QPC INCIDENTE : RENVOI AU CC
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 4 FÉVRIER 2025
M. [Z] [D] a présenté, par mémoire spécial reçu le 19 décembre 2024, une question prioritaire de constitutionnalité à l'occasion du pourvoi formé par lui contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, section 7-1, en date du 6 novembre 2024, qui l'a renvoyé devant la cour d'assises de Paris, spécialement composée, sous l'accusation d'association de malfaiteurs terroriste, assassinat et meurtres en bande organisée, en relation avec une entreprise terroriste.
Des observations ont été produites.
Sur le rapport de Mme Merloz, conseiller référendaire, les observations de la SCP Le Guerer, Bouniol-Brochier, avocat de M. [Z] [D], et les conclusions de M. Dureux, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 4 février 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Merloz, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
1. La question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :
« Les dispositions des alinéas 1er à 4 de l'article 114 du code de procédure pénale, lorsqu'elles sont applicables par renvoi de l'article 283 du même code, lui-même applicable par renvoi de l'article 379-4 dudit code, en tant qu'elles ne prévoient pas la notification du droit au silence à une personne qui, condamnée par défaut devant la cour d'assises, dont l'arrêt de condamnation a été anéanti par l'effet de son arrestation, est interrogée pour la première fois par un magistrat instructeur sur les faits qui lui sont reprochés, dans le cadre d'un supplément d'information ordonné par le président de la cour d'assises, sont-elles entachées d'incompétence négative dans des conditions affectant le droit de se taire, les droits de la défense, ainsi que le principe d'égalité devant la loi ? ».
2. Les dispositions de l'article 114 du code de procédure pénale, dans leur version en vigueur au moment des faits, issue de la loi n° 2015-993 du 17 août 2015, sont applicables à la procédure et n'ont pas été déjà déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.
3. La question, ne portant pas sur l'interprétation de dispositions constitutionnelles dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle.
4. La question posée présente un caractère sérieux pour les motifs qui suivent.
5. Ni l'article 114 du code de procédure pénale ni aucune autre disposition dudit code, dans leur version applicable au 11 février 2021, date de l'interrogatoire dont la nullité est alléguée, ne prévoient la notification du droit de se taire à la personne qui, condamnée par défaut devant la cour d'assises dont l'arrêt de condamnation est anéanti par l'effet de son arrestation, est interrogée pour la première fois par un magistrat instructeur dans le cadre d'un supplément d'information ordonné par le président de la cour d'assises.
6. En effet, d'une part, l'article 116 du code de procédure pénale, relatif à l'interrogatoire de première comparution de la personne qui comparait devant le juge d'instruction en vue de sa mise en examen et qui prévoit une telle notification, n'est pas applicable à la personne précitée dès lors qu'elle a le statut d'accusé.
7. D'autre part, la notification du droit de se taire n'est pas davantage prévue par l'article préliminaire du code de procédure pénale, dans sa version applicable aux faits, antérieure à la loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 qui a introduit une telle exigence.
8. Or, la personne concernée peut être amenée à reconnaître les faits qui lui sont reprochés et ses déclarations seront portées à la connaissance de la juridiction de jugement.
9. Dès lors, en l'absence d'une notification préalable à celle-ci de son droit de se taire, il pourrait être porté atteinte à son droit de ne pas s'accuser.
10. En conséquence, il y a lieu de renvoyer la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
RENVOIE au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en audience publique du quatre février deux mille vingt-cinq.
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