Non renvoi
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C B a demandé au tribunal administratif d'Amiens de prononcer, en droits et pénalités, à titre principal, la décharge, à titre subsidiaire, une réduction, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2016 et 2017.
Par un jugement n° 2100770 du 15 juin 2023, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 14 août 2023, le 8 janvier 2024 et le 19 février 2024, Mme B, représentée par Me Philip, demande à la cour :
1°) à titre principal, d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer, en droits et pénalités, la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux en litige ;
3°) à titre subsidiaire, de prononcer la décharge des impositions établies sur l'assiette de 52 044 euros, et, en tout cas, des prélèvements sociaux ainsi que de la majoration de 40 % et de réformer ce jugement ;
4°) en toute hypothèse, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la proposition de rectification par laquelle l'administration lui a fait connaître qu'elle entendait imposer, au sein de son foyer fiscal, les revenus regardés comme distribués correspondant aux rehaussements appliqués aux bénéfices imposables de la société à responsabilité limitée (SARL) Cobe Sécurité Privée, dont elle était la gérante et l'associée, est insuffisamment motivée au regard des exigences posées par les articles L. 57 et L. 76 du livre des procédures fiscales, en ce qu'elle ne comporte aucune indication des modalités de détermination du taux forfaitaire de 80 % que le service a entendu appliquer au chiffre d'affaires de cette société pour tenir compte des charges des exercices rehaussés ;
- les dispositions de l'article 1658 du code général des impôts, qui laissent à l'administration le choix d'émettre soit un avis de mise en recouvrement, soit un rôle et un avis d'imposition pour assurer le recouvrement des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux qu'elle entend mettre à la charge d'un contribuable, créent, en méconnaissance des stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de celles de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention, une différence de traitement entre des contribuables placés dans des situations identiques, les avis de mise en recouvrement offrant aux contribuables des garanties plus importantes que les simple avis d'imposition qui lui ont été notifiés ;
- pour reconstituer les résultats imposables D, en se bornant à faire application d'un taux forfaitaire de 80 % qui n'est pas réaliste au regard des données tirées de son exploitation ou de celles d'entreprises comparables ou encore des statistiques du secteur professionnel concerné et qui induit un taux de marge de 20 % manifestement disproportionné par rapport aux conditions réelles de son exploitation, l'administration a fait usage d'une méthode radicalement viciée dans son principe et excessivement sommaire, qui a conduit à soumettre cette société à une imposition excessive ; la doctrine administrative, en particulier celles publiées sous les références BOI-CF-IOR-10-20, en son paragraphe n°200, BOI-CTX-DG-20-20, en son paragraphe n°20, et BOI-CF-IOR-50-20, en ses paragraphes n°200 et n°210, conforte son analyse ;
- en soumettant les sommes qu'elle a perçues D, au titre de l'année 2017, à l'impôt sur le revenu à la fois dans la catégorie des traitements et salaires, en tant que rémunérations versées au titre de son mandat de gestion, et dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, en tant que revenus distribués, l'administration l'a soumise, à raison des mêmes sommes, à une double imposition ;
- l'administration fiscale était incompétente pour établir et mettre en recouvrement les cotisations sociales afférentes aux rémunérations qui lui ont été versées par la SARL Cobe Sécurité Privée à raison de ses fonctions de gérante, dès lors que ces rémunérations constituent, au sens de l'article L. 136-1-1 du code de la sécurité sociale, des revenus d'activité et que le contrôle et le recouvrement des cotisations sociales s'y rapportant échappe, en application de l'article L. 136-5 du même code, à la compétence de l'administration fiscale ;
- la majoration de 40 % prévue, en cas de manquement délibéré, par le a de l'article 1729 du code général des impôts, qui a été appliquée aux cotisations d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux en litige, n'est pas fondée, faute pour l'administration d'apporter la preuve, qui lui incombe en vertu de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales, de l'intention d'éluder l'impôt qu'elle lui prête.
Par un mémoire en défense, enregistré le 16 novembre 2023, et par des mémoires, enregistrés le 8 février 2024 et le 2 mai 2024, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- la proposition de rectification adressée à M. et Mme B pour porter à leur connaissance les rectifications envisagées par l'administration en ce qui concerne leurs revenus imposables à raison des rehaussements appliqués aux bénéfices imposables D est suffisamment motivée au regard des exigences posées aux articles L. 57 et L. 76 du livre des procédures fiscales, en particulier s'agissant de la justification du taux de charge de 80 % dont il a été fait application, dans un souci de réalisme économique et dans une situation dans laquelle la vérificatrice n'a eu accès à aucune comptabilité ;
- le moyen tiré par Mme B de ce que l'émission, afin d'assurer le recouvrement des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux en litige, d'avis d'imposition lui aurait fait subir une discrimination prohibée par les stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et par celles de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention n'est pas fondé ;
- dès lors que les suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux se rapportant à l'année 2017 ont été taxés d'office sur le fondement du 1° de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales, Mme B supporte, en application de l'article L. 193 du même livre, la charge de la preuve du caractère exagéré de ces suppléments ;
- Mme B n'est pas fondée à soutenir que la méthode de reconstitution des résultats imposables D serait radicalement viciée au seul motif que le service vérificateur, dans un contexte dans lequel aucun document comptable se rapportant aux exercices vérifiés ne lui a été présenté, a tenu compte des charges supportées par cette société en appliquant à son chiffre d'affaires un taux forfaitaire de 80 % ; à cet égard, il ne peut être tenu pour établi, au vu des seules pièces versés à l'instruction, que la SARL Cobe Sécurité Privée aurait supporté, au titre des deux exercices vérifiés, des charges atteignant des montants supérieurs à ceux retenus par l'administration ;
- Mme B n'est pas fondée à soutenir que les sommes qu'elle a perçues en 2016 et 2017 D, qui n'a pas déposé de déclaration de résultats au titre des deux exercices correspondants, constituaient des revenus d'activité imposables dans la catégorie des traitements et salaires, alors qu'elle n'a pas porté explicitement de tels revenus sur ses propres déclarations ;
- en tant que gérante et associée unique D et compte tenu de l'importance des montants en cause, Mme B ne pouvait ignorer avoir perçu de cette société, au titre de l'année 2016, les sommes de 51 866 euros, correspondant aux sommes réintégrées au bénéfice social, et de 50 130 euros, correspondant aux prélèvements opérés dans la caisse sociale, ni que celles-ci constituaient des revenus imposables ; par suite, c'est à bon droit que l'administration a fait application, aux suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux se rapportant à cette année, de la majoration de 40 % prévue, en cas de manquement délibéré, par le a de l'article 1729 du code général des impôts.
Par deux mémoires distincts, enregistrés le 19 février 2024 et le 7 mai 2024, Mme B demande à la cour, en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 et à l'appui de sa requête, de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions de l'article 1658 du code général des impôts.
Elle soutient que, combinées à celles des articles L. 190, L. 253 et L. 256, R. 196-1, R. 256-1, R. 256-6 et R. 256-7 du livre des procédures fiscales, les dispositions critiquées, applicables au litige, portent atteinte au principe d'égalité devant la loi et les charges publiques, protégé par les articles 6 et 13 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, et caractérisent une incompétence négative du législateur, en méconnaissance de l'article 34 de la Constitution.
Par un mémoire, enregistré le 7 mars 2024, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique soutient que les conditions posées par l'article 23-2 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 ne sont pas remplies, et, en particulier, que la question prioritaire de constitutionnalité posée est dépourvue de caractère sérieux.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Constitution, notamment son article 61-1 ;
- la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le premier protocole additionnel qui y est annexé ;
- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
Sur l'objet du litige :
1. Mme C B était la gérante et l'unique associée de la société à responsabilité limitée (SARL) Cobe Sécurité Privée depuis la création de celle-ci, en 2013. Cette société, qui a pour activité la protection des biens et des personnes, le gardiennage et, plus généralement, la sécurité privée, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant, en matière d'impôt sur les sociétés, sur la période allant du 1er novembre 2015 au 31 octobre 2017. A l'issue de ce contrôle, l'administration a estimé que Mme B avait bénéficié, au titre des années 2016 et 2017, de revenus distribués par la SARL Cobe Sécurité Privée et correspondant, d'une part, aux rehaussements de bénéfices notifiés à cette société au titre de ses exercices clos les 31 octobre 2016 et 2017, imposables au sein du foyer fiscal de Mme B, regardée comme le seul maître de l'affaire, sur le fondement du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, et, d'autre part, à des sommes identifiées comme versées par cette société à Mme B au cours des mêmes exercices, imposables au sein du foyer fiscal de l'intéressée sur le fondement du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts.
2. L'administration a fait connaître son analyse à M. et Mme B, par une proposition de rectification qu'elle leur a adressée le 26 avril 2019, selon la procédure de taxation d'office prévue au 1° de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales en tant qu'elle concerne l'année 2017, et selon la procédure de rectification contradictoire pour le surplus. Les observations formulées par M. et Mme B n'ayant pas convaincu l'administration de reconsidérer son appréciation, les suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux résultant des rehaussements notifiés ont été mis en recouvrement le 30 septembre 2020, pour un montant total de 389 732 euros en droits et pénalités.
3. La réclamation formée par les intéressés ayant été rejetée, Mme B a porté le litige devant le tribunal administratif d'Amiens en lui demandant de prononcer, en droits et pénalités, à titre principal, la décharge, à titre subsidiaire, une réduction, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2016 et 2017. Elle relève appel du jugement du 15 juin 2023 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande.
Sur la question prioritaire de constitutionnalité :
4. Il résulte des dispositions combinées des premiers alinéas des articles 23-1 et 23-2 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, que le tribunal administratif saisi d'un moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution présenté dans un écrit distinct et motivé, statue sans délai par une décision motivée sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'Etat et procède à cette transmission si est remplie la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances et que la question ne soit pas dépourvue de caractère sérieux. Le second alinéa de l'article 23-2 de la même ordonnance dispose : " En tout état de cause, la juridiction doit, lorsqu'elle est saisie de moyens contestant la conformité d'une disposition législative, d'une part, aux droits et libertés garantis par la Constitution et, d'autre part, aux engagements internationaux de la France, se prononcer par priorité sur la transmission de la question de constitutionnalité au Conseil d'Etat () ".
5. Aux termes de l'article 1658 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " Les impôts directs et les taxes assimilées sont recouvrés en vertu soit de rôles rendus exécutoires par arrêté du directeur général des finances publiques ou du préfet, soit d'avis de mise en recouvrement. / () ". Ces dispositions offrent à l'administration la faculté de procéder au recouvrement des impôts directs, s'agissant notamment de cotisations supplémentaires établies à l'issue d'une procédure de rectification, soit au moyen de rôles rendus exécutoires, soit par voie d'avis de mise en recouvrement.
6. Mme B soutient qu'en ce qu'elles prévoient la possibilité pour l'administration de choisir de mettre en recouvrement des impositions supplémentaires soit par l'émission d'un rôle supplémentaire, soit en notifiant au contribuable un avis de mise en recouvrement, les dispositions de l'article 1658 du code général des impôts, combinées à celles des articles L. 190, L. 253 et L. 256, R. 196-1, R. 256-1, R. 256-6 et R. 256-7 du livre des procédures fiscales, ont pour effet de soumettre des contribuables placés dans une situation identique à une différence de traitement constitutive d'une rupture d'égalité devant la loi fiscale et devant les charges publiques, dès lors, premièrement, que les avis de mise en recouvrement sont, à la différence des avis d'imposition, notifiés par lettre recommandée avec avis de réception ou signifiés par commissaire de justice, deuxièmement, que les mentions devant obligatoirement figurer sur un avis d'imposition sont moins complètes que celles devant figurer sur un avis de mise en recouvrement, et troisièmement, que les délais de réclamation contentieuse ouverts au contribuable ne sont, dans les faits, pas identiques selon qu'un avis de mise en recouvrement ou un avis d'imposition lui a été adressé. Par ailleurs, Mme B soutient que les dispositions critiquées caractérisent une incompétence négative du législateur, en méconnaissance de l'article 34 de la Constitution.
7. Toutefois, en premier lieu, aucune disposition législative ni réglementaire n'impose que les avis de mise en recouvrement soient, à peine d'irrégularité de la procédure d'imposition, notifiés par voie de lettre recommandée avec avis de réception ou signifiés par exploit de commissaire de justice, la disposition réglementaire prescrivant ces formalités ayant été abrogée par l'ordonnance n°2003-1235 du 22 décembre 2003.
8. En deuxième lieu, les dispositions de l'article L. 256 du livre des procédures fiscales, dont le quatrième alinéa renvoie les modalités d'application à un décret en Conseil d'État, ne comportent aucune indication sur les mentions devant obligatoirement figurer sur les avis de mise en recouvrement. Par suite, ne saurait être regardé comme sérieux le moyen tiré de ce qu'en prescrivant des mentions à porter sur un avis d'imposition moins complètes que celles prévues par l'article L. 256 de ce livre pour les avis de mise en recouvrement, les dispositions des deux premiers alinéas de l'article L. 253 du même livre, prises en combinaison avec celles de l'article 1658 du code général des impôts, institueraient au détriment des contribuables faisant l'objet du premier de ces modes de recouvrement une différence de traitement méconnaissant le principe d'égalité devant la loi fiscale et devant les charges publiques.
9. En troisième lieu, la computation différente du délai de réclamation contentieuse, selon que le contribuable a été rendu destinataire d'un avis de mise en recouvrement ou d'un avis d'imposition ne résulte ni des dispositions de l'article 1658 du code général des impôts, ni de celles de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales, mais de celles du a) de l'article R. 196-1 de ce livre, en ce qu'elles prévoient que le délai court à compter de la notification d'un avis de mise en recouvrement ou de la mise en recouvrement du rôle. Or ces dispositions réglementaires ne peuvent, en tout état de cause, faire l'objet d'une question prioritaire de constitutionnalité. Au surplus, cette différence dans les modalités de recouvrement est sans incidence sur l'exercice par les contribuables concernés du droit au recours ou des droits de la défense et n'est pas constitutive d'une rupture d'égalité entre ces contribuables au détriment des contribuables rendus destinataires d'un avis d'imposition.
10. Par ailleurs, s'il découle de l'article 34 de la Constitution que, lorsqu'il définit une imposition, le législateur doit en déterminer les modalités de recouvrement, les dispositions contestées de l'article 1658 du code général des impôts, combinées avec celles des articles L. 190, L. 253 et L. 256 du livre des procédures fiscales, ont, pour ce qui concerne les impositions directes, précisément cet objet. Si Mme B soutient, en outre, que le législateur aurait méconnu l'étendue de sa compétence et l'exigence de clarté de la loi en n'encadrant pas suffisamment le choix laissé par les dispositions litigieuses à l'administration fiscale de recourir à l'un ou l'autre des modes de recouvrement qu'elles mentionnent, cette méconnaissance n'affecte par elle-même aucun droit ou liberté que la Constitution garantit et ne peut, par suite, être invoquée à l'appui d'une question prioritaire de constitutionnalité.
11. Il résulte de ce qui a été dit aux quatre points précédents que la question soulevée ne présente pas un caractère sérieux. Ainsi, sans qu'il soit besoin de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité invoquée, les moyens tirés de ce que, combinées à celles des articles L. 190, L. 253 et L. 256, R. 196-1, R. 256-1, R. 256-6 et R. 256-7 du livre des procédures fiscales, les dispositions du premier alinéa de l'article 1658 du code général des impôts portent atteinte au principe d'égalité devant la loi et les charges publiques, protégé par les articles 6 et 13 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, et caractérisent une incompétence négative du législateur, en méconnaissance de l'article 34 de la Constitution, doivent être écartés.
Sur l'exception d'inconventionnalité :
12. Mme B soutient que les dispositions de l'article 1658 du code général des impôts, qui laissent à l'administration le choix d'émettre soit un avis de mise en recouvrement, soit un rôle et un avis d'imposition pour assurer le recouvrement des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux qu'elle entend mettre à la charge d'un contribuable, créent, en méconnaissance des stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de celles de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention, une différence de traitement entre des contribuables placés dans des situations identiques, les avis de mise en recouvrement offrant aux contribuables des garanties plus importantes que les simple avis d'imposition qui lui ont été notifiés.
13. Toutefois, les mentions devant obligatoirement figurer, respectivement sur les avis de mise en recouvrement et sur les avis d'imposition, sont déterminées non par l'article 1658 du code général des impôts, mais, respectivement, par l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales et par l'article L 253 du même livre. Il en résulte que l'article 1658 du code général des impôts n'est pas, par lui-même et pris isolément, à l'origine de la différence de traitement alléguée. En outre, ainsi qu'il a été dit précédemment, aucune disposition législative ni réglementaire n'impose que les avis de mise en recouvrement soient, à peine d'irrégularité de la procédure d'imposition, notifiés par voie de lettre recommandée avec avis de réception ou signifiés par exploit de commissaire de justice, la disposition réglementaire prescrivant ces formalités ayant été abrogée par l'ordonnance n°2003-1235 du 22 décembre 2003. Enfin, la computation différente du délai de réclamation contentieuse, selon que le contribuable a été rendu destinataire d'un avis de mise en recouvrement ou d'un avis d'imposition ne résulte pas des dispositions de l'article 1658 du code général des impôts, mais de celles du premier alinéa de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales, en ce qu'elles prévoient que le délai court à compter de la notification d'un avis de mise en recouvrement ou de la mise en recouvrement du rôle. Il suit de là que l'exception d'inconventionnalité des dispositions de l'article 1658 du code général des impôts au regard des stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de celles de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention doit être écartée.
Sur les suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux établis au titre de l'année 2017 :
En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :
14. Aux termes de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales, dont les dispositions sont applicables lorsque, comme en l'espèce s'agissant de l'année 2017, la procédure de taxation d'office a été mise en œuvre : " Les bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office et leurs modalités de détermination sont portées à la connaissance du contribuable trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions. () ".
