Non renvoi
CIV. 1
COUR DE CASSATION
CF
______________________
QUESTION PRIORITAIRE
de
CONSTITUTIONNALITÉ
______________________
Audience publique du 5 juin 2024
NON-LIEU A RENVOI
Mme CHAMPALAUNE, président
Arrêt n° 421 F-D
Affaire n° H 24-40.007
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 5 JUIN 2024
Le tribunal judiciaire de Thionville a transmis à la Cour de cassation, suite au jugement rendu le 19 mars 2024, la question prioritaire de constitutionnalité, reçue le 27 mars 2024, dans l'instance mettant en cause :
D'une part,
M. [H] [D], domicilié [Adresse 1],
D'autre part,
le Conseil national des barreaux (CNB), dont le siège est [Adresse 2],
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Jessel, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat du Conseil national des barreaux, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 4 juin 2024 où étaient présents Mme Champalaune, président, M. Jessel, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Ben Belkacem, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Par déclaration au greffe du 22 décembre 2022, M. [D], avocat, a fait opposition à une décision du Conseil national des barreaux (CNB), qui lui été signifiée le 20 décembre 2022, lui faisant obligation de payer une certaine somme au titre des cotisations dues pour les années 2018 à 2021.
2. Par mémoire distinct et motivé du 22 mai 2023, il a présenté une question prioritaire de constitutionnalité.
Enoncé de la question prioritaire de constitutionnalité
3. Par jugement du 19 mars 2024, le tribunal judiciaire de Thionville a transmis la question prioritaire de constitutionnalité ainsi rédigée :
« les dispositions de l'article 21-1 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 en ce qu'elles contraignent les avocats à régler une cotisation au Conseil national des barreaux et en ce qu'elles permettent au Conseil national des barreaux d'émettre des titres exécutoires en vue d'obtenir le recouvrement desdites cotisations sont-elles conformes au Préambule de la Constitution du 4 octobre 1958 ainsi qu'aux articles 4, 12 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 et des principes constitutionnels qui en découlent à savoir notamment la liberté d'association, la liberté d'entreprendre ainsi que les principes de séparation des pouvoirs et d'indépendance de la justice ? »
Examen de la question prioritaire de constitutionnalité
4. La question porte sur le dernier alinéa de l'article 21-1 de la loi n° du 31 décembre 1971, créé par la loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 selon lequel à défaut de paiement de la cotisation annuelle due par les avocats inscrits à un tableau dans un délai d'un mois à compter d'une mise en demeure de payer, le CNB rend, à l'encontre des avocats redevables, une décision qui, à défaut d'opposition du débiteur devant la juridiction compétente, produit les effets d'un jugement au sens du 6° de l'article L. 111-3 du code des procédures civiles d'exécution.
Cette disposition est applicable au litige
5. Elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.
6. Cependant, d'une part, la question posée, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle.
7. D'autre part, la question posée ne présente pas un caractère sérieux.
8. En effet, en premier lieu, les cotisations dues au CNB, établissement d'utilité publique, en ce qu'elles assurent le fonctionnement de celui-ci, dont les missions de service public sont distinctes de celles des ordres qui recouvrent des cotisations pour leur propre fonctionnement, ne sont pas contraires aux libertés d'association et d'entreprendre.
9. En second lieu, ce n'est qu'en l'absence de paiement dans le délai d'un mois d'une mise en demeure restée infructueuse que le CNB peut prendre une décision de mise en recouvrement qui peut être contestée par la voie d'une opposition devant la juridiction judiciaire territorialement compétente dans le délai de quinze jours à compter de sa notification et qui ne devient exécutoire qu'à l'expiration de ce recours préalable de pleine juridiction dont dispose le débiteur, sans préjudice de la faculté, pour ce dernier, de saisir la juridiction de l'exécution d'éventuelles contestations relatives à l'exécution forcée de la décision du CNB ayant acquis force exécutoire. Ces dispositions ne heurtent donc pas non plus le principe d'indépendance de la justice ou encore celui de la séparation des pouvoirs.
10. En conséquence, il n'y a pas lieu de renvoyer la question au Conseil constitutionnel.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq juin deux mille vingt-quatre.
Code publication