Cour de cassation

Arrêt du 29 mai 2024 n° 24-40.006

29/05/2024

Non renvoi

COMM.

 

COUR DE CASSATION

 

CC

 

______________________

 

QUESTION PRIORITAIRE

de

CONSTITUTIONNALITÉ

______________________

 

Audience publique du 29 mai 2024

 

NON-LIEU A RENVOI

 

M. VIGNEAU, président

 

Arrêt n° 412 F-D

 

Affaire n° F 24-40.006

 

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

 

_________________________

 

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

 

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 29 MAI 2024

 

La cour d'appel de Douai (1re chambre civile, section 1) a transmis à la Cour de cassation, suite à l'arrêt rendu le 7 mars 2024, la question prioritaire de constitutionnalité, reçue le 12 mars 2024, dans l'instance mettant en cause :

 

D'une part,

 

la société Aquanord Ichtus, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3],

 

D'autre part,

 

1°/ la direction générale des douanes et des droits indirects, dont le siège est [Adresse 1],

 

2°/ la direction régionale des douanes et droits indirects de Dunkerque, dont le siège est [Adresse 2],

 

Le dossier a été communiqué au procureur général.

 

Sur le rapport de Mme Tostain, conseiller référendaire, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société Aquanord Ichtus, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la direction régionale des douanes et droits indirects de Dunkerque et de la direction générale des douanes et des droits indirects, et l'avis de M. Lecaroz, avocat général, après débats en l'audience publique du 28 mai 2024 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Tostain, conseiller référendaire rapporteur, M. Ponsot, conseiller doyen, et Mme Dumont, greffier de chambre,

 

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

 

Faits et procédure

 

1. La société Aquanord Ichtus (la société Aquanord) exerce une activité d'aquaculture en eau de mer, activité comprise dans la sous-classe 03.21 Z de la section A de la nomenclature d'activités françaises (NAF).

 

2. Le 27 novembre 2020, soutenant que la société Aquanord n'était pas éligible au tarif réduit de la taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité (TICFE), prévu à l'article 266 quinquies C, 8, C, a, du code des douanes, l'administration des douanes a émis contre cette société un avis de mise en recouvrement (AMR) d'un rappel de cette taxe pour la période du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2019.

 

3. Après le rejet de sa contestation, la société Aquanord a assigné l'administration des douanes en annulation de l'AMR.

 

Enoncé de la question prioritaire de constitutionnalité

 

4. Par un arrêt du 7 mars 2024, la cour d'appel de Douai a transmis une question prioritaire de constitutionnalité ainsi rédigée :

 

« Les dispositions du a) du C du 8 de l'article 266 quinquies C du code des douanes, dans leur version en vigueur entre le 1er janvier 2016 et le 31 décembre 2021, portent-elles atteinte aux principes d'égalité devant la loi et d'égalité devant les charges publiques respectivement garantis par les articles 6 et 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, dans la mesure où elles restreignent l'application des taux réduits de la taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité aux seules entreprises industrielles au sens des sections B, C, D et E de la nomenclature des activités françaises ? »

 

Examen de la question prioritaire de constitutionnalité

 

5. La disposition contestée est applicable au litige, qui concerne la contestation, par la société Aquanord, du rappel de TICFE mis à sa charge par l'administration des douanes au titre des années 2016 à 2019.

 

6. Elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.

 

7. Cependant, d'une part, la question posée, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle.

 

8. D'autre part, la question posée ne présente pas un caractère sérieux.

 

9. En effet, le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit. Il ne fait dès lors pas obstacle à ce que le législateur édicte des dispositions fiscales différentes pour des activités professionnelles différentes.

 

10. En prévoyant au bénéfice des personnes qui exploitent des installations industrielles électro-intensives des tarifs réduits de TICFE, la disposition critiquée a pour objet, par l'octroi d'un avantage fiscal, de préserver la compétitivité de l'industrie et l'attractivité du territoire.

 

11. La différence de traitement qui en résulte, selon que les entreprises électro-intensives exercent ou non une activité industrielle, repose sur un critère objectif et rationnel, en rapport direct avec l'objet de la loi.

 

12. En outre, l'imposition au tarif normal de la TICFE, qui est assise sur la consommation d'électricité et peut être prise en compte par l'exploitant pour apprécier la rentabilité économique de son activité et fixer en conséquence le niveau de ses prix, ne revêt pas un caractère confiscatoire ni ne fait peser sur une catégorie de contribuables une charge excessive au regard de leurs facultés contributives.

 

13. Il s'ensuit que la disposition critiquée ne méconnaît pas les exigences des principes d'égalité devant la loi et d'égalité devant les charges publiques.

 

14. En conséquence, il n'y a pas lieu de renvoyer la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel.

 

PAR CES MOTIFS, la Cour :

 

DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;

 

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

 

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf mai deux mille vingt-quatre.

Code publication

n