15. Il ressort des termes de la proposition de rectification adressée le 26 avril 2019 à Mme B que ce document, s'agissant des revenus réputés distribués correspondant aux rehaussements des bénéfices imposables D, indique que l'administration a entendu soumettre à l'impôt au sein du foyer fiscal de Mme B, sur le fondement du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, et reprend, s'agissant des modalités de reconstitution de ces bénéfices sociaux, les termes de la proposition de rectification qui a été adressée le même jour à la SARL Cobe Sécurité Privée, à l'issue de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet en matière d'impôt sur les sociétés, en ce qui concerne la période s'étendant du 1er novembre 2015 au 31 octobre 2017. Ainsi, ce document mentionne que la détermination des résultats imposables D a été fondée par le service vérificateur sur la reconstitution des recettes de l'entreprise, réalisée, à partir des crédits bancaires identifiés comme des règlements de clients et que, en l'absence de présentation de tout document comptable se rapportant à la période vérifiée, de même que de toute pièce justificative de dépenses susceptibles de constituer des charges des exercices correspondants, les résultats imposables de l'entreprise ont été déterminés en défalquant des chiffres d'affaires reconstitués une part de 80 % de ces chiffres d'affaires pour tenir compte, dans un souci de réalisme économique, des charges inhérentes à l'activité de l'entreprise.
16. Ainsi rédigée, cette proposition de rectification, qui précise l'impôt et les années concernées par les rehaussement notifiés à Mme B, doit être regardée comme comportant, avec une précision suffisante au regard de l'exigence posée par les dispositions précitées de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales, la mention des bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office et de leurs modalités de détermination, l'intéressée ayant ainsi été mise à même d'en discuter utilement devant le juge de l'impôt, s'agissant de l'année 2017 faisant l'objet de la procédure de taxation d'office. Dans une situation dans laquelle aucune comptabilité se rapportant aux exercices vérifiés n'a été présentée par la SARL Cobe Sécurité Privée au cours de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet, la justification du taux de charges de 80 % par la recherche d'un réalisme économique était suffisante pour permettre à Mme B, au besoin en produisant, en lien avec le liquidateur judiciaire D, tous éléments se rapportant à l'exploitation de l'entreprise, de nourrir une telle discussion sur ce point. Il suit de là que le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la proposition de rectification, en ce qu'elle concerne l'année 2017, doit être écarté.
En ce qui concerne le bien-fondé des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux établis au titre de l'année 2017 :
S'agissant de la charge de la preuve :
17. Ainsi qu'il a été dit précédemment, les suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels Mme B a été assujettie au titre de l'année 2017 ont été établis selon la procédure de taxation d'office prévue au 1° de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales, dont la régularité n'est pas contestée. Il s'ensuit que l'appelante supporte, en application de l'article L. 193 du même livre, la charge de la preuve et qu'il lui appartient, en vertu de l'article R. 193-1 de ce livre, d'établir que ces suppléments présentent un caractère exagéré.
S'agissant de la contestation de la méthode de reconstitution mise en œuvre par le service :
18. Dans une situation dans laquelle la vérificatrice n'a eu accès, pour les besoins de la vérification de comptabilité à laquelle elle entendait soumettre la SARL Cobe Sécurité Privée, en matière d'impôt sur les sociétés, à aucune comptabilité, ni à aucun justificatif de dépenses susceptibles de constituer des charges des exercices vérifiés, et dans laquelle le débat oral et contradictoire n'a pu être engagé qu'à l'égard d'une collaboratrice du liquidateur judiciaire de la société, qui ne disposait d'aucun élément d'information sur les conditions d'exploitation de l'entreprise, le service vérificateur pouvait s'en tenir à une évaluation forfaitaire du niveau des charges des exercices vérifiés et le seul fait qu'il n'a pas estimé utile de s'assurer, de sa propre initiative, de la pertinence de ce taux, par comparaison avec des données recueillies auprès d'entreprises exerçant dans le même secteur d'activité ou à partir de publications professionnelles ou de données statistiques disponibles ne peut suffire à Mme B, qui supporte la charge de la preuve ainsi qu'il a été dit, pour établir que la méthode mise en œuvre par le service vérificateur pour reconstituer ses résultats imposables serait, en tant qu'elle a été utilisée pour établir les suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels elle a été assujettie au titre de l'années 2017, radicalement viciée dans son principe ou excessivement sommaire.
