Tribunal administratif de Lyon

Ordonnance du 30 août 2024 n° 2304404

30/08/2024

Non renvoi

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Vu la procédure suivante :

Par un mémoire distinct enregistré le 5 mars 2024, M. A B demande au tribunal administratif, en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 et à l'appui de sa requête tendant à l'annulation de la décision du 20 mars 2023 de Pôle emploi, devenu France Travail, lui demandant de produire les justificatifs de déplacement pour le paiement des aides à la mobilité et de la décision lui imposant un délai de 48 heures pour déposer une demande d'aide à la mobilité, de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution du 1er alinéa de l'article L. 5312-13-2 du code du travail.

Il soutient que les dispositions législatives litigieuses portent une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 avril 2024, France Travail, représenté par la Selarl Levy Roche Sarda (Me Djebari) conclut au rejet de la demande de transmission au Conseil d'Etat de cette question prioritaire de constitutionnalité.

Il soutient que la demande du requérant est dépourvue de caractère sérieux.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. Il résulte des dispositions combinées des premiers alinéas des articles 23-1 et 23-2 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, que le tribunal administratif saisi d'un moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution présenté dans un écrit distinct et motivé, statue sans délai par une décision motivée sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'Etat et procède à cette transmission si est remplie la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question ne soit pas dépourvue de caractère sérieux. Le second alinéa de l'article 23-2 de la même ordonnance précise que : " En tout état de cause, la juridiction doit, lorsqu'elle est saisie de moyens contestant la conformité d'une disposition législative, d'une part, aux droits et libertés garantis par la Constitution et, d'autre part, aux engagements internationaux de la France, se prononcer par priorité sur la transmission de la question de constitutionnalité au Conseil d'Etat (). ".

2. Aux termes du 1er alinéa de l'article L. 5312-13-2 du code du travail dans sa version applicable au litige : " Les agents chargés de la prévention des fraudes agréés et assermentés mentionnés à l'article L. 5312-13-1 bénéficient d'un droit de communication qui permet d'obtenir, sans que s'y oppose le secret professionnel, les documents et informations nécessaires au contrôle de la sincérité et de l'exactitude des déclarations souscrites ainsi que de l'authenticité des pièces produites en vue de l'attribution et du paiement des allocations, des aides ainsi que de toute autre prestation servies par Pôle emploi. ".

3. M. B soutient que les dispositions précitées du 1er alinéa de l'article L. 5312-13-2 du code du travail portent une atteinte disproportionnée au principe constitutionnellement garanti du droit au respect de la vie privée.

4. Toutefois, alors que ces dispositions ont pour objectif la recherche des auteurs d'infractions, elles limitent le droit de communication des agents aux seuls documents relatifs à l'objet du contrôle et qui sont nécessaires à l'accomplissement de leur mission sans leur conférer un pouvoir d'exécution forcée pour obtenir la remise de ces documents. En outre, ce droit de communication n'est reconnu qu'à des agents chargés de la prévention des fraudes agréés et assermentés. D'ailleurs le Conseil constitutionnel a déjà, par ses décisions n° 2019-789 QPC du 14 juin 2019 et n° 2023-1044 QPC du 13 avril 2023 jugé que les dispositions rédigées dans les mêmes termes du 1er alinéa de l'article L. 114-19 du code de la sécurité sociale et de l'article L. 172-11 du code de l'environnement ne portent pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée. Dès lors, la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M. B est dépourvue de caractère sérieux. Dans ces conditions, il n'y a pas lieu de transmettre cette question au Conseil d'Etat.

O R D O N N E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M. B.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A B et à France Travail.

Fait à Lyon le 30 août 2024.

La présidente de la 5ème chambre,

V. Vaccaro-Planchet

La République mande et ordonne à la ministre du travail, de la santé et des solidarités en ce qui la concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

Un greffier,

Code publication

C