19. Mme B n'est pas fondée à invoquer, à cet égard, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, les énonciations du paragraphe n°200 de la doctrine administrative publiée sous la référence BOI-CF-IOR-10-20, dans les prévisions desquelles la SARL Cobe Sécurité Privée n'entre pas, dès lors que ces énonciations ont trait à l'hypothèse dans laquelle la procédure de rectification contradictoire a été mise en œuvre, ce qui n'a pas été le cas s'agissant des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels elle a été assujettie au titre de l'années 2017, qui ont été taxés d'office. Mme B n'est pas davantage fondée à invoquer, sur le fondement des mêmes dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, les énonciations du paragraphe n°20 de la doctrine administrative publiée sous la référence BOI-CTX-DG-20-20, dès lors que, afférentes à la procédure contentieuse applicable devant le juge de l'impôt, elles ne peuvent être regardées comme comportant une interprétation formelle de la loi fiscale, au sens de ces dispositions. Enfin, Mme B n'est pas plus fondée à invoquer, sur le fondement des mêmes dispositions, les énonciations des paragraphes n°200 et n°210 de la doctrine administrative publiée sous la référence BOI-CF-IOR-50-20, en ce qu'elles énoncent que " Le droit accordé à l'administration d'arrêter d'office les bases d'imposition ne lui confère pas un pouvoir discrétionnaire " et que " Le service doit donc s'attacher à faire une évaluation aussi exacte que possible des éléments qui concourent à la détermination des bases d'imposition () de manière à éviter l'établissement d'impositions manifestement excessives ou insuffisantes ", dès lors que le dernier paragraphe invoqué précise lui-même que " le service doit faire application des principes suivants : / - s'il trouve, parmi les renseignements qu'il aura recueillis, des éléments lui permettant de déterminer directement la base d'imposition avec une approximation suffisante, il retiendra le chiffre ainsi obtenu. () ". Or, le service vérificateur n'ayant, ainsi qu'il a été dit, disposé d'aucun document comptable, ni d'aucun autre justificatif des dépenses exposées par la SARL Cobe Sécurité Privée et susceptibles d'être regardées comme des charges des exercices vérifiés, cette société ne peut être regardée comme entrant dans les prévisions des extraits de doctrine administrative que l'appelante invoque.
S'agissant du caractère exagéré des suppléments d'impôt en litige :
20. Si Mme B conteste que le taux forfaitaire de 80 % retenu par l'administration pour reconstituer le résultat imposable de SARL Cobe Sécurité Privée au titre de son exercice clos le 31 octobre 2017, ait été de nature à traduire fidèlement le niveau de charges supportées par l'entreprise au cours de cet exercice, elle ne verse au dossier, alors que la charge de la preuve lui incombe ainsi qu'il a été dit, aucun document comptable, ni aucun autre élément afférent à la gestion de cette société, dont elle a été la gérante et l'unique associée, de nature à permettre d'appréhender l'importance des charges que l'entreprise a effectivement supportées au cours de cet exercice, des comptes prévisionnels au 31 mars 2016 ne pouvant constituer à cet égard un commencement de preuve suffisant.
21. Par ailleurs, en invoquant, à partir de documents comptables afférents à un exercice encore précédent, clos le 31 octobre 2015, au niveau de ses charges se rapportant à cet exercice, d'un montant notablement supérieur à celles retenues par l'administration, sans démontrer que les conditions d'exploitation de l'entreprise sont demeurées inchangées depuis lors, et en se référant à des données statistiques générales publiées par l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) en novembre 2018 au sujet des entreprises de sécurité privée, prises d'ailleurs dans une acception plus large que le champ des activités exercées par la SARL Cobe Sécurité Privée, puisque cette étude englobe aussi les entreprises réalisant des transports de fonds, installant des systèmes de sécurité et d'alarmes électroniques et réalisant des enquêtes privées, cette étude précisant, au demeurant, que la rentabilité des entreprises relevant de ces secteurs d'activité est très variable et que les petites entreprises ont un taux de marge supérieur à celui des entreprises plus grandes, Mme B ne peut être regardée comme apportant, par ces seuls éléments, la preuve, qui lui incombe, du caractère exagéré des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels elle a été assujettie au titre de l'année 2017.
S'agissant de la double imposition :
22. Mme B soutient qu'en soumettant les sommes qu'elle a perçues D, au titre de l'année 2017, à l'impôt sur le revenu à la fois dans la catégorie des traitements et salaires, en tant que rémunérations versées au titre de son mandat de gestion, et dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, en tant que revenus distribués, l'administration l'a soumise, à raison des mêmes sommes, à une double imposition.
23. Toutefois, dans une situation dans laquelle il n'est pas contesté que la déclaration de revenus souscrite pour le foyer fiscal de Mme B au titre de l'année 2017 n'a été reçue par l'administration qu'après l'expiration du délai imparti par la mise en demeure adressée par le service, Mme B ne peut être regardée comme ayant déclaré, au titre de l'année en cause, des revenus imposables dans la catégorie des traitements et salaires. Au demeurant, il n'est pas davantage contesté que les statuts D ne prévoyaient pas le versement d'une rémunération au titre de la gérance et que la déclaration souscrite pour le foyer fiscal de l'année 2016 ne faisait pas mention de revenus qu'aurait perçus Mme B et qui auraient été imposables en tant que traitements et salaires.
24. Dans ces conditions, l'ensemble des sommes perçues par Mme B D au titre de l'année 2017 a pu à bon droit être imposé dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers et la situation de double imposition invoquée par Mme B en ce qui concerne cette année ne peut être tenue pour établie.
S'agissant des prélèvements sociaux :
25. Ainsi qu'il a été dit au point précédent, l'ensemble des sommes perçues par Mme B D au titre de l'année 2017 a pu à bon droit être imposé dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, qui correspond, pour le calcul des prélèvements sociaux s'y rapportant, à des revenus du patrimoine, visés à l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale. Par suite, le moyen tiré de ce que ces sommes auraient eu, en tout ou partie, la nature de revenus d'activité, tels qu'envisagés à l'article L. 136-1-1 du même code, dont le contrôle et le recouvrement n'incombe pas à l'administration fiscale, en application de l'article L. 136-5 de ce code doit être écarté.
En ce qui concerne le bien-fondé des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux établis au titre de l'année 2016 :
S'agissant de la charge de la preuve :
26. Ainsi qu'il a été dit précédemment, les suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels Mme B a été assujettie au titre de l'année 2016 ont été établis selon la procédure de rectification contradictoire prévue aux articles L. 55 et suivants du livre des procédures fiscales. Il s'ensuit que l'administration conserve, s'agissant de ces suppléments, la charge de la preuve.
S'agissant de la contestation de la méthode de reconstitution mise en œuvre par le service :
27. Ainsi qu'il a été dit s'agissant de l'année 2017, dans une situation dans laquelle la vérificatrice n'a eu accès, pour les besoins de la vérification de comptabilité à laquelle elle entendait soumettre la SARL Cobe Sécurité Privée, en matière d'impôt sur les sociétés, à aucune comptabilité, ni à aucun justificatif de dépenses susceptibles de constituer des charges des exercices vérifiés, et dans laquelle le débat oral et contradictoire n'a pu être engagé qu'à l'égard d'une collaboratrice du liquidateur judiciaire de la société, qui ne disposait d'aucun élément d'information sur les conditions d'exploitation de l'entreprise, le service vérificateur pouvait s'en tenir à une évaluation forfaitaire du niveau des charges des exercices vérifiés. Le fait qu'il n'a pas estimé utile de s'assurer, de sa propre initiative, de la pertinence de ce taux, par comparaison avec des données recueillies auprès d'entreprises exerçant dans le même secteur d'activité ou à partir de publications professionnelles ou de données statistiques disponibles ne peut suffire, par lui-même, à Mme B pour soutenir que la méthode de reconstitution employée par l'administration serait radicalement viciée dans son principe ou excessivement sommaire dans sa mise en œuvre.
28. Toutefois, Mme B conteste, en se prévalant de documents comptables D afférents à l'exercice clos le 31 octobre 2015, immédiatement antérieur, et en se référant à des données statistiques générales publiées par l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) en novembre 2018 au sujet des entreprises de sécurité privée, même considérées dans un sens plus large que le seul domaine d'activité dans lequel évolue la SARL Cobe Sécurité Privée, que le taux de charges de 80 % retenu pour la reconstitution du résultat imposables de cette société au titre de son exercice clos le 31 octobre 2016, qui implique un taux de marge de 20 %, soit de nature à tenir compte de la réalité des conditions d'exploitation de l'entreprise. Elle fait observer, à cet égard, que la SARL Cobe Sécurité Privée avait dégagé, au titre de cet exercice antérieur, une marge nette négative et que tel risquait d'être encore le cas au titre de l'exercice clos le 31 octobre 2016 au vu des documents comptables provisoires établis au 31 mars 2016, tandis que les statistiques publiées au sujet du secteur d'activité de la sécurité privée confirment que le taux de marge moyen des entreprises exerçant dans ce secteur était de 3,7 % durant la période en cause et que près de 30 % des entreprises du secteur présentaient une rentabilité négative.
29. Face à cette contestation argumentée et étayée, l'administration, en se prévalant de l'exigence de réalisme économique, pour toute justification du taux forfaitaire de charge de 80 % sur lequel elle a fondé la reconstitution des résultats imposables D au titre de l'exercice clos le 31 octobre 2016, sans apporter aucun élément de réponse précis à l'objection de Mme B tenant à l'importance de l'écart entre le taux de marge de 20 % correspondant et ceux tirés par l'intéressée des données disponibles en ce qui concerne le secteur d'activités concerné, ne peut être regardée comme rapportant la preuve, qui lui incombe, comme il a été dit, s'agissant de l'année 2016 en litige, du bien-fondé de ce taux de charges forfaitaire.
30. Dans ces conditions, Mme B doit être regardée comme fondée à soutenir qu'elle a été soumise, en conséquence de la réintégration, dans ses revenus imposables de l'année 2016, des rehaussements de bénéfices notifiés à la SARL Cobe Sécurité Privée au titre de l'exercice correspondant, à une imposition excessive. Par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête afférents à cette année, Mme B est fondée à demander la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2016 à raison du rehaussement du bénéfice D au titre de son exercice clos le 31 octobre 2016.
S'agissant des pénalités :
31. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; / () ". En outre, aux termes de l'article L. 195 A du même livre : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manœuvres frauduleuses incombe à l'administration. ".
32. Pour justifier, comme la charge lui incombe, en vertu des dispositions précitées de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales, l'application, aux cotisations d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles Mme B a été assujettie au titre de l'année 2016 à raison des sommes identifiées par l'administration comme versées par la SARL Cobe Sécurité Privée, de la majoration de 40 % prévue, en cas de manquement délibéré, par les dispositions précitées du a de l'article 1729 du code général des impôts, l'administration a retenu, selon les termes de la proposition de rectification adressée le 29 avril 2019 à Mme B, que la vérification de comptabilité dont a fait l'objet la SARL Cobe Sécurité Privée a conduit le service à mettre en évidence, au cours de l'exercice clos le 31 octobre 2016, des prélèvements, dans la caisse sociale de l'entreprise, pour un montant de 50 130 euros et que Mme B, gérante et seule associée D, est le bénéficiaire de ces prélèvements, dont elle ne pouvait ignorer la nature de revenus imposables. L'administration ajoute, dans la même proposition de rectification, que cette somme n'a cependant pas été portée sur la déclaration de revenus souscrite pour le foyer fiscal de Mme B au titre de l'année 2016, seuls les salaires perçus par son conjoint y ayant été mentionnés, alors que, eu égard notamment à l'importance de cette somme de 50 130 euros, que Mme B a perçue en toute connaissance de cause, en tant que dirigeante et seule associée D, cette omission ne peut raisonnablement être regardée comme résultant d'une erreur.
33. Ces motifs, que le ministre reprend en appel, sont de nature à établir l'intention délibérée qui a animé Mme B au cours de l'année d'imposition 2016 en litige, ainsi que le bien-fondé de la majoration de 40 % prévue au a de l'article 1729 du code général des impôts dont il a été fait application aux suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux résultant du chef de rectification afférent à la réintégration, dans les revenus imposables de l'intéressée, des sommes prélevées dans la caisse sociale.
34. Il résulte de tout ce qui précède qu'il n'y a pas lieu de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par Mme B et que celle-ci est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté les conclusions de sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels elle a été assujettie au titre de l'année 2016, en ce qu'elles procèdent de la réintégration, dans ses revenus imposables de cette année, des bénéfices reconstitués et réputés distribués par la SARL Cobe Sécurité Privée.
Sur le frais liés au litige :
35. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre une somme à la charge de l'Etat, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, au titre des frais exposés par Mme B et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par Mme B.
Article 2 : Mme B est déchargée, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2016, en conséquence de la réintégration, dans ses revenus imposables, des bénéfices reconstitués et réputés distribués par la SARL Cobe Sécurité Privée.
Article 3 : Le jugement n° 2100770 du 15 juin 2023 du tribunal administratif d'Amiens est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C B et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera transmise à l'administratrice de l'Etat chargée de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.
Délibéré après l'audience publique du 15 mai 2024 à laquelle siégeaient :
- M. Marc Heinis, président de chambre,
- M. Bertrand Baillard, premier conseiller,
- M. Jean-François Papin, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 mai 2024.
Le rapporteur,
Signé : J.-F. PapinLe président de chambre,
Signé : M. ALe rapporteur,
J.-F. PapinLe président de la formation de jugement,
F.-X. Pin
La greffière,
Signé : E. Héléniak
La greffière,
E. Héléniak
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Pour la greffière en chef,
Par délégation,
La greffière,
Elisabeth Héléniak
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N°23DA01645
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N°"Numéro"
Code